old memories vs new feelings (tawan#10)

Ce mec, Greg, est sympa mais je suis pas très à l’aise avec cette sensation d’être comme une sorte de cible pour lui. Peut-être parce que je ne sais que trop bien ce qu’il cherche et de toute évidence il ne l’obtiendra pas. Je ne suis pas en confiance, et je n’ai pas le goût à la séduction ce soir. C’est un peu étrange d’ailleurs parce que je me sentais bien et plutôt de très bonne humeur avant qu’il ne fasse son arrivée et que Tawny s’éclipse pour laisser le champ libre à son ami. Clairement ça manquait de subtilité. Je fausse compagnie au jeune homme en prétextant un besoin de revoir mon maquillage, l’argument futile par excellence mais il n’est pas censé savoir que ça ne me ressemble pas. Alors que je ressors des toilettes, fallait bien évacuer les punch consommés, je me retrouve face à Tawny ou plutôt son reflet et elle a l’air surprise de me voir là. Je me renseigne sur cet appel qu’elle a reçu, j’ai l’habitude que ça soit annonciateur de son départ et je plaisante un peu là dessus. Etonnamment elle me donne raison me rendant mes clés de voiture après que j’ai fini de me sécher les mains. En fait elle prend ça au sérieux, pensant peut-être que je veux partir… a moins que rentrer soit réellement sa volonté. Quoi qu’il en soit je me contente d’un léger sourire et d’un hochement de tête avant de la suivre. La brune est étrangement silencieuse, prenant ma main alors que nous nous frayons un chemin parmi le reste des invités, elle ne prend même pas la peine de saluer quiconque. Ok… elle a l’air carrément pressée de partir en fait. Je ne pose pas de questions, ne cherche pas à comprendre de toute façon elle ne m’en laisse pas vraiment la possibilité.
Une fois à l’extérieur elle s’empresse de sortir une clope, m’en proposant également mais je décline son offre. « Non là bas. » répondis-je à sa question tout en désignant la zone où je me suis garée, là où tout bêtement y’avait de la place quand je suis arrivée. Je ne sais pas trop comment interpréter l’attitude de Tawny, même pas si je dois le faire en fait. Mais j’y peux rien, ça me laisse perplexe son changement soudain de comportement, je suis sûre que ce coup de téléphone n’était pas si anodin que ça. Je bidouille un peu avec mes clés dans mes mains, jusque là y’avait pas eu un seul moment bizarre, la soirée aurait pu parfaitement se conclure mais un truc cloche je le sens même avec, peut-être, un verre de trop à mon actif. Elle me remercie pour la soirée, je la sens sincère mais ça n’enlève pas tout à l’étrangeté de l’ambiance. Je lui souris à mon tour « Moi aussi, c’était cool de voir le vieux toi. » j’échappe un rire « Enfin la jeune toi en fait… mais d’une autre époque. ». Je hausse les épaules « Par contre ton pote a cassé l’ambiance on dirait. » l’alcool ça désinhibe et je ne fais que dévoiler ma pensée, sans détour. J’esquisse un sourire en coin « Ou alors c’est cet appel ? J’veux pas te retenir si t’es pressée de la rejoindre, tu courrai presque pour sortir de la salle. » je lâche un petit rire, j’émets des hypothèses, c’est tout. « La nuit est belle, t’aurais tort de pas en profiter. Et puis faut lutter contre les rides. » plaisanté-je avant de lui piquer la fin de sa clope pour tirer une latte dessus.

Je sais pas trop pourquoi je me comporte de cette façon, pourquoi d’un seul coup tout est devenu bizarre. Greg a sûrement fait remonter des souvenirs de ces années où il arrivait à séduire les filles qui me plaisaient vraiment. Et je crois que j’ai flippé, flippé qu’il fasse de Joan sa nouvelle proie, qu’il me la vole, même si elle n’est pas ma propriété. Tout allait bien avant qu’il arrive, tout allait bien et il a tout fait foirer. Alors maintenant que nous sommes là, j’ai la sensation que Joan a envie de partir, en même temps, je lui ai foutu dans les pattes un gars qu’elle connaissait même pas. Clairement, ça aurait été mieux pour tout le monde qu’il ne vienne pas. Tant pis. Je choisis de prendre le chemin du retour et une fois dehors, je me jette sur mon paquet de clopes, et avance en direction de la voiture de Joan, silencieuse, mal à l’aise. J’arrive quand même à lui dire que j’ai passé une bonne soirée. « Moi aussi, c’était cool de voir le vieux toi. Enfin la jeune toi en fait… mais d’une autre époque. » J’esquisse un sourire en la regardant, l’alcool a bel effet sur elle. Enfin j’ai la sensation que tout a un bel effet sur elle. « Par contre ton pote a cassé l’ambiance on dirait. » Ça c’est fait. Je me mords la lèvre inférieure et baisse les yeux, regardant mon pied qui joue avec les graviers. « Ouais, un peu on dirait… » La main dans ma poche, je n’ose même pas relever les yeux vers elle, me contentant de tirer sur ma clope et recracher la fumée. « Ou alors c’est cet appel ? J’veux pas te retenir si t’es pressée de la rejoindre, tu courrai presque pour sortir de la salle. » Cette fois je fronce les sourcils et relève la tête pour la regarder. De quoi elle parle au juste. « La nuit est belle, t’aurais tort de pas en profiter. Et puis faut lutter contre les rides. » Elle me pique ma clope et je lâche un rire un peu con à sa dernière phrase. « Mais nan, je dois rejoindre personne… » Lui dire la vérité ou pas lui dire la vérité ? « Greg est cool, j’ai vu que tu lui plaisais, j’me suis dit que ça pourrait être réciproque, j’voulais juste, j’sais pas… » Je hausse les épaules, les mains dans mes poches, et je la regarde tirer sur ma clope. J’sais pas, j’voulais juste la voir avec un gars pour essayer d’oublier à quel point j’ai envie de l’embrasser sans arrêt. « T’es sûre que t’es en état de conduire ? Nan parce que j’voudrais pas qu’il t’arrive un truc, que tu voies passer un cerf une biche et une tripotée de petits bambi… » Je lui souris, essayant de retrouver mon entrain, notre complicité, ce qui fait que je me sens bien, mais ça semble difficile ce soir. Je comprends pas pourquoi ça passe pas, pourquoi j’arrive pas à me mettre dans le crâne que bordel, elle aime pas les filles. J’ai vraiment un gros problème je me demande si je devrais pas aller voir un psy. Mon regard se perd à nouveau sur ses lèvres lorsqu’elle laisse s’échapper les volutes de fumée et je ferme les yeux plus longuement en souriant, me mordant la lèvre pour réfréner mes envies. « Tu devrais y aller avant que je fasse une bêtise… »

