Rencontre bouleversante. -Leanne & Lily-

Cette intervention où j’avais du rassurée une future maman m’avait fait replonger dans des souvenirs plus que douloureux. On croit toujours qu’avec le temps les douleurs s’effacent mais c’est faux. Tout simplement parce qu’il faut apprendre à vivre avec nos erreurs et cette erreur d’avoir abandonné cette petite fille et l’homme que j’aimais me poursuivait encore aujourd’hui. Certes j’avais retrouvé Allan il y a quelques jours et tout se passait bien entre nous pour le moment. Seulement qu’adviendra il de notre couple le jour où il apprendra la vérité sur cet enfant dont j’ai refusé de lui dire l’existence ? Vais je le perdre à nouveau ? Rien qu’à cette idée j’en tremblais car cela faisait dix années que je vivais uniquement pour le boulot et aujourd’hui le destin m’offrait une nouvelle chance avec mon premier amour. Je décidais donc de marcher pour rentrer jusque chez moi, c’était la fin de la journée et mon collègue avait accepté de ramener l’ambulance à la caserne. Heureusement que je vivais à deux pas je pourrais toujours reprendre ma voiture demain ou un autre jour. Mais pour l’heure, j’avais besoin de marcher sans réel but, de visiter à nouveau la ville de mon enfance, cet endroit qui m’a vu grandir et évoluer à chaque étape de ma vie. A force de marcher dans la ville, je ne me rendis pas compte que j’étais arrivée jusque dans le nord de la ville, près des disquaires et autres petites boutiques en tout genre. Bref un quartier peu fréquentable en général pour une femme. D’ailleurs, je vis une jeune femme, elle devait avoir dans la vingtaine, elle semblait perdue, à tel point qu’elle venait d’en faire tomber ses affaires. Elle en ramassa une partie avant de repartir en sens inverse mais en fit tomber un papier alors je décidais de venir l’aider en ramassant le fameux papier.   « Mademoiselle, attendez ! Vous avez fait tombé ce papier ? Est ce que vous allez bien ? », lui demandais je, par déformation professionnelle où je devais toujours demander si la personne allait alors à force j’en étais devenue bienveillante. En revanche, je fus sous le choc lorsque mon regard croisa le sien, on avait le même. Et si elle était cette petite fille que j’avais mise au monde ? Je n’en revenais pas que mon passé avait décidé de venir me perturber à nouveau. Après Allan, voilà que maintenant c’était cet enfant que je regrettais d’avoir abandonnée … Je ne pouvais plus rien dire d’autre alors je décidais d’attendre sa réponse.  

Depuis ma plus tendre enfance, j’avais toujours rêvé de fonder ma propre famille. Bien sur je voulais avoir un enfant avec un homme que j’aimerais pour le reste de mes jours et il y a vingt ans, je l’avais trouvé cet homme. Sauf qu’il a fallu que je tombe enceinte par accident, je n’avais que dix sept ans alors forcément ma mère a tout fait pour que je renonce à l’homme que j’aimais mais aussi à ce bébé qui n’avait rien demandé. J’en ai voulu durant des semaines, des mois puis des années à ma mère, je n’ai même pas pleuré le jour de son enterrement, tellement je me sentais soulagée qu’elle ne soit plus de ce monde. Certes je pouvais paraître atroce quand j’évoquais ma génitrice mais elle n’était plus rien depuis longtemps à mes yeux, tout simplement car elle m’avait enlevé ce qui comptait le plus pour moi, Allan et ce bébé. Elle avait tout fait pour que j’y renonce et j’avais été tellement faible à cette époque que j’ai fait ce qu’elle m’avait demandé. Malgré tout, depuis vingt longues années, il n’y avait pas une seule journée sans que je ne pense à ce bébé que je n’avais pas eu l’occasion de voir grandir ou même d’élever. Ce qui me refaisait penser automatiquement à cet homme qui ignore tout de cet enfant que j’ai abandonné, de cet enfant qu’il a sûrement du rencontrer une fois sans savoir que c’était son enfant aussi. J’aurais pu le dire à Allan lors de nos  retrouvailles il y a plusieurs jours mais j’en étais franchement incapable, j’avais surtout peur de le perdre à nouveau car il allait me détester de lui avoir caché une information aussi importante. Après tout, je l’avais empêché d’être père il y a vingt ans comme je m’étais empêchée d’être mère pour le bonheur de ma propre mère, il n’allait certainement pas me pardonner comme ça, pensais je.

