never, never gonna give you up. (Vesper - loterie)

C'est vrai qu'habituellement, il y a des pancartes qui indiquent de ne pas toucher, encore moins voler, bien entendu, ça va avec la logique des choses. « Ah oui.. maintenant que je regarde de plus près, elle est pas mal cette pelouse. » Dit-il avec une pointe d'humour et en même temps, ce n'est pas totalement faux, car si c'était autorisé, la pelouse ne serait sûrement pas aussi fraîche. Après, ce n'est pas un expert du gazon hein, c'est donc peut-être effectivement du faux. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas le sujet, pour l'heure, ils ont des plantes à voler, enfin, Vesper, elle s'y connaît et c'est surtout pour elle qui fait cela, sinon il ne serait sûrement pas là, debout sur la pelouse à regarder dans tous les sens comme s'il attendait son dealer et sa dose du jour, pas du tout louche. C'est ce que Rafa devient nerveux dans ce genre de situation et il l'avait prouvé avec Noomi, face au receleur, en même temps, attendre un type étrange dans une ruelle délabrée, il n'y a jamais rien de bon qui vous attend. Heureusement, tout c'était bien déroulé, on va mettre cela sur le coup de la chance. Cette fois-ci, c'est la même chose, excepté qu'il n'a pas son arme sur lui et de toute manière, il ne va pas commencer à tirer dans tous les sens.

Ok, sûrement qu'il en faisait des tonnes et puis, au fond, ce n'est pas plus mal, après cela, ils n'auraient vraiment pas pu faire comme si rien n'était, surtout s'il avait fallu croiser à nouveau la dame et qu'elle aurait demandé de fouiller le sac de Vesper. La paranoïa fait peut-être un peu partie de son stress post-traumatique, mais ce n'est pas quelque chose qu'il aime parler et il préfère ignorer les signes, parce qu'il est comme cela Rafa, préfère que ça soit les autres qui s'en sortent. « Tu as raison, il y a l'homme à la tête dure. » Il ne peut s'empêcher de pouffer de rire en s'imaginant à nouveau la scène, celle où le vase qui s'était fracassé contre la tête du pauvre russe qui n'avait rien demandé. « Non, personne, ma famille se trouve en Colombie et elle est toujours vivante. » -pour la plupart-. Et c'est sûrement là, qu'il va devoir enterrer ses parents, enfin, pas maintenant, bien sûr, mais c'est leur terre natale et il comprend cette importance d'être auprès des siens. Après être entré dans l'armée, eux, ils sont retournés vivre à Medellín. « Allons-y. » Ils sortent du parking pour rejoindre le cimetière à quelques mètres d'où ils sont. « Une promenade entre les tombes le jour de la Saint-Valentin, je ne sais pas si on peut faire plus original. »

Ah, c’est vrai qu’assommer un pauvre type – pas si pauvre que ça au sens figuré puisque c’est un russe, ce qui veut dire qu’il est forcément coupable de quelque chose, quoi que ça puisse être – à coups de vase – ça n’avait rien d’intentionnel, c’est juste qu’il s’était trouvé sur la route dudit vase – est bien plus grave que de subtiliser quelques boutures. Son rire se joint alors au sien parce que ce souvenir ne cesserait jamais d’être amusant. Il aurait pu avoir une toute autre conclusion : le mec aurait pu mourir d’une commotion cérébrale ou quelque chose dans ce goût-là mais ce n’est pas le cas alors ils peuvent bien en rire. Puis, après avoir proposé de passer directement au cimetière, elle demande si, des fois, quelqu’un qui Rafa connaît n’y serait pas enterré. Ils pourraient même s’arrêter quelques instants pour rendre hommage, mais il lui apprend que non, que toute sa famille est bien vivante et à Medellin. Ce n’était pas vraiment à eux qu’elle faisait référence, plutôt à des amis, des collègues, etc. Mais elle n’irait quand même pas se plaindre que la réponse soit négative. Elle acquiesce donc dans mouvement de tête et ils passent les grilles du cimetière.

Endroit charmant pour une Saint-Valentin réussie s’il en est comme le fait alors remarquer Rafa. Autre fait étrange, la blonde se met à rire. Du moins, ça pourrait sembler étrange à bien des gens d’avoir l’audace de rire sur une terre consacrée, elle-même consacrée au recueillement mais pourquoi pas, après tout ? Les morts doivent carrément se faire chier en ne voyant jamais que des têtes d’enterrement. Enfin, si tant est qu’ils restent là parce que si elle était un fantôme, elle irait très probablement voir du monde au lieu de rester là. Un peu de gaieté ne leur ferait donc pas de mal.

