(loterie) shopping time ❣ iris

**○ inscrit le** : 26/07/2016

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Son armoire faisait pitié. Dans le sens où Amara avait acheté une grande armoire. Une très grande armoire pour mettre dans sa chambre. Super jolie l'armoire. Seulement, comme elle n'avait pas emporté beaucoup de choses quand elle avait quitté l'Inde, oui, son armoire était plutôt vide. Et quand elle avait été la colocataire de Shawn, elle avait préféré attendre d'être chez elle pour faire des emplettes. Bah oui. Toujours plus simple de déménager avec peu d'affaires plutôt qu'avoir tout plein de choses. Pour sûr. Donc oui, maintenant qu'elle était chez elle, maintenant que les pièces se meublaient, petit à petit, elle allait pouvoir s'occuper de son armoire. Et comme elle avait de la place, beaucoup de place, Amara allait pouvoir se faire plaisir. Et s'acheter tout ce qui pouvait lui passer par la tête. Néanmoins, elle n'allait pas non plus dévaliser les magasins en une seule fois. Du tout. Elle le ferait petit à petit. Là, elle allait s'acheter quelques trucs. Elle ne savait pas quoi encore. Elle verrait bien. Des robes. Des pantalons aussi. Enfin, Amara ne faisait pas de projets. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle allait acheter. Elle y allait au coup de coeur. Alors, l'indienne était rentrée dans la première boutique qu'elle avait pu croiser sur son chemin. Elle ne travaillait pas aujourd'hui. Sans doute qu'elle en ferait d'autres par la suite. A voir. En rentrant dans le magasin, Amara en profita pour récupérer un petit panier. C'était dans le cas où elle se retrouve avec plein de choses à essayer. Parce que oui. Toujours essayer avant d'acheter. Elle mettait un point d'honneur à le faire. Pour éviter de devoir revenir. C'était pénible après tout. Et la voilà donc à arpenter les différents rayons. A la recherche d'un ou des coups de coeur.

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Iris Von Dust • Amara Râhi

Contre ma plus sincère volonté et désir, le grand dirigeant et détenteur du magazine que personne au monde n'ose contredire ou défier m'a ordonné de prendre une journée de congé et de ne pas mettre les pieds aux bureaux dans l'idée de me détendre et de prendre du temps pour moi. C'est vrai que ces temps-ci, la cadence est insensée puisque le numéro de septembre est le plus important de l'année en plus d'être ma première édition mais ce n'est pas pour autant que je m'en plains et que j'ai la brûlante envie de ne pas travailler. Cet emploi c'est ma raison de vivre, les jours où je ne dois pas ou ne peux pas me rendre aux locaux du magazine sont des journées malheureuses durant lesquelles je me sens vide et inutile, impuissante et sans intérêt. Mathys, mon rédacteur en chef adjoint qui n'est jamais le dernier lorsqu'il s'agit de se ficher de ma bonne poire, m'a envoyé un texto un peu plus tôt dans la matinée me conseillant de mettre les heures à venir à profit pour aller m'ouvrir à la diversité vestimentaire locale et dénicher des perles rares dans des boutiques d'Island Bay où je n'aurais jamais ne serait-ce que l'idée de pénétrer d'habitude. D'une manière générale, je ne sors jamais aux alentours de là où j'habitude pour la simple et bonne raison que je n'ai pas envie de me faire emmerder, je n'ai pas envie qu'on découvre où je vis un quotidien paisible en dehors de l'effervescence et la folie constante de Wellington. Le pire scénario possible serait d'ouvrir la porte d'entrée et de me retrouver soudainement nez à nez avec des paparazzis nourrissant des ramassis de merde semblant intrigués par ma personnalité apparemment mystérieuse. Bref, suite aux provocations insupportables de mon acolyte sur mon style de vie, j'ai décidé en me levant d'aller à la rencontre du style propre aux environs en espérant ne pas tomber sur trop de tissus maltraités ou de conceptions artistiques pauvres en matière d'innovation. Mais bon, faut pas trop rêver.