Alors lorsque j’avais du amener cette jeune maman qui était sur le point d’accoucher et où l’enfant était en danger, je ne pouvais m’empêcher de repenser à cet enfant que j’aurais du protéger de cette grand-mère qui ne voulait pas l’être. Je nourrissais tellement de regrets au fond de moi que depuis dix longues années, je me refusais à retomber amoureuse et je privilégiais ma vie professionnelle ou amicale. Les amis, il n’y avait rien de mieux pour éviter de penser à ce dont on ne voulait pas. Du coup, ayant terminé ma journée après cette intervention, j’avais décidée de marcher sans réel but, je ressentais le besoin de réfléchir à ce qui se passait dernièrement dans ma vie. Toutefois, j’étais bien loin de me douter que j’allais me trouver face à ce bébé qui devait avoir la vingtaine aujourd’hui. Tout ce temps, j’avais longtemps imaginé comment cette petite fille pouvait être aujourd’hui, si elle ressemblait plus à son père ou à moi, si elle avait nos yeux bleus ou non, si elle faisait de bonnes études. Autant de questions et de suppositions qui me hantaient et me faisait partir loin, tellement loin que je venais seulement de m’apercevoir que j’avais marché jusqu’au nord de la ville. Le nord d’Island Bay n’était pas vraiment un quartier aussi sur que les autres alors lorsque je vis une jeune fille perdue, je décidais de lui venir en aide, surtout qu’elle venait de faire tomber un papier. Je n’avais pas lu le papier car cela ne me concernait pas, seulement le regard de la jeune fille me fit me voir dans un miroir. Et si cette jeune fille était ma fille ? Mais pour l’heure, elle vint me demander mon aide pour l’aider à retrouver son chemin alors je vins lui répondre.   « Oui bien sur que je peux t’aider, je connais cette ville plutôt bien », lui fis je avant de reprendre.   « On va repartir vers le centre ville, il y a pas mal de cafés, je pourrais t’en payer un si tu le souhaites ? », lui proposais je car cela devait faire un moment qu’elle tournait dans la ville, j’ignorais d’ailleurs où elle vivait en ville alors je repris.   « Au fait, tu vis vers où en ville ? Island Bay doit te changer par rapport à ton ancienne ville, non ? », lui demandais je, sans me douter encore qu’elle venait de mon ancienne ville et que j’avais devant moi cette petite fille que j’avais confiée à l’adoption il y a près de vingt ans aujourd’hui.

Il y a vingt ans de cela, j’avais du renoncer aux personnes les plus importantes dans ma vie et c’était depuis ce jour que ma relation avec ma propre mère avait réellement changé. J’avais changé aussi, j’avais du grandir pour prendre une telle décision, celle d’abandonner l’homme de ma vie et ce bébé qui n’avait rien demandé à personne. Seulement voilà j’avais du me plier aux exigences de ma propre génitrice et autant dire que le lien fusionnel qui nous unissait elle et moi s’était rompu dès lors qu’elle m’avait renvoyé en Nouvelle Zélande sans possibilité d’un aller retour en Angleterre. De toute manière, la procédure d’adoption était déjà lancé et je ne pouvais plus faire marche arrière, je devais apprendre à vivre avec cette réalité, j’avais abandonné mon propre enfant. Et depuis ce jour où je n’avait que dix sept ans, cet abandon hantait mes pensées. Il n’y avait pas eu une seule journée où je n’avais pas pensé à cet enfant qui ne demandait qu’à grandir aux côtés de ses vrais parents. Parfois je me demandais comment était cette petite fille, si elle me ressemblait ou si elle avait pris toute la beauté de son père ? Quoiqu’il en soit, depuis le jour où j’ai du laissé de côté ma petite fille, je n’avais plus envisagé de devenir mère à nouveau. Tout simplement car je me disais qu’un beau jour où ma fille arriverait à me trouver et où tout pourrait devenir comme je l’avais toujours voulu. Seulement en voyant cette future maman avoir accouché avec mon assistance et voir ce petit bonhomme se battre contre la vie, cela était venu réveiller en moi ce manque que j’avais depuis ces vingt dernières années. Est ce que ma fille allait bien ? Est ce qu’elle ne manquait de rien ? Est ce qu’elle me pardonnerait cette erreur ? Est ce que son père me pardonnerait aussi ? Il était hors de question que je perde de nouveau Allan à cause d’une erreur de jeunesse. Bien sur notre fille était loin d’être une erreur mais l’avoir abandonnée en était une à mes yeux. Du coup, pour rentrer chez moi, j’avais décidé de marcher depuis l’hôpital, lieu où mon collègue m’avait laissée. Malgré tout, j’allais très vite atterrir dans un quartier peu fréquentable et où j’aperçus une jeune fille qui semblait perdue. Elle avait des cheveux blonds comme moi, était ce ma fille ? Pourtant il allait s’avérer que cela allait être le cas mais pour l’heure, je voulais m’assurer qu’on allait rapidement quitter ce quartier malfamé en venant lui proposer de marcher jusqu’au centre ville afin de pouvoir se boire un chocolat et pouvoir s’asseoir tranquillement alors je vins lui répondre.   « Et bien, c’est parti alors », lui dis je en souriant, sans me douter que j’étais bien en train de parler à mon bébé. C’était donc en marchant que je venais d’apprendre qu’elle vivait sur South Bay. Un bon quartier, me mis je à penser. Elle vint me demander à son tour où je vivais avant de venir me parler de Londres. Ainsi, elle venait de Londres, était ce une coïncidence ou le destin ? Alors je vins lui répondre.   « Oh je vis sur West Bay pour ma part. C’est vrai que Londres est plutôt grand par rapport à Island Bay et cela fait un moment que je vis ici », lui répondais je avant de reprendre, intriguée sur le choix du pays de cette jeune fille pour venir y faire ses études.   « Et pourquoi avoir choisi la Nouvelle Zélande pour tes études ? », lui demandais je, sans me doute encore un instant que j’avais bel et bien ma fille face à moi et reprenant, me présentant à mon tour.   « Enchantée Lily, c’est un joli prénom que tes parents t’ont donnés. Moi c’est Leanne. », lui disais je, tout en marchant et attendant sa réponse.

Retrouver cette petite fille qui avait grandi en moi durant neuf mois et que j’avais lâchement abandonné pour qu’elle ait une vie meilleure dans une bonne famille avait été pendant longtemps mon but dans la vie. Puis les années passèrent et je m’étais faite une raison qu’elle était bien plus heureuse dans sa famille d’adoption et qu’un jour le Destin nous remettra sur la route l’une et l’autre. Je n’aurais jamais pensé que ce serait ce jour là. Après tout, quelques heures plus tôt, j’avais accepté l’aide d’assistantes sociales pour m’aider à commencer des démarches longues et fastidieuses afin de la retrouver et voilà qu’en marchant dans la ville après le boulot, je venais à croiser une jeune fille perdue et seule. Je ne pouvais pas la laisser se balader dans un tel quartier car les quartiers du nord de la ville étaient réputés pour être plutôt malfamés alors je venais de lui proposer d’aller boire un chocolat en centre ville. Toutefois, sur la route qui nous menait au café du centre, je vins remarquer des traits qui me fit repenser à la personne que j’étais il y a vingt ans. Et là une question subsiste en moi : et si c’était ma fille ? Mais avant d’en déduire une telle chose ou de venir la perturber avec une révélation qui allait la bousculer, nous parlions de nos lieux de vie, elle vivait sur South Bay mais son premier choix avait été là où je vivais. Coïncidence ou non, c’était tout de même assez troublant. Malgré tout, je vins lui répondre, d’autant plus qu’elle me demandait si je connaissais Londres. « Ce sont deux agréables quartiers de la ville et j’ai vécu à Londres durant mes années au lycée  », lui fis je, tout en reprenant, ayant remarqué qu’elle me vouvoyait, sauf que je n’étais pas si vieille que cela. « Oh et tu peux me tutoyer au fait », lui fis je, venant à me demander si je n’avais pas devant moi ce bébé que j’avais abandonné il y a vingt ans. Après tout, elle devait avoir dans les vingt ans, elle venait de Londres et surtout elle était en Nouvelle Zélande pour rencontrer une personne en particulier. Cela ne pouvait plus être une coïncidence mais j’ignorais quoi lui dire à cette instant alors je vins me présenter et là elle me demandait si elle pouvait s’asseoir. Alors je vins lui répondre. « Euh oui bien sur. Tout va bien ? Tu as mal où ? », lui demandais je, ayant peur de sa réaction car elle devait faire une angoisse. Peut être qu’elle avait compris qui j’étais pour elle et qu’elle m’en voulait de l’avoir abandonnée ? Peut être que l'émotion avait eu raison d'elle à l'idée de me retrouver ? Peut être qu'elle avait des tonnes de questions à me poser ? Je ne pouvais pas lui en vouloir mais mon coeur commençait à se serrer à l’idée de perdre les deux personnes les plus importantes de ma vie et aussi car j'ignorais quelles questions elle allait bien pouvoir me poser ou même si elle allait m'appeler maman à peine retrouvées. Parce que si notre fille était en ville, il allait falloir que j’en parle à Allan et cela allait encore plus réveiller de douloureux souvenirs enfouis depuis des années au fond de moi.