C’est silencieusement que nous quittons la fête. A vrai dire j’ai cru qu’on resterait un peu plus longtemps que ça, mais Tawny a l’air d’en avoir décidé autrement. Je suis son invitée, c’est elle qui décide. Elle me raccompagne jusqu’à ma voiture et finalement je ne peux me retenir de faire remarquer que l’ambiance a clairement changé. Je place Greg comme responsable de cela mais je crois qu’il n’y a pas que ça. J’essaye d’en savoir un peu plus, évoque une potentielle conquête que la brune doit aller retrouver rapidement et elle aurait tort de s’en priver. La nuit est encore longue après tout. J’arrive au moins à lui arracher un rire, j’ai pas l’habitude de la voir si sérieuse… ou mal à l’aise. Y’a peut-être des trucs que je ne sais pas sur son meilleur ami et elle, en tout cas j’en vois les conséquences sans rien comprendre. La recrue nie avoir un quelconque rencard avec une fille, je sais pas pourquoi mais je souris de l’entendre dire ça, probablement en ayant une pointe d’espoir que la soirée se finisse pas sur son départ précipité alors qu’on a passé une bonne soirée jusqu’ici. Je tire sur la fin de sa clope tandis qu’elle m’explique que Greg est un mec cool et qu’elle a pensé qu’on pourrait bien s’entendre lui et moi. Je lâche un petit rire « Ok. Un conseil si tu veux te reconvertir après l’armée surtout n’ouvre pas d’agence matrimoniale. » je dis ça avec légèreté, un peu euphorique grâce au punch que j’ai ingurgité durant la soirée. J’ai peut-être bu le dernier verre un peu trop vite, j’ai la tête très légère. Est-ce que ça se voit ? Tawny me demande si je suis apte à conduire, honnêtement j’en sais rien… je suis tentée de dire oui parce que j’ai pas franchement d’autre choix si je veux rentrer chez moi mais je hausse seulement les épaules « Bambi devrait apprendre le code de la route. On traverse pas une route comme ça sans faire gaffe… » je lève les yeux, jouant un faux air excédé.
Je tapote sur le toit de ma voiture comme pour la flatter « Mais t’en fais pas la voiture connaît la route. » je ris à nouveau, pas sûre que ça la rassure d’avantage. Je finis ce qui était à l’origine sa cigarette et écrase le mégot, je laisse la fumée s’échapper d’entre mes lèvres prête à sortir une nouvelle connerie mais me ravise, Tawny me conseillant de partir avant qu’elle fasse une connerie. J’arque un sourcil, intriguée « Quoi t’as peur que je sois le genre de témoin qui balance ? » je secoue la tête « Si t’as envie de crever les pneus de Paula vas y… je dirais rien. » ajouté-je à voix plus basse comme une confidence. J’esquisse un sourire en coin « Puis si t’as prévu une connerie drôle, j’en suis ! » l’alcool me rend toujours beaucoup plus espiègle, à un stade au dessus de mon état d’ébriété actuel je fais pas mal de blague. Pas toujours réussie et pas toujours super drôle… mais c’est mieux ça que de vouloir cogner sur tout le monde, non ? « Je jure que mes intentions sont mauvaises. » déclaré-je en lui offrant un regard plein de malice, dévoilant au passage mon attrait pour la saga Harry Potter. De toute façon Tawny me considère comme une gamine, alors un peu plus ou un peu moins.

Je dois avouer à Joan ce qui m’a poussée à jouer les entremetteuses entre elle et Greg. C’était idiot, surtout vu dans quel état ça m’a mise, mais je sais pas pourquoi j’ai imaginé qu’ils puissent se plaire tous les deux. « Ok. Un conseil si tu veux te reconvertir après l’armée surtout n’ouvre pas d’agence matrimoniale. » Je ris, je n’ai pu le retenir celui-ci. Elle a raison, je suis nulle pour jouer les meetic girl, et c’est pas plus mal au final. J’aurai vraiment mal vécu que Joan reparte avec mon meilleur ami d’enfance ce soir, ça m’aurait clairement foutu les boules. Pourtant, je ne suis pas tout à fait redevenue ‘normale’, il y a quelque chose qui cloche, ça doit sûrement venir du fait que j’ai un peu pris conscience de mon attirance et mon attachement envers elle, et clairement ça craint. Je tente de me foutre d’elle, gentiment, comme à mon habitude, mais je vois qu’elle a la réplique facile. Le punch sûrement. « Bambi devrait apprendre le code de la route. On traverse pas une route comme ça sans faire gaffe… » Je hoche la tête vivement, un mince sourire au coin des lèvres. « Je lui dirai la prochaine fois que je le croise. Promis. » J’essaie de prendre la température, vérifier qu’elle n’est pas trop pompette pour reprendre le volant. Ce à quoi elle me répond « Mais t’en fais pas la voiture connaît la route. » Oui alors ça c’est pas la réponse la plus rassurante qui soit, et ça me fait d’ailleurs plisser les yeux, dubitative quant à son état d’ébriété. Mais ce sentiment passe assez vite lorsque mon regard bifurque sur ses lèvres, et je lui avoue avoir envie de faire une bêtise. « Quoi t’as peur que je sois le genre de témoin qui balance ? » Je plisse les yeux, ne comprenant pas exactement où elle veut en venir. « Si t’as envie de crever les pneus de Paula vas y… je dirais rien. » Ok. Visiblement elle est la seule fille sur la surface de la Terre a pas comprendre que j’ai juste envie de lui sauter dessus. « Puis si t’as prévu une connerie drôle, j’en suis ! » Cette fois je ris, c’est pire que ce que je pensais. Mon côté casa nova en prend un coup, je dois bien l’admettre, mais elle me fait rire. « J’avais pas prévu une connerie drôle nan… » Clairement pas. « Je jure que mes intentions sont mauvaises. » dit-elle en levant la main en guise de sermon. « Eh miss Granger, va falloir penser à la gueule de bois demain matin ! » Je me fous un peu d’elle mais au milieu, j’avoue quand même que je sais très bien à quoi elle fait référence. Quoi, moi aussi j’ai lu et regardé harry Potter, elle est pas seule au monde hein ! « Bon sérieux tu fais flipper ! » Je ris et récupère ses clés de voiture qu’elle a encore dans la main, en m’approchant un peu trop près d’elle à nouveau. « Je te ramène. Pas question que tu prennes le volant, tu dis que des conneries, je suis sûre que tu vas parler toute seule, alors pour ton honneur, vaut mieux que je sois là pour pas que tu aies l’air totalement folle. » Je hoche la têt en voyant son air choqué. « Et en plus, ton tas de ferraille a bien envie de pelotter mes jolies petites fesses musclées ! Allez grimpe ! » Je lui fais signe de faire le tour, la pousse un peu et ouvre la portière conducteur pour m’y installer. La jeune femme ne bouge pas, un petit air boudeur sur son visage angélique. « Dépêche avant que Paula débarque et te propose de te ramener. A moins que tu préfères Greg ? » Je démarre le moteur de la voiture et attends qu’elle daigne faire le tour.

