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contexte › island bay ressemble à n’importe quelle petite ville côtière de nouvelle-zélande, mais il n’en est rien. en bordure de wellington, à une trentaine de minutes en voiture, se trouve un parfait petit endroit où se mélangent étroites maisons en location et grandes villas de propriétaires fortunés. c’est un endroit où il fait bon vivre, du moins d’apparence, puisque comme on sait, l’herbe semble toujours plus verte de l’autre côté de la clôture. tous les habitants d'island bay se sentent ici comme à la maison, en quelque sorte. mais n’en est-il pas autrement de leurs voisins ?
oct. 2024
8° - 17° // températures stables, mais vent à venir
initiales interdites. › personnages inventés de 25 ans minimum. › 3 ans de différence entre l'avatar et l'âge du personnage. › 15 lignes minimum par rp › un rp par mois.


une rencontre lors d'un stage et la seule chose qu'ils ont en commun
c'est leur passion pour le sport, pour le reste ils sont diamétralement opposés

elles sont soeurs et n'ont pas connaissance du lien qui les unis
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 Everybody dances to their own boom boom (Noa)

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MessageSujet: Everybody dances to their own boom boom (Noa) (#)   Everybody dances to their own boom boom (Noa) EmptyJeu 17 Aoû - 23:42

Le moment était insoutenable. Oppressant, terrifiant, terriblement gênant : c'était l'apothéose de tout ce que je ressentais de manière diffuse lorsque je traînais au milieu des gens normaux, c'était un concentré tellement fort que j'avais l'impression qu'une main invisible me broyait les côtes pour m'écraser les entrailles et que tout allait me remonter par la bouche d'un instant à l'autre. Agrippée au grand cahier que je serrais contre ma poitrine, je me tenais contre le mur comme si il allait gentiment m'aspirer et me faire disparaître. Les minutes me paraissaient des heures, et plus elles avançaient plus je sentais que je devenais fébrile, noyée par mon angoisse, anéantie par une faim constante que je refusais en bloc et par mon corps trop faible que je ne voulais pas nourrir. C'était ainsi, le cercle vicieux de mes journées, qui se bouclait inlassablement tandis que les rares moments où j'avais un peu de répit n'existaient que quand je buvais trop ou que je me droguais, pauvre fille paumée que j'étais. Autour de moi les conversations m'assourdissaient : les deux filles derrière moi, plus jeunes et dont l'existence se situait probablement aux antipodes de la mienne discutaient haut et fort des cours qu'elles avaient eu dans la journée, en riant et gloussant et ponctuant leur discours de remarques sur untel ou unetelle. Je ne connaissais personne puisque j'étais un fantôme dans cette université, mais j'avais l'impression que chaque remarque et chaque éclat de rire était dirigé contre moi, comme si le monde entier était au courant que je n'étais qu'une strip-teaseuse qui essayait désespérément de se cultiver en étudiant le théâtre...

Puis l'élève devant moi en termina avec le professeur et vint mon tour ; je lui rendis mon dossier que j'avais à rendre et il me toucha quelques mots à propos de mon devoir précédent, mais mes tempes bourdonnaient tellement que j'avais du mal à suivre réellement ce qu'il me disait. Je dus lui faire répéter, et quand enfin on se mit d'accord, je quittai la salle sans demander mon reste.

C'était la fin de journée et mon plan était de filer droit hors de cet endroit plein d'étudiants que je ne connaissais pas, puisque je faisais constamment profil bas ; il se trouve que ce soir-là était organisée une énorme fête, comme me l'apprirent les banderoles dépliées partout que je remarquai seulement à l'instant. L'agitation était à son comble dans les couloirs et lorsque je croisai le regard d'un groupe de quatre garçons je compris qu'ils étaient en train de me dévisager, puis l'un deux me fit un sourire. Sans réagir, je détournai le regard et continuai mon chemin, perturbée. J'avais une profonde hantise de croiser parmi tous ces visages, un jour, un de mes clients au bar, voilà pourquoi je m'habillais le plus simplement du monde quand j'allais à l'université, comme maintenant : un jean déchiré aux genoux, un sweat rose pâle, un peu de maquillage, mes cheveux relevés en chignon. Je bifurquai dans un couloir, tout aussi peuplé, cherchant la sortie, puis me rendis compte que c'était l'allée qui menait au gymnase, probablement où était la fête. En essayant d'éviter un groupe d'élèves, je trébuchai par terre et bousculai une jeune fille qui avait le dos tourné. « Oh pardon, je suis désolée, je n'ai pas fait attention » lui dis-je, avec toujours cette si délicieuse sensation d'avoir envie de disparaître six pieds sous terre... « J'essayais d'éviter le... Bref. Désolée. J'ai pas l'habitude que les couloirs soient si bondés. Tout le monde va à cette fête ou quoi ?! » Je n'étais pas certaine que ma tentative de paraître normale soit très réussie...
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MessageSujet: Re: Everybody dances to their own boom boom (Noa) (#)   Everybody dances to their own boom boom (Noa) EmptyDim 20 Aoû - 1:01