Me voilà donc droite comme un piquet devant une friperie qui ne paie pas de mine, probablement à juste titre d'ailleurs, mes pieds perchés sur des talons à la hauteur conséquente semblant tout d'un coup bien hésitants. J'échappe un long soupir et extirpe mon téléphone portable de ma minaudière CHANEL avant de prendre en photo la devanture du magasin que j'envoie aussitôt à Mathys, juste pour lui prouver que je suis capable de sortir de ma zone de confort de riche supposément coincée du cul et paumée dans ses habitudes luxueuses et onéreuses. J'accompagne le MMS d'un superbe et magistral « Je t'emmerde » et range l'appareil à sa place initiale avant de prendre une profonde inspiration et de franchir les portes de la boutique. Comme je le craignais, ma vision est instantanément blessée alors que j'aperçois des piles de vêtements dont tout le monde se fout, de vulgaires bouts de tissus sans intérêt entassés les uns sur les autres sans le moindre ordre. Je soupire à nouveau, désespérée et échappe soudainement un perçant cri de surprise lorsque quelque chose me percute dans le dos. Je me retourne et fais alors face à une superbe jeune femme confuse, je me redresse et fronce les sourcils à son égard. « Je suis invisible ou vous vous considérez trop importante pour porter attention au monde qui vous entoure ? » Les autochtones sont décidément bien peu civilisés par ici. Alors que je remets en place mon cardigan en soie sauvage, je détaille la personne à l'origine d'une telle altercation et suis prise d'un doute, elle m'est étrangement familière. Comme un ancien visage que j'ai eu l'habitude de voir quelque part. « On s'est déjà vues auparavant ? » Elle a l'apparence de celles avec qui je travaillais lorsque j'étais encore à New York.

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Quand on fait du shopping, le risque, c'est de ne pas forcément faire attention à ce que l'on fait. Parce qu'on se laisse emporter par le moment et qu'on fouine parmi les rayonnages à la recherche de la perle rare. Et Amara n'échappait pas à cela. Non. Du tout. Elle était du genre à faire attention. Mais là, elle était peut-être un peu frustrée de ne pas encore avoir trouvé quelque chose qui lui plaisait. Clairement pas le bon magasin. Elle ne désespérait pas pour autant. Il y avait encore quelques rayonnages. Et si elle ne trouvait rien, elle finirait bien par trouver dans d'autres boutiques. Ce n'était pas la seule après tout. Enfin, tout ça pour dire qu'elle avait quitté la route des yeux seulement une fraction de seconde. Et elle percuta, pas de manière forte, une personne. Alors, bien sûr, Amara se tourna immédiatement pour voir le visage de sa victime. "Oh, je suis sincèrement désolée." Surtout qu'elle ne l'avait pas fait exprès. Mais la réprimande de la rousse fut un poil violente. Elle avait un sacré caractère. Un très mauvais caractère. Une peau de vache ? Sans doute. En tout cas, ce n'était pas vraiment le genre d'individus avec qui on avait envie de devenir amis. Mais pas du tout. "Je serais aussi importante que vous le dites, je ne pense pas que je prendrais la peine de faire mes emplettes ici." Ou pas. Mais au moins, Amara lui mettait le doute. En tout cas, cette personne était désagréable et elle n'avait aucune envie de rester ici plus longuement à parler avec elle. Oh que non. Elle pensa, à tort, que leur petite discussion était finie. Mais non. Car voilà que la rousse lui demandait si elles s'étaient déjà vues quelques part. Amara aurait été désagréable, elle lui aurait répondu qu'elle se serait souvenue d'une personne aussi détestable qu'elle. Mais non. Elle allait jouer la carte de la diplomatie. Et éviter de la foutre plus en pétard qu'elle ne l'était déjà. Amara secoua la tête. "Non, je ne pense pas." Et c'était vrai. Elle ne l'avait jamais vu. "Je suis sur Island Bay seulement depuis quelques mois." Sans doute qu'elle devait s'en foutre mais bon, Amara le lui précisait quand même."Mais il n'empêche que j'ai un visage connu. Principalement en Inde. Vous m'avez peut-être vue dans un magazine." Amara en doutait puisqu'elle avait disparu des écrans radars quand elle a mis fin au mannequinat. Ou presque. Y'avait encore eu quelques articles sur elle.

