lost in the wild...; pv.noomi

Traiter avec des adolescents, c’est comme de traiter avec des gamins. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que Noomi sait y faire avec les enfants. Notamment parce qu’elle en a une. Et que certes, cinq ans, ce n’est probablement pas le pire âge, la blonde s’est déjà préparée en se basant sur elle-même plus jeune. Mais en espérant que Sarah serait quand même un rien plus facile. Toujours est-il qu’il faut croire que le ton qu’elles avaient employé était le bon car lorsqu’elles leur dirent de rentrer chez leur mère, les ados obtempérèrent. Avec l’air le plus minable du monde mais c’était bel et bien ce qu’ils étaient ; des minables qui n’ont rien de mieux à faire de leurs journées que de fiche la frousse aux autres. Bon débarras. Zoë exprima alors le besoin de retrouver un peu de lumière. Pour se calmer car elle était visiblement à cran. Sans souci, elles pouvaient bien se permettre de faire une pause. Elle lui emboîta donc le pas et chercha dans son sac à dos une bouteille d’eau qu’elle lui tendit. Elle n’aurait rien eu contre une cigarette en ce qui la concernait mais vu l’endroit, ce n’était sans doute pas le plus indiqué. Tant pis, ça attendrait bien encore un peu.

« Faut pas faire attention à ce p’tits cons, je pense qu’il y a quelque chose ici. Même si je ne m’avancerais pas à dire quoi. »

Ses propos faisaient bien évidemment référence avec ce que Zoë avait pris en photos dans la chapelle. Peut-être que ce n’était rien mais peut-être que c’était tout aussi, allez savoir. Elle en avait vu des vidéos de chasses aux fantômes et le moins que l’on puisse dire, c’est que les trucs les plus convaincants sont souvent les plus discrets, sans quoi on peut crier au fake. Soit, en parlant de photos, la demoiselle lui demanda si elle voulait qu’elle prenne quelques clichés d’elle. En temps normal, Noomi n’était pas super fan de voir son image mais ce problème s’arrangeait petit à petit depuis qu’elle travaillait à la radio et que son émission était filmée en temps réel et qu’il valait mieux qu’elle cesse de se demander si elle n’avait pas trop une tête à jouer dans La Nuit des Morts-Vivants cette nuit-là. Et puis c’était le moment où jamais. Elle avait une photographe et un lieu pas banal à disposition.

« Pourquoi pas, oui ! Tu veux que je prenne une pose particulière ou quelque chose comme ça ? »

Elle pouvait jouer les mannequins s’il le fallait.

Zoë faisait donc partie de ces photographes qui préfèrent capturer l’instant au lieu de tout mettre en scène. C’est une très bonne chose en soi et Noomi ne doutait pas une seule seconde qu’elle sache effectivement ce qu’elle était en train de faire mais rester naturelle lorsque vous savez qu’un objectif est pointé sur vous, ce n’est pas si simple que ça. Alors elle essaya de l’oublier. Mais c’était marrant parce qu’elle avait un peu de mal ; ce qui est tout de même ironique quand on pense à tout ce qu’elle a pu oublier entre le mois de février et maintenant mais ça, c’est compliqué. Enfin bref, c’est à ce moment-là que la jeune fille vola à son secours en la faisant parler. Une technique qui devait marcher à chaque fois, ça, non ? Avec Noomi c’était toujours assez efficace. C’était d’ailleurs de cette façon qu’elle passait chacun de ses examens médicaux, sinon elle se mettait à réfléchir puis prenait ses jambes à son cou. Véridique, ça lui était arrivé une fois. Mais c’était avant son accident de voiture. Et tous les examens médicaux qui en avaient découlé, évidemment.

« Alors, je suis pianiste à la base. Et je chante aussi. On peut dire que la musique a une place très importante dans ma vie depuis toujours mais mon truc à moi, c’est vraiment le piano. »

Il y en avait pour dire qu’elle avait du talent, elle n’irait pas jusque-là mais elle adorait poser les doigts sur un clavier et jouer tout et n’importe quoi. C’était un plaisir et il fut un temps où ça payait même les factures, à l’époque où elle allait encore jouer dans un établissement ou l’autre de Wellington. Alors certes, elle n’était pas une star reconnue par ses pairs et elle ne gagnait pas tant que ça non plus, juste de quoi subvenir aux besoins de sa fille ainsi qu’aux siens mais ça lui convenait très bien. Et puis qui sait, peut-être qu’à force, ç’aurait pu marcher, on aurait pu la remarquer. Mais bon, la vie serait trop belle – et peut-être un peu chiante aussi – si tout se passait comme on l’a prévu.