Le retour à la fac après les vacances d’hiver a un goût amer. Je serais restée sous les couvertures, au fond de mon lit avec grand plaisir. Envie de rien. Enfin, si, d’une chose, mais celle-ci est logée au plus profond de moi et je ne veux pas qu’elle affleure. Je la garde cachée dans un recoin. Je crains qu’elle me bouffe la vie si elle prend le dessus. Dès que je lui accorde une attention, sa violence me fait peur. Les gens bien choisissent la justice et non la vengeance. Je me le répète tous les jours. Je le dis à voix haute devant le miroir de la salle de bain et ça sonne faux. Ces deux derniers mois ont été les pires que j’ai vécus. La famille coupée en deux avec le départ de Lukas, mon escapade avec séchage des cours en juin, mon enlèvement, les vacances d’hiver vécues en mode recluse dans ma chambre avec un quasi silence radio. Je n’ai vu qu’une poignée de personnes durant cette période. J’ai répondu à peu de mes messages. J’ai ciblé les gens qui ont le plus d’importance dans ma vie, dans mes activités scolaires et extra-scolaires. En gros, une petite moitié de ceux qui m’ont demandé où j’étais passée. Mais je suis restée très vague sur les événements. Très peu de monde sait exactement ce qui s’est passé. Je n’ai pas envie d’en parler.

Ces premiers jours de retour à l’université, je les ai passé autant en cours qu’à faire des mondanités avec toutes mes connaissances qui me sautaient au cou pour me dire «Tu nous à manquer» ou «Enfin t’es là». J’ai la sensation que c’est sincère et cela m’étonne. Je ne pensais pas manquer comme ça dans le décor. Tous n’ont eu que cette phrase : «On se voit à la fête». Je n’ai plus qu’a m’y rendre. Oui, m’y rendre. Je suis plantée dans le couloir. Je ne parviens pas à faire un pas de plus. Je ne sais pas pourquoi il y a ce ravin entre le gymnase et moi. Je sais qu’il est profond. De l’autre côté, il y a une foule de potes qui m’attend et je n’arrive pas à avancer d’un pas. Quelqu’un me bouscule. Je me retourne prête à l’engueuler, style «Tu veux tuer en faisant tomber dans ce gouffre», mais il n’y en a pas, c’est dans ma tête. C’est de la pure stupidité, je n’ai pas de raisons de stopper dans ce couloir, d’avoir peur d’aller jusqu’au bout, mes amis m’attendent. La fille en face de moi s’excuse. — C’est rien. Et puis c’est ma faute. Je me suis arrêtée. Elle fait des commentaires sur le flot d’étudiants et la fête. — Ben, c’est le chemin pour aller au gymnase donc oui c’est normal qu’il y ait du monde parce que oui, tout le monde y va. Tu croyais quoi ? Que tu serais la seule sur la piste de danse ? Tu débarques d’où ? Je fronce les sourcils. Comment peut-elle ignorer que cette fête est un des événements que tout le monde attend chaque année. Je me rends compte que mes questions sont un poil brutal dans la forme. Je lui souris et reprend dans une version adoucie. — Tu es nouvelle ici ? Perdue ? Est-ce que tu as besoin d’aide pour quelque chose ? Et parce qu'on fait barrage en étant immobile dans le passage, je pose ma main sur son bras pour l'amener contre le mur et dégager la zone.
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MessageSujet: Re: Everybody dances to their own boom boom (Noa) (#)   Everybody dances to their own boom boom (Noa) EmptyDim 20 Aoû - 18:09