Tawny a visiblement prévu de faire une connerie et veut m’en exclure, ce à quoi je m’oppose. Je veux bien être sa complice si elle veut crever les pneus de Paula, cette nana ne m’a pas fait bonne impression du tout. Clairement je suis d’humeur à faire une connerie, et d’autant plus si c’est quelque chose de drôle. Cependant la brune tue mon espoir en déclarant que ce n’est pas dans ses intentions. Bon et alors elle parlait de quoi ? Je reste perplexe mais surtout assez peu convaincante quant à ma capacité à conduire pour rentrer chez moi. Je ris connement quand elle évoque la gueule de bois « N’importe quoi ! » tu parles ça va la convaincre ça, c’est sûr. « Je te fais flipper ? Grande première ! » déclaré-je avec un petit air fier, c’est quand même pas rien que de réussir à faire peur à la recrue Graham-Lewis. Enfin bon c’est surtout qu’elle s’inquiète un tout petit peu de mon retour, rien de plus. La militaire reprend mes clés sous mon regard faussement réprobateur je crois que ma promesse façon Harry Potter ne l’a pas convaincu « Des conneries ? T’es rabat joie en fait ! » dis-je avec un air outrée. Je fronce les sourcils à sa remarque concernant ses fesses « Modeste en plus de ça. Tu voulais juste glisser au passage que tes fesses sont musclées ? Sache que je ne crois que ce que je vois. » je me mets à rire en ignorant complètement son ordre de faire le tour tandis qu’elle s’installe côté conducteur. Je reprends contenance et fais mine de bouder « Tu l’as traité de tas de ferraille…. C’est pas gentil. » protesté-je pour défendre l’honneur de ma voiture. C’est clair le punch m’est bien monté à la tête.
Sous les menaces de Tawny j’affiche un air de défi « Oh parce que tu partirais sans moi ? » dis-je pour la challenger un peu. J’échappe un soupir et me dirige vers la porte côté passager pour monter à bord et à peine posée sur le siège passager je me mets à rire « Si mon père m’attrape dans cet état il va me tuer… » je pointe la recrue du doigt en m’approchant d’elle, sourire aux lèvres « Et toi aussi par la même occasion. » je passe mon pouce sur ma gorge « Couic. » je pars dans un nouveau rire « Tu sais conduire une voiture au moins ? ». Vu le regard qu’elle m’adresse j’en déduis que ma question est stupide, mais je crois qu’à cet instant tout ce que je peux dire est potentiellement stupide. « Oh j’ai même droit au regard de braise… » plaisanté-je en ironisant sur le regard que Tawny pose sur moi. Je dépose un baiser sur sa joue « C’est gentil de me ramener. Je préfère que ça soit toi que Paula ou Greg. » avoué-je avec cette spontanéité propre à mon état un peu alcoolisé. Le poing en avant et tapant sur le tableau de bord je me mets à rire « Allez c’est parti ! » je reprends à peu près mon sérieux tandis que la jeune femme nous met en route « Tu compte me border aussi ? » je souris mais affiche presque aussitôt une moue soucieuse prenant conscience d’une chose « Mais tu vas rentrer comment après ? Tu vas pas aller dormir sur la base quand même ? » j’ai pas envie qu’elle gâche son week-end pour moi. « Tawny arrêtes toi, tu vas pas me ramener… tu pourras pas rentrer après. » je sais pas ce qu’elle a en tête, ni même si elle a pensé à ça « Stop je te dis. » je pose une main sur son bras. Elle s’arrête à un feu rouge et je plonge mon regard dans le sien, attendant d’avoir la réponse à ma question. Elle a quoi en tête ?

Joan n’est pas dans son état normal, et ça me fait plus rire qu’autre chose. Je découvre une nouvelle facette de sa personnalité, ou du moins, un côté plus exacerbé de sa folie adorable. L’alcool aidant, elle part un peu dans tous les sens et manque clairement de précision pour comprendre jusqu’à mes sous-entendus. « Je te fais flipper ? Grande première ! » Je hoche un peu la tête, c’est vrai que c’est une première, mais vu son état, je ne voudrais pas qu’il lui arrive quoi que ce soit, je m’en tiendrai pour responsable, je crois que je n’ai pas besoin de me rajouter ça en plus des soucis que j’ai eu récemment. « Des conneries ? T’es rabat joie en fait ! Modeste en plus de ça. Tu voulais juste glisser au passage que tes fesses sont musclées ? Sache que je ne crois que ce que je vois. » « Oh fais attention à ce que tu dis jeune fille. Un passage de fesses musclées sauvages est si vite arrivé… » dis-je en rigolant sûrement autant qu’elle. J’aime bien cette nouvelle Joan, je ne pense pas que je pourrai l’aimer au quotidien, mais de temps en temps, je la trouve amusante. Après avoir faussement boudé à la charge de sa voiture, elle finit par prendre place du côté passager. « Oh parce que tu partirais sans moi ? » J’arque un sourcil. Non, elle sait bien que non, je suis le cul posé dans sa voiture, uniquement pour la ramener chez elle sans dégâts. Pas pour partir seule avec ladite voiture. Si encore c’était une lamborghini ou une aston martin, à la limite. « Si mon père m’attrape dans cet état il va me tuer…Et toi aussi par la même occasion. Couic. » Je la regarde me faire son petit numéro de comedia del arte et je ris, encore. « Raison de plus pour que je te ramène, plutôt que tu couic avant même qu’il t’ait vue dans cet état ! » Elle me demande si je sais conduire une voiture et j’arque un sourcil, perplexe, presque même un peu vexée. « Non, c’est bien pour ça que je juge que c’est moins dangereux que je te ramène plutôt que tu rentres toute seule avec tes deux litres de punch dans le sang ! » « Oh j’ai même droit au regard de braise… » Elle est intenable, mon dieu sortez moi de là ! Mais je continue de rire parce qu’elle est quand même beaucoup trop mignonne. « C’est gentil de me ramener. Je préfère que ça soit toi que Paula ou Greg. » « Ah ! Enfin un peu de reconnaissance ! » Elle est déchaînée. Voilà qu’elle tape sur la boîte à gants avant de rire, reprendre son sérieux et rire encore. « Tu compte me border aussi ? » « Pourquoi pas. » Rictus au coin de mes lèvres et nous prenons la route jusqu’à la base de Wellington où elle vit. « Mais tu vas rentrer comment après ? Tu vas pas aller dormir sur la base quand même ? » Ah non, ça je n’ai pas pour projet de dormir sur la base, c’est certain. « Tawny arrêtes toi, tu vas pas me ramener… tu pourras pas rentrer après. » Je souris, sans rien dire, j’aime bien quand elle se préoccupe de moi. « Stop je te dis. » appuie-t-elle en posant sa main sur mon bras. Je m’arrête au feu rouge et tourne la tête vers elle. « Voilà. Stop. » Petit sourire avant d’ajouter. « Je vais squatter dans ton lit, c’est la seule solution. Faudra juste que je parte demain matin avant que ton père soit levé c’est tout ! » Je hausse les épaules, essayant de masquer mon sourire et tourne finalement la tête vers la jeune femme avant de rire. « Mais je déconne, ça va t’inquiètes pas, je vais pas empiéter sur ton territoire, y’a déjà Capsule qui squatte, je sais ! » Je reprends la route, me laissant une seconde imagine dormir avec elle. Très mauvaise idée. « Nan, j’vais prendre un Uber pour retourner là bas chercher ma moto. Au passage j’vais p’tetre trouver une de mes ex qui voudra bien rentrer avec moi, surtout que j’suis toute seule dans ma grande baraque tout le week end… » Les yeux concentrés sur la route, je tourne à peine la tête vers Joan qui semble bien silencieuse depuis quelque secondes.