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IRIS / AMARA

Si je devais véritablement révéler toutes mes cartes sur la table de jeu et ne promettre d'exposer que l'entière vérité et réalité des faits, je me dois d'admettre que me retrouver dans un tel établissement me met mal à l'aise. Il est plutôt complexe pour ma personne de me retrouver dans un magasin de vêtements où ces derniers ne sont absolument pas traités et respectés en tant que tels, ils sont éparpillés et négligemment empilés en d'affreux tas d'immondices sur des meubles d'exposition achetés à un prix défiant sans aucun doute toute concurrence. Avant de pénétrer dans cette boutique, je ne me pensais sincèrement pas précieuse et pète-sec pour un sou mais de toute évidence, je m'étais totalement fourvoyée sur la nature de ma personnalité de ce côté-là. Je fais plutôt partie de cette catégorie de personnes qui aiment afficher leur argent et leur supériorité hiérarchique sur eux, je flambe mes revenus scandaleusement conséquents à tout va et ne me suis de toutes manières jamais préoccupée de ne pas pouvoir obtenir ce que je veux puisque, même durant mon enfance, la richesse de mes géniteurs m'a fait grandir et évoluer d'une certaine manière. Peut-être n'est-ce pas la bonne mais après tout, qu'est-ce que j'en ai à foutre. La magnifique et élégante jeune femme qui vient de me rentrer dedans de plein fouet ne manque d'ailleurs pas de souligner que des personnes aussi importantes que celles dont je dépeignais le portrait quelques secondes auparavant n'ont pas leur place dans un tel endroit. Je ne peux m'empêcher d'imaginer les sous-sols et la réserve où ils conservent l'intégralité de leur stock insalubres, malsains et miteux. « Je dois vous confier que ça me fait bizarre de croiser une femme de votre envergure ici, en parlant de ça. » Compte tenu de sa beauté et de son allure, elle ne devrait effectivement pas prendre la peine de faire ne serait-ce que du repérage entre ces quatre murs, ce magasin ne pourrait même pas être qualifié de friperie ou d'antre du vintage. Tout est juste laid et de mauvais goût. En même temps, difficile de rivaliser avec les plus grands créateurs de ce monde desquels je reçois échantillon sur échantillon dans mon penthouse situé à Wellington, dans une majestueuse avenue en pleine centre-ville. L'expression plutôt douce de son visage, outre la presque dureté de ses propos, me fait presque regretter d'avoir été aussi agressive. Je suis tendue ici, je n'y peux rien. Je décide d'engager un brin de conversation avec elle pour me faire déculpabiliser d'agir en tant que garce. « J'aurais pourtant juré vous avoir déjà vue quelque part. » Quelque chose en son visage m'est en effet familier, sans que je ne puisse vraiment poser le doigt dessus. Elle précise qu'elle n'est arrivée à Island Bay qu'il y a quelques mois de cela. « De même pour moi, je suis venue m'installer ici pour raison professionnelle. Non, je ne parlais pas de vous avoir croisée ici-même. » Je fronce légèrement les sourcils, tentant par tous les moyens de remettre de l'ordre dans ma mémoire et de poser des mots logiques sur mon pressentiment à l'égard de la sublime femme typée. Je m'écarte de quelques pas du portant de fringues qui m'écoeure sérieusement et fixe de nouveau l'inconnue qui semble bien plus charmante qu'attentive à ses mouvements. « Je n'ai malheureusement jamais eu l'occasion de mettre les pieds en Inde encore, il paraît cependant que c'est un étonnant pays. » Je me racle la gorge, elle doit royalement se foutre de ce que je suis en train de lui raconter après mon attitude peu recommandable. Inexplicablement, elle émane un je-ne-sais-quoi me forçant à adopter un comportement sympathique à son encontre, ce n'est pourtant clairement pas dans mes habitudes. Elle émet brièvement l'hypothèse de son apparition dans un magazine et mon regard s'illumine alors. « Mais bien sûr, je vous remets enfin maintenant que vous dites ça ! Nous nous sommes déjà aperçues à New York, tout est limpide comme de l'eau de roche. » Je me souviens d'un shooting organisé par l'équipe d'Anna Wintour qui me supervisait encore à l'époque, et je revois la fameuse mannequin me faisant face déambuler dans les couloirs du magazine pour se rendre à la réunion post-séance. « Vous êtes Amara Râhi, n'est-ce-pas ? » Mon professionnalisme à toute épreuve fait de moi une physionomiste hors pair, je suis sûre de ce que j'avance. Un sourire se dessine sur mes lèvres alors que je tends vers elle une main bien plus avenante que mes paroles. « Iris Von Dust, désormais rédactrice en chef de VOGUE NZ. Je bossais avant à New York pour Anna Wintour. » Étonnante rencontre en personne, en tout cas.

