whenever you remember (abby)

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whenever you remember.
Abby&Finn

Après avoir été faire un tour à l'université afin d'aller chercher des dépliants, parce qu'il ne sait pas encore s'il va y retourner. Il était retourné au studio sous une averse de pluie et dès qu'il plongea à l'intérieur, le soleil se pointa dans le ciel. La malchance de Finn ne s'arrête jamais. Il retire ses chaussures, marche tout trempé jusqu'à sa chambre improvisé avant de se changer de vêtements, il enfile un simple jogging. L'ambiance est différence de son ancienne ville, les bâtiments, la culture. Il tente encore de s'y faire, de comprendre, comme s'il descendait tout droit d'un vaisseau spécial. Son accent ne s'atténue pas, on a parfois du mal à le comprendre, alors, les gens font des têtes bizarres. Il commence à s'y habituer à ce genre de réaction, enfin, presque. Il est encore perdu, perdu sur son avenir, sur ses choix. A-t-il bien fait de quitter son pays et l'université ? Ici, c'est un nouveau départ, de nouveaux amis, une nouvelle maison. Il a balancé des dépliants sur la table de cuisine avant d'ouvrir la porte du réfrigérateur. Il ne se pose pas de question, il attrape le steak saignant. Ce n'est pas un chef, il préfère que l'on lui prépare son repas plutôt que de le faire, mais bon, il faut bien qu'il se débrouille un peu. Finn le pose sur le comptoir, attrape une poêle, évidemment, il n'ajoute aucun beurre ou huile pour faire cuire tout ça. Alors, qu'il attrape le manche de la poêle, il se brûle et il échappe le tout au sol. « Merde, Merde, Merde. » Ce n'est pas pour rien que sa mère préférait le voir loin du four et tout ce qui peut mettre le feu à la baraque. Il éteint le rond, il arrive à ramasser les dégâts, enfin, presque. Il continue de gémir avec sa brûlure, il ne sait pas trop comment s'y prendre. Sale de journée de merde.

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whenever you remember

Finn & Abby Llewellyn

N OW I GOTTA CUT LOOSE, FOOTLOOSE, KICK OFF YOUR SUNDAY SHOES Au volant de sa voiture, Abby chantait à tue tête ce vieux morceau. Footloose, ce film avait beau être sorti avant sa venue au monde, sa bande originale restait l’une des chansons qu’elle préférait. Elle l’écoutait à tue-tête, chantait – comme une casserole – et quand elle le pouvait, se dandinait telle une sauterelle survoltée. Bon, pour le coup la sauterelle survoltée, elle évitait. En voiture, ça aurait pu être risqué, mais au feu rouge, il était évident pour tous les conducteurs alentours qu’elle donnait un concert privé. Autant vous dire que leurs regards étonnés, elle s’en moquait royalement. Elle avait enchaîné son propre entraînement et un cours à une bande de mômes survoltés, autant vous dire qu’elle avait bien besoin d’un regain d’énergie pour effectuer le chemin qui la mènerait du complexe sportif jusqu’à chez elle sans encombre.

Arrivée à destination, Abby gara sa voiture le plus près possible de son immeuble et s’extirpa de l’habitacle. Elle continua à fredonner cet air qu’elle connaissait par cœur dans le hall, puis dans l’ascenseur, et n’avait pas encore terminé lorsqu’elle passa le pas de la porte. Elle n’était pas verrouillée, Abby devina donc avant même d’avoir posé le regard sur lui que son petit frère était là. Yo ! s’annonça-t-elle, laissant tomber son sac de sport sur le sol afin de pouvoir se débarrasser de son manteau. Une chance pour elle, le temps s’était levé avant qu’elle n’ait à mettre le nez dehors, elle avait évité la douche forcée, même si ses cheveux encore trempés par sa douche – volontaire, celle-ci – pouvaient laisser penser le contraire. Merde, Merde, Merde. Les jurons de son petit frère et le fracas qui l’accompagnaient lui parvinrent alors qu’elle était occupée à fourrer ses basket dans le meuble de l’entrée. Qu’est-ce que tu fais comme conneries ? demanda-t-elle, s’avançant finalement dans l’appartement pour découvrir son petit frère occupé à ramasser une poêle et un steak sur le sol tout en tenant sa propre main. Autant vous dire que faire tout ça en même temps, ce n’était pas évident.

Abby s’approcha de lui, écartant sa main de la brûlure qu’il s’efforçait de couvrir de son autre main. Va mettre ça sous l’eau tiède, j’vais ramasser et j’irai te chercher la biafine, lui conseilla-t-elle, se baissant pour récupérer la poêle, qu’elle reposa sur la plaque. Des brûlures, elle s’en était fait quelques unes même si dans son cas, elles étaient davantage dues aux frottements de corde qu’à des accidents de cuisine. Tu sais que pour cuire un steak, faut mettre de la matière grasse dans ta poêle ? lui demanda-t-elle, lui jetant un coup d’œil par-dessus son épaule. Abby n’était pas une grande cuisinière mais ça, au moins, elle le savait. Il fallait bien commencer quelque part. Je paris que maman devait pas te confier les fourneaux très souvent, hein ? demanda-t-elle finalement tout en nettoyant le sol là où le steak était tombé. Leur mère, maman poule qu’elle était, devait très certainement prendre un plaisir indescriptible à cuisiner pour son petit dernier. Pourquoi s’embêter à apprendre comment faire cuire un steak quand on a un cordon bleu à la maison qui n’attend que ça de vous préparer de bons petits plats, franchement ? Elle-même ne s’en donnait pas la peine, du temps où elle vivait encore au Pays de Galles.

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whenever you remember.
Abby&Finn

La catastrophe ambulante que peut s'avérer être Finn, avait opéré une fois de plus. Heureusement, il ne s'est jamais passionné pour la cuisine, qu'il n'a jamais voulu prendre des cours, parce que sûrement que l'école aurait pris en feu en moins d'une semaine. Enfin si, il se passionne pour la nourriture en général, quand c'est fait par les autres, par maman, ses plats lui manquent. Il aurait pu attendre sa sœur, lui demander de lui préparer un steak, mais rendu à son âge, c'est rendu plus une honte qu'autre chose de faire ce genre de demande. Il déteste déranger Abby pour ce genre de choses, tout comme la lessive, parce que ça aussi, il n'est pas doué. En parlant du loup, elle est arrivée. Il relève donc la tête, échappant une nouvelle fois le steak au sol. Tant pis pour le dîner, il mangera des restes ou encore du restaurant. Il grimace un peu. Il a réussi à faire plusieurs gaffes en moins de dix minutes et il a bien sali le plancher et la poêle. « Euh.. » Finit-il par lui répondre. Elle est là, devant lui, au lieu de l'engueuler, elle prend soin de lui. Cela le surprend, après ses conneries, et ça, il avait l'habitude avec leur mère, toujours clémente. Il s'empresse de plonger sa main sous le robinet à la bonne température. Un certain soulagement, mais ça chauffe toujours, il espère que ça partira bien assez tôt. « Je suis vraiment désolé.. la cuisine et moi, ça fait deux. » Finn grimace un peu. « Tu m'en veux ? » Il faut bien qu'il sache à quoi s'attendre. Cela ne fait pas si longtemps qu'ils se sont retrouvés et encore, ils n'avaient pas cette complicité de partager un moment comme celui-ci. Il sourit bêtement à cette phrase. Elle a tout à fait raison. Finn était à l'autre bout de la maison quand elle cuisinait, quand elle devait jouer avec le feu, la cuisson et ce qui peut causer une brûlure. « Je ne vois pas trop de quoi tu parles. » Lâche le gamin en faisant l'innocent. Des souvenirs lointains à présent.
« Adieu mon dîner.. » Se met à marmonner Finn avant d'arrêter l'eau du robinet et de secouer un peu sa main, laissant les gouttes d'eau s'étendre un peu partout. « J'espère que toi au moins, tu as passé une agréable journée. Mieux que la mienne. » Il lui adresse un sourire sincère. Il l'espère. Parce que la sienne n'est pas aussi bonne qu'il aurait voulu qu'elle soit. Malgré tout, Finn n'est pas le genre à s'apitoyer sur son sort, pas vraiment, il ne baisse jamais les bras. La preuve, il avait pris la chance de prendre l'avion et de tout abandonner derrière lui, un nouveau départ, une nouvelle ville et sans ses parents, sans les bons petits plats de maman et des conseils de papa.

