We're not friends and not enemies. We're just strangers with some memories. - Ethan Alderan

Je suis toujours en froid avec ma mère, je n’arrive pas à trouver le courage pour l’affronter et je n’arrive pas non plus à réfléchir à une manière pour aborder le sujet. Je ne sais pas non plus si je devrais contacter Kenlee, lui dire que je sais tout. Mais encore une fois, je ne peux rien faire.
Je m’amuse à regarder mon journal, en y ajoutant quelques photos que j’avais prises il y a peu, en écrivant de petits mots qui me rappelleraient mon humeur quand je les reverrai une dizaine d’année plus tard.
Je feuillète ce gros livret qui date depuis belle lurette -je devrais d’ailleurs songer à en créer un nouveau-, mais au fil des pages, je m’arrête sur une, remplie de photos avec Ethan. Je ne me rappelle plus de la dernière fois où je l’ai vu. Prise de nostalgie, je caressais ce papier, ses cheveux bouclés me manquaient, son sourire, les blagues pourries qu’on se disait, nos délires, nos heures passées sur les vagues… Je me demande ce qu’il est devenu. Je ne sais pas si je lui en veux toujours, il m’a quand même viré de sa vie comme une vieille chaussette même si, en grande partie c’était moi qui avait coupé contact, mais c’était pour son propre bonheur en dépit du mien.
Je tourne encore les pages, sachant que je ne devrais pas me remuer le couteau dans la plaie, mais la tentation n’était pas de cet avis. Ainsi, je tombe sur les dernières photos.(*) La dernière photo avec lui. (**)  Il avait déjà grandi à cette époque et était un très bel homme. On sentait aussi de la distance déjà. Je me rappelle de comment je me sentais quand sa petite amie prenait de la place dans sa vie, comment il commençait à oublier nos petits rendez-vous de rien du tout, comment il me disait qu’un simple « salut, ça roule ? » quand on se croisait et qu’il était avec elle. Ça me déchirait le cœur.
Je ferme le carnet aussitôt que je sentie une petite larme tomber tout au long de ma joue, je ne la voyais pas venir, je ne pensais pas que j’étais toujours aussi affectée par son absence. Faute d’hormones peut-être ? Très drôle, c’est ainsi que j’ai pris l’habitude de justifier mes faiblesses. Sauf que, je ne crois pas que c’est le cas pour cette fois. Je dois dire que c’est une période où je me sens assez seule, j’ai deux mamans mais je ne ressens la présence d’aucune des deux. Tawny est occupée, et même si elle ne l’était pas, elle me dépassait d’une dizaine d’années, je n’allais quand même pas la déranger avec mes émotions et sentiments d’adolescente mal-aimée.
Une forte envie de contacter Ethan me pris soudainement. Je veux savoir, si lui, il va bien. Je veux qu’il me parle de sa vie, comme il le faisait autre fois pour me changer les idées, je voudrai savoir s’il a réalisé son rêve à l’université. Mon égo m’a retenu pendant toutes ces années, mais je pense qu’il est temps que je fasse un pas vers lui. Je ne réfléchis pas plus longtemps sinon je risque de jeter mon téléphone sans rien faire, mais ma conscience me cris d’écrire ce stupide SMS.
Je cède enfin, après quelques minutes supplémentaires de contemplation de ses photos.
« Hey, je sais pas si tu as gardé ton numéro, mais c’est moi, Ailina. Si t’es bien Ethan,… »
Je m’arrête au milieu. Qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui dire. J’ai changé mon numéro, il a sûrement dû m’oublier. Je décide quand même de retenter. Je ne perds pas grand-chose de toute façon. Si je reçois un vent, je me sentir blessée quelques temps puis je vivrai bien, je m’y suis habituée et dans le cas où son numéro a été réattribué (fort probable) c’est encore mieux ! On dira que je n’ai pas zappé mon égo.
Rassurée, je recommence la rédaction du foutu message.
« Hey, c’est Ailina. Je sais pas si tu as gardé ton numéro mais voilà. ^^’ Je voulais avoir de tes nouvelles, ça fait longtemps que je ne t’ai pas vu dans le coin… Désolée si je te dérange et, tu n’es pas obligé de répondre. X) Enfin voilà, désolée x) bonne journée ! »