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Il était vrai que ce n'était pas vraiment le meilleur magasin au monde en ce qui concernait les fringues. Non. Y'avait des magasins haute couture. Et Amara allait souvent dans ce genre de boutiques. Seulement, elle n'était pas en Nouvelle Zélande depuis longtemps. Elle n'était pas à Island Bay depuis longtemps. Et avant ... Et bien, avant de se porter sur un magasin en particulier, oui, elle essayait de tous les faire. Bon, pas dans la journée. En plusieurs fois, bien sûr. Et au moins, elle saurait ce que les boutiques de vêtements auraient à lui offrir. Et surtout, elle saurait dans quelle boutique elle reviendrait le plus souvent. Alors oui, elle irait dans quelques friperies. Quelques magasins moins top par rapport aux autres. Mais c'était pas grave. Amara ne trouvait pas que c'était du temps de perdu. Au contraire. Et puis, à sa manière, ça lui permettait de découvrir la ville d'ailleurs. Enfin, passons. Amara pensait qu'elle allait reprendre ses emplettes tranquillement après s'être excusée auprès de la jeune femme qu'elle avait bousculé. Mais non. Celle-ci semblait avoir envie de papoter un peu. L'inconnue était certaine que ... Et bien, elle était certaine qu'elle l'avait déjà vue quelque part. Mais elle n'arrivait pas à se souvenir d'où à dire vrai. "C'est pénible quand on a ce genre d'impression et qu'on arrive pas à se rappeler d'où ce sentiment peut provenir." Amara avait rencontré tellement de personnes au fil des années qu'elle ne pouvait pas se souvenir de tout le monde. Oui, y'avait certaines personnes qui marquaient. Et dont elle n'oublierait jamais le visage. Et d'autres où ... Et bien, d'autres où elle ne pourrait dire si elle avait pu rencontrer telle ou telle personne. Ca n'allait pas les aider. Elle n'était pas originaire d'Island Bay elle également. En ville seulement depuis quelques temps. Amara lui parla de l'Inde. Comme elle était originaire de là-bas. Mais non, ce n'était pas l'Inde leur point commun. "C'est un pays intéressant où il y fait bon vivre. Et j'dis pas ça parce que j'y ai vécu durant de longues années. Y'a des coins sympathiques à visiter." Amara eut un hochement de la tête. "Et d'autres coins où il vaut mieux ne pas mettre les pieds si on ne veut pas se retrouver blessée ou pire encore. Un peu comme dans toutes les villes d'ailleurs." Oui, y'avait toujours deux ou trois coins où il fallait pas s'aventurer. Sans quoi ... Ouais ... Sans quoi on risquait de se retrouver avec un membre en moins par exemple. Finalement, à l'énonce des magazines, ça fit tilt dans la tête de la jeune femme. New York. Elles s'étaient rencontrées à New York. Amara pencha la tête sur le côté. Elle avait été à New York. Pour des shootings. A trois reprises elle s'y était rendue. Durant quelle séance avait-elle pu croiser l'indienne ? L'inconnue en vint à éclaircir tout cela. "Oui, c'est bien moi." Elle lui tendit la main. Et l'indienne en vint à la serrer. Parce que même si elle avait été grossière au départ, elle semblait être en de meilleures dispositions. Iris Von Dust. "Oui, ça y est. J'me souviens." C'était une rencontre très rapide. Normal qu ça ne lui avait pas sauté aux yeux. "Vogue NZ. Vous travaillez avec Shawn Sharps." C'était son meilleur ami après tout. "Vous avez fait du chemin depuis New York." Se retrouver à l'autre bout du monde, ouais, c'était quelque chose mine de rien.

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IRIS / AMARA