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Finn & Abby Llewellyn

D eux ans déjà qu’Abby avait décidé de s’installer en Nouvelle-Zélande. L’autre bout du monde pour cette jeune galloise, mais elle avait passé tellement de temps à voyager qu’être loin de chez elle ne la perturbait plus outre mesure. Être loin de sa famille, loin de sa petite ville perdue et des montagnes qui l’entourait n’était pas toujours facile et naturellement, il lui arrivait d’avoir le mal du pays, mais elle s’y était faite. Et puis au vingt-et-unième siècle, il était facile d’entretenir le contact avec des gens se trouvant de l’autre côté du globe, alors ce n’était pas parce qu’elle ne voyait pas souvent les siens qu’elle ne les aimait pas, ou ne prenait pas de nouvelles. Elle n’avait jamais oublié un anniversaire, jamais manqué de leur faire parvenir des cartes postales et autres souvenirs de tous les endroits qu’elle visitait ou des colis pour Noël. Et quand son petit frère avait débarqué comme une fleur, l’idée de le renvoyer d’où il venait ou de l’envoyer dormir à l’hôtel ne lui avait même pas traversé l’esprit.

Finn, elle ne l’avait pas beaucoup vu grandir, mais c’était son petit frère. Bébé Llewellyn. Un bébé qui était, de toute évidence, encore moins doué derrière les fourneaux qu’elle ne l’était. Pourquoi les mères tenaient-elles tant à apprendre à leurs filles à cuisiner et ne se préoccupaient pas de montrer à leurs fils comment se faire cuire un oeuf ? C’était le genre de question qui avait tendance à agacer la féministe qu’était Abby. Le cliché de la femme aux fourneaux pendant que l’homme attend sa pitance avec plus ou moins de patience lui filait de l’urticaire. Mais Finn avait fait un effort, au moins il avait essayé. L’échec avait été cuisant – littéralement – mais il avait essayé.

Je suis vraiment désolé.. la cuisine et moi, ça fait deux. Tu m'en veux ? lui demanda-t-il alors qu’Abby nettoyait le résultat de sa maladresse. La jeune femme leva le regard vers son petit frère, debout devant l’évier, la main sous l’eau. Pourquoi je t’en voudrais ? Tu me prends pour un tyran ou quoi ? plaisanta-t-elle. Ce n’était, après tout, qu’un steak. Quant au sol, c’était vite nettoyé, il n’y avait pas de quoi en faire une montagne. Et puis vu l’état de son appartement, il était évident qu’elle était loin d’être maniaque. Elle était même clairement bordélique – c’était propre, certes, mais le rangement ce n’était pas vraiment sa tasse de thé. Je ne vois pas trop de quoi tu parles, lâcha Finn d’un air innocent lorsqu’elle évoqua leur mère. Abby rit légèrement. Honnêtement, avec une mère comme la leur, ce n’était même pas de sa faute s’il était pire que novice en cuisine. Adieu mon dîner.. se lamenta-t-il, coupant le robinet avant de secouer sa main, mettant de l’eau plein la cuisine, ce qui fut loin de perturber Abby. L’eau, ça sèche. Et en plus, ça ne tache pas. J'espère que toi au moins, tu as passé une agréable journée. Mieux que la mienne. lui demanda-t-il alors qu’elle filait rapidement vers la petite salle de bain. Elle y récupéra un tube de biafine avant de revenir à la cuisine. Elle le lui lança avant de se laisser tomber sur une chaise, fouinant distraitement parmi les dépliants qu’il avait étalé sur la table. L’Université… Voilà bien une chose qu’elle n’avait jamais considérée pour elle-même. L’école, ça n’avait jamais été son truc. Pas parce qu’elle était stupide, mais parce qu’elle s’y ennuyait comme un rat mort.

Eh bien j’ai passé plusieurs heures à m’entraîner, avant d’enchaîner sur un cours pendant lequel j’ai dû courir après une bande de mômes surexcités. Mais ils sont drôles. répondit-elle avec un haussement d’épaules. Abby qui donnait des cours à des gamins, ça pouvait sembler comme le monde à l’envers, mais elle était étonnamment plus patiente avec eux qu’elle ne l’était avec des grimpeurs plus aguerris qui pensaient, souvent, qu’ils savaient tout mieux que tout le monde et avec qui elle devait souvent batailler pour se faire entendre. Les gamins, bien que plus turbulents, avaient envie d’apprendre. Et toi, t’as trouvé des trucs intéressants ? demanda-t-elle, désignant les dépliants face à elle. Que Finn ait eu envie de changer d’air, elle le comprenait parfaitement, mais maintenant qu’il était là il allait bien falloir qu’il trouve ce qu’il allait bien pouvoir faire de sa peau. Pour le diner on peut commander des pizzas si tu veux. Parce que moi tout ce que j’avais prévu, c’était un bol de lait et des céréales. Ce n’était pas un vrai repas, à ce qu’on lui avait dit, mais ça elle s’en moquait bien. Tant que ça lui remplissait l’estomac avec un minimum d’efforts et de vaisselle, ça lui convenait parfaitement.

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Abby&Finn

Partir sur un coup de tête, ce fut un peu son cas. Laisser les études, surtout sa mère, ses amis, pour aller vivre à l'autre bout de la terre, ne fut pas si facile que ça en a l'air. Même si Harry, son ami d'enfance, va le rejoindre d'ici un mois ou deux, il s'ennuie quand même de là-bas, de son pays, de son petit coin perdu. Son père n'a vraiment jamais cru à cette histoire de partir d'ici et de vivre sans études, sans presque rien. Enfin, jusqu'à ce que Finn le fasse réellement. Ce n'était pas des mensonges. Après tout, le voilà à Island Bay. Les défis, il s'y connaît et il vient d'en relever un énorme, le prochain ça va être de choisir son avenir, ses études. Pour le moment, il n'a pas l'intention d'y retourner, mais cette journée porte ouverte à l'université, arrive à le faire réfléchir. Tôt ou tard, il devra bien faire quelque chose de sa vie. Le plus important pour l'heure, c'est la gaffe qu'il vient de faire. Elle n'est pas fâchée, ça se voit même dans son visage, sa façon d'agir avec lui. Elle dépasse derrière lui comme le faisait leur mère. La seule différence, c'est qu'ils ont du temps à rattraper tous les deux. Finn a encore du mal avec cet éloignement, d'être le garçon sur le banc touche, alors qu'il a toujours été au centre de l'attention avec ses amis. Ils sont du même sang, alors, ça fait un peu plus mal, mais il ne le montre pas, il ne veut pas non plus se faire mettre dehors, que ça parte en grosse dispute.