J'eus l'impression que tout se passa trop vite pour mon pauvre cerveau embrumé : la fille en question s'excuse à moitié puis soudain m'adresse des remarques sèches et percutantes, pour me faire comprendre à juste titre que j'avais vraiment posé des questions idiotes. Je sentis que mon coeur s'affolait un peu plus, si c'était possible ; stupide et ridicule, voilà ce que j'étais, je le savais très bien, pourquoi espérais-je à chaque fois m'en sortir d'une autre manière ? Je cherchais une réponse, tandis que mon visage s'était figé, immuable, impénétrable, comme j'en avais tant de fois l'habitude. Il fallait juste que je me sorte de là. Surtout que la piste de danse, je ne voulais même pas y aller — mais tout de suite mon anxiété avait pris le dessus pour me faire imaginer les pires scénarios : la fille parlait de piste de danse et me demandait d'où je venais, elle savait, c'est ça, elle savait qui j'étais et elle voulait juste se foutre de ma gueule ?...

Puis en une seconde elle se radoucit, me sourit, nous attira à l'écart, et s'inquiéta de moi. Encore plus perplexe, je me sentis en tout cas soulagée d'être mise un peu à l'écart du flot de personnes que nous bloquions et qui parcouraient le couloir. « Euh, je, non, je ne suis pas nouvelle, j'étudie le théâtre, mais je ne suis pas souvent là. Je n'avais pas fait attention que la fête était ce soir, c'est tout » expliquai-je tant bien que mal. « À vrai dire, je ne suis jamais allée à une des soirées de l'université... » J'étais certaine qu'elles étaient comme tout le monde se les imaginait, grandes, bruyantes, colorées et sous les projecteurs qui clignotaient, la musique à fond, l'alcool dans les gobelets, les buffets, les groupes de gens qui se faisaient et se défaisaient, les silhouettes qui se déhanchaient, les histoires qui se créaient de toutes parts. C'était quelque chose que je n'avais jamais connu et que je pouvais imaginer, mais loin de moi, quelque chose qui n'était clairement pas dans mes cordes. Les soirées que j'avais connues étaient toutes autres : quand j'avais grandi aux États-Unis, c'était dans des endroits si perdus et vides qu'on était peu à se retrouver, puis ici, directement injectée dans le monde de la mode, c'était bien différent, loin de l'ambiance universitaire, avant ma chute en beauté vers ce monde de la nuit qui faisait aujourd'hui, malheureusement, partie intégrante de qui j'étais. « Elles sont comment ? Tu y vas souvent ? Au fait, je suis Tracey. Et toi, tu étudies quoi ? » Je savais ce qui motivait mes questions : le fait que cette fille se soit tout d'un coup attachée à s'inquiéter de qui j'étais et ce dont j'avais besoin, et que son regard soit si sincère et si intriguant au fond, comme si elle aussi n'était pas vraiment à sa place dans cet endroit immense.
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MessageSujet: Re: Everybody dances to their own boom boom (Noa) (#)   Everybody dances to their own boom boom (Noa) EmptySam 26 Aoû - 2:42