« C'est un pays intéressant où il y fait bon vivre. Et j'dis pas ça parce que j'y ai vécu durant de longues années. Y'a des coins sympathiques à visiter. » J'opine légèrement du chef, juste l'affaire de quelques fois pour lui faire comprendre qu'elle avait désormais affaire à une oreille attentive et non plus une femme offusquée de s'être faite agressée par une autochtone. Je me demande d'ailleurs depuis quand elle réside en Nouvelle-Zélande, c'est tout de même dingue de la recroiser dans le coin. Elle rajoute que certaines endroits sont à éviter à tout prix si on ne voulait pas courir de graves dangers imprévisibles, là aussi j'appuie ses paroles, en total accord avec ces dernières. « De ce côté-là, New York n'a franchement rien à envier à votre pays alors ! C'est surtout le problème des grandes villes mais oui, en effet. Depuis quand êtes-vous ici, du coup ? » Peut-être la jeune femme ne voudra-t-elle pas répondre à cette question mais je me risque tout de même à la lui poser à cause de ma curiosité maladive qui me fait parfois défaut. Je n'y peux rien, c'est ma façon d'être pleinement. En parlant de la grosse pomme, j'enchaîne directement sur le fait d'être persuadée de l'y avoir déjà croisée par le passé. Plus spécifiquement au sein des bureaux de VOGUE US où je bossais alors encore durant cette période. Elle était présente là-bas pour des séances photos, des essayages de tenues provenant des plus grandes maisons de couture au monde, des entretiens avec la grande Anna Wintour. La femme qui a fait de moi ce que je suis aujourd'hui, une personne méfiante vis à vis de tout le monde et très brutale et directive à travers mon travail actuel. J'ai toujours eu du pouvoir, même lorsque j'étais sa rédactrice en chef mode, mais c'est une toute autre histoire aujourd'hui et je ne m'en suis rendue compte qu'en commençant véritablement à diriger l'équipe qui est maintenant sous mon joug. La belle qui me fait face penche un peu la tête sur le côté, pensive et soudainement comme vivement intéressée par ce que je lui raconte. J'ai manifestement piqué sa curiosité au vif. « Oui, c'est bien moi. » « Ça alors, c'est tout juste incroyable ! » Je me présente à mon tour et elle s'empare de la main chaleureuse que je lui tends, semblant elle aussi radicalement changer d'attitude à mon encontre, et je lui adresse alors un sourire radieux. Le genre de sourires que je n'ai pas souvent l'occasion de faire lorsque je suis à Wellington, dans mon immense bureau qui me confère tout de suite une supériorité nécessaire et presque vitale. Dans cette boutique, c'est autre chose et je m'en veux maintenant de lui avoir aboyé dessus. « Oui, ça y est. J'me souviens. » Autant elle a la classe en apparence et un style de prime abord irréprochable, autant c'est un désastre dès qu'elle ouvre la bouche. Cette façon de parler m'irrite, j'ai toujours eu en horreur les gens qui mâchent les mots. « Vogue NZ. Vous travaillez avec Shawn Sharps. » Je relâche sa main et arque un sourcil, étonnée. « Effectivement, d'où le connaissez-vous ? » Tel que je le connais, il a forcément dû la tringler. « Vous avez fait du chemin depuis New York. » « Oui et c'est bien peu de le dire, dis-je en émettant un léger rire cristallin. J'ai tout de même grimpé quelques échelons, c'est vrai. Et qu'en est-il de votre carrière de mannequin, de votre côté ? » Je balaie des yeux la boutique et quelques personnes nous lancent des regardes curieux, notamment la vendeuse postée à quelques pas de notre position seulement. Je me racle la gorge et souris de nouveau à Amara. « Peut-être pourrions-nous tenter de trouver des vêtements valant le coup dans ce trou à rats, qu'en dites-vous ? » Autant mettre cette rencontre fortuite à profit.