Il attrape le fameux tube en question, tout en l'écoutant, il commence à se tartiner la brûlure. Finn sourit. C'est lui quand il était enfant, un môme excité. Encore aujourd'hui, il n'est pas plus mature qu'il y a dix ans, il a seulement grandi physiquement. « Tu t'entraînes déjà pour plus tard. » Il faisait référence aux bébés, aux enfants, qu'elle va finir par s'y habituer avec les gosses surexcités qui sautillent partout. Il le dit d'une façon taquine, rien de sérieux. C'est une chose qu'il ignore, si elle souhaite se marier, avoir des enfants, vivre dans une maison, enfin, être rangé. Il hausse les épaules à sa question. Il repose le tube avant de se laver les mains et il s'avance vers la fameuse table. « Je crois que je me suis plus amusé à prendre les dépliants qu'à regarder sérieusement les informations qui s'y trouvent. » Il prend une chaise et il s'y installe. Il se passe une main sur le visage. Il sait ce qu'il veut. Il est encore jeune, il veut simplement profiter de ce que le monde lui offre. Peut-être qu'à trente ans, quarante ans, il sera trop tard pour de longues études, mais d'ici là, il peut arriver bien des choses. « Je pense prendre une année pour y réfléchir. » Finn détourne le regard avec le fou rire. Parce qu'une année pour réfléchir, c'est énorme, c'est du grand n'importe. Sa décision est déjà prise. Il va prendre le temps de s'installer. Il a déjà commencé à se faire des amis, à prendre ses marques. Ses yeux s'illuminent presque en l'entendant prononcer le mot pizza, mot fétiche, mot favori, un mot magique quoi. Il hoche la tête rapidement. « C'est encore mieux. » Il a beau faire de la gym, il adore la nourriture, les beignets, la pizza, toutes les raisons qui font qu'il s’entraîne. Il jette un coup d'œil à sa brûlure qui démange. « Je ne t'ai jamais vraiment remercié pour l'hébergement. » Il relève la tête vers elle puis il la regarde dans les yeux sincèrement. « Merci. » Un simple mot, un simple merci, mais qui veulent dire beaucoup pour lui. La preuve qu'il y a encore de l'espoir entre eux. C'est un peu bizarre tout ça. Finn n'est pas habitué à ce genre de moment avec sa fratrie. « Bon. On la commande cette pizza ? » Dit-il pour sortir de la séquence émotion, ou qui en devenait presque une. Il se relève aussitôt, attrape les dépliants avant de s'approcher de la poubelle. Il reste planter devant, à regarder les programmes, les propositions, les cours, mais aucun déclic.

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Finn & Abby Llewellyn

A bby n’était pas du genre à s’imaginer comment seraient les cinq, dix, vingt prochaines années de sa vie. Il lui arrivait de ne pas savoir ce qu’elle allait faire de sa journée, alors le reste de sa vie… Ca viendrait quand ça viendrait. Elle ne comprenait pas ces gens qui établissaient tout un plan pour le reste de leur vie : leur travail, le mariage, les enfants, la retraite… C’était là le meilleur moyen d’établir une routine dont elle n’avait clairement pas envie. Elle aimait pouvoir décider, sur un coup de tête, de partir en voyage. Pouvoir, aussi, décider de ne pas quitter son lit de la journée si elle n’en avait pas envie. Pouvoir s’entraîner quand bon lui semblait, où bon lui semblait. Alors les plans sur la comète et les grandes responsabilités, très peu pour elle. Le mariage et les gosses, ça ne lui avait même pas traversé l’esprit. Pour elle, tout cela s’apparentait à un boulet attaché à sa cheville, l’empêchant à tout jamais de mener sa vie comme elle l’entendait et elle n’était certainement pas prête à mettre sa liberté de côté. Le seul fait d’être en couple un an et demi constituait déjà un exploit pour elle. Par chance, Cade et elle avaient la même vision des choses de ce côté-là, ils ne risquaient donc pas de ce disputer sur le sujet. Ouais, non. J’aime bien les gosses, mais chez les autres. Leur apprendre à grimper quelques heures par semaine avant de les rendre à leurs parents, c’était amplement suffisant pour Abby. C’était déjà bien assez de responsabilités pour elle. Avoir la responsabilité constante de la vie d’un gamin sur les bras, c’était bien trop pour elle. Au pire j’adopterai un chien, c’est bien suffisant. Un chien elle pouvait gérer.

Je crois que je me suis plus amusé à prendre les dépliants qu'à regarder sérieusement les informations qui s'y trouvent. Je pense prendre une année pour y réfléchir, avoua Finn qui l’avait rejointe à la table de la cuisine. Abby continuait de regarder distraitement les prospectus qu’il avait abandonné là, parcourant du regard les titres de différents filières et autres diplômes tout en se disant qu’elle serait certainement devenue folle si ses parents l’avaient forcée à suivre des études. D’autant que son père avait un petit côté vieux jeu, ce qui signifiait que toutes les études un tant soit peu amusantes étaient reléguées, à ses yeux, au rang de parfaitement inutiles. Lui, il croyait aux vrais diplômes, aux grandes études – médecine, droit, business – ou aux jobs plus physiques, manuels. Une chance que malgré son exigence, il ne soit jamais devenu un véritable tyran et qu’il avait tout de même laissé ses enfants choisir leur voie, même quand elle lui déplaisait. Il n’avait pas été ravi lorsqu’Abby avait annoncé qu’elle arrêterait l’école à la fin du lycée pour se consacrer entièrement à l’escalade. Elle n’avait obtenu son diplôme que de justesse, son esprit et son temps bien trop accaparés par ses rêves et pas assez par le blabla de ses professeurs. Je serais mal placée pour te forcer à y retourner… Mais tu sais que papa ne va pas financer ton escapade néo-zélandaise indéfiniment, n’est-ce pas ? A un moment, va falloir que tu lui dises ce que tu comptes faire de ta vie tant que tu es ici. Leurs parents avaient de l’argent, certes, mais leur père finirait par refuser de servir de banque personnelle à son fils s’il n’avait pas ne serait-ce qu’un semblant de projet à lui proposer. Ce serait sa façon à lui de botter les fesses de son fils à distance, pour le forcer à faire quelque chose de sa vie. Il m’a appelée l’autre jour, je lui ai dit que tu devais aller te renseigner à l’université, ça l’a calmé un peu mais bon, tu le connais, ajouta-t-elle en feuilletant un dépliant traitant des études de médecine – celles là même qu’avait fait Cade. Rien que de lire le nombre d’heures, de matières, d’années que cela représentait, elle était déjà épuisée.

En tout cas, Finn semblait enthousiaste à l’idée d’une pizza pour le diner, ce qui convenait parfaitement à Abby. Pas de cuisine, pas de vaisselle, et pas de risque que son frère ne mette le feu à l’appartement en s’affairant derrière les fourneaux. Parfait. Je ne t'ai jamais vraiment remercié pour l'hébergement. Merci. dit-il finalement. Abby détacha son regard du dépliant qu’elle avait dans les mains pour le poser sur son petit frère. Bon. On la commande cette pizza ? poursuivit-il avant qu’elle n’ait eu le temps de répondre, comme pour changer de sujet. T’as pas besoin de me remercier. J’allais quand même pas te laisser à la porte ou t’envoyer à l’hôtel. J’suis pas non plus une sœur indigne répondit-elle en se levant de la chaise pour se diriger vers le frigo, en profitant au passage pour ébouriffer les cheveux de son frère comme s’il s’était agit d’un gamin de dix ans. Garde-les, suggéra-t-elle en le voyant regarder les dépliants qu’il avait rassemblé et qu’il semblait hésiter à jeter dans la poubelle. Tu pourras toujours y revenir plus tard. Elle décrocha du frigo le menu de sa pizzéria habituelle et retourna se laisser tomber sur sa chaise. Tiens, pour la peine c’est toi qui passe commande. Ca t’apprendra à avoir Sali ma cuisine. Petite vengeance de rien du tout. Et puis, elle aimait bien voir les gens galérer à comprendre leur accent, qu’ils n’entendaient que rarement dans cette partie du monde. Si elle savait l’atténuer lorsqu’elle le jugeait nécessaire, elle faisait rarement cet effort. On ne demandait pas aux néo-zélandais de parler l’anglais de Sa Majesté la Reine après tout, pourquoi devrait-elle le faire ?