Il fallait croire que le Destin était partout aujourd’hui car à peine venais je de quitter l’hôpital et ce médecin plus qu’adorable qui m’avait conseillé d’aller m’inscrire à un programme de retrouvailles afin d’aider ma fille à mieux retrouver ma place, voilà que je croisais une jeune fille qui me ressemblait étrangement. Et pour cause, elle semblait avoir les mêmes traits que moi, à tel point que cela me perturbait quelque peu. Je me demandais vraiment si ce n’était pas ma fille qui se tenait face à moi et qui semblait perdue dans cette ville inconnue pour elle. Après tout, la manière dont elle parlait de Londres me faisait savoir qu’elle y avait toujours vécu et j’avais mis au monde ma fille en Angleterre. Ce ne pouvait être une simple coincidence, pensais je. Malgré tout, je décidais de paraître naturelle en venant lui répondre.   « Cela dépend des moments et toi ca n’a pas été trop compliqué de quitter tes amis et ta famille ? », lui demandais je, tentant de savoir comment elle vivait ce nouveau départ à l’étranger car je savais par expérience que cela pouvait être compliqué à vivre. En même temps je l’avais moi même vécu à cause du travail prenant de ma mère alors forcément je ne pouvais que comprendre. Elle me fit savoir qu’elle avait du mal à tutoyer les personnes, je me doutais que ses parents avaient du lui apprendre très tôt à ne pas parler aux inconnus et c’est ce que j’aurais sans doute fait avec ma fille alors je vins reprendre.   « Ne t’en fais pas, fais comme tu le sens alors », lui fis je, ne voulant pas la brusquer.

Nous étions donc en train de marcher en direction du centre ville, discutant de tout et de rien mais aussi se présentant l’une à l’autre. C’est à partir de ce moment que je la vis devenir pâle, du moins à partir du moment où j’avais prononcé mon prénom. Je la vis me tendre un papier et en le lisant de plus prês, tout en évitant qu’elle fasse un malaise, je compris à ce t instant que c’était bel et bien le bébé que j’avais abandonné il y a vingt ans. Ainsi cette jeune fille avait décidé de quitter ses parents adoptifs pour me retrouver, Elle commença à s’asseoir sur le banc, tout en venant me demander si c’était bien moi et de sortir un paquet de mouchoirs. Si j’avais su que j’allais retrouver ma fille le jour où j’étais enfin décidée à entamer les démarches pour la revoir, je crois que je n’aurais pas cru celui qui oserait me dire que je ne rêverais pas. C’était tellement irréel et pourtant tout était réel en même temps. Tout mon passé venait de refaire à la surface, tous mes regrets aussi et mes peurs, surtout celle de perdre à nouveau l’homme que j’aime. Car il était évident que j’allais devoir annoncer à Allan qu’il avait une fille et qu’elle nous avait retrouvé pour qu’on apprenne à devenir une vraie famille. Alors je vins lui répondre, tremblant également mais me retenant de pleurer.   « Oui c’est bien moi », lui disais je avant de reprendre,   « Tu as quitté Londres et tes parents adoptifs pour me retrouver, c’est ça ? », lui demandais je, un peu perdue par toute cette émotion qui commençait à m’envahir à mon tour. Elle devait avoir des milliards de questions à me poser et je savais que la première allait être « pourquoi je l’avais abandonnée ? ». J’avais peur de sa réaction mais en même temps je voulais tant apprendre à la connaître, tant la présenter à Allan. Notre fille était magnifique, elle me ressemblait et elle devait avoir hérité forcément d’un peu de son père. Une chose est sure, il n’était plus question que je la quitte, ni elle ni Allan. On allait prendre notre temps pour apprendre à nous connaître mais on deviendrait une vraie famille, du moins si elle le souhaitait.