« Pour enchaîner, on pourrait se faire un MacDo au lieu d’un resto hyper fancy. »

Portant son rosier d’un côté, sa main libre dans celle de Rafa, ils évoluent entre les stèles en ne croisant personne.

« Je me demande s’il y a des gens ayant perdu leur âme-sœur qui passe leur Saint-Valentin au cimetière. Je suis sûr que ça existe mais pour le coup, ça me semble triste. »

Ou pas, ce n’est que son point de vue de personne connaissant assez peu la mort en fin de compte quand on pense que sa grand-mère est toujours en vie et au top de sa forme. Maintenant qu’elle y pense, elle se dit que son père pourrait être mort mais ça ne lui fait rien puisqu’elle ne sait pas qui c’est. Ni elle, ni personne chez elle, c’est la coutume.

Il est difficile de ne pas s'en souvenir, surtout que tout juste après l'incident, ils ont carrément sauté d'un toit à un autre. Cette simple action avait confirmé qu'il devrait faire encore plus d'efforts pour se remettre en forme, non pas qu'il ne le soit pas, enfin moins que lorsqu'il avait vingt ans. Bref, tout cela pour dire que c'est un moment inoubliable et c'est sûrement le cas pour le Russe, quoi qu'il ait peut-être déjà oublié ce moment avec quelques verres de vodka en trop. Ce n'est quand même pas à tous les jours qu'on se prend un vase sur la tête, encore une fois, c'était purement accidentel et au final, personne n'est mort et c'est l'important. Rafael l'informe que sa famille ne se trouve pas dans le cimetière, quant aux soldats, certains sont morts au combat, d'autres sont retournés dans leur pays ou sont restés sur le champ de bataille. Il a gardé contact avec quelques-uns d'entre eux, seulement ils ne se voient pas très souvent, la dernière fois, cela remonte à l'été dernier, lors d'un camp d'entraînement pour les futurs soldats, les jeunes qui voulaient avoir un avant-goût de ce métier, un très mince aperçu, car personne n'est préparé à la guerre et encore moins aux impacts que cela engendre.

En tout cas, les voilà qu'ils viennent de passer les grilles du cimetière après une courte virée au jardin botanique. « Carrément, on peut faire ça. » Laissons tomber le dîner aux chandelles et avec les pétales de roses étalées sur tout le plancher de la maison, optons plutôt pour un big mac et la boisson gazeuse en fontaine, parce que c'est plus leur truc à eux. « Peut-être pour ceux ayant perdu une épouse ou un époux.. mais c'est vrai que c'est pas mal triste. » Ils avancent lentement, il regarde les différentes tombes, aussi dépriment que cela puisse paraître. Il s'arrête pour lire une description, lorsqu'il relève aussitôt la tête en entendant des bruits étranges, comme des grattements ou voire même un grognement. « Je ne suis quand même pas cinglé hein, tu entends toi aussi ? » Histoire de savoir que cela n'est pas uniquement dans sa tête, sans compter qu'il pense distinguer une ombre dans la lueur.

La simple idée de passer quelques minutes dans un MacDo le soir de la Saint-Valentin pourrait filer des boutons à certaines ; pas assez chic, pas assez glamour, pas assez de paillettes dans les yeux. En ce qui concerne Vesper, à une époque, elle a en bouffé des paillettes et du glamour, à tel point qu’aujourd’hui, tout ça ne fait clairement pas le poids contre un burger, des nuggets et des frites bien grasses. Le tout arrosé d’un milkshake au chocolat, bien sûr. Le MacDo, le cimetière, pour elle, c’était dans la logique des choses. Et pas seulement parce qu’une consommation immodérée de l’un conduisait directement à l’autre, non, juste parce qu’elle aime bien l’idée que ces deux endroits n’ont absolument rien à voir avec l’idée qu’on se fait généralement d’une fête des amoureux typiques mais que ça ne change rien au fait qu’ils soient pourtant amoureux tous les deux. Ils conviennent donc que c’est là-bas qu’ils feront leur dîner de la Saint-Valentin – là-bas ou même carrément dans la voiture, sur le parking, hein, c’est peut-être encore mieux même si elle se doute bien qu’il ne doit pas y avoir foule un jour pareil – puis la texane se met à se poser des questions étranges. Et un peu déprimantes, il est vrai mais c’est surtout parce qu’elle n’y a jamais songé jusqu’ici et que ça lui semble des plus probables.