« Seulement en février dernier, j’ai eu un accident de voiture et bref, je t’épargne les détails mais il m’en reste quelques séquelles. Dont des troubles de la mémoire qui m’empêche le plus souvent de suivre une partition d’un bout à l’autre. Il a donc fallu que je trouve autre chose mais je voulais rester dans le domaine de la musique autant que possible. Quand j’ai su qu’il y avait une place à la radio, j’ai sauté sur l’occasion. En plus, les horaires de nuit me conviennent parfaitement. »

Quand je vous dis que ça marche plutôt bien avec elle, voilà que Noomi était en train de raconter son histoire et en avait carrément oublié la raison pour laquelle elle la racontait.

« Et toi alors, comment t’es venue cette passion pour la photographie ? »

La preuve.

Voilà comment prendre une photo sur le vif. C’était très gentil de la part de Zoë de lui dire qu’elle était désolée pour elle. Et bien sûr, Noomi réagit comme toujours dans ces moments-là : elle minimisa son accident en faisant un geste de la main signifiant que ce n’était rien. En réalité, c’était tout sauf rien mais elle estimait que si elle voulait se plaindre ou se lamenter sur son sort, il y avait les psys pour ça. Par contre, elle n’avait rien contre l’idée d’évoquer le sujet si on lui posait des questions et c’est précisément ce que fit la gentille photographe qui voulait savoir si elle ne jouait plus du tout de piano. En fait si mais la blonde n’appellerait pas ça jouer, c’était plus comme si elle faisait bégayer son instrument à force de recommencer encore et encore la même chanson.

« J’essaye de ne pas abandonner définitivement parce que, d’aussi loin que je me souvienne, la musique a toujours été ma passion et que c’est un bon exercice mais je t’avoue que j’ai souvent envie de lâcher l’affaire. »

La patience n’était clairement pas son fort, malheureusement. Enfin bref, Zoë s’approcha alors d’elle pour lui montrer la photo qu’elle avait prise. Dès le premier coup d’œil, on pouvait tout de suite dire qu’elle avait un don certain dans son domaine. Le cadrage, la lumière, la mise en avant du sujet, bref, le genre de clichés que l’on pourrait tout à fait retrouver dans les magazines.

« C’est incroyable, c’est vraiment une photo magnifique. Pourtant, c’était pas gagné avec ce décor et ce sujet. T’as vraiment beaucoup de talent. »

C’est ainsi qu’elle apprit que Zoë était censée devenir éditrice à la base. C’était en effet assez loin de la photographie et elle avait l’impression que c’était un métier à double tranchant. Ça devait être absolument passionnant par moment et totalement barbant à d’autres. Comme la plupart des métiers, en fait, ils ont plus ou moins tous leurs avantages ainsi que leurs défauts.

« Ah oui, carrément. C'est une chance alors parce que ç’aurait été dommage de gâcher ce talent. Je pourrai voir les autres clichés que tu as pris ? »

La jeune fille devait bien avoir un site, un blog ou mieux encore où exposer ses œuvres et Noomi se ferait un plaisir de le visiter. Pour l’heure, il était temps de reprendre l’exploration. Elle acquiesça et elles partirent donc à l’assaut de l’autre aile. La grecque tendit l’oreille, par précaution mais n’entendit aucun bruit suspect, cette fois-ci. Elle poussa ensuite la première porte qui se trouvait sur son chemin et elles tombèrent sur une pièce aux fenêtres condamnées. Ce qui est quand même curieux, à l’étage mais le soleil passait au travers des planches de bois et ça lui conférait à la fois un côté chaleureux mais un peu fantomatique, aussi. Très bizarre à décrire. A en juger par ce qui trainait encore dans la pièce, à savoir de vieux sommiers tout rouillés, il devait s’agir d’un dortoir.