J’ai dit une tonne de connerie en un temps record, dévoilant à Tawny une facette de ma personnalité qu’elle ne connaissait pas encore. Ça la fait rire, autant que moi je ris de mes propres conneries et si j’étais un petit peu déçue que l’on parte si vite en fin de compte je suis ravie de la soirée. Sauf peut-être le fait de ne pas être capable de conduire pour rentrer chez moi, parce que ce n’était pas prévu et à vrai dire ce n’est pas mon genre de me laisser aller à boire alors que je sais que je dois rentrer. Heureusement la brune prend les choses en main, du moins le volant et nous nous engageons dans la direction de la base militaire. Malgré mon excitation dû à mon état je fais tout de même preuve d’une pointe de sérieux pour remercier la recrue de me raccompagner. Je lui suis reconnaissante de ne pas m’avoir laissé prendre le volant ou planter sur le parking comme une idiote sans solution de replie. Probablement que j’aurais conduit quand même, en roulant à trente à l’heure… sinon il me restait la solution d’appeler des amies qui n’habitent pas loin pour aller squatter chez elles. Je suis bête, c’est ça que j’aurais dû faire ! Et me faisant cette réflexion je prends soudainement conscience qu’après m’avoir ramené Tawny sera coincée, c’est en tout cas ce que je crois. Je la force à s’arrêter pendant que nous sommes pas encore sorties de la ville, ce qu’elle fini par faire à un feu rouge. Bon ok en fait elle m’a pas écouté moi, mais juste respecté le code de la route. La solution la jeune femme l’a déjà, squatter mon lit. Je reste perplexe, réfléchissant à cette alternative qui n’a rien d’infaisable, il est assez grand, mon lit. Et pour ce qui est de son départ avant le réveil de mon père je secoue la tête, elle va devoir se lever très tôt. La militaire fini par m’indiquer qu’elle n’est pas sérieuse, je hausse les épaules ça m’aurait pas dérangé et puis mon père par faire du bateau tôt demain matin.
Tawny me dévoile alors son vrai plan, prendre un uber se trouver une ex à ramener chez elle parce que de toute façon elle est seule tout le week-end. J’analyse ses paroles, je ne me rends même pas compte que je suis restée silencieuse jusque là, répondant seulement par la pensée. Va falloir que je bosse sur la télépathie. « Hum hum… T’as quand même un sens de la logique complètement merdique. » déclaré-je laissant un court silence s’installer puis de reprendre « On a passé la soirée à éviter tes ex et maintenant tu veux en trouver une qui voudra bien finir la soirée avec toi. » je la regarde « Et puis t’es toute seule chez toi et tu t’emmerdes à vouloir faire trente minutes de route pour me ramener jusqu’à la base, alors que je pourrais tout à fait dormir sur ton canapé. » je soupire, plutôt amusée « Zéro logique. ». Quoi que si elle n’a pas exprimé cette alternative c’est probablement pour une raison. Ah bah oui… l’ex qu’elle veut ramener. Evidemment. A moins qu’elle ai d’autres projets ? Un éclair de lucidité me traverse « Oh non je sais… » j’esquisse un sourire en coin « En fait t’as prévu d’organiser un after chez toi en profitant que la baraque est vide. » je lâche un petit rire « Et de toute évidence je ne suis pas invitée. C’est réservé aux 1912 et plus, c’est ça ? ». Je regarde par le fenêtre sur le côté mais les lumières qui défilent me donnent le tournis, mieux vaut que je regarde devant moi.