Bref, ils s’arrêtent pour lire les épitaphes ; parfois, certaines valent le détour, comme si les défunts occupant les tombes avaient voulu faire rire leurs visiteurs depuis l’au-delà ce qu’elle trouve être de bon goût, sans doute ferait-elle la même chose le moment venu. Quand tout à coup, l’atmosphère change. Le ciel s’assombrit et des bruits se font entendre. De concert, Rafa et Vesper tournent la tête dans la même direction.

« Non, non, je l’entends aussi. Dis-moi, y a des carcajous dans ce pays ? »

Aussi appelés gloutons et en anglais wolverine. Oui, ça démystifie sacrément celui des X-Men une fois qu’on sait ça, d’autant que la bestiole en elle-même est assez mignonne – mais il ne faut surtout pas se fier aux apparences, ils sont redoutables. Si elle demande ça c’est parce qu’elle ne pense pas une seule seconde qu’il puisse s’agir d’un esprit quelconque mais que ça lui fait plutôt penser à ça.

« Si oui, alors on devrait pas rester plantés là. »

Cette fois, c’est à son tour de lui prendre la main et de se mettre à presser le pas. Mais vers où ? Énormément de stèles de pierre blanche n’offrant pas vraiment d’abri. Jusqu’à ce qu’ils finissent par tomber sur une espèce de mausolée. Elle en ouvre la lourde grille en fer forgé et s’enfonce sous terre, dans la crypte. De mieux en mieux…

« Promis, on va pas rester longtemps ici, juste le temps que ça se tasse. »

Au fond, l'important n'est pas vraiment le lieu du restaurant, ni la ville, ce qui compte réellement c'est d'être avec la personne que l'on aime. Il se fiche pas mal de tout cela, avant Vesper, ce n'était qu'une fête comme une autre et pour être honnête, cela n'a pas vraiment changé, heureusement qu'elle n'est pas comme toutes ses femmes qui cherchent à tout prix que tout soit parfait, avec les pétales tout le kit. Après un tour au cimetière, ça va être réconfortant d'avoir tout ce gras et ce sel dans la bouche, enfin peut-être moins pour le cœur et les autres organes du corps, mais ce n'est pas comme s'ils ne pouvaient pas se permettre de temps en temps un fast food, comme on dit, on n'a qu'une vie à vivre, autant la vivre et mourir heureux. Cette journée qui devait être ensoleillée d'après la miss météo à la télévision, change de direction, les nuages qui commencent à envahir le ciel, cachant les rayons du soleil. Le ciel s'est donc rapidement couvert avec quelques nuages et pour couronner le tout, d'étranges bruits se font entendre pas très loin de Vesper et de Rafael. Il préfère demander si ce n'est pas que son imagination, après tout, cela ne serait pas la première fois et il veut éviter de paniquer une seconde fois en moins de cinq minutes, ce serait bête de tout gâcher. Néanmoins, elle le rassure, il n'est pas seul à pouvoir entendre. « Je ne crois pas non, mais en effet, il vaut mieux s'en éloigner. » Il n'en a jamais entendu parler, ni vu en personne, mais peut-être qu'il se trompe, puisque ce n'est pas un expert en faune, de toute manière, il vaut mieux éviter de s'en approcher. Rafa se laisse attraper la main, difficile de trouver un endroit quand tout ce qu'on y trouve, ce sont des tombes. Cela dit, pas impossible apparemment, un coup de chance peut-être, mais ils arrivent à trouver un abri. « Pas de soucis.. pourvu qu'on ne reste pas enfermé ici. » Cela ne lui tente pas de passer la nuit à côté des dizaines de toiles d'araignées qui sont habitées par des bestioles à huit pattes, huit yeux, non merci. Il allume la lumière de son téléphone pour pouvoir éclairer les lieux. « On devrait peut-être vérifier s'il y a une sortie de secours, sinon peut attendre ici, ça me va aussi. » On ne sait jamais.