Elle n’est donc pas nouvelle ! Elle étudie le théâtre. Pas souvent là... dois-je en déduire qu’elle sèche souvent ? Ou alors elle n’est inscrite qu’à un seul cours ? En tout cas, la tête dans les nuages, parce qu’il y a des banderoles et des affiches partout pour annoncer la fête de ce soir. Solitaire ? Timide ? Désintéressée par tout ce qui tourne autour du festif ? Coincée ? Traumatisée ? — Oh théâtre ! Littérature aussi ou que théâtre ? Tu veux être comédienne ? Auteure ? Je suis dans la filière com’, le marketing, tout ça. Pas le même domaine. Je m’appelle Noa. Un prénom, pas d’avantage, comme elle s’est présentée. Je commence par là avant d’aborder le thème des fêtes. Quel sujet ! Un univers à part entière. — Colorées, bruyantes, festives quoi. Après ce n’est pas toujours pareil. Ce soir il y a un DJ, parfois c’est scène ouverte et il y a plein de groupes dans l’université, c’est un bon tremplin pour certains, parfois c’est soirée déguisée. Et puis tout dépend de ce que tu cherches. Sourire. — Certains viennent pour danser, d’autres... Je lève un sourcil.— D’autres sont à la recherche de l’amour fou de leur vie et qui ne durera qu’une heure vingt-sept secondes... D’autres viennent s’enivrer uniquement... Ou... Je hausse les épaules. — Ouais les fêtes sont ce qu’on en fait... En disant cela, je suis en train de réfléchir dans quelle catégorie je suis. Okay, je coche toutes les cases, sauf celles d’en bas : le traffic de drogues et les bastons. — On y trouve toujours ce qu’on cherche. Sauf si tu cherches quelque chose de très... particulier. Je peux même pas te dire un extraterrestre, ça a été le thème d’une fête, tout le monde déguisé. Ni un cercueil, il est arrivé une fois qu’il y en est un qui serve de bar, rempli de glace et de bouteilles. Les idées farfelues ne manquent jamais pour créer de l’animation. Je hoche la tête. — J’y vais souvent, oui. Pour dire qu’il est rare que j’en rate une. — C’est l’occasion, si tu n’as jamais participé. En voilà une qui te tend les bras.  Fonce. Vas-y. Profite. J’hésite. Je tends vers une invitation, mais d’un côté je n’ai pas envie de me trainer un boulet toute la soirée, de l’autre si elle ne connait personne... Ahhh ! ma bonne action de la journée ! — J’y vais d’ailleurs. Tu peux m’accompagner. Au moins tu connaitras une personne. Et je t’autorise à dire que c’est moi si quelqu’un demande. J’éclate de rire en mimant la scène, le doigt tendu vers elle dans un effet de miroir. — C’est elle, j’la connais. Elle est sympa, géniale, drôle, serviable... j’déconne, t’es pas obligée d’ajouter plein de qualificatifs positifs sur moi. J’y mets un max d’humour pour détendre Tracey qui me semble perdue dans ce vaste monde.
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MessageSujet: Re: Everybody dances to their own boom boom (Noa) (#)   Everybody dances to their own boom boom (Noa) EmptySam 2 Sep - 18:05

Son débit de parole oeuvra sans doute en ma faveur : plus elle parlait et se mouvait devant moi et plus je sentais que ma fébrilité s'appaisait un peu, comme si le fait de la voir à l'oeuvre chez quelqu'un d'autre signifiait qu'elle n'avait plus lieu d'être. C'était drôle de parler ainsi avec cette jeune fille, Noa ; tout d'un coup j'avais l'illusion assez plaisante d'être une élève comme les autres, de croiser une de mes camarades et de discuter, d'échanger à propos de nos cursus, de plaisanter au sujet des fêtes organisées par l'université... Quelque chose en elle me mettait à l'aise, bien que je n'étais toujours pas certaine de ce qu'elle pensait réellement, et de la place qu'elle s'imaginait avoir ici. Mais j'appréciais l'échange et j'appréciais surtout l'idée que je pouvais encore me faire une amie ici, et que la perspective de me rendre à cette fête en sa compagnie était dans le domaine du possible... Comme perchée sur l'arrête d'une falaise, je me sentais tanguer, osciller doucement, vers la droite puis vers la gauche. Accepter ? Ne pas accepter ? Oser ? Faire semblant ? Fuir ?