Ma fille venait de me dire qu’elle n’avait pas réellement d’amis à Londres et que ses parents adoptifs l’avaient déçus, elle devait probablement parler du fait qu’ils avaient du lui cacher pour son adoption. Seulement elle ne pouvait pas leur en vouloir, ils avaient sans doute du avoir peur de la perdre si elle décidait un jour de me retrouver moi ou son père biologique. Bien sur je comprends la déception de Lily face à ce mensonge de la part de ses parents et cela rajoutait un peu plus de culpabilité et de regrets. Si seulement j’avais pu dire non à l’époque à ma propre mère, tout aurait été différent aujourd’hui. Mais le passé est ce qu’il est et il faut que j’assume ce que j’ai pu faire plus jeune, que j’accepte que mon bébé me pose aujourd’hui des questions qui vont venir remuer le couteau dans la plaie. Parce que cet abandon que j’ai fait il y a vingt ans était encore une plaie béante, une plaie pas vraiment refermée car je n’avais pas voulu aller parler à ma propre mère sur son lit de mort et aujourd’hui je crois que je le regrette un peu. Je sais que je ne lui aurais jamais pardonné ce qu’elle m’avait demandé de faire pour sa propre carrière mais au moins j’aurais pu lui dire ce que j’avais sur le coeur. Elle m’avait privé de mon enfant mais elle s’était privé d’être grand-mère, enfin il fallait croire qu’elle ne voulait pas pouponner de nouveau. De toute manière, ma mère m’avait eu et m’avait toujours dit que je resterais fille unique alors je m’étais faite une raison avec les années que je n’aurais jamais de petite sœur ou de petit frère. Mais pour l’heure, je voyais ma fille commencer à se sentir mal, elle semblait avoir du mal à respirer alors je décidais de venir lui répondre. « Ne dis pas des choses pareilles, ils ont voulu sans doute te protéger. Ne leur en veux pas pour une erreur qui n’est pas leur faute, d’accord ? », lui disais je, sachant pertinemment que la coupable n’était nul autre que moi même. J’avais été lâche à l’époque, j’avais fui les deux personnes qui comptaient le plus à mes yeux pour quelqu’un que je détestais, même après sa mort. Mais face à la détresse de ma fille, je décidais de reprendre. « Lily, regarde moi, respire calmement s’il te plaît. Tout va bien, je n’irais plus jamais nulle part, personne ne t’abandonnera à nouveau, d’accord ? », tentais je de la rassurer au mieux et de lui faire sentir que j’avais attendu ce moment durant ces vingt dernières années avec impatience mais aussi beaucoup d’appréhension.

Je sentais qu’elle commençait à suivre mes conseils, j’étais ambulancière au quotidien alors ce genre de détresse respiratoire, j’en voyais souvent. Mais là ce n’était qu’une forte émotion et je ne pouvais que la comprendre. J’ignorais même comment allait réagir Allan, devais je lui en parler au préalable ou devions nous attendre que le hasard fasse encore bien les choses ? Quoiqu’il devait arriver lorsqu’il le saurait, je serais forte et je n’abandonnerais plus jamais ma fille, c’était certain. Et je savais qu’Allan ne nous abandonnerait pas non plus, on allait juste devoir apprendre à devenir des parents ensemble. Mais pour l’heure, la fameuse question que je redoutais tant vint sortir de la bouche de ma fille et me fit sortir de mes pensées. Alors je pris une grande respiration puis attrapa ses mains avant de venir lui répondre. « Si tu savais à quel point cette question m’a toujours fait peur depuis toutes ces années …  », lui fis je, ne sachant pas par où commencer mais je décidais de reprendre, sereine car j’allais enfin dire la vérité à ma fille et apprendre à la connaître. « D’abord, il faut que tu saches que tu es arrivée peut être par accident mais j’aimais vraiment ton père biologique et c’était réciproque, il était mon premier amour …  », commençais je par lui dire avant de reprendre. « seulement, ma mère donc ta grand-mère ne voyait pas d’un bon œil ma grossesse pour sa carrière, c’est à cause d’elle que j’ai du t’abandonner, j’ai été lâche je le sais et crois moi, il n’y a pas un jour où je le regrette », lui fis je, me retenant de craquer car reparler de ma mère me