J’essaie de trouver une excuse, un plan d’attaque pour une fois que je l’aurai déposée. Après tout, je vais pas réellement lui faire croire que je compte dormir avec elle. Faudrait pas lui faire peur non plus. Je sais bien que les envies qui me traversent à son propos ne sont pas réciproques, la preuve tout à l’heure quand je lui ai parlé de faire une connerie, elle a même jamais pensé à ce que je puisse lui sauter dessus. C’est dire si je suis crédible, ou si elle est naïve. Ou les deux. « Hum hum… T’as quand même un sens de la logique complètement merdique. » Je fronce les sourcils en attendant la suite alors que la voiture redémarre au feu vert. « On a passé la soirée à éviter tes ex et maintenant tu veux en trouver une qui voudra bien finir la soirée avec toi. » Je me retiens de sourire, attendant la suite. « Et puis t’es toute seule chez toi et tu t’emmerdes à vouloir faire trente minutes de route pour me ramener jusqu’à la base, alors que je pourrais tout à fait dormir sur ton canapé. Zéro logique. » J’arque un sourcil, dubitative. « Attends attends Cendrillon, t’es en train de me dire que tu serais capable de découcher sans prévenir papa et maman ? » Je lui sors une tête choquée pour me foutre d’elle. « Merde alors, t’es plus rebelle que t’en as l’air ! » Je ne pouvais pas m’en empêcher, plus fort que moi. « Le punch te monte à la tête chérie, découcher c’est pas raisonnable pour les jeunes filles de bonne famille comme toi. » Nous continuons de rouler et je ne peux m’empêcher de penser à Joan dormir à la maison, dans le clic clac de la chambre de musique ou même dans mon lit. Merde ok faut que j’arrête ça. DE SUITE. « Oh non je sais… » Je sursaute, elle a presque crié là où c’est juste qu’elle vient de me sortir brusquement de mes rêveries ? « En fait t’as prévu d’organiser un after chez toi en profitant que la baraque est vide. Et de toute évidence je ne suis pas invitée. C’est réservé aux 1912 et plus, c’est ça ? » Je ris, bêtement, parce qu’elle me fait rire. « Voilà, un truc réservé, pas le droit aux enfants de moins de 25 ans tu comprends… je suis désolée c’est pas contre toi hein mais… » Je fais une petite moue désolée avant de la regarder un peu en souriant, taquine. « Nan mais en fait, c’est juste que pour entretenir ma jeunesse éternelle, rappelle-toi, une parte de jambes en l’air par semaine. Minimum. Là ça fait six jours je sens la ride qui arrive là… » Je pointe le coin de mon oeil avant de poursuivre. « Je t’aurai bien proposé de rester dormir à la maison mais je suis pas sûre que tu fasses l’affaire pour mon histoire de jeunesse éternelle… » Je la provoque, un peu, mais c’est sûrement pour l’entendre me dire que c’est mort. Ça m’éviterait peut-être de me prendre un vent un peu plus tard. Faut que je me fasse une raison de toute manière…

Je crois que le punch me donne des ailes, ou au moins l’illusion d’en avoir. Pleine de confiance je démontre à Tawny combien sa logique est pourrie, oubliant que j’ai face à moi, ou plutôt à côté présentement, la championne de la taquinerie et des répliques bien placées. Pourtant ce soir elle a été plutôt soft avec moi, se ramollirait-elle ? Quoi qu’il en soit on dirait bien que la brune reprend de sa verve et elle me cloue le bec avec cette histoire de découcher sans prévenir. Elle se fout de ma gueule et je lui adresse une moue boudeuse « Bien sûr que j’en suis capable. » mais le pire c’est qu’elle en rajoute une couche et pour toute réponse je lui tire la langue. On a vu plus mature comme réponse mais elle me prend pour une gamine de toute façon. La recrue n’a réussi à me calmer qu’un court instant, puisqu’après avoir réfléchi un peu j’émets une nouvelle hypothèse sur son programme pour la suite de la soirée, ou plutôt de la nuit. Une fête dans sa baraque puisque madame l’a pour elle toute seule. Le genre de fête à laquelle je ne suis bien évidemment pas invitée parce que trop jeune. Elle rit et me donne raison, je souris en secouant la tête « C’était si prévisible. ». Mais Tawny ne s’en tient pas là, revenant à nouveau sur son secret de jeunesse éternelle à savoir s’envoyer en l’air au moins une fois par semaine. Me précisant que ça fait déjà six jours, elle a peur que des rides ne viennent ternir son beau visage. Elle est vraiment obsédée par la jeunesse, ou surtout obsédée tout court ? Je ris l’esprit toujours aussi léger sous l’effet de l’alcool, mais ça ne m’empêche pas d’entendre la dernière remarque de la recrue.
J’arque un sourcil, interloquée par ses propos « De nous deux c’est de toute façon moi qui représente le plus la jeunesse. » répliqué-je du tac-o-tac, voulant lui rendre la monnaie de sa pièce pour s’être foutue de ma gueule un peu plus tôt. Elle peut bien faire toute les cures de jouvence qu’elle veut, elle aura toujours cinq ans de plus au compteur. Je me mets à rire « Je suis un remède trop puissant, t’es pas prête pour ça. Un trop gros bond en retour vers la jeunesse c’est un choc auquel tu n’es pas préparée. » dis-je sans vraiment avoir conscience des conneries que je balance. Enfin si je sais ce que je dis, ce que j’ai juste un tout petit peu perdu de vue c’est le sous-entendu dissimulé par la cure de jouvence en question. « Tu survivrais pas. » je lui lance un regard de défi puis hausse les épaules « Je te recommande plutôt une verveine et une bonne nuit de sommeil. » je ris encore un peu et regarde la route devant moi, je pense que cette fois c’est moi qui lui ai cloué le bec. Quoi ? Je peux au moins me bercer de cette douce illusion, le rêve est gratuit.