« Théâtre, littérature, tous les cours auxquels je peux me rendre dans ce cursus. C'est un peu compliqué, je travaille à côté. Idéalement j'aimerais être comédienne, mais bon, on verra bien. Et toi, ça te plaît ? Tu vises quoi ensuite ? » C'était si facile de faire comme si, si facile de masquer les vérités de mon existence. Et puis elle m'entraînait dans ce qu'elle disait et je sentis que je me mettais à sourire, puis à rire, j'imaginais les thèmes des fêtes, j'imaginais les gens, je me laissais porter. Je pris le carton, le coeur battant. Allais-je vraiment finir par m'y rendre ?! C'était presque inespéré, et si tout d'un coup je crevais d'envie de le faire, pour avoir l'impression rien qu'une soirée que je pouvais être normale, j'avais d'avance peur du retour de bâton, de la fin de soirée et du petit matin, quand je me rappellerais de la réalité des choses et de l'immense mascarade qui se serait passée. « Allez, je te dois bien ça, si jamais tu as besoin que je vante tes talents auprès des personnes qui t'intéressent, c'est le moment ! » Je m'esclaffai à mon tour. Je sentais que mes joues avaient légèrement rosi d'excitation. « Merci, ça me fait plaisir, et c'est toujours cool d'y aller avec quelqu'un... Promis j'essayerai de ne pas trop te donner l'impression que je suis ton gosse à qui tu dois tout expliquer, ha ha ! » Puis je pris conscience d'une chose tout d'un coup : « Merde, tu crois que ça va aller les fringues ? Je n'avais pas prévu le coup... » Un jean déchiré, un haut simple, des baskets... Je pouvais bien me refaire une beauté dans les toilettes, j'avais ma trousse à maquillage, mais pour le reste... Je me détachai les cheveux, puis haussai les épaules : j'avais envie de m'y rendre ainsi car me vêtir d'une robe et de talons avaient un tout autre sens pour moi à présent, mais je ne voulais pas faire tâche non plus. « On y va directement, tu es prête ? »
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MessageSujet: Re: Everybody dances to their own boom boom (Noa) (#)   Everybody dances to their own boom boom (Noa) EmptySam 9 Sep - 1:48

Les réponses arrivent concernant son activité à l’université, les cours qu’elle prend. Elle veux être commédienne. Je souris. Belle idée, beau métier. Et puis, j’ai réussi à la décider d’aller à la fête. — T’inquiète pas pour ta tenue. Ce n’est pas un défilé de mode. Je recule de deux pas pour un rapide coup d’oeil de la tête au pied s’il faut la rassurer sur le sujet. — C’est bon. Tu vas te fondre dans la masse.   Est-ce que je suis prête, moi, à me lancer ? Ben, maintenant que je l’ai presque forcée à y aller, ce serait mal de faire demi-tour. Je tourne la tête pour voir le bout du couloir. Ce n’est qu’un couloir. Au bout, ce n’est qu’une fête, ce sera de la musique, des rires, des potes qui m’attendent. — Ouais prête. J’avance en vérifiant qu’elle est à la même allure que moi et je reprends la conversation, ce sera ma façon de créer un pont au-dessus du ravin invisible que l’angoisse avait creusé. — Etudier et travailler en même temps, c’est parfois compliqué. Ça l’est même beaucoup et souvent en fait. J’ai aussi un boulot. Mais j’ai de la chance. J’ai pu adapter les heures pour que ce ne soit pas trop contraignant. Dans le cas contraire, je ne l’aurais pas fait. Je fronce les sourcils le temps de trouver une réponse à la question qu’elle m’avait posé au paravent. — J’avais choisi cette filière parce qu’elle me plaisait. Je parle au passé. Comme on repère les années avant Jésus-Christ et après Jésus-Christ. Je me suis mise à trier les événements par leur date avant et après mon enlèvement. Sans le vouloir. Instinctivement. — Je n’sais plus très bien depuis... depuis ces derniers jours. J’ai l’impression que ça a perdu de son importance, que c’est futile, que... Comment dire ? — Je pense qu’il y a des métiers qui permettent de sauver des vies ou aider à vivre mieux et il y a les autres. Le marketing rentre dans la case “les autres”. Je souris à ce constat qui n’a rien de rassurant sur l’énergie que je risque de mettre à finir mon cursus. Même si je veux aller au bout. Ce serait une défaite que d’abandonner, défaite à mettre à l’actif de mes agresseurs. — Je vais finir, mais je crois que j’ai perdu le feu sacré, comme on dit. Je pousse un soupir en regardant le sol. Un pas et je suis sur le pont. Cinq pas et j’ai franchi la crevasse. Je souris. Ce n’était pas si difficile que ça en fait. Je regarde Tracey. — Pompier. Tu en penses quoi ? Pourquoi je n’ai pas dit maître-nageur sauveteur ? Ce serait quand même plus proche de mes activités aquatiques ! Pompier ! Je ne m’imagine même pas pompier ! Je ne sais vraiment pas pourquoi j’ai dit pompier. — Ouais, enfin, je suppose que je bosserai dans une grosse entreprise à mettre des idées sur papier pour d’autres qui... J’en sais rien. Je crois que je vis de plus en plus au jour le jour. Je n’ai plus envie de faire des projets à long terme. Parce que la vie ne tient qu’à un cheveu.
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