De la même façon que, sans en avoir jamais croisé, on sait par instinct qu’il ne vaut mieux pas trop s’approcher des serpents, des mygales, des scorpions, Vesper sait également, sans pourtant en avoir jamais vraiment vu un de près – c’est qu’on trouve des crotales avec beaucoup moins de difficulté par chez elle -, qu’il ne vaut surtout mieux pas s’approcher d’un carcajou. Surtout si on tient à ses yeux et les siens sont pas trop mal. Raison pour laquelle elle est rassurée qu’il n’y en ait pas en Nouvelle-Zélande. Tout le reste elle peut gérer ou presque. Ce qui ne les empêche pas d’en venir à la conclusion qu’il leur faut un abri temporaire. Seulement, dans un cimetière, et dans ce cimetière-ci en particulier parce qu’ils ne sont pas non plus quelque part en Angleterre où on trouve des mausolées en veux-tu, en voilà abritant des tas de familles autrefois très haut placées mais à qui plus personne ne vient rendre visite aujourd’hui. A croire qu’en Angleterre, il n’y avait jamais eu que des nobles, c’est fou. Et faux aussi, elle s’en doute bien mais c’est l’impression que ça donne. Bref, tout ça pour dire que, s’ils veulent trouver un abri dans ce cimetière-ci, le mieux serait encore de déterrer un squelette pour prendre sa place dans le trou. Mais cette perspective ne l’enchante guère.

Une chance qu’ils finissent donc par tomber sur un petit bâtiment s’enfonçant sous terre. En y pensant, est-ce bien différent de descendre là-dedans que de s’enterrer en compagnie d’autres cadavres ? La texane aurait tendance à dire que quand même, oui, principalement parce qu’ils en sont séparés par des murs de béton. Vesper sort son téléphone à son tour pour constater qu’il n’y évidemment pas de réseau, un cliché qui s’avère très vrai, la plupart du temps quand on se retrouve sous la terre. Heureusement que ce n’est pas le but d’appeler quelqu’un qu’elle le sort mais bien pour se servir de sa lampe. Deux ne seraient probablement pas de trop.

« Ouais, bonne idée, faisons le tour. »

La pierre de la crypte fraîchit l’endroit et un frisson remonte le long de sa colonne vertébrale. A choisir, elle aimerait tout autant ne pas avoir à rester statique. Elle longe donc les murs tout en projetant le faisceau de sa lampe sur les murs. Des rangées de petits casiers. Sans doute une sorte de columbarium. Il en faut aussi. Pourquoi sous terre en revanche ? Mystère. Peut-être une question d’esthétisme ou encore de place.

« Hé ben, heureusement qu’il y a les roses, sinon on pourrait absolument pas dire que c’est la Saint-Valentin. »

Cette idée la fait rire, son rire se répercutant en écho contre le béton.

« Là , une sortie de secours. »

Qui doit probablement déboucher sur l’autre côté du bâtiment.

Les voilà presque six pieds sous terre, mais toujours vivants et loin de la bestiole ou de ce qu'il y avait derrière eux. À vrai dire, il n'est pas trop certain de vouloir savoir ce que c'était et il doute que l'animal, si c'est bien cela, arrive à ouvrir la porte, mais s'ils entendent une porte grinchée, alors, ils sauront que ce n'était pas le mammifère. Quoi qu'il en soit, pas de réseau, mais de toute façon, qui pourraient-ils bien appeler ? Pour l'heure, la lampe de poche est plus nécessaire et avec celle de Vesper, c'est encore mieux pour éclairer l'endroit et se faire une idée d'où ils se trouvent. Rafael propose de fouiller, du moins, de trouver une seconde porte, il ignore si l'endroit est prévu pour cela, mais ils n'ont rien à perdre à chercher une porte de sortie pour pouvoir quitter ce lieu. Il y a une étrange odeur et ce n'est pas seulement à cause de la poussière et du renfermé. Il soupire légèrement, mais cet endroit est si déprimant et il se dit que dans quelques années, ça sera peut-être sa place, qu'il soit rapatrié en Colombie ou non, cela ne change pas grand-chose, ils vont tous finir sous terre ou dans une urne. Quoi que, c'est encore plus démoralisant d'y penser. « Joyeuse Saint-Valentin, chérie ! » Il y a un peu de sarcasmes, mais il arrive tout de même en rire, ce n'est clairement pas la journée de rêve, mais bon, au moins, on ne peut pas dire qu'ils s'ennuient tellement, pas comme s'ils étaient devant un repas gastronomique, à ne rien dire, il imagine bien cela chez les personnes bourgeoises. Vesper trouve une porte et il s'empresse de l'ouvrir, tout au bout, il y a une lueur qui semble sortir tout droit de l'extérieur. « Au fait, on devrait trouver un nom à notre chat, plutôt que de toujours l'appeler -le chat- ou -le chat russe qu'on a trouvé dans une salle de bain dégoûtante.- » Qu'il dit pour plaisanter. « Je pensais à Pumpkin. J'ai aperçu une vieille citrouille plus loin, d'où mon inspiration. Sinon Artyom.. tu avais des idées de ton côté ? » Il continue d'avancer vers les escaliers plus loin. « Tout ça me donne vraiment faim. »