« Est-ce que tu crois que quelqu’un aurait pu se défenestrer ici ? Peut-être que je déraille mais je vois pas tellement d’autre explication pour qu’on condamne des fenêtres à l’étage. »

La photographie, on peut dire que Noomi n’y connaît rien alors elle n’avait même pas songé qu’il faudrait retoucher les photos. Ce n’est que lorsque Zoë pointa du doigt une photo en particulier où le vert était effectivement la couleur qui ressortait le plus. Parfois, ça pouvait être joli et donner un style aquatique en quelque sorte, façon The Shape of the Water et d’autres fois, ça vous donne juste un air malade. La blonde acquiesça, toute prête à lui donner son feu vert pour tous les clichés qu’elle voudrait retoucher étant donné que c’était Zoë l’experte ici. Puis les deux jeunes femmes repartirent à l’aventure pour tomber sur un dortoir. Il faut croire qu’elle est du genre à se faire des films puisque la version de la demoiselle semble bien moins dramatique. Et sûrement bien plus logique aussi. A savoir qu’ils avaient dû condamner avant de partir. Ils avaient fait la même chose dans le réfectoire. Possible. La mémoire de Noomi ne cessant de lui jouer des tours, elle n’aurait pu en jurer mais elle lui faisait entièrement confiance. Le pourquoi du comment devenait plus clair, alors. Ils avaient dû vouloir que personne n’entre pour venir tout saccager. Peut-être avaient-ils l’intention de revenir et de retrouver tout en l’état, alors ?

« Tu dois avoir raison. Dommage qu’on n’en sache pas plus sur l’endroit. Ç’aurait été cool de savoir pourquoi ils ont déserté comme ça. »

Parce que sinon, on pouvait se faire tout un tas d’histoires à ce sujet. Toutes plus abracadabrantes les unes que les autres. Mais la grecque saurait dompter son imagination débordante. D’ailleurs, la photographe lui proposa alors une brillante idée. Tourner une vidéo. Certes, il leur faudrait revenir avec Ash et son équipe car c’était lui le vidéaste mais elles pouvaient bien faire ça en attendant. Elle s’en servirait pour faire de la pub sur son site ainsi que dans son émission.

« Super idée, oui ! On reste ici ou on va dans le jardin ? Voire même un peu des deux. »

Toujours pour la lumière. Même si l’appareil photo de Zoë avait l’air d’être un appareil photo de compétition et qu’il devrait pouvoir gérer l’intérieur comme l’extérieur même en mode vidéo.

« Ça serait cool qu’on puisse faire un plan d’ensemble des pièces qu’on a déjà visité. »

Mais ça, elle le ferait peut-être quand Ash serait là ? Elle n’en savait trop rien. Toujours est-il qu’elle trouvait ça cool d’avoir une photographe avec elle.

Zoë n’a pas tort, peut-être qu’il y a en effet des documents quelque part dans le bâtiment. Certes, le lieu a déjà été visité par d’autres, comme en témoigne leur rencontre de tout à l’heure mais elles peuvent encore espérer que ça ne soit que par des jeunes décérébrés qui se contrefichaient bien de l’histoire de cette bâtisse et qu’ils n’aient pas mis le feu aux documents qu’elles pourraient possiblement trouver pour se marrer. Mais du coup, oui, leur prochaine mission serait de trouver un bureau. Et peut-être même qu’elles auraient dû commencer par ça mais c’est difficile de se repérer dans un endroit que l’on ne connaît pas et que l’on visite pour la première fois.

« Bonne idée, tiens. On regardera quand on redescendra, ça doit sûrement se trouver au rez-de-chaussée, ça. »

Ou alors l’architecte était totalement à l’ouest quand il a dessiné les plans. D’ailleurs, à cet étage, il ne devait plus avoir que les salles de bains à visiter. Peut-être qu’il y avait un grenier. Là aussi elles pouvaient peut-être tomber sur des archives. Et non, ce n’était pas qu’une façon de repousser le moment fatidique où il faudrait descendre à la cave autant que possible.

Mais soit, pour l’heure, il était question de filmer quelques rushes. Et Zoë n’avait pas de préférence pour ce qui était de tourner en intérieur ou en extérieur. Elle lui proposa même de faire un live, à condition d’avoir du réseau bien évidemment. En voilà une bonne idée, elle pourrait les poster à la fois sur son site et sur son instagram histoire de teaser les fans le plus possible.

« Ça marche, faisons ça. »

Les fans découvriraient le reste des lieux en même temps qu’elles, c’était sûr qu’Ash aimerait beaucoup l’idée. Bref, Noomi renonça à sortir tout de suite dans le jardin ; ça serait idiot de descendre et de remonter sans cesse, autant commencer là où elles se trouvaient si Zoë pouvait arranger ça ensuite pour les vidéos promo. La jeune fille lui demanda ensuite si elle avait l’intention d’enquêter ici avec le reste de l’équipe.

« J’imagine que c’est ce qu’Asher voudra faire, oui. Et on peut compter sur lui pour dénicher des informations que personne d’autre ne trouverait. »

Elle ne savait pas comment il s’y prenait mais il n’avait pas son pareil pour se renseigner sur n’importe quel endroit. Bref, la blonde aida Zoë à préparer le matériel, elles commenceraient donc par présenter un peu l’endroit ici puis elles se déplaceraient pour le live.