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Abby&Finn

Il venait au moins d'apprendre quelque chose, sa sœur ne semblait pas vouloir avoir de gosse. Il ignore si c'était son cas, en tout cas, certainement pas pour les dix prochaines années. Finn n'aspire pas à avoir une famille, à se caser pour toute sa vie et devoir travailler vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour faire vivre sa famille. Il est bien trop jeune pour penser à de telles choses et surtout, trop immature pour élever un gosse, il risquerait d'y avoir deux bébés dans le même appartement. Finn pensait également à s'adopter un chien, ça lui manque, il a toujours été un amoureux des animaux. Pour le moment, il doit se mettre un peu d'ordre dans sa vie. Pour le moment, il préfère réfléchir à tout cela avant de se lancer dans quelque chose et de le regretter au bout d'un mois ou deux. Il écoute ce qu'elle lui dit. Il n'en doute pas une seconde à propos du père. Cela dit, sa mère ne l'abandonnera pas non plus. Et il ne compte pas non plus passer sa vie sur un canapé, la vie sédentaire ce n'est pas son truc. « Ah, ben ça, je n'en doute pas une seconde. Après, je ne compte pas sur son argent non plus. S'il voulait entendre mes projets, il le ferait. Accepter le fait que j'aimerais devenir danseur et faire du théâtre. Mais pour lui, ce n'est pas raisonnable, pas sérieux. » Il est loin d'être un enfant pourri gâté, même si on le gâte, il a toujours su se débrouiller sans compter sur leur argent. Certes, c'est plus facile, mais il reste assez débrouillard. Ça toujours été son rêve de faire de la danse. Il avait suivi des cours de danse, à l'issue de son père, qui n'a jamais trouvé que c'était un vrai métier, mais plus un passe-temps. Or, pour Finn, c'est différent. Il ne veut pas un job de bureau ou un truc ennuyeux à ses yeux.

Il baisse légèrement la tête lorsqu'elle lui dépeigne les cheveux, aussitôt, mais surtout, automatiquement, il passe l'une de ses mains dans ses cheveux. Il lui fait une grimace en retour. C'était quand même nécessaire de lui dire, de la remercier, lui faire comprendre qu'il est reconnaissant pour son accueil. Finn hausse les épaules. Doit-il vraiment les garder ? Est-ce que cela va servir un jour ? D'ici là, les dépliants auront changé de slogan, de prix et d'activité. Il les pose tout de même sur le bord du comptoir. Il la regarde prendre ses aises, pendant que lui, il va commander le repas. Il regarde le menu, dès qu'il a choisi, il attrape son portable et il passe commande. Après avoir répété trois fois la même chose. Parce que personne ne semble comprendre ce qu'il dit, alors quand il élève la voix, on a l'impression qu'il gueule comme s'il était fâché, or, il veut juste se faire comprendre. « Et donc, c'est toujours comme ça quand on parle aux gens d'ici ? » Il secoue légèrement la tête avant de la rejoindre à sa place. Il regarde alentour, il observe l'espace, le studio. C'est joli. Il n'aurait jamais cru qu'il viendrait vivre avec sa sœur un jour. Le silence, ce n'est pas vraiment son fort. Alors, il se lance avec l'ultime question. « Tu as un petit ami ? » Ouais, il est curieux, mais il veut également la connaître davantage, savoir s'il a un beau-frère, s'il doit le détester ou non. Il croise ses jambes en indien sur la chaise et la regarde dans les yeux, à l'écoute de ce qu'elle va lui raconter à ce sujet.

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Finn & Abby Llewellyn

L e père d’Abby n’avait jamais jugé que ses ambitions sportives constituaient un projet d’avenir stable pour sa fille. Mais Abby avait la fâcheuse tendance de n’en faire qu’à sa tête et ce trait de caractère ne tombait pas du ciel puisque papa Llewellyn était lui-même têtu comme une mule. Alors elle avait fait ce qu’elle voulait, comme elle le voulait et dans le fond, elle ne s’en était pas trop mal tirée. Sa mère, elle, aurait préféré voir sa fille se tourner vers des activités plus féminines, mais il suffisait de voir Abby et ses pour se rendre compte que c’était peine perdue de ce côté-là. De toute façon, elle n’aimait pas les clichés et ne voyait pas pourquoi une femme devrait obligatoirement aimer le shopping, le maquillage et les séances interminables chez le coiffeur, et il était d’ailleurs risqué de la lancer sur le sujet : c’était le meilleur moyen de réveiller la féministe en elle. Elle aimait son père, mais sa vision un peu trop traditionnaliste des choses avait le don de lui hérisser le poil. Pour autant, il n’était pas un tyran, et il l’avait laissée faire ce qu’il voulait – après tout elle était sa seule fille, et un père ne refuse pas grand-chose à sa fille. Elle était convaincue que Finn pourrait lui aussi obtenir gain de cause. Faire carrière comme grimpeuse professionnelle c’était pas non plus raisonnable et pourtant regarde où j’en suis, répondit-elle avec un haussement d’épaules. Son palmarès, les titres qu’elle avait remportés parlaient pour elle. Malgré ses réticences, il avait fini par accepter que sa fille ne deviendrait pas une prestigieuse avocate ou un brillant médecin. Et il était fier d’elle, même s’il n’était pas du genre à lui dire. Faut juste lui faire comprendre que c’est pas juste un caprice. Que t’es sérieux et que tu feras ce qu’il faut pour y arriver. De toute façon il est trop loin pour t’empêcher de faire ce que tu veux, maintenant. L’avantage de vivre à l’autre bout du monde : pas de parents sur le dos, à surveiller le moindre de vos faits et geste. Pour Abby, qui appréciait son indépendance, cette liberté était la bienvenue.

L’inconvénient, par contre, c’était qu’en cas de flemme il était impossible de débarquer à l’improviste chez maman pour se faire cuisiner un bon petit plat. Alors ils devraient se contenter d’une pizza. Enfin, ce n’était pas comme si Abby n’appréciait pas la pizza, de toute façon, ou comme si elle était une adepte de repas sains et équilibrés. On n’a qu’une vie et la passer à manger comme un lapin, très peu pour elle. Ce serait du gâchis. Et donc, c'est toujours comme ça quand on parle aux gens d'ici ? lui demanda Finn une fois qu’il eut raccroché le téléphone. Abby sourit, le regardant la rejoindre à la table. Avec le temps t’apprendras à gommer un peu ton accent pour éviter ce genre de désagrément. Mais bon, je le fais rarement. On parle la même langue après tout, ils n’ont qu’à ouvrir leurs oreilles. Si elle s’amusait à sans arrêt atténuer son accent, les gens ne feraient plus le moindre effort alors elle ne s’embêtait plus. Si ses élèves arrivaient à s’habituer après seulement quelques séances, les adultes pouvaient en faire autant.