La mort, Vesper a décidé il y a bien longtemps de ne jamais y penser. Sans quoi elle finirait par ne plus pouvoir bosser étant donné que pratiquement à chaque tournage, elle risquait sa vie. Ce qui serait dommage puisqu’elle aime bien ça. Oui, la texane fait clairement partie de ces cinglés qui aiment mettre leur vie en péril. D’où est-ce que ça peut bien lui venir ? Elle n’en a pas la moindre idée – parfois elle s’imagine que son père devait être un risque-tout et que voilà ce que ça donnait lorsqu’on fécondait une Walker -, tout ce qu’elle sait c’est qu’il en a toujours été ainsi. Elle n’a pas peur de la mort ni même de ce qu’il peut y avoir après – rien selon elle – mais maintenant, elle a quelque chose à perdre qui change un peu la donne. Ou plutôt quelqu’un en la personne de Rafa ici présent. Ce soupir lui fend le cœur et elle vient rapidement se faire une place entre ses bras – oui, toujours avec son rosier - tandis qu’il lui souhaite ironiquement une bonne Saint-Valentin et lui donne un baiser renversant.

« Bonne Saint-Valentin quand même, mon amour. »

Avant de pouffer et de se remettre à la recherche d’une autre porte. Ce qu’elle ne tarde pas à trouver. Une porte de secours dans un tel endroit, ça aussi c’est ironique, comme si les gens qui ont conçu cet édifice s’étaient dit qu’il fallait à tout prix une issue en cas d’incendie. Alors d’abord, un incendie dans un endroit si humide lui paraît presque impossible et puis qui s’enfuirait ? Les tas de cendres au fond de leur casier ? Non, sans les gens qui viennent se recueillir. Ils doivent être plus nombreux les autres jours. Rafa ouvre la porte donnant sur un couloir donnant lui-même sur l’extérieur. Et alors qu’ils le traversent, il propose de trouver un nom à leur chat. C’est vrai que depuis qu’ils sont rentrés, ils continuent de l’appeler « Le Chat » et c’est tout de même un peu nul. La blonde rit à l’autre nom qu’il leur arrive de lui donner.

« Artyom ? C’est quoi ? Pumpkin c’est mignon, ça lui irait bien. Puis tant qu’on l’appelle Miaouss, moi ça me va. »

Non parce que bon, les Pokémon, ça va bien cinq minutes.

« Moi aussi. Tu veux qu’on passe au drive et qu’on se trouve un endroit correct pour pique-niquer ? »

Ils peuvent même revenir ici – enfin, sur les hauteurs pour observer le magnifique panorama, les doigts tout graisseux.

On ne va pas le nier, la mort est un sujet démoralisant, pourtant, ils se retrouvent dans un des lieux les plus déprimants sur la planète terre. Il n'a pas envie de se jeter sur le sol en pleurant, le mieux est vraiment de ne pas y penser. C'est un soldat, alors, il faut dire qu'il a connu pire. Il a frôlé la mort, c'est vrai que cela renforce cette idée de mourir un jour, il le sait. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas le sujet et heureusement qu'ils ne sont pas non plus dans un remake de meurtre à la saint-valentin. Ils peuvent en rire de cette journée dans un cimetière, entouré d'urnes et de cette ambiance presque macabre. Rafael la serre contre lui et l'embrasse. Il se met à rire à son tour, ce n'est pas une journée chargée en romantisme, mais qu'importe, il est heureux d'être à ses côtés et de pouvoir la partager à ses côtés, enfin, c'est vraiment tout ce qui compte pour lui, le reste, il s'en fiche, tant qu'ils sont bien ensemble. D'ailleurs, ils sont presque déjà sortis de cet endroit qui lui donne la chair de poule. Il lui propose de trouver un nom pour ce malheureux chat qu'ils ont trouvé en Russie et qu'ils ont décidé d'adopter. « Un nom russe d'un personnage de jeu vidéo, je ne sais pas, c'est venu comme cela. » Il glousse. « Miaouss. J'ai l'impression que ce serait un peu comme si on lui répondait quand il se met à miauler. » Enfin, ce n'est pas comme si les gens ne parlaient pas à leur animal de compagnie non plus, c'est juste qu'il trouve l'idée plutôt marrante. C'est qu'il ne connaît pas trop les pokémons, c'est qu'il a passé tellement de temps à l'extérieur, à essayer d'arrêter une guerre à ne plus finir et à son retour, il n'a pas tenté de tout savoir d'A à Z. Quoi qu'il en soit, ils arrivent au bout du couloir. « Oui, ça me va, je voulais qu'on aille tout en haut pour le coucher du soleil, mais je crois que c'est mort. » Et puis, ce n'est pas comme si le soleil allait mourir demain, du moins, croisons quand même les doigts, ils pourront toujours revenir ou le regarder ailleurs. Ils sortent enfin, il prend une grande bouffée d'air frais. « Ahh.. maintenant, McDonald's nous voilà. » Il entrelace ses doigts avec ceux de Vesper et ils se dirigent vers le restaurant.