Elle me dit être capable de découcher. Très bien. C’est une information à garder bien que je ne sois pas sûre et certaine de ce qu’elle avance. C’est pas grave,c’est enregistré dans ma mémoire maintenant. Je continue de me foutre un peu d’elle, et la renvoie balader lorsqu’elle me parle de contre soirée. Plus encore que de ne pas avoir l’âge, elle a surtout pas l’étoffe de celle qui me fera grimper aux rideaux cette nuit. Remarque, heureusement que je ne lui dis pas de cette manière, elle serait capable de se taire pour une durée indéterminée, paralysée par le choc de mes paroles. Je la vois tellement comme une petite fille sage que j’ai presque du mal à l’imaginer dans les bras d’un mec en train de… bon ok. Stop ce genre de pensée, c’est pas le moment, en plus ça me dégoûte. Mais Birdy revient vite à la charge, déjà qu’elle n’a de nature pas la langue de sa poche, ne parlons pas de quand elle a bu plusieurs verre de punch. Note à moi même, ne plus jamais l’inciter à boire. Pas que ce soit désagréable de la voir dans cet état, mais ça me déstabilise plus qu’autre chose. « De nous deux c’est de toute façon moi qui représente le plus la jeunesse. » J’arbore un air choqué tout en tournant la tête vers elle. « Tu oses ? » Ça la fait rire cette andouille, mais j’aime tellement la voir rire, et plus encore la faire rire. C’est comme une petite victoire dans mes journées si pourries ces derniers temps. Joan est véritablement devenu un soleil dans ma vie, même si je ne veux définitivement pas me l’avouer. « Je suis un remède trop puissant, t’es pas prête pour ça. Un trop gros bond en retour vers la jeunesse c’est un choc auquel tu n’es pas préparée. » J’arque un sourcil, pas certaine qu’elle ait vraiment compris les sous-entendus dont elle fait part, ou mon principe de coucher avec une fille au moins par semaine pour garder la forme et la jeunesse. « Tu survivrais pas. » Elle est sérieuse là ? Je la regarde encore, pouffant de rire. « Je te recommande plutôt une verveine et une bonne nuit de sommeil. » Cette fois je ris avec elle, heureusement que j’ai pas de soucis avec mon âge, j’aurai pu me vexer. J’ai bien le temps de m’en préoccuper cela dit. « C’est toi qui survivrait pas ouais ! Je suis sûre que t’as jamais ne serait-ce qu’imaginé ce que ça pourrait être de prendre ton pied toute une nuit entière ! » AH ! VOILA ! Voilà ce qu’il fallait pour la faire taire. Halleluia ! Je tourne la tête vers elle, sourire vainqueur sur le visage. « Oh allez, fais pas la choquée ! Ça t’arrivera peut-être un jour, je te le souhaite en tout cas ! » Je jubile, parce que j’ai le sentiment d’avoir remporté la bataille. Sans doute pas la guerre, mais au moins la bataille, et ça c’est jouissif, sans doute autant qu’une partie de jambe en l’air avec une de mes ex. « Cela dit, si tu le propose, je veux bien voir ce quoi tu es capable en terme de cure de jouvence.. Enfin, j’dis ça j’dis rien hein ! » Le trajet se finit et je gare la voiture sur un trottoir à quelques centaines de mètres de l’entrée de la base militaire. « Tu vas arriver à rentrer sans te prendre un poteau ou écraser un chat ? » Nouveau sourire provocateur.

Bien sûr que j’ose ma vieille ! Elle croyait peut-être que j’allais la laisser me traiter comme une gamine sans rien dire ? Oui probablement. En fait je crois que Tawny a cru que je n’allais pas répliquer, me taire ou lui donner raison mais clairement dans mon état actuel j’ai du mal à la fermer. Je devrais sans doute, parce que je la sais beaucoup plus forte que moi à ce petit jeu là mais c’est plus fort que moi je réponds, et j’en rajoute. Je mets les pieds sur un terrain dangereux sans même vraiment m’en rendre compte, dans mon élan j’occulte totalement qu’en réalité la brune parlait clairement de rentrer s’envoyer en l’air avec une de ses ex parce que me concernant je ne suis pas à la hauteur. Pile le genre de sujet sur lequel je m’aventure sans filet et je vais forcément me casser la gueule à vouloir faire la maline. Je tacle, je vanne et ça fait rire Tawny  autant que moi je vais peut-être m’en sortir finalement. Puis vient sa réplique, franche un peu brutale même et là je n’ai d’autre choix que de rester silencieuse. Battue par KO. J’ai joué j’ai perdu, mais je sens comme un léger goût amer, un peu vexée qu’elle utilise cette ultime argument. Je regarde devant moi, alors que la brune essaye de me faire réagir. Elle s’y prend d’autant plus mal en me disant que ça finira bien par arriver, je force un rire et ne réponds rien. Là c’est clair que si elle voulait gagner c’est fait et à plate couture. Ça m’apprendra à jouer hors de ma catégorie. C’est pas pour autant que la recrue s’arrête, distillant une dernière provocation dont je ne saurais dire si c’est une proposition sous forme de défi ou un ultime foutage de gueule histoire de m’achever une bonne fois pour toute « C’est ça… » marmonné-je pour moi-même de manière quasi inaudible.
Tawny stoppe la voiture sur un trottoir près de l’entrée de la base, je fronce les sourcils un court instant et comprends finalement qu’elle n’a pas l’intention d’aller plus loin. Ça ne m’étonne pas tant. Nouvelle remarque piquante de la brune et je lui rends son sourire « Et bien j’imagine qu’il te faudra attendre les nouvelles dans les journaux de demain pour le savoir. » j’ouvre ma portière et descends de la voiture pour en faire le tour « Je vois quand même que tu te dégonfles. » dis-je en puisant dans mes dernières réserves de conneries. Mais pourquoi je fais ça putain ? Elle a raison, elle déteint sur moi… je veux avoir le dernier mot et j’en rajoute inutilement. « T’avais parler de me border. » je la regarde d’un air entendu et hausse les épaules « T’auras pas cinq étoiles à la notation des chaperons. » je lui souris « Tant pis. J’espère au moins que ta fin de soirée en vaudra la peine. » et je dis ça pourquoi au juste ? On dirait presque que ça me fait chier de finir la soirée ainsi. « Et bah bonne nuit, prends bien ton pied. » semblerait que je l’ai pas trop digéré celle-ci mais je me mets quand même à rire « J’vais aller imaginer du coup. Histoire de pas mourir trop bête. » je lui adresse un petit clin d’œil de sale gosse. Je pense que le punch et moi c’est fini, divorce prononcé on ne nous verra plus ensemble