J'ai jeté le téléphone après avoir reçu l'accusé de réception, mon cœur battait la chamade, le regret me rongeait. Je n'aurai peut-être pas dû le contacter. Finalement j'étais culottée d'envoyer ce SMS après toutes ces années où j'avais disparu, culottée de m'incruster dans sa vie au risque de lui causer des problèmes avec sa fofolle de petite amie...
Pour me changer les idées, j'allais faire couler de l'eau chaude dans la baignoire histoire de me détendre, ça faisait une éternité que je ne m'étais pas offerte ce petit plaisir.
En retournant dans la chambre pour prendre les serviettes, j'entendis le son de notification retentir. Malgré moi, je me jette sur le lit pour le lire. Ethan ! Je me surprends à me mordiller la lèvre retenant un sourire niais. On s’est échangé deux trois messages qui devenaient de moins en moins hésitants. Sans trop réfléchir, je lui proposa qu’on se voit autour d’un bon sandwich comme au bon vieux temps, chose qu’il accepta directement à mon plus grand plaisir, et cerise sur le gâteau, il avait rompu avec son Adélaïde.
En proposant de venir me chercher à la maison, j’ai failli accepter jusqu’à ce que je me rappelle que ma mère était là. Je ne pourrai savoir quelle serait sa réaction en le voyant débarquer chez nous après quatre ans, quand elle a su qu’on avait coupé contact elle était vraiment furieuse  contre lui, sauf que là, on est en froid et je n’ai aucunement envie qu’elle commence à l’attaquer où à dire quoi que ce soit alors que déjà moi, je ne la supporte pas. On s’est donc donné rendez-vous directement au McDo. J’étais plus qu’excitée, j’avais l’impression que toute la rancune que j’avais envers lui s’était évaporée.
Je regarde la petite horloge plaquée sur un des murs de ma chambre et me rend compte qu’il ne me reste qu’une petite heure pour me préparer. Rapidement, je vais dans la salle de bain en changeant le programme du bain bien chaud vers une douche ultra rapide. Et 20 minutes après, me voilà devant la tâche la plus difficile pour une jeune fille : quoi porter ?
Je n’ai jamais vraiment oublié Ethan et mon amour pour lui n’était qu’endormi durant ces années, j’ai toujours eu envie de le séduire –discrètement- durant cette période, je faisais en sorte d’être toujours présentable quand je savais qu'on allait inévitablement se croiser mais cette fois, c’est différent. Déjà je n’ai pas envie de me faire jolie, mes hoodies me satisfont pour le moral que j’ai. D’un autre côté, je n’ai pas envie qu’il voit que je me suis "délaissée", mais je n’ai pas non plus envie qu'il croit que je me fais belle pour lui.
UGH.
Après une bonne quinzaine de minutes, j’opte pour la sobriété : ma jupe en cuire noire passe-partout, un haut blanc et des baskets. (*)Pour le maquillage, j’ai été gâté par la nature, mon teint n’avait pas besoin d’être travaillé, je ne mis donc que du mascara et du baume à lèvres. Il était déjà 11h53, heureusement que le point de rendez-vous n’était pas trop loin de chez moi.
Ne voulant pas adresser la parole à ma mère et ne voulant pas non plus qu’elle s’inquiète et me bombarde d’appels et de messages, je lui laisse un mot sur le plan de travail de la cuisine avant de sortir. « Je mange au McDo. Ne m’attend pas. »

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Une fois sur place, je stressais comme pas possible, mon cœur battait toujours très fort j’avais l’impression qu’on l’entendait. Je ne voulais pas qu’Ethan me surprenne mais je voulais avoir une sorte d’avance sur lui. Je balayais l’endroit discrètement et là, je le vis assis à regarder son téléphone, ma foi, il était devenu trois fois plus beau ! Je ne sentais plus mon cœur battre et je n’entendais plus le brouhaha de la clientèle, c’est comme si j’étais sous l’eau. Je m’avançais vers lui, en essayant d’avoir des pas assurés et un visage … normal.
« Hey ! » Dis-je, tout sourire. « Je suis désolée pour le retard, c’était un peu soudain je ne m’étais pas vraiment … enfin bref. » Je commençais déjà à stresser et à bafouiller les mots. Je regardais mes doigts honteuse en m'insultant intérieurement et en essayant de me calmer et d’arrêter ce stupide sourire niais. Je finis par prendre une profonde inspiration, je relève la tête et le regarde droit dans les yeux, sûre de moi.
« Tu vas bien ? Ça fait vraiment un bail ! »