Le silence s’installa alors qu’Abby regardait toujours distraitement le dépliant qu’elle avait dans les mains. Finalement, elle le replia et le déposa sur la table. Ce n’était pas, de toute façon, comme si elle considérait de reprendre les cours un jour – encore moins pour se lancer dans la médecine. A son âge, elle passerait sa vie à faire des études, ce qui serait ridicule. Et puis, la question fatidique tomba : Tu as un petit ami ? Un rire lui échappa. Sa réaction spontanée aux mots « petit ami ». Parce qu’Abby, elle n’était pas du genre à s’enchaîner à un homme. Elle n’était pas romantique pour un sou et le célibat ne l’avait jamais dérangée, pas plus que les histoires sans lendemain qu’elle avait pu vivre. Et pourtant… Il s’appelle Cade, annonça-t-elle après avoir fouiné dans son téléphone à la recherche d’une photo les représentant tous les deux, en train de faire les cons pour changer. C’est un crétin, c’est d’ailleurs sûrement pour ça qu’on s’entend si bien tous les deux. Je lui ai botté les fesses sur un ring de boxe et comme il est bizarre, ça lui a plu. M'enfin, si tu lui en parles, il te dira sûrement que j'ai eu de la chance... Bon, ce n’était pas là un portrait très reluisant de celui avec qui elle partageait sa vie depuis plus d’un an maintenant… Mais elle était comme ça Abby. Pas du genre fleur bleue. Oui, Cade était beau comme un dieu, mais ce n’était pas ce qui avait retenu son attention. Il était intelligent, perspicace, déterminé, et avait le don de la faire rire comme de la faire tourner en bourrique. Il la comprenait mieux que personne, parce que dans le fond ils avaient le même grain, tous les deux. Comme elle, il ne se prenait pas trop au sérieux, il aimait rire, parfois à ses dépends, s’amuser de tout et profiter de la vie. Plus d’un an maintenant, et elle ne s’était pas lassée, elle qui passait si aisément à autre chose – ça relevait du miracle. Personne n’aurait parié sur ces deux sauvages lorsqu’ils ont commencé à se fréquenter et pourtant, c’était une affaire qui marchait plutôt bien. On s’est un peu pris la tête hier soir, donc je le laisse mariner. Des chamailleries ridicules, comme toujours, mais le faire tourner en bourrique ne rendrait les réconciliations que meilleures – ce qu’elle se garda bien de dire à son petit frère, parce qu’il avait beau avoir vingt ans, il serait toujours un bébé à ses yeux.

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Abby&Finn

Ce n'est pas tout le monde qui croit que la danse, c'est pour les hommes, enfin, les hommes à femmes. Finn avait toujours été passionné par cela, il l'est toujours d'ailleurs, il en est même doué, pas professionnel, mais il y a de la matière, des compétences pour y parvenir. Il avait bien réussi à se faire une place dans la seule école du coin de son pays. L'école n'était pas à côté, il faut dire qu'il est difficile d'avoir tous les écoles dans cette même ville. C'est sa mère qui faisait les aller-retour pour le conduire jusqu'à là-bas, étant trop jeune pour prendre le volant. Leur père ne pouvait pas intervenir, enfin, sauf s'il décidait de prendre l'avion pour une telle chose. Mais il se doute bien qu'à un moment ou l'autre, il n'aura pas le choix de s'y faire, comme semblait le dire sa sœur concernant ses choix à elle. Mais à la mort de leur frère, Finn est devenu presque le seul et dernier espoir de faire honneur à la famille, il aurait pu commencer une carrière militaire tout comme eux. Or, cela n'a jamais été dans ses intérêts, dans son envie d'aller se battre. Il défend le pays à sa manière, loin des champs de bataille quoi. L'accent n'a évidemment pas été un problème dans son pays, sauf pour les touristes. Mais en arrivant ici, c'était un peu du jargon qui sortait de sa bouche, parfois incompréhensible. On dit que c'est l'effort qui compte, le fait de vouloir apprendre leur langue, comprendre l'accent de l'autre. Il ne doutait pas une seconde qu'il allait devoir s'y accommoder, tout comme les habitants de ce nouveau pays. Heureusement, son séjour aux États-Unis, il y a quelques années, avait réussi à l'aider un peu, enfin, le temps d'un été. La pizza était en route, il manquait plus qu'elle atterrisse dans son assiette, surtout dans son estomac.

Finn se devait de poser la question, après tout, il est en train d'apprendre à la connaître, à la découvrir. Il fait son curieux. Elle semblait trouver cela drôle comme question. Il fronça légèrement les sourcils en la regardant. Peut-être que c'était petite amie qu'il aurait dû dire. Finalement, elle se met à lui dévoiler le nom du heureux élu. Cade. Ne connaît pas. Et parce qu'il ne connaît pas grand monde encore aussi. Curieux de le connaître, de savoir à quoi il ressemble, comment est-il, s'il la traite bien. Abby en dévoile un peu plus au fur et à mesure que les secondes passent. Il est attentif, il l'observe, il l'écoute. Il regarde la photo d'eux. Ils semblent bien heureux tous les deux. Il est content pour elle, qu'elle ait trouvé le bonheur, quelqu'un dans sa vie sur qui compter. Concernant lui-même, sa dernière véritable relation sérieuse remonte à un an ou deux. « S'il te rend heureux, je suis content alors. J'espère pouvoir le rencontrer bientôt. » Il lui adresse un sourire. Il a hâte de faire sa connaissance, porter un jugement sur cette personne qui partage la vie et le cœur de sa sœur aînée. Il ne pensait pas qu'elle allait s'ouvrir, lui dévoiler cela, après tout, ils ont encore du temps à rattraper. Finn quitte la chaise et il va prendre l'argent qui traîne sur le bord du comptoir qui sert à payer la pizza. « Au fait, c'est papa qui t'a avertie que j'allais venir m'installer en ville ? Parce que j'ai reçu pratiquement à la dernière minute son message disant qu'il voudrait que je m'installe chez toi. Tu as accepté seulement parce qu'il te l'a demandé et que je suis ton frère ? » Il tourne la tête vers Abby. Il était censé faire cela à l'improvise, sans repères, sans personne. Finn avait accepté de s'installer parce qu'il n'avait nulle part où aller et qu'il avait surtout envie de revoir sa sœur. Il restait tout de même curieux de savoir si leur père l'avait forcé à accepter et si c'était par envie qu'elle le faisait. Il joue un peu avec la monnaie. « Au fond, on n'est pas si proche.. » Finit-il par lui avouer, le cœur battant à toute vitesse. Ça l'attriste, mais il le dit d'une façon normale, même s'il a cette petite boule dans le fond de sa gorge. Il ne préfère pas montrer ses sentiments vis-à-vis tout cela.