Le moins qu’on puisse dire c’est que leur arrêt dans cette espèce de nécropole est un passage éclair. En même temps, c’est pas vraiment le genre d’endroits qui donne envie de s’arrêter pour faire un brin de causette – ou alors au sujet de son propre testament mais on a tout de même connu plus fun -, il est donc tout à fait normal de chercher à en sortir le plus rapidement possible. Et ça tombe bien puisqu’ils tombent sur une sorte de porte coupe-feu. Le chemin vers la lumière du jour, rendant les lampes de leurs téléphones en moins en moins utiles, si bien que Vesper finit par ranger le sien tandis qu’ils discutent du futur nom qu’ils vont donner à leur chat. La blonde n’a rien contre le nom d’un personnage de jeux vidéo, encore moins un russe puisque, qu’ils le veuillent ou non, leur chat est russe mais :

« Le problème c’est que je risque de jamais m’en souvenir et finir par l’appeler Poutine. »

Ou Rasputin puisqu’elle a longtemps cru qu’ils étaient de la même famille. Bref, Pumpkin c’est plus simple, et puis ça lui rappelle Misery. Sans compter que ça fait également un peu oublier les origines de leur chat qui sont une tare plus qu’autre chose à ce stade. Bref, elle sourit à la remarque de Rafa, il n’a pas tort.

« T’as raison, ouais, ça fait un peu zinzin. »

Et bien qu’elle n’a rien contre les gens zinzins, elle en a rencontré des tas qu’on pouvait sans difficulté aucune qualifier de la sorte, il ne faudrait quand même pas qu’en plus de leur rappeler sans arrêt qu’ils deviennent vieux, on rajoute les frais d’un début de sénilité.
Et c’est ainsi que, comme pour prouver qu’ils n’étaient ni des vieux gâteux ni un couple de guimauves, ils décident d’aller manger au MacDo. En voilà un truc de jeunes. Et de moins jeunes aussi car tout le monde rêve secrètement de leurs wraps mais, Saint-Valentin oblige, ce jour-là, il n’y avait que des ados faisant la queue.

« Tu crois qu’ils ont un menu spécial amoureux pour l’occasion ? »

Ça serait tout bonnement hilarant ; imaginer un ado boutonneux plonger des patates dans l’huile de friteuse pendant qu’il leur chante Love me Tender ainsi qu’une boîte de nuggets à partager alors que vraiment, les nuggets ça se partage pas, surtout ceux-là. Ça la fait rire. Tout comme la petite blonde qui se trouve juste devant eux et qui en train de mettre des coups de coude à son copain pour qu’il remarque qu’elle est en colère pour X ou Y raison.

« T’étais comment quand t’étais ado ? »

Question qui lui vient le plus naturellement du monde suite à cette observation.