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Dans toute ville il y avait de bonnes et de mauvaises choses. L'Inde, c'était la même chose. Et elle ne disait pas cela parce qu'elle avait vécu une bonne partie de sa vie là-bas. Non. Ce pays était adorable. New Delhi, c'était une ville où il y faisait bon vivre. Elle ne dirait pas forcément la même chose en ce qui concernait Calcutta, par exemple, ou bien une autre de ces petites villes reculées. Mais oui. C'était chouette. C'était à faire, au moins une fois à faire une fois dans la vie. Comme voyager un peu partout de toute manière. Certaines villes, certains pays valaient clairement le détour. Elle n'avait jamais pensé qu'elle viendrait en Nouvelle-Zélande, étant pratiquement sûre qu'elle resterait en Inde, ou bien qu'elle irait dans le pays de son homme, de celui qui avait partagé sa vie un moment, celui avec qui elle avait failli avoir un bébé. Mais ça ne s'était pas fait. Non. Le destin avait décidé qu'il n'y aurait pas de bébé. Et ça avait foutu son couple en l'air. Enfin, passons. Tout ça pour dire que oui, si on lui avait dit qu'elle finirait en Nouvelle-Zélande, elle n'y aurait pas forcément cru. Non. Du tout. "C'est différent New York. Le cadre est différent. Les villes, ses habitants aussi." Elle avait eu l'occasion d'y aller deux ou trois fois. Amara n'avait pas détesté. Mais c'était différent, oui. "Ca fait depuis fin mars à peu près que je suis là." Parce qu'elle avait eu une énième conversation avec Shawn. Et parce qu'il avait réussi à l'attirer ici. Sans Shawn, elle n'était pas certaine que ... Et bien, qu'elle serait là au final. Non, c'était même sûr et certaine. Elle serait peut-être ailleurs qu'en Inde mais pas forcément là. Enfin. "Et vous alors ? Ca fait combien de temps ?" Normal qu'elle cherche à savoir. Normal qu'elle lui retourne la question après tout. Même si, au départ, il était clair que Amara n'avait nullement envie de discuter avec elle. Comme quoi, faut jamais se fier à la première impression. Parce que Amara serait restée sur cette impression de peste à qui tout est dû, ouais, elle aurait pris ses jambes à son cou et elle serait partie, sans plus attendre. C'était certain. Et non. Là, elle discutait avec l'inconnue. Qui, au final, n'était pas qu'une inconnue puisqu'elles s'étaient déjà croisées toutes les deux. Brièvement, à New York. Mais oui, elles se connaissaient de là-bas. Un shooting en particulier. Amara se souvenait plus du mannequin avec qui elle avait fait les photos parce que c'était un mec gentil, très agréable, cordial. Elle aurait pu envisager d'avoir une histoire avec lui. Mais ils vivaient clairement pas dans le même pays. Et se retrouver sur un même shooting aurait relevé du miracle. Mais Iris ... Ouais, qu'on s'l'avoue, Iris n'était pas la personne donc elle se souviendrait en premier. Elles ne s'étaient pas beaucoup côtoyées. Après ces étonnantes révélations, Amara en vint à parler brièvement de Shawn. Parce qu'elle ne savait pas qui était son contact à Vogue. Et s'il avait eu l'occasion de rencontrer Iris déjà. Si c'était le cas, il ne devait pas forcément s'en vanter. "Cela fait un petit moment que nous nous connaissons." Elle eut un hochement de la tête. "On a fait un shooting ensemble en 2004. Et on a gardé le contact après ça. C'est un peu à cause de lui, d'ailleurs, que j'ai fini par atterrir à Island Bay." A cause ou grâce à lui. Mais elle aimait bien. Elle aimait bien. Elle ne regrettait pas d'avoir quitté son confort et de s'être lancée dans la grande inconnue. Faut savoir prendre des risques parfois. Et elle avait bien fait. Iris lui parla de sa carrière de mannequin. Amara secoua la tête. "J'avais besoin de me recentrer un peu. J'ai arrêté en 2009." Et elle avait disparu des magazines. Amara n'irait pas jusqu'à dire qu'elle se sentait revivre mais oui. C'était mieux comme ça. Après, elle pourrait toujours replonger. Mais elle n'était pas certaine de le faire à dire vrai. Amara eut un petit rire amusé quand Iris lui proposa de faire du shopping. "Je ne suis pas vraiment certaine qu'on trouvera quoi que ce soit de réellement potable mais on peut toujours essayer." De ce qu'ell avait vu jusqu'à présent, non, rien d'intéressant. Des choses qu'elle ne mettrait même pas en rêve.