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Finn & Abby Llewellyn

S ’il y a bien une chose à laquelle Abby avait toujours tenu, c’était sa liberté, son indépendance. Elle aimait pouvoir faire ce qu’elle voulait, quand elle voulait et comme elle le voulait. Personne, dans sa vie, n’avait jamais vraiment été capable de lui dicter sa conduite – hormis peut être son frère ainé, qui savait la calmer quand elle dépassait les bornes. Sa vie n’était pas des plus stables. Des années durant, elle avait voyagé de compétition en compétition. D’abord dans son pays, puis en Europe, et finalement à travers le monde entier. Jamais, jusque là, elle ne s’était posée avec qui que ce soit. Jamais elle n’avait vraiment eu envie de se mettre en couple. Pour elle, un mec c’était un boulet à sa cheville, une corde au cou, et il était hors de question qu’elle change ses habitudes, bonnes ou mauvaises, pour qui que ce soit. Alors Cade, il n’était vraiment pas prévu au programme. Aucun mec n’était prévu au programme, ou en tout cas pas de manière durable. Et puis elle avait rencontré ce grand blond, cette espèce de casse-pieds qui lui non plus n’avait jamais su se poser avec qui que ce soit… Et elle s’était faite prendre au piège de leur petit jeu.

Pas qu’elle s’en plaigne. Non, clairement pas. Il était chiant, pourtant. Un véritable emmerdeur. Il était têtu, avait une passion inexplicable pour le sang et un métier bien glauque qui allait avec. Et puis il avait le don de lui faire péter les plombs mieux que personne. A croire qu’elle avait un côté un peu masochiste, parce qu’un an et demi après le début de leur petit jeu, elle en redemandait encore. Ils n’en faisaient pas tous un plat. Elle comme lui n’étaient pas fan de tout ce bazar d’étiquette, de couple officiel, sérieux, stable. Ils n’étaient pas non plus du genre à se faire de grandes déclarations romantiques. Ca leur convenait et même si certains les trouvaient bizarres, ils n’étaient pas prêts à changer leurs habitudes et gare à celui qui évoquerait la possibilité d’un mariage.

Il me rend surtout totalement dingue, parce qu’il est chiant. Mais je lui rends bien. S’il la rendait heureuse ? Elle n’avait pas à se plaindre. Si c’avait été le cas, elle aurait été voir si l’herbe était plus verte ailleurs depuis longtemps déjà. Tu finiras sûrement par le croiser. Avec eux, il ne fallait pas s’attendre à des présentations en grande pompe – encore moins face à son petit frère. Abby récupéra son téléphone et le glissa dans sa poche tandis que Finn se levait pour aller récupérer l’argent pour cette pizza qui se faisait attendre. Elle en était à se demander si elle n’allait pas attaquer les céréales, en guise d’entrée.

Elle en était à ces préoccupations existentielles lorsque son petit frère repris la parole, se lançant sur un sujet bien différent. Abby posa le regard sur Finn alors qu’il lui demandait, en résumé, si elle l’avait accueilli chez elle seulement parce que leur père le lui avait demandé. Abby ne répondit pas tout de suite, se contentant de le regarder, si bien que Finn ajouta Au fond, on n'est pas si proche… d’un ton qui se voulait détaché. C’était vrai. Ils n’étaient pas si proches, et c’était en partie parce qu’il était bien plus jeune qu’elle et leurs aînés. Mais c’était aussi parce qu’Abby avait passé tellement de temps à voyager qu’elle n’avait pas vu grandir son petit frère. Mais Abby n’était pas du genre à avoir besoin de voir les gens pour les porter dans son cœur. Elle aimait ses frères. Elle aimait sa mère, même si elle avait toujours voulu faire d’elle une jeune femme bien rangée, ce qu’elle n’était clairement pas. Elle aimait son père, même s’il avait tendance à l’exaspérer au plus haut point avec sa vision parfois trop traditionnelle des choses.

C’est vrai que j’ai pas toujours été très présente, hum ? dit-elle, pensive. C’était un fait, il était inutile de chercher à le nier. Ils n’avaient jamais eu l’occasion d’être proche et la faute lui revenait. En effet, Papa m’a appelée quand tu lui as dit que tu comptais venir t’installer ici. Maman était inquiète et même s’il l’aurait jamais avoué, lui aussi. Ca les rassurait de savoir que tu serais pas à la rue en arrivant. C’était inutile de lui mentir au sujet de ce coup de fil. De toute façon, malgré ses nombreux défauts, Abby n’était pas une menteuse. C’était même plutôt l’inverse. Mais j’ai pas accepté parce qu’il me l’a demandé. T’es mon petit frère, Finn, t’es toujours le bienvenu, aussi longtemps que tu le souhaiteras, au même titre que les deux autres… Même si vous seriez gentils d’éviter de débarquer tous les trois en même temps, on risquerait de se marcher dessus. plaisanta-t-elle, parcourant du regard son studio. Non, ils n’y aurait définitivement pas de place pour toute la fratrie Llewellyn dans cette boite à chaussures.

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Abby&Finn

Finn sourit en l'écoutant parler de Cade. Sûrement que oui, qu'il finirait par le croiser, la ville semble assez petite pour ça et maintenant qu'il connaît sa tête, il le remarquera peut-être un jour dans les rues d'Island Bay. Il joue avec la monnaie pour la pizza, ça se fait attendre, son ventre commence sérieusement à creuser la réserve de sucre, mais rien n'y fait, il a toujours aussi faim. Il se demande si c'est comme aux États-Unis, après une demi-heure, le repas est gratuit. Ça lui manque ses vacances, ses explorations qu'il faisait en visiter le pays, c'est un peu le but recherché ici, s'aventurer, changer d'air, voir de nouvelles choses. La Nouvelle-Zélande a bien des choses à offrir, il compte bien en profiter, à sortir son appareil photo pour capturer chaque instant de ce voyage. Enfin, on ne peut pas dire que c'est un voyage, plutôt une installation, mais c'est plus intéressant de dire que ce n'est qu'une aventure qui l'attend, parmi tant d'autres qui suivront sûrement.

C'est en pensant à son départ de la petite ville qui est Dolgellau, qu'il se questionne sur l'acceptation de l'hébergement d'Abby. Certes, ils sont du même sang, mais il connaît des gens beaucoup mieux que sa fratrie, c'est presque inquiétant. Il sait qu'être le dernier, qu'avoir autant d'écart, ce n'est clairement pas facile pour tous. Elle affirme même ce qu'il vient de dire, ou en tout cas, elle semble pensive à ce sujet. Finn se doit juste de poser la question, de comprendre, de savoir le pourquoi du comment. Il est évident que ses parents avaient dû la mettre au courant de son départ. Rien d'étonnant finalement. Il pensait quand même que ses parents allaient le laisser se débrouiller, comme le font les scouts dans la forêt. « Je pensais qu'ils avaient plus confiance que ça en moi. » Le ton de sa voix ressemble à quelqu'un de déçu, c'est un peu le cas, mais il ne préfère pas se plaindre davantage. C'est du passé, il n'est plus à ce stade. Il hausse légèrement les épaules en l'entendant lui parler d'eux, de leurs inquiétudes. Ça ne lui donne pas envie de retourner là-bas, mais c'est vrai qu'il est touché par cela, ce sont ses parents, ils l'ont élevé. Il est arrivé sur un coup de tête, sans savoir où il allait loger, ce qu'il allait manger pour le repas du soir, du lendemain, ce qu'il allait faire dans les mois suivants. Il est juste arrivé comme une fleur, avec ses bagages et son désir de respirer un nouvel air. Finn sourit à sa dernière remarque. Tout le monde sur le plancher, ça serait un peu bizarre d'être tous réunis dans la même pièce, il ne souvient pas beaucoup de ses moments en famille, de ses dîners où ils étaient tous réunis pour un bon repas. En parlant de repas, la sonnette résonne dans le studio. Il agrippe l'argent et il se rend à la porte pour payer la nourriture, le livreur, il ferme la porte pour ensuite se diriger à la cuisine où il dépose le tout. « Je pense chercher un appartement bientôt. Je ne sais pas où et quand, mais c'est en cours. » Enfin presque. Il n'a pas encore regardé les annonces, mais il le fera sûrement dans les prochains jours, ou même sur internet, on trouve pratiquement de tout. « Aussi, je ne voudrais pas être traumatisé le jour où je te trouverai avec Cade en pleine action. Je me crèverais sûrement les yeux ce jour-là. » Dit-il en se mettant à rire. Ouais, il n'est pas si innocent que ça, mais quand même, voir sa famille nue, il y a de quoi à l'être. Il ouvre une boîte et il sert une part de pizza, qu'il s'empresse de mettre dans sa bouche.