On va dire qu'il préfère sortir rapidement de cet endroit et pas seulement parce qu'il en a des frissons, qu'il a peur de se faire piquer par une araignée ou qu'une urne tombe à ses pieds pour le terroriser. Mais il aime mieux partir pour aller manger un fast-food, qui n'est sûrement pas bon pour la santé, certes et tout le monde le sait, mais on s'en fout pas mal, c'est qu'il a vraiment hâte de finir la journée en beauté avec Vesper. Donc, heureusement, ils ne restent pas coincés pas dans ce lieu lugubre et bien déprimant et pourvu que la chose qui était derrière eux ne soit plus dans les parages. Il manquerait plus qu'ils reviennent ici pour manger, non merci. Rafael range à son tour son téléphone après avoir retiré le mode lampe de poche. « Tu veux dire Pudding ? » Dit-il en riant, parce que c'est ainsi qu'il avait appelé monsieur le président, lorsqu'ils étaient là-bas. Néanmoins, il comprend tout à fait et puis, il n'est pas trop doué avec les noms, alors c'est plutôt sorti de la première inspiration qui lui est venu en tête. Pumpkin, c'est plutôt mignon et puis, c'est assez original, du moins, il suppose, puisqu'il ne connaît personne qui a un animal avec ce prénom. Il pouffe de rire, en tout cas, voilà une chose de faite avant de déménager dans leur futur maison.

Les frits salées au maximum comme pas possible font rêver Rafael et bien qu'avec son âge, il ferait mieux de faire attention, car même s'il est en début de quarantaine et qu'il est physiquement plutôt en forme, c'est un peu là que les problèmes commencent à survenir, à ce qu'on dit. « Hm, bonne question. » Il ne sait pas du tout si cela existe, mais il n'y a qu'une façon de le savoir et c'est de demander à la caissière quand elle aura une petite minute. « J'imagine que tu te fous de moi ? » Qu'il dit en riant, bah ouais, ils font tellement de publicités que finalement, ils l'auraient sûrement su, non ? « Plutôt tranquille. » Un large sourire s'affiche sur son visage, il n'était pas le type le plus populaire ou le nerd du lycée, mais il était entre les deux selon lui, un peu espiègle aussi. « J'étais plutôt timide avec les filles. À vrai dire, il y avait une fille sur qui je flashais et je n'ai jamais réussi à lui dire quoi que ce soit, même les baisers qu'on s'était échangé, je suis parti à l'armée sans me retourner. J'ai écrit une lettre pour dévoiler mes sentiments, mais je l'ai plutôt conservé. J'ai l'air d'un idiot, maintenant que je le dis à voix haute. » Il se passe une main dans les cheveux et ce n'est pas plus mal hein, sinon ils n'en seraient peut-être même pas là. « J'aimais bien jouer des farces, mais je dépensais surtout mon énergie dans les activités sportives. Et toi ? Attends, laisse-moi deviner, une jolie blonde rebelle qui en faisait craquer plus d'un à la fois ? »

Un petit pique-nique sur les pierres tombales à base de nourriture de fast-food, ça serait quelque chose. Mais dans le fond, Vesper comprend que Rafa n’a pas plus envie que ça de s’attarder dans ce lieu. Après tout, d’ici quelques dizaines d’années, ils auraient tout le loisir de passer l’éternité dans un endroit de ce genre. Mais sans doute pas ici. Peut-être que la blonde se ferait rapatrier chez elle, au Texas pour l’occasion et que Rafa rentrerait en Colombie, auprès du reste de sa famille, lui. Ou qui sait ? Peut-être un jour changeraient-ils de coin et qu’ils seraient enterrés ensemble. La texane n’en sait rien et bien que ça ne lui fasse ni chaud ni froid en fin de compte, elle se rend tout de même compte que ce n’est sans doute pas le sujet le plus fun qui soit et elle n’a pas envie d’y songer plus que ça alors ils prennent la direction du resto sans un mot de plus à ce propos. Préférant parler de leur chat ainsi que du fait qu’ils n’ont même pas encore pris la peine de lui trouver un nom, chose à laquelle ils s’attellent sans plus tarder. Pudding, ça la fait toujours rire ; nul doute que le fameux président de la Russie serait vraiment ravi d’apprendre qu’on l’appelle parfois ainsi.

« Pourquoi pas ? C’est mignon aussi ! »

Pas comme ce président, en revanche. Par contre, une fois sur place, la blonde ne peut que se demander s’ils ont sortis un menu spécial amoureux pour l’occasion. Il s’agit d’une vraie interrogation parce qu’elle n’a pris le temps de regarder ce qu’on propose à la carte : elle sait déjà ce qu’elle va commander. Sourire éclatant aux lèvres, elle répond :

« Même pas, ça me paraît pas impossible du tout venant d’eux. »

C’est ça le plus triste. Ou le plus drôle, au choix. Puis, pendant qu’ils font la file, elle lui pose une question qui lui vient subitement à l’esprit. A savoir comment il était ado. Si elle l’aurait imaginé tranquille et timide avec les filles ? Peut-être pas mais ça ne l’étonne pas outre mesure non plus, elle trouve qu’il dégage cette sensation de force tranquille, parfois même d’eau qui dort qu’il vaut mieux ne pas trop pousser à bout. C’est cette histoire d’idylle d’adolescent qui la touche le plus. Elle trouve ça mignon.