« Passe en premier pour les présentations puisque tu as découvert l’endroit. »

Une fois l’enregistrement lancé, Noomi prit sa pose de professionnelle : dos bien droit, bras collés le long du corps pour empêcher ses mains de faire n’importe quoi, ce qui pourrait distraire inutilement les viewers et le sourire commercial accroché aux lèvres toujours. Une habitude qu’elle avait prise dès l’instant où elle avait su que son émission de radio serait filmée pour les gens qui avaient envie de voir qui se trouvait derrière le micro. Encore que c’était bien différent aux studios où elle est assise sur une chaise et parle de trucs idiots pour tenir ses auditeurs éveillés, évidemment. La blonde préféra laisser Zoë se charger de la présentation parce qu’en ce qui la concernait, l’improvisation était toujours un peu risquée. On n’était pas à l’abri qu’elle perde le fil de ce qu’elle était en train de raconter en cours de route parce qu’elle se mettait la pression justement pour ne pas l’oublier. Bref, ce fut ensuite à son tour de prendre la parole.

« Hello ! Alors comme vous le savez déjà, je fais en quelque sorte partie d’une équipe de chasseurs de fantômes et le moins que l’on puisse dire c’est que cet endroit a énormément de potentiel pour une investigation, raison de notre présence en ces lieux. On précise également qu’il s’agit bien d’un sanatorium et pas d’un hôpital psychiatrique, nous n’avons pas encore vu de cellules capitonnées ni de fauteuils roulants ou ce genre de choses. »

Petit sourire et regard complice. Ça lui semblait important de le souligner parce que l’endroit était déjà bien assez glauque comme ça, pas la peine d’en rajouter pour que ça soit encore plus théâtral. Ensuite, ce fut le tour de passer au live. Alléluia, il y avait bel et bien du réseau. Noomi prit quelques minutes pour fixer son téléphone portable sur la perche à selfie de Zoë et récapitula vite fait pour quelle raison elles livaient.

« On va vous faire découvrir en même temps que nous les pièces encore inexplorées. »

Et donc let’s go, la grecque sortit du dortoir, longea le couloir et ouvrit une énième porte close. Celle-ci donnait sur une pièce entièrement carrelée qui ne pouvait être que les sanitaires. La tuyauterie était toute rouillée et il faisait toujours aussi sombre, elle se persuada que tout n’était que de la rouille et pas du sang. Ici on trouvait plein d’outils comme des tournevis, des marteaux et ainsi de suite un peu comme s’ils avaient entreprit des travaux juste avant de prendre la fuite. Vraiment étrange. Et puis tout à coup, cette impression de mouvement juste au coin de l’œil. Noomi tourna vivement la tête, ça pouvait être une ombre, il y en avait pas mal dans un endroit si peu éclairé mais elle n’en était pas sûre alors elle préféra redemander confirmation à Zoë.

« T’as vu quelque chose bouger toi aussi ? »

Il est vrai qu’il y avait de quoi se demander ce que pouvaient bien fabriquer des marteaux au beau milieu d’une salle de bains. Mais Noomi avait bien une petite idée sur la question. Et elle n’étonnera personne étant donné que c’est la seule explication un tant soit peu plausible : la salle de bains était en travaux juste avant d’être abandonnée. Ce qui bien sûr, rajoutait du mystère à toute cette histoire mais ce n’était pas la première fois qu’elle avait cette sensation de départ en toute hâte au cours de leur exploration ; il avait dû se passer quelque chose mais quoi ? La blonde allait faire part de sa réflexion à Zoë quand celle-ci trébucha et manqua se rétamer et pas qu’un peu. Elle se précipita auprès d’elle pour s’assurer qu’elle n’avait pas besoin d’aide. C’est plus important que ce qu’elle a vu ou cru voir.

« Ça va ? »

Mais tout à l’air d’aller très bien et même que son binôme du jour continue sur sa lancée, presque comme si de rien n’était. La grecque baissa alors les yeux sur la poupée qu’elle n’avait pas remarquée jusqu’ici. Glauque. Oh bien sûr, elle n’est pas du genre à avoir peur d’un jouet, sinon elle ne serait pas sortie de l’auberge avec Sarah mais on ne peut pas nier qu’en trouver dans un endroit à l’abandon, ça vous file toujours un peu la chair de poule. Noomi réfléchit alors à la question de Zoë. Était-ce ça qu’elle aurait vu du coin de l’œil et qu’elle aurait cru voir bouger ? Si c’était le cas alors elle commençait sérieusement à dérailler et elle qui avait toujours eu les psy en horreur reconsidérerait peut-être la question en ce qui concerne une éventuelle consultation. Elle finit par secouer la tête.