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Finn & Abby Llewellyn

Q uelque part, ce que Finn faisait, Abby l’avait fait avant lui. Prendre son indépendance, loin des parents. Partir à l’autre bout du monde sans le moindre projet concret, sans logement, sans emploi... Elle était passée par là elle aussi, même si son choix n’avait pas été porté par les mêmes raisons. Son indépendance, elle l’avait déjà longtemps avant de s’installer en Nouvelle-Zélande et le monde, elle l’avait vu en long, en large et en travers. Mais quand elle avait débarqué, elle n’avait rien d’autre que la valise qu’elle avait emmenée avec elle pour sa compétition. Autrement dit, elle n’avait pas grand-chose, puisqu’elle n’était pas du genre à remplir douze valises d’objets et fringues inutiles juste au cas où. Et au final, elle ne s’en était pas si mal sortie que ça. Elle avait ses entraînements, ses compétitions, comme avant. Elle avait un petit boulot. Elle avait ses sponsors et les corvées que ça impliquait. Elle avait un appartement, certes petit mais qui lui suffisait amplement. Et puis elle n’était pas restée bien longtemps, elle avait rapidement trouvé des amis, elle était même en couple, elle qui ne l’avait jamais vraiment été auparavant. Alors l’un dans l’autre, ce changement de vie lui avait plutôt réussi. Il n’y avait pas de raisons pour qu’il n’en soit pas autant pour Finn, même si faire rentrer cela dans la tête de leurs parents ne serait pas une mince affaire. C’avait déjà été difficile de laisser leur seule et unique fille partir à la conquête du monde seule, alors le petit dernier, n’en parlons même pas.

Je pensais qu'ils avaient plus confiance que ça en moi, se lamenta Finn, visiblement déçu du manque de confiance de leurs parents. C’est pas qu’ils ne te font pas confiance, Finn. Mais t’es le bébé de la famille. Ils ont déjà perdu un fils… Alors ils s’inquiètent. Abby doutait franchement que quoi que ce soit puisse être capable d’empêcher leurs parents de s’inquiéter. La perte de l’aîné de la famille était encore fraîche pour tout le monde et à la seule mention de ce drame, le cœur d’Abby se serra. Elle fut donc soulagée lorsque la sonnette retentit, annonçant l’arrivée de leur diner. Finn fila réceptionner la pizza, ce qui permis à Abby de mettre de côté cette pensée, son estomac qui grognait déjà reprenant le dessus. C’est que ça mange, ces bêtes-là !

Je pense chercher un appartement bientôt. Je ne sais pas où et quand, mais c'est en cours, lui annonça Finn, en revenant, la boite entre les mains. Abby balaya ses paroles d’un geste de la main, comme pour lui faire comprendre que rien ne pressait. De toute façon, maintenant qu’elle avait à manger sous le nez, elle se moquait bien de leurs petits soucis de logement. Elle pourrait très bien y penser une fois qu’elle aurait l’estomac plein ! Aussi, je ne voudrais pas être traumatisé le jour où je te trouverai avec Cade en pleine action. Je me crèverais sûrement les yeux ce jour-là. Abby n’était pas pudique, loin de là, mais il est vrai qu’elle n’avait pas particulièrement envie de se faire surprendre sous la couette avec son mec, par son petit frère. Pas du tout, même. A ton avis, pourquoi je l’ai jamais ramené ici depuis que t’es là ? lui fit-elle remarquer en attrapant une part de pizza avant de croquer dedans à pleines dents. De toute façon, on est plus souvent chez lui. C’est plus grand que ma boite à chaussures. Le reste de sa part dans la main, Abby se leva de son siège pour aller chercher à boire dans le frigo. Si t’étais pas là, j’y serais sûrement à l’heure qu’il est d’ailleurs, affirma-t-elle, déposant verre et boissons sur la table avant de reprendre place sur sa chaise.

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Le seul soutien qu'il pouvait avoir, c'est celui de ses amis, sûrement même celui de son unique sœur. Alors, oui, savoir que ses parents, qui ont sûrement dû faire des folies dans leurs jeunes années, ça le rendait malade de ne pas avoir leur confiance. Il n'ajouta rien à cela. Finn ne désirait pas s'étaler sur ce débat, après, leurs parents n'étaient pas pour entendre la cause. Mais il pouvait déjà entendre leur père faire un discours sur l'insouciance, la maturité et d'autres sujets auxquels il lèverait sûrement les yeux vers le ciel avant de sortir de la pièce. Il n'eut pas le temps d'y songer plus longtemps, qu'il se leva pour répondre à la porte. Enfin. La pizza. Il n'attendait que ça, remplir son ventre qui commençait sérieusement à jouer une drôle de musique, à force de faire des petits bruits. En revenant à la cuisine, il était question qu'il se trouve un logement pour lui, en tout cas, c'est une chose qu'il invoquant ainsi. Il s'empressa de manger, concentrer à sa nourriture, les yeux rivés sur la boîte en carton. Sa sœur répliqua à ses dernières paroles que c'était la raison pour laquelle il n'était pas venu, enfin, il est la raison, il est de trop. C'est ce qu'il commence à croire. Il se contente de froncer les sourcils, la suite n'est pas mieux, il est définitivement vexé par ses mots. Il dépose la croûte sur le carton, pas de façon délicate, ni violente d'ailleurs, mais on entend le son du reste sur la boîte. « Ben génial, tu peux partir maintenant que tu as mangé, non ? Je veux dire, ce n'est pas comme si j'étais un pauvre animal ayant besoin d'attention particulière. » Il tente de mâcher ses paroles, ne pas avoir l'air frustré, mais au final, ça se voit assez, il a ses paroles coincées dans la gorge, la pizza ne peut même pas passer par-dessus cela.

Si Finn n'est pas du genre à être très rancunier, des souvenirs continuent de le hanter, comme l'absence d'Abby après la mort de leur aîné. Il aurait voulu qu'elle soit plus présente, au lieu de le laisser dans sa peine. Ils auraient pu affronter cette terrible épreuve en famille. Il lui en veut toujours. Et ce qu'elle est en train de lui dire, ça confirme le fait qu'il la toujours à travers la gorge. On ne peut pas revenir en arrière, certes, mais la douleur est resté, les souvenirs aussi. Ça va juste finir par le ronger davantage, à le rendre distant face à sa sœur. « Je me suis toujours demandé ce qui se serait passé, si tu n'avais pas claqué brutalement la porte. Tu t'es jamais demandé ? » Il se met à rire jaune. Ouais, il en a gros sur le cœur. « Mais c'est vrai, que tu ne penses qu'à toi, n'est-ce pas ? Ne réponds même pas, de toute manière, tu viens d'en faire la démonstration. » Finn sort de la cuisine, mais étant donné que c'est un studio, il ne peut pas aller bien loin, ni claquer de porte, enfin, peut-être à part celle de l'appartement. Il s'assoit sur le canapé, les yeux fixant la télévision toujours allumé.