faisait mal, je décidais de continuer malgré tout. « Aujourd’hui, ta grand-mère est morte depuis deux ans, je ne lui ai plus adressée la parole depuis mes 18 ans, je ne lui ai jamais pardonnée de m’avoir privé des deux personnes les plus importantes de ma vie …  », lui disais je le plus sincèrement possible avant de terminer sur quelque chose de plus positif. « Mais sache qu’à présent plus rien ni personne ne nous empêchera de devenir la famille qu’on aurait du être à l’époque. Ton père biologique vit aussi dans cette ville depuis presque autan de temps que toi alors si tu veux venir à la caserne, ce sera avec plaisir », lui fis je, me doutant qu’elle allait deviner mon métier et peut être celui de son père. Je n’avais jamais eu l’occasion de parler de ma grossesse à Allan mais vingt ans plus tard, il n’était jamais trop tard pour le faire. Certes nos collègues allaient nous charrier mais c’était toujours de bonne guerre car pompiers et ambulanciers faisaient partie de la même famille au final. J’espérais avoir répondu à sa question et je ne pouvais imaginer ce qu’elle pouvait ressentir à cet instant même, elle devait être partagée entre la déception, la joie ou la tristesse alors je repris. « Je suis désolée Lily, désolée de t’avoir abandonnée et de t’avoir privé de ton vrai père », lui disais je, toujours aussi sincèrement et espérant qu’elle ne me rejette pas comme j’avais pu le faire il y a vingt ans et qu’elle comprenne pourquoi j’avais fait cela.

Cette rencontre avec ma fille, ce bébé que j’avais du laisser dix neuf ans plus tôt et qui était devenue une charmante jeune fille, tout cela me paraissait à la fois réel et irréel. Parce qu’il y a quelques heures, j’avais décidé que je m’inscrirais à un programme pour retrouver ma fille et voilà qu’elle se tenait devant moi. Comme quoi parfois le Destin faisait bien les choses et provoquait de belles surprises. Bien sur cela faisait remonter les pires souvenirs que je voulais effacer de ma mémoire mais au moins j’avais la chance de pouvoir construire la famille que j’aurais du avoir avec Allan et notre fille. Ma fille devait se sentir encore plus perdue que le jour où elle avait découvert que ses parents, ceux qui l’ont aimés toutes ces années, n’étaient pas ses véritables parents. Pourtant elle a bel et bien du sang anglais puisque son père est anglais. Mais pour l’heure, je m’efforçais de la calmer en lui parlant calmement, lui demandant de respirer doucement et la rassurant du mieux que je pouvais. En lui disant que plus jamais je ne l’abandonnerais ni elle ni son père. Puis ce fut le moment des explications avec la fameuse question tant redoutée, celle qui m’avait fait réfléchir maintes et maintes fois, celle dont je n’avais jamais vraiment eu de véritables réponses toutes prêtes. Au final, j’ai décidée de lui expliquer tout naturellement la raison de son abandon, que ce n’était pas de ma propre volonté et que je n’avais jamais voulu la laisser mais j’étais trop jeune pour décider à cette époque. Je pouvais remarquer que ma fille m’écoutait attentivement, se retenant de pleurer aussi. En voyant son regard, j’avais l’impression de voir les yeux d’Allan, c’était assez troublant mais au moins elle avait hérité du regard de son père. Peut être qu’elle avait hérité d’une partie du caractère de chacun de nous deux mais pour cela, il allait alloir nous apprivoiser avec le temps. Devenir parent ne s’improvisait pas et pourtant on allait devoir improviser et se laisser guider par notre instinct. Elle vint alors s’excuser de ce que j’avais subi à cause de sa grand-mère mais ce n’était pas de la faute de Lily, ni de la mienne, ni même celle d’Allan. Elle vint aussi me demander si j’avais déjà songé à savoir ce qu’elle devenait, il était vrai que je n’avais jamais vraiment cherché à savoir mais peut être que c’était pour ne pas faire remonter les vieilles blessures à la surface ? Ce n’était en aucun cas car je l’avais oublié parce que je n’avais jamais pu oublier ce petit bébé que l’infirmière avait emmené loin de moi il y a dix neuf ans, je ne pouvais pas et ne pourrais jamais