« Non, je crois pas. Ça bougeait vraiment. »

Elle reprit ensuite l’exploration, se doutant que tout ce qu’elle allait trouver ça serait des douches mais bon, sait-on jamais. Le tout en faisant finalement part de sa théorie. Enfin, si on peut appeler ça comme ça.

« C’est comme si ces gens avaient fui quelque chose, t’as pas l’impression. Je sais pas ce qu’il en est pour cette poupée, c’est peut-être juste un môme comme ceux de tout à l’heure qui l’a déposée là pour faire flipper les autres visiteurs mais y a d’autres indices qui vont dans ce sens, à commencer par ces outils. »

L’idée de la quarantaine lui revint à l’esprit. Oui, ça serait le comble mais qui sait ? C’est alors qu’un mouvement – le mouvement – attira de nouveau son attention. Et cette fois, elle mit de côté ses appréhensions pour lui courir après. Pas bien loin, cela dit. Et le résultat était assez décevant. Une vieille bâche poussiéreuse suspendue comme un rideau de douche se balançait à cause d’un courant d’air. Elle attendit que la jeune femme la rejoigne pour commenter :

« C’était que ça. Je m’attendais à mieux, je dois dire. »

Décidément, quel curieux endroit elles sont en train de visiter. Bien sûr, ce n’est pas le premier de ce genre qu’elle visite, grâce aux pérégrinations d’Ash et son équipe mais c’est tout de même un peu inhabituel d’en savoir si peu sur l’endroit en question. Ce qui, en fin de compte, d’autant plus prenant étant donné que ça laisse libre cours à l’imagination de s’inventer les histoires les plus folles. Parfois – souvent- impossibles comme une quarantaine suite à un sale virus extrêmement contagieux, des gens qui se défenestrent parce qu’ils se savent condamnés et ainsi de suite. Noomi savait pertinemment qu’elle se faisait des films mais quel super scénario ça serait pour un film de genre. Bref, tout ça pour dire que la grecque ne savait pas si elle était tout à fait d’accord avec Zoë quant à savoir si les jeunes de tout à l’heure n’étaient pas assez malins pour penser à placer ici une poupée comme celle-ci dans le but de faire peur aux visiteurs. Bon d’accord, sans doute pas ceux qu’elles avaient croisé un peu plus tôt mais pourquoi pas d’autres ? De toute évidence, ils n’étaient pas les seuls à venir faire joujou ici, comme en témoignait l’espèce de rituel qui se voulait satanique ou un truc comme ça qu’elles avaient vu juste avant, alors sait-on jamais ? C’est à son tour d’hocher la tête dans la pénombre, ce qui est un bon idiot mais bon, réflexe.

« Peut-être d’autres. A moins que ç’ait appartenu à une petite fille qui a dû l’abandonner dans l’urgence. »

Dans le fond, cette scène faisait grandement penser à Pripiat, la ville évacuée de toute urgence suite à l’incident de Tchernobyl. Noomi n’en avait vu que des photos mais c’était similaire, des jouets délaissés dans une école parce que pas le temps de faire autrement. Et encore, si ce n’était que les jouets… Mais soit, ce n’est pas ce qui s’est passé ici. Zoë proposa alors de descendre au sous-sol. Ô joie, le moment tant redouté arrivait enfin… comme vous l’aurez compris, ça n’enchantait guère la blonde mais il fallait bien rassembler son courage et y aller.

« Allez, qu’on soit débarrassées. »

Par mesure de sécurité, Noomi reprit la tête du binôme en commença la descente lorsque Zoë lui demanda si le live filmait toujours. Elle jeta un rapide coup d’œil.

« Jusqu’ici c’est nickel. »

Et elle avait raison de préciser « jusqu’ici » car, sans vouloir jouer l’oiseau de mauvais augure, plus on s’enfonce sous la terre et moins on capte bien. Alors certes, elles n’ont pas prévu un voyage au centre de la Terre non plus mais c’est une vieille cave. D’ailleurs, alors qu’elle arrive presque au bas de l’escalier menant au sous-sol :

« Ah voilà, on commence à perdre un peu le signal mais il est toujours là pour l’instant. »