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Finn & Abby Llewellyn

L ’impulsivité d’Abby n’était un secret pour personne. Abby prenait des décisions sans réfléchir, agissait sur un coup de tête plus souvent que de raison, et s’emportait facilement. Elle avait aussi tendance à parler d’abord, et à réfléchir après. Le tact, la diplomatie, ce n’était clairement pas son truc et si d’un point de vue physique elle était loin d’être maladroite, elle ne s’imaginait pas toujours que des paroles innocentes à ses yeux puissent être mal interprétées. Ce devait être un cadeau de son père, qui avait lui aussi le don de se montrer blessant sans vraiment le vouloir. Abby n’avait jamais voulu laisser entendre à Finn qu’il était de trop. Lorsque son père l’avait appelée pour lui annoncer l’arrivée imminente de son petit frère en Nouvelle-Zélande, elle n’avait même pas eu à réfléchir avant d’accepter de l’héberger. Certes, son appart’ était petit, mais ils s’arrangeraient. Et oui, partager son studio impliquerait de bouleverser un peu ses habitudes, mais elle le faisait de bon cœur. De toute façon, elle n’aimait pas la routine. Alors si ses paroles avaient été maladroites, elles n’étaient pourtant en rien un reproche. Bien sûr qu’elle n’avait pas envie de se faire surprendre dans les bras de son petit ami par son petit frère, mais ce n’était pas pour cela qu’elle n’avait pas ramené Cade chez elle ces derniers temps. Ils étaient seulement mieux chez lui, moins à l’étroit. Et si elle n’avait pas filé directement chez Cade, ce n’était pas parce qu’elle estimait devoir rentrer pour garder un œil sur son cadet, ou parce qu’elle s’estimait obligée de passer du temps avec lui. C’était seulement parce qu’elle avait rarement eu l’occasion de passer du temps avec Finn, et que c’était justement l’occasion de rattraper un peu le temps perdu. Si dans sa tête c’était logique, Finn semblait avoir tout compris de travers.

Ben génial, tu peux partir maintenant que tu as mangé, non ? Je veux dire, ce n'est pas comme si j'étais un pauvre animal ayant besoin d'attention particulière. Abby ouvrit des yeux ronds comme des billes, s’interrompant alors qu’elle s’apprêtait à croquer à nouveau dans sa part de pizza, la bouche déjà à moitié ouverte. Pardon ? Qu’est-ce qu’il lui prenait ? Elle était loin déjà la conversation tranquille qu’ils avaient entretenue jusque là, et Abby avait un peu du mal à imaginer comment ils en étaient arrivés là. Elle avait beau se repasser le film à l’envers, elle ne comprenait pas vraiment ce changement d’attitude de la part de son petit frère. Je me suis toujours demandé ce qui se serait passé, si tu n'avais pas claqué brutalement la porte. Tu t'es jamais demandé ? poursuivit-il, sous le regard incrédule d’Abby. Elle en avait oublié sa part de pizza, qui pendait lamentablement dans sa main. Mais c'est vrai, que tu ne penses qu'à toi, n'est-ce pas ? Ne réponds même pas, de toute manière, tu viens d'en faire la démonstration. Sur ces mots, Finn se leva, délaissant leur repas pour aller s’installer dans le canapé pour aller bouder devant la télévision.

Abby balança son morceau de pizza dans la boite sans y accorder davantage d’attention. L’attitude de son frère lui avait coupé l’appétit. Certainement pas pour longtemps, parce qu’il en fallait plus que ça pour lui faire passer l’envie de manger, mais tout de même, elle en avait oublié son repas et quand on connaissait Abby, ce n’était pas rien. Il se serait passé exactement la même chose. Il serait toujours mort, on aurait juste été plus nombreux à déprimer, tous en chœur ! Charmant tableau familial, n’est-ce pas ? balança-t-elle, sarcastique, tout en se levant de sa chaise pour faire face à son petit frère. Et puis t’étais pas tout seul, aux dernières nouvelles, alors je vois pas pourquoi tu viens me casser les pieds avec ça. S’il y avait bien un sujet à éviter avec Abby, c’était son frère. Elle n’en parlait jamais, et si elle devait le faire, c’était quand elle l’avait décidé, et pas autrement. C’était le sujet sensible, le seul certainement, et le meilleur moyen de la braquer, de la mettre en colère. Parce que la colère, c’était tellement plus facile à gérer que tout le reste. Et puis qu’est-ce qui te prends, hein ? Quand est-ce que j’ai dit que c’était une corvée de t’avoir ici ? Tu te montes la tête tout seul, ça tourne pas rond chez toi !

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Ce n'est clairement pas dans ses habitudes de chercher les embrouilles, de lancer une conversation qui pourrait mener à la dispute. Et si c'est le cas, alors, il n'en a pas conscience. Il ne pensait pas faire cela avec sa sœur. Après tout, ils ont besoin de ce rapprochement, après ses années perdues, ses années où ils n'ont pas été très proches, ces jours où Finn se sentait seul, étant le dernier, le plus jeune de la fratrie. Il sait à quel point la mort de l'aînée touche Abby, cela le touche tout autant, mais ça reste son frère aussi. Mais là, il a pris cette brèche que sa sœur a ouverte, sûrement sans le vouloir, pour s'exprimer, pour une fois. Il en a besoin de ça, de s'exprimer, d'ouvrir sa bouche pour dire ce qu'il ressent. Pour le moment, il a l'impression d'être de trop, de l'empêcher de vivre sa vie de couple. Or, cela n'a jamais été son désir, d'ailleurs, si ses parents lui avaient fait confiance, peut-être serait-il dans son propre logement. Il n'aime pas être ainsi, déverser sa colère, mais ça sort, en tout cas, en partie, parce qu'il attend une réaction, qui ne vient pas à l'instant de ses paroles. Ses fesses, il va les poser sur le canapé, pour respirer, pour se calmer, se dire que ce n'est rien, il se fait juste des idées. Il roule les yeux à ses paroles tout en secouant la tête. Ouais, mais au moins, ils auraient été ensemble, mais ça, il le garde pour lui. Finn lève le regard vers sa grande sœur qui s'approche de lui. « Ouais, super, j'étais avec des parents qui me mettaient une pression de fou pour devenir l'enfant parfait, après ton départ, la mort de notre frère, sans compter de l'autre frère. Ouais, j'étais super bien entouré hein. Tu devais être bien dans ton monde sans te soucier de cela. » Il soupire. Il ne voit pas pourquoi il en rajoute une couche. Il se sent juste obligé de répliquer, de se justifier, de faire comprendre qu'elle n'est pas la seule avoir été peinée, d'avoir eu du mal avec ça. Finn lève du canapé pour lui faire face. « C'est sûrement de famille ça, hein. » Ça ne tourne pas rond chez lui, peut-être, mais aux dernières nouvelles, ça ne vient pas uniquement de lui, c'est de famille, ils ont tout ce petit côté fougueux. Il se recule de quelques pas. « Tu sais quoi, laisses tomber. Je suis sûrement fou, tu as bien raison. Tu ferais mieux d'avertir notre père, le dernier fils a perdu la tête. Il n'y a plus d'espoirs pour la famille. » Il exagère grandement ses mots, ses gestes de mains. Il ne préfère même pas s’obstiner davantage. Il n'aime pas cette conversation avec elle, mais il n'a clairement pas l'intention de s'excuser, pas maintenant, pas aujourd'hui, il est fier, comme son père, comme sa sœur probablement.

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