into the forest → craig

Craig marche sans s’arrêter depuis des heures. Il n’a pas mal aux jambes, il est habitué, il quittait souvent la capitale de l’Angleterre pour s’aventurer dans les quelques bois qu’il trouvait, ceux qui ont la chance de ne pas s’être faits rasés pour y construire de grands immeubles ou bâtiments en tous genres. Le groupe qu’il suivait il y a quelques temps semble bien loin de lui et de Noomi. Il pourrait presque penser que c’est un coup monté et que cet égarement a été recherché, parce que ça s’est passé sans qu’il s’en rende compte. Il était aux côtés d’autres personnes désireuses d’aventures et la minute d’après, il n’était plus qu’aux côtés de la blonde. La seule chose qui lui déplaît, c’est l’idée de passer une nuit entière ici. Et il voit que le soleil se fait de plus en plus rare, à travers les feuillages. Il sait que si la nuit tombe, ils ne pourront plus bouger, et son sac ne contient pas de quoi dormir, ce n’était pas prévu au programme. Il ne peut pas s’empêcher de rire bêtement à la remarque de Noomi, il avait très bien remarqué ce détail, inutile de le préciser. Ils s’arrêtent de marcher pour détailler le terrain, pour essayer de se repérer. S’il a préféré suivre tout un groupe ainsi qu’un guide, c’est parce qu’il ne connaît pas cette forêt, c’est la première fois qu’il s’aventure ici. ▬ J’ai pas pensé à laisser des bouts de pain derrière moi. Il la regarde, rigoler des mauvaises situations, c’est sa manière à lui de s’en sortir. Et puis il n’a pas peur, s’ils sont perdus, qu’est-ce qu’il peut leur arriver ? Il va faire de plus en plus froid, la seule chose qu’ils devront faire, c’est se réchauffer tout en faisant attention à ne pas céder à la panique. ▬ Ni à faire des croix sur les arbres pour voir si on est déjà passé par là, t’sais, comme dans les films. Cette fois, il regarde autour de lui, il a dit une bêtise mais il pourrait presque être sérieux. Il reste quelques minutes avant que la nuit tombe complètement, il n’est pas encore résigné. Il n’a pas détaillé le paysage en marchant, il s’est contenté de respirer l’air frais et pur qui provient des arbres autour de lui. La prochaine fois, il s’attardera sur ce qu’il y a autour de lui. Il regarde quand même un arbre, dans l’espoir d’y trouver quelque chose qui sortirait de l’ordinaire, une chose qu’il aurait pu apercevoir durant sa marche désintéressée. Mais non, il ne voit rien de plus que du bois, du bois et encore du bois. ▬ J’ai toujours rêvé de savoir comment se sentait tarzan quand il vivait dans la jungle. Bon, ils ne risquent pas de tomber sur un tigre ou sur des gorilles, mais l’idée est là. Il n’a pas la solution miracle dont rêverait Noomi en cet instant, il est autant perdu qu’elle, peut-être même plus. Il n’était pas très attaché au groupe, eux n’hésitaient pas à parler et à poser des questions, lui, il était en retrait, comme toujours. Une chose qu’il n’a pas prévu vient cependant le déranger, le côté fier qu’il revendiquait il y a encore quelques secondes s’effondre. La pluie. Enfin, une sorte de pluie. Pas vraiment forte pour qu’on puisse la considérer comme telle, mais suffisamment présente pour être désagréable. Il soupire longuement, les bras ballants, lui aussi n’a pas de solutions au calvaire dans lequel ils viennent de se mettre. ▬ J’ai pas pensé à emmener un parapluie.

Il n’a aucune idée de qui sont les héros de cette histoire pour gamin, ceux qui font tout pour marquer leur chemin. Lui et les contes, ça fait 1000. Autant dire qu’il ne serait même pas capable de dire que c’est dans le petite chaperon rouge que la grand-mère se fait remplacer par le loup. Et ce n’est même pas exagérer que de dire ça, petit, il ne s’intéressait pas aux histoires de châteaux et de dragons comme les gosses de son âge. Les fées, les princesses, le prince charmant et les chevaux blancs, ça a jamais été une part de sa vie. Tous comme les nombreux livres que l’on laisse à côté du lit d’un enfant, quand on prévoit de lui faire une lecture le soir. Pour lui, ça s’arrêtait à un « bonne nuit mon lapin », et il s’endormait après avoir dessiné ses propres histoires. À cette époque, il ne se doutait pas qu’il allait devenir peintre, mais il ne voulait déjà pas qu’on lui prémâche son travail, il préférait exploiter ses idées que se contenter de celles des autres. Bref, tout ça pour dire qu’il a des références que, finalement, il ne connaît pas si bien que ça. Tarzan peut être compté également là-dedans, bien qu’il ait vu les quelques films qui sont sortis sur ce sujet. Le brun serait capable de la prendre au mot, de tenter de grimper dans les arbres, mais avec la pluie qui commence à tomber sur eux, ce serait prendre des risques inutiles. ▬ Prochaine fois qu’il fait grand soleil j’te jure que je grimpe. Une promesse qu’il ne tiendra peut-être pas, après cette expérience, peut-être qu’ils ne feront pas de randonnées avant un long moment. Ou alors, peut-être qu’ils se retrouveront dans le même groupe sous peu, après s’être promis d’être plus prudents, qui sait. Le tatoué ne peut pas s’empêcher de rire en l’entendant mentionner sa tente Quechua, il l’imagine bien avec un sac plus grand et plus lourd qu’elle. ▬ Mais oui, puis la fois d’après t’emmènera toute ta maison parce que la tente est pas assez confortable, c’est ça ? Il la taquine, mais c’est vrai que l’idée de prévoir le pire pour une randonnée est rigolote. Normalement, ça dure quelques heures et une fois le circuit terminé, tout le monde rentre chez soi sans le moindre problème. Ils se sont biens trouvés ces deux-là, c’est sûrement les deux seuls capables de se perdre alors qu’il y avait tout un groupe avec eux, dont un meneur. Quand on est seul ou à deux, quand on ne connaît pas le terrain, là, le fait de s’être perdu est facilement justifiable. Pour le coup, ils n’ont pas vraiment d’excuses, ils ne peuvent s’en vouloir qu’à eux-mêmes. ▬ Bon, est-ce que tu connais quelques trucs de survie ? Genre t’sais quand il fait nuit, suivre les étoiles ou j’sais pas, planter un bâton et voir où le soleil va ? Parce que moi à part man vs wild j’ai jamais regardé quoi que ce soit et c’est pas l’idée de boire sa pisse à l’aide d’un t-shirt qui va nous aider, pour le coup. Il regarde le ciel dans l’espoir d’avoir un signe de celui-ci, mais à part se prendre des gouttes dans les yeux, il ne gagne rien du tout. Foutu temps, foutue forêt.