J’ai gagné la bataille mais putain, je me rends vite compte que j’aurai mieux fait de fermer ma gueule sur ce point là parce que vu la tête qu’elle tire, je crois que j'ai appuyé malencontreusement là où ça fait mal. Je cherche pas à creuser davantage, je veux pas poser non plus de question pour savoir ce qui vient de la faire taire. D’ailleurs, il vaudrait mieux que je ne me pose pas plus de questions. J’arrête la voiture non loin de l’entrée de la base et lui demande si ça va aller, la taquinant à nouveau pour chercher son sourire qui me manque déjà. « Et bien j’imagine qu’il te faudra attendre les nouvelles dans les journaux de demain pour le savoir. » Rah, j’aime décidément pas du tout la manière dont tout ça vient de se retourner, et je culpabilise d’être allée aussi loin ou d’avoir touché une corde sensible chez elle. Elle n’est plus du tout drôle, on dirait qu’elle a perdu son sens de l’humour, ou pire, que je l’ai carrément vexée. Je me sens trop mal, je sais pas comment réussir à lui faire retrouver le sourire, mais un vrai sourire je parle. « Je vois quand même que tu te dégonfles. » dit-elle en faisant le tour de la voiture pour venir me rejoindre côté conducteur. Je vois pas encore de quoi elle veut parler et je fronce les sourcils, dubitative. « T’avais parler de me border. T’auras pas cinq étoiles à la notation des chaperons. » Je lui rends son sourire et me lève du siège pour la laisser s’installer à ma place. Enfin sa place. « Ouais, j’suis loin d’être parfaite, c’est pas nouveau… » « Tant pis. J’espère au moins que ta fin de soirée en vaudra la peine. » Pourquoi j’ai l’impression qu’elle est déçue ? Je dois comprendre quoi au juste ? Qu’elle voudrait que je la raccompagne chez elle et que je risque de me faire décapiter par son père ? Enfin, c’est pas ça qui me fait peur, c’est plutôt les risques de me laisser aller avec elle et ça c’est sûrement pire que tout. Je suis perdue dans mes sentiments, dans mes interprétations de ses sous-entendus. « Et bah bonne nuit, prends bien ton pied. » Pourquoi ça sonne comme un reproche ? « J’vais aller imaginer du coup. Histoire de pas mourir trop bête. » J’ouvre un peu plus grand les yeux, surprise par cette dernière phrase, et elle profite que je sois hébétée pour prendre place dans la voiture et refermer la portière. En moi gronde une très grande hésitation. Rester avec elle ou partir. Je sais qu’en restant j’alimente quelque chose qui ne doit pas être alimenté, mais en même temps j’ai l’impression qu’elle a envie que je prolonge cette soirée avec elle, même si ce n’est pas de la même manière dont je vois les choses. « Ouais… on va faire ça. Bonne nuit Birdy. » Je tape sur le capot de la voiture et m’éloigne d’un pas pour la laisser démarrer et entrer dans la base, la voiture s’éloignant de moi pour finalement disparaître. Je m’en veux finalement de ne rien avoir tenté, j’ignore si elle me lançait des perches mais bordel, c’est pas moi ça, c’est pas moi d’avoir des regrets, je préfère de loin les remords. Ok. C’est sans doute pas une bonne idée mais tant pis. Je cours jusqu’à l’entrée de la base et leur baratine un truc. J’ai pas mon badge, mais ils connaissent ma tête, et me laissent finalement entrer. Je cours jusqu’à chez les Oakley, c’est pas la porte à côté, y’a bien quatre ou cinq kilomètres, heureusement j’ai une bonne condition physique, mais mes bottines me lacèrent les talons et ça m’étonnerait pas que je sois déjà en train de saigner comme une conne. Tant pis. J’arrive chez elle, discrètement je monte à la gouttière et frappe au carreau pour signifier ma présence. La lumière est encore allumée. Elle ouvre et je souris, essoufflée. « Merde t’es pas couchée ? Je voulais te border ! »

Effet de l’alcool ? Simple connerie ? Sursaut d’orgueil ? Un peu de tout ça ? Je ne sais pas bien ce qui me fait agir de la sorte et répondre à Tawny avec autant de verve. Elle a touché un point sensible, c’est vrai mais je l’ai cherché alors je devrais tout simplement la fermer et rentrer en lui souhaitant simplement bonne nuit. Mais j’en suis incapable, sur fond de plaisanterie j’ai besoin de lui faire comprendre qu’elle a été trop loin. En fait je me sens un peu comme ayant été utilisé. Je ne regrette pas d’avoir accompagné la brune à cette soirée, mais même si ce n’était pas mon rôle j’ai l’impression qu’en fin de compte je servais juste d’alibi pour faire fuir ses ex, ses ennemis quiconque l’emmerderait. Un rôle que j’ai cependant pris plaisir à jouer et dans lequel je me suis illustrée. Et puis l’instant d’après j’ai eu soudainement l’impression d’être la vierge effarouchée dont on se moque, sans doute Tawny n’en a pas la moindre idée mais c’était bien la meilleure façon de me remettre à ma place. Quoi que personne ne se sert de cette info habituellement… puisque personne ne sait, à part elle. De toute façon je sais même pas ce que c’est ma place à vrai dire… Tout ça me fait prendre conscience que je suis plutôt perdue à force de jouer à ce jeu dont je ne connais pas les règles. Je n’ai pas l’habitude de franchir certaines limites, d’aller hors des sentiers battus et pourtant c’est ce que j’apprécie avec la recrue, elle me pousse à me dépasser. J’ai toujours été la plus sage, un peu écrasée par Janis et ses frasques, l’oreille attentive, l’alibi à ses bêtises, son soutien dans les épreuve. Pour quoi au final ? Qu’elle s’en aille et me reproche d’apprécier notre père. Je pense à tout ça sur le trajet me ramenant jusque devant la maison. Je n’ai écrasé personne et pas un seul poteau n’a eu l’idée de traverser la route alors que j’arrivais. Je me gare à ma place habituelle et descends de la voiture, je crois que l’effet du punch se dissipe laissant la place à la fatigue.
Sans bruit je monte à l’étage, et file directement dans la salle de bain afin de me démaquiller et me changer. Capsule m’accueille, réclamant à manger au passage, je lui donne quelques croquettes. Je traine un peu, me passant de l’eau fraiche sur le visage rafraichissant mes idées au passage. J’ai vraiment été stupide d’en rajouter, mais ce qui est fait est fait. Je rejoins ma chambre, allume la lumière et regarde mon ordinateur sur mon bureau. Je suis fatiguée et à la fois je sais très bien que si je me couche maintenant je ne vais pas arrêter de cogiter sur cette fin de soirée. Ce que j’aurais dû dire ou pas dire, me refaire le film en me répétant combien c’était bête de provoquer Tawny avec cette histoire de cure de jouvence à la con. L’alcool c’est terminé, vaut mieux que je garde mes filtres, parce que là j’ai vraiment dit n’importe quoi. Je sursaute légèrement en entendant frapper à la porte vitrée qui mène sur le balcon. J’ai eu une hallucination ou quoi ? Je tire le rideau et ouvre, Tawny se tient devant moi, essoufflée et je cligne des yeux pour être sûre que l’alcool n’est pas en train de me jouer un tour. Je secoue la tête à sa question et souris légèrement « A priori non, je ne suis pas couchée. Et si j’avais dormi je ne t’aurais pas ouvert. » merci captain obvious. Je hausse les épaules « Je t’ai déjà mis que quatre étoiles comme note en tant que chaperon… » dis-je avec une moue embarrassée. Je reprends mon sérieux et penche légèrement la tête, perplexe « Qu’est-ce que tu fais là Tawny ? » elle a pas un uber à prendre et une ex à trouver ?