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IRIS / AMARA

Effectivement New York est bien différent des autres, mais pour moi c'était encore autre chose puisque c'est la ville qui m'a vue réussir dans la vie pour la première fois, grimper les échelons sans que rien ne semble être apte à me briser ou ralentir ma cadence. Je me suis sentie forte pour la première fois en franchissant les bureaux de VOGUE US, libre lorsque j'ai fait la connaissance de la vie nocturne de Manhattan, impressionnée et ridiculement petite lorsque j'ai traversé Times Square, patriote au Madison Square Garden, naturelle à Central Park. Dire que ça ne me manque pas serait mentir mais je commence cependant à bien me plaire dans les parages et même si rien ne me semble encore acquis dans ce pays que je n'avais encore jamais visité par le passé, je sais que j'arriverai à m'y sentir aussi bien que dans mon appartement à Brooklyn. D'adolescente apeurée au statut inexistant, je suis devenue une femme puissante aux ambitions claires et au tempérament infernal. Je m'en contente, j'ai toujours voulu devenir une personne de caractère dans mon enfance lorsque j'admirais ma mère prendre au sérieux certains cas qu'elle avait à gérer dans son travail, aux côtés de mon père. J'offre un sourire à Amara en guise de toute réponse, ce n'est effectivement pas la même chose, non. Rien au monde n'est comparable à la grosse pomme. Tout semble bien fade en comparaison. Elle est dans le coin depuis fin mars, elle connaît donc forcément la ville mieux que moi. La jeune femme retourne ma question contre moi et je hausse alors légèrement les épaules, pensive. « Je me suis installée au fur et à mesure depuis le début de l'année mais je n'ai véritablement commencé à habiter ici qu'au mois de juin. Pour commencer à travailler sur l'édition de septembre. » La toute première à mon compte en tant que rédactrice en chef, j'avais au départ énormément de mal à gérer le stress et l'angoisse ressenties par rapport aux attentes placées en moi, mais j'ai finalement réussi à appréhender les choses avec perfection et professionnalisme. Le numéro est prêt à être vendu dans le monde entier, il n'y a désormais plus qu'à attendre les retours des lecteurs, investisseurs mais également directeurs de l'empire mondial. En attendant, je continue de diriger les locaux d'une main de fer dans un gout de velours hors de prix. Tout n'est qu'une histoire de renouveau dans cet univers, de toutes manières, si le premier numéro est un échec, le second ne le sera peut-être pas. Elle évoque brièvement le nom de l'un de mes nouveaux mannequins, la somptueux et énigmatique Shawn Sharps. Enfin énigmatique dans son attitude face aux appareils photos et aux caméras, ses agissements se lisent en revanche comme un livre grand ouvert. C'est un fêtard et un jeune homme qui aime profiter et croquer dans la vie à pleines dents. Il a suffisamment d'argent pour se le permettre et je ne suis pas prête de rompre son contrat puisqu'il nous satisfait jusque là alors, il a bien raison de s'en donner à coeur joie. Tant que ça ne nuit pas à l'image du magazine, je n'ai rien à lui dire. J'ai envie de demander la nature de leur relation à Amara mais c'est un genre d'indiscrétion dont je me fiche éperdument en fin de compte. La vie privée de mes employés ne me regarde que lorsqu'elle rentre en conflit avec leur vie professionnelle. Autrement, quel intérêt. « On a fait un shooting ensemble en 2004. Et on a gardé le contact après ça. C'est un peu à cause de lui, d'ailleurs, que j'ai fini par atterrir à Island Bay. » « Ça explique dans ce cas comment vous le connaissez. » Je lui adresse un bref sourire, si elle s'est installée ici de manière définitive à cause de lui, c'est qu'elle y est attachée. Ça confirme donc peut-être mes théories. Elle m'explique par la suite avoir eu besoin de faire un break de sa carrière de mannequin, ce que je peux parfaitement comprendre. Le rythme est parfois infernal, les voyages incessants, les contrats volages. Un jour vous êtes la personne la plus en vogue de l'univers, le lendemain vous n'êtes plus qu'une pauvre survivante tentant de se lancer dans la musique pour se prouver qu'elle peut encore exister sur le devant de la scène. Triste. « Et vous n'avez jamais eu envie de reprendre par la suite ? Puisque vous connaissez Shawn et qu'il est un mannequin prodige, peut-être que je pourrais programmer un séance où vous poseriez pour nous. Avec lui, j'entends. » Si l'idée la séduit, je n'hésiterai pas un seul instant à la contacter, être celle qui fait renaître sa carrière artistique de ses cendres serait un peu plus indéniable pour le magazine. Un vrai tremplin pour elle, également mais ça c'est autre chose. Désespérée par le fait d'être dans une boutique de vêtements où rien n'attire mon regard et excite mes sens, je propose à la jeune femme de devenir ma compagne de misère le temps d'essayer de dénicher des perles rares. Si tant est qu'il y en ait dans les parages. Elle échappe un léger rire amusé auquel je me mêle et accepte alors la proposition en appuyant la même théorie que la mienne, ça relève presque de l'impossible que d'entreprendre pareilles recherches. Mais bon, qui ne tente rien n'a rien alors pourquoi pas. Je n'ose pas toucher la plupart des vêtements, je suis dégoûtée par le peu qu'il reste. La vendeuse semble tout aussi désemparée que je le suis alors. Elle n'y est pour rien alors je ne lui jetterai pas la pierre mais merde, y a vraiment que dalle ici c'est pas possible. Mes yeux s'illuminent lorsque j'aperçois des sequins brodés sur un textile pas trop crade, je déchante rapidement lorsque je m'en empare et remarque qu'il s'agit d'un simple t-shirt. Sérieusement ? Y a vraiment des gens pour porter ça ? Je repose la chose comme si elle renfermait une maladie secrète et sors rapidement une lotion désinfectante de mon sac à main. J'échappe un profond soupir, regarde l'heure et me tourne vers Amara. « Quelque chose d'intéressant de votre côté ? » Je me rapproche d'elle à nouveau, traversant du coup plusieurs rayons. « Je pense que j'ai assez supporté cet endroit pour aujourd'hui, je vais donc vous laisser. » Je lui lance un sourire radieux malgré ma mauvaise humeur qui commence à regagner du terrain. J'ai besoin d'un verre, quelque chose de fort, vite. Je sors de mon sac une carte de visite et la lui tends de manière élégante. « Si jamais vous désirez vous lancer à nouveau, appelez ce numéro et je vous arrangerai un shooting. C'est dommage de prendre déjà votre retraite avec tout votre potentiel. » Peut-être travaille-t-elle dans une toute autre branche désormais, je n'en sais rien à vrai dire. Et encore une fois, ça ne m'intéresse pas vraiment. Je sors une cigarette du paquet contenu dans ma poche et la coince entre mes lèvres avant de faire retomber mes lunettes de soleil sur le bout de mon nez. « A bientôt, j'espère. » Je lui serre à nouveau la main, tourne les talons et quitte ce trou à rats qui m'aura au moins appris quelque chose. Je suis une pétasse qui pète plus haut que son cul et qui a des standards bien trop élevés, et je l'assume.