alors je vins lui répondre. « Ce n’est pas de ta faute, ma puce, ne t’en fais pas. Te dire que j’ai déjà cherché à savoir ce que tu devenais serait te mentir mais l’idée m’a traversé l’esprit plusieurs fois … mais sache que même si je n’ai fait aucune démarche pour te retrouver, cela ne veut pas dire que je ne t’aimais pas, tu es le bébé que j’ai porté durant neuf mois, tu m’as aidé à panser les blessures de cette rupture que j’ai du faire à contre cœur alors impossible d’oublier la chair de ma chair …  », lui fis je, me rendant compte que je venais de faire un pavé et que j’avais parlé de rupture alors je décidais de reprendre. « ... Tu sais, quand j’ai appris pour toi, j’ai voulu le dire à ton père car je l’ai toujours aimé mais ma mère m’a demandé de choisir entre elle ou vous deux. Elle était ma seule famille à l’époque et je n’avais que dix sept ans mais je regrette d’avoir fait ce choix dans le passé, sauf que je me dis qu’on va pouvoir rattraper le temps perdu maintenant tous les trois », lui disais je, gardant espoir qu’Allan accepte que je lui ai caché à l’époque ma grossesse et qu’il ne s’enfuit pas en courant. Ce serait la pire hypothèse qui pourrait arriver mais au moins j’aurais toujours notre fille à mes côtés. D’ailleurs, elle vint me demander si sa grand-mère s’en était voulue, une chose que j’ignorais alors je repris. « J’ignore ce qu’elle a pu dire à ma tante mais je doute qu’elle s’en soit voulue, sa carrière a toujours passé avant tout de toute manière », lui disais je sans la moindre once de tristesse dès que je parlais de ma mère, je la détestais toujours malgré sa mort et je crois que cela changera jamais dans le fond.

A un moment, je la vis vouloir faire un geste tendre vers moi mais elle se rétracta, c’était sans doute trop tôt pour se faire un câlin mais j’adorerais pouvoir la prendre dans mes bras. Je n’ai pas pu la prendre dans mes bras à l’hôpital car on m’en a empêché pour suivre leur fichue procédure mais aujourd’hui on allait pouvoir rattraper tout ça. Je vins d’ailleurs lui parler de nos métiers à moi même et à son père. Après tout, j’étais ambulancière et Allan pompier, ce n’était pas rien, c’était des métiers à risques tout de même mais pas moins passionnant bien au contraire. Elle vint demander si j’étais pompier ou ambulancière alors j’eus un léger rire avant de venir lui répondre. « Alors je suis ambulancière mais ton père est pompier et toi, quelles études as tu choisi ? », lui demandais je, m’intéressant à sa vie et à ses études comme n’importe quelle mère pourrait le faire. Elle vint ensuite me faire savoir qu’elle serait ravie de venir à la caserne avant de me demander si son père était au courant pour elle alors je vins reprendre. « Non, il n’a jamais su la véritable raison de notre rupture donc il ignore encore que tu es sa fille, cela risque de lui faire un choc mais je suis persuadée qu’il sera ravi d’avoir une fille aussi charmante que toi », lui disais je, comme pour la rassurer et me rassurer par la même occasion, tout en reprenant. « D’ailleurs, tu as le même regard que lui », lui disais je, lui donnant un indice sur comment était son père avant de sourire à sa dernière remarque, elle voulait apprendre à me connaître mais aussi connaître son père biologique, cela me faisait plaisir et c’était comme si toutes les blessures du passé venaient de s’envoler, même si la peur de voir partir Allan à l’annonce de sa paternité tardive restait dans mon esprit mais je vins lui répondre. « Bien sur qu’on va apprendre à se connaître toutes les deux mais il va falloir que j’annonce à ton père que tu es sa fille. C’est pour ça qu’à la caserne ce serait l’idéal, on pourrait s’y retrouver un jour où tu n’as pas cours et on aurait plus de chances d’y croiser Allan, ton père », lui fis je, espérant qu’elle accepte ma proposition de se voir tous les trois à la caserne. C’était le seul endroit qui me venait en tête alors que je connaissais la ville pratiquement comme ma poche. Mais pour une révélation comme celle que je comptais annoncer à Allan, c’était sans doute le mieux, me mis je à penser.