Je peine à respirer correctement et mes pieds me font un mal de chien. Pourquoi j’ai fait ça au juste ? Pour une fois j’aurai pas juste pu réfléchir ? Peser les pour et les contre avant de faire un truc complètement idiot ? Elle tire les rideaux et ouvre la porte, et lorsque son regard se pose sur moi, je comprends que j’aurai mieux fait de rester dehors, rentrer chez moi, coucher avec la première venue, j’en sais rien mais pas revenir et m’accrocher encore un peu plus à elle alors que c’est clairement pas ce qu’elle veut. Je le vois dans son sourire presque forcé, et mon coeur se serre. « A priori non, je ne suis pas couchée. Et si j’avais dormi je ne t’aurais pas ouvert. » Ouais. Génial. Et on peut faire machine arrière et faire comme si j’étais pas venue ? « Je t’ai déjà mis que quatre étoiles comme note en tant que chaperon… » Je me mords l’intérieur de la jour et hoche la tête légèrement. « Ouais, mais je me suis dit que peut-être tu aurais pu revenir sur ton jugement… » Nos regards s’ancrent un instant avant qu’elle ne me pose la question fatidique. « Qu’est-ce que tu fais là Tawny ? » Je cligne quelques fois des yeux, ma respiration ne se calmant pas tout à fait. « J’avais pas dit que je devais te border ? J’ai presque oublié… » Je tente un léger sourire, attendant une seconde, mais je refuse cette fois de réfléchir plus longtemps avant de prendre cette foutu décision. Pas de regrets, c’est mon credo. « En fait c’est que… j’ai oublié de… » Mon regard glisse un instant sur ses lèvres avant de venir m’approcher d’elle, murmurant « …faire la bêtise à laquelle je pensais tout à l'heure… » avant de venir capturer ses lèvres. Ma main dans sa nuque pour appuyer mon baiser, baiser qui se fait légèrement plus puissant au fil des secondes. J’entre dans sa chambre, refermant derrière moi la porte fenêtre et approche le corps de Joan du mien, ma main libre dans son dos. Je ne réfléchis plus, mon coeur bat à une vitesse folle et j’ai la presque sensation de n’avoir jamais ressenti un truc pareil. Ça bondit dans ma poitrine, et j’arrive pas vraiment à comprendre si ça me pousse à arrêter mes conneries, ou à continuer. Allez Joan, fous moi dehors, fous moi une baffe une bonne fois pour toute que je comprenne. Ma langue en contact avec la sienne, je sens aussi sa respiration plus rapide. J’avance dans sa chambre, la faisant doucement reculer jusqu’à ce que ses jambes heurtent le bord du lit et que je nous fasse tomber dessus. Je me sépare alors de ses lèvres déposant des baisers le long de l’arrête de sa mâchoire jusqu’à son cou, murmurant à son oreille. « Dis-moi de partir Birdy, avant qu’il soit trop tard… » Ma voix est incroyablement brûlante et sensuelle, je m’interdis de réfléchir ni même de culpabiliser, me laissant guider par mes envies les plus intimes. Je ne sais pas ce que je veux, mis à part elle.

Que je revienne sur mon jugement ? Ouais elle a pas tort je pourrai, je m’en veux un peu d’avoir dit toutes ces conneries… même si ça excuse pas totalement que Tawny ai appuyé où ça fait mal pour me faire taire. Je pensais que sa fin de soirée était plutôt clairement définie alors forcément je m’interroge sur sa présence sur mon balcon. Y’a qu’elle qui peut me dire ce qu’elle fait là. Elle me répète qu’elle avait prévu de me border je hausse les épaules en esquissant un sourire, m’apprêtant à lui dire qu’elle radote. Mais la jeune femme reprend la parole, qu’est-ce qu’elle a oublié ? Elle s’avance, je ne comprends pas où elle veut en venir, elle s’approche d’avantage évoque cette bêtise à laquelle elle pensait plus tôt et j’ai à peine le temps d’enfin comprendre que ses lèvres se posent sur les miennes. Totalement prise de cours il me faut quelques secondes avant que je ne réagisse et réponde à ce baiser. Décidant, comme il y a trois jours en arrière de me focaliser seulement sur mes sensations en délaissant toutes tentatives de réflexion. Etrangement je me sens soudain libérée d’une tension dont je n’avais même pas remarqué la présence avant qu’elle ne s’envole. Je ne maitrise rien, à vrai dire je n’ai même pas envie d’essayer, je me laisse juste entrainer par l’intensité de l’échange. Tawny entre et referme la porte sans lâcher mes lèvres et bientôt je me retrouve tout contre elle. Ma respiration s’accélère, qu’est-ce que je suis en train de faire ? Instinctivement mes mains se referment sur les pans de sa veste, et suivant sa volonté je recule. Mon lit doit être quelque part derrière moi, c’est bien la seule pensée lucide que je suis capable d’avoir à cet instant, je m’arrête quand mes jambes en heurtent le bord. Dans la foulée je me sens tomber sur le matelas la brune libère mes lèvres, j’essaye de reprendre mes esprits. Réfléchis Joan… tu fais quoi là ? Un puissant frisson me traverse en sentant le souffle et les lèvres de Tawny dans mon cou. Alerte zone sensible. Je rouvre les yeux quand elle murmure à mon oreille. Wow c’est quoi cette voix ? « J…a…J… » et comment elle veut que je dise quoi que ce soit là maintenant ? Je soupire et me décale légèrement pour me soustraire à son souffle juste au creux de mon cou. Elle relève la tête et me regarde. Surtout ne pas la regarder dans les… yeux. Trop tard. Putain il m’arrive quoi ? Elle a raison faut qu’elle parte, c’est carrément en train de partir en live. Je hoche la tête « F…Faut que tu t’en ailles. » dis-je, c’est ce qu’elle m’a demandé non ? Mais faut croire que moi-même je ne suis pas si convaincue d’avoir envie de la voir partir parce que mes mains restent fermement agrippées à sa veste et inconsciemment je m’y raccroche pour l’empêcher de partir. Je crois même que je tire légèrement dessus pour qu’elle s’approche à nouveau. Tout ce que j’ai en tête c’est un épais brouillard, mon cœur lui bat à mille à l’heure et pour ce qui est du reste je ne sais même pas si j’ai encore conscience de mon corps. Je crois que certains de ses mots se sont inscrits dans mon esprit de manière beaucoup plus importante que je n’aurais pu le prévoir… J’ai aucune foutue idée de pourquoi mais si je m’écoute à cet instant, et c’est la seule option qu’il me reste, j’ai juste envie qu’elle m’embrasse encore. Alors un peu hésitante je finis par combler la distance qui reste entre nos lèvres et prends cette fois l’initiative de l’embrasser. J’aurais tout le temps de penser ensuite que c’est sans doute une connerie.