Spoiler:

**○ inscrit le** : 26/07/2016

shopping time

Si Amara était là depuis fin mars à peu près, Iris, quant à elle, était sur Island Bay depuis un peu plus de temps. Mais cela ne voulait pas dire pour autant qu'elle connaissait bien la ville. Au contraire d'ailleurs. A son ton, Amara avait l'impression qu'Iris ne connaissait pas bien la ville. Ou alors, elle cachait bien son jeu. Ouais. "Ah, le boulot ... C'est quelque chose qui nous occupe beaucoup mine de rien." Et pas qu'un peu. Amara avait eu peur. Elle avait eu peur, au départ, de quitter son boulot, en Inde, et de devoir se tourner les pouces pendant un long moment ici, à Island Bay. Mais non. Elle avait trouvé rapidement. Et elle commençait à se faire une sérieuse clientèle mine de rien. Et elle espérait bien que ça allait continuer à grossir, petit à petit. Pas au point, tout de même, de se retrouver débordée. Mais oui. Elle était contente que son talent soit apprécié et reconnu. Et elle était pratiquement certaine qu'Iris était dans la même optique des choses. Bien faire son boulot. Être reconnue et avoir, peut-être pour elle, le monde à ses pieds. Enfin, passons. Amara orienta la conversation quelque peu vers Shawn. Car oui, elle le connaissait. Elle le connaissait très bien. "C'est bien de connaître quelqu'un quand on débarque dans une grande ville et qu'on cherche prendre un nouveau départ." Sans son meilleur ami, elle ne serait pas là. Elle serait ailleurs. Alors oui, elle pouvait le remercier. Et puis, Island Bay était une chouette ville. Elle ne regrettait pas d'avoir quitté l'Inde. Même si ... Y'avait certaines choses qui lui manquaient un peu. Il suffisait d'y penser et c'était comme si elle était chez elle. Ou alors, il lui suffisait de faire à manger. Avec des épices. Avec beaucoup d'épices. Et elle était ravie. Bon, elle évitait de faire à manger pour les autres avec beaucoup d'épices. Elle n'avait pas envie qu'ils se retrouvent avec une bouche en feu parce qu'ils avaient dû mal avec les épices. Un peu comme ce pauvre Shawn. Iris était curieuse. Amara lui avait confié qu'elle avait stoppé le mannequinat. Et elle avait envie de savoir si l'indienne avait envie de reprendre. Ah, ça, elle s'était doutée qu'elle finirait par avoir ce genre de proposition. Que ça soit par Iris, par Shawn d'ailleurs ou toute autre personne. C'était une question qui revenait souvent quand elle disait qu'elle était un ancien mannequin. "Je ne sais pas vraiment. Si c'est pour la bonne cause, oui, par exemple, je pourrais accepter de faire quelques shootings." Mais à dire vrai, Amara n'était pas totalement certaine qu'elle pourrait véritablement replonger là dedans. Sauf si on appuyait sur la corde sensible et qu'on lui disait que ça pouvait être pour de l'humanitaire, ou qu'on redistribuerait de l'argent, justement, à ceux qui en avaient besoin. Comme les enfants. La cause des enfants, oui, ça la touchait. "Mais je préfère ne pas promettre ce genre de choses." Parce qu'elle pouvait y réfléchir maintenant et au final dire que ça ne le ferait pas. Enfin, elle n'en savait rien encore. Shawn arriverait sans doute à la convaincre plus facilement, qui sait ? Pour l'heure, il était temps de regarder s'il y avait quelques fringues intéressantes dans les environs. Mais rien. Non. Amara avait beau fouiné dans les différents rayonnages, c'était pas génial. Mais alors pas du tout. Elle n'aimait pas. Elle n'aimait rien. "Non. Du tout. Je crois que je vais rayer ce magasin de ma liste des magasins à visiter souvent." Ouais. Un coup dans l'eau. Tant pis. Elle était certaine qu'elle trouverait bien d'autres magasins qui vendraient des trucs intéressants. Ce n'était que partie remise. Iris allait prendre congé. Mais avant de le faire, elle confia une carte à Amara. Qu'elle prit. Elle ne savait pas si elle finirait par l'utiliser un jour mais mieux valait l'avoir et ne pas en avoir besoin que l'inverse. Elle eut un sourire quand Iris ajouta qu'il serait bien dommage de prendre sa retraite. "Merci, c'est gentil. Je vais y songer. Mais je ne vous promets rien." Non. Parce que Amara ne voulait pas lui donner de faux espoirs après tout. C'était normal. L'indienne lui serra la main. "Bon courage avec votre magazine et à bientôt." Elle ne savait pas trop quand elles allaient se revoir. Mais elles allaient se revoir, sans doute.

C'était avec plaisir ♥ On s'en refera un quand tu voudras ♥

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world's greatest miracles happen by accident.

Nova. ▬ It starts with the eyes. He's gotta have those kind of eyes that can look right through the bullshit, to the good in someone. 20% angel, 80% devil.

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