« Pas du tout, c’est adorable. Mais est-ce que ça signifie que je dois craindre qu’elle débarque un jour pour tirer cette histoire au clair ? »

Là en revanche elle le charrie. Puis elle fait mine de réfléchir.

« T’as pas tort pour me côté jolie blonde rebelle. Je tenais pas en place ; dis-toi que maintenant, comparé à cette époque, je suis calme, posée. J’étais aussi très cavalière avec les garçons, du genre à les mener par le bout du nez parce que c’est ce qu’on m’avait appris et c’est aussi ce que les gars de chez moi attendent de leurs femmes. Mais il n’y en a eu qu’un seul que je me suis amusée à torturer. »

Pauvre Chris, ça lui fait un peu de peine quand elle repense à l’enfer qu’elle lui a fait vivre autrefois.

Il se met à rire, il est évident qu'avec un nom de même, ils ne pourront pas oublier l'endroit où ils l'ont trouvé, déjà parce que c'est plutôt hors du commun, mais parce qu'il risque d'avoir l'image du président Poutine dans la tête. Honnêtement, il n'a pas tellement envie que ce type occupe ses pensées, ça sonne vraiment étrange, maintenant qu'il imagine ça. Quoi qu'il en soit, ils pourront toujours en discuter davantage à la maison et voir comment le chat réagit, sait-on jamais s'il préfère miaou ou pumpkin, voire pudding. Ils passent d'un sujet à un autre, celui du menu du McDonald's, il pensait à une blague, après tout, ce serait bien la première fois qu'il voit un menu pour couple, enfin, pour un groupe, oui, il manque plus qu'à vérifier pour en avoir le cœur net. « Pas totalement faux, on ne sait jamais. » Ils avancent dans la file d'attente et Vesper lui pose une bonne question, à savoir comment il était lorsqu'il était adolescent, cela remonte, mais il en a encore quelques souvenirs, ce n'était donc pas le mec le plus populaire, ni le plus rejeté quand même, mais il gardait la tête sur les épaules, sauf quand il s'agissait de parfois déconner pour jouer de mauvais coups, il n'était pas sérieux toute la journée et difficile de l'être, avec le duo qu'il formait avec Nathan, ils étaient un peu les comiques de service.

Il se met à rire. « Non, pas d'inquiétude de ce côté. » Autant mettre les choses aux clairs, même si elle venait par le savoir, cela ne changerait rien à la situation, puisqu'ils ont chacun leur vie. Maintenant, c'est à son tour de se dévoiler un peu, il avait déjà vu quelques photos, lorsqu'ils étaient au Texas, alors, il se fait déjà une petite idée de comment elle était ou du moins, il l'imagine bien. « Ohh, je vois. » Il lui sourit. « Je me demande ce que cela aurait donné si nous nous étions rencontrés à l'époque et dans le même pays. » Oui, parce que c'est un gros problème quand même, mais il suppose qu'il aurait craqué pour elle, malgré son côté rebelle. Il lui sourit et c'est enfin à eux de commander. Mauvaise nouvelle, pas de spécial Saint-Valentin, en revanche, ils ont droit à un dessert deux pour un, c'est déjà ça. Il prend un big mac et des nuggets pour emporter, qu'ils finiront sûrement avec le chemin du retour et bien sûr, des frites avec le trio. « Je te laisse choisir le dessert ! » Il passe un bras autour d'elle.

Dans le fond, ils prendraient leur décision en fonction du chat. Certes, ce n’est pas comme un chien, ça ne répond pas quand on l’appelle. Enfin si, mais ça ne s’associe pas vraiment à un nom, plutôt à la manière dont c’est dit. Ce qui est une chance en l’occurrence d’ailleurs sinon ils seraient forcés de trouver un nom avec une rime en A étant donné que leur chat pense que son nom pour l’instant c’est Le Chat. Mais soit, ils verraient en rentrant, c’est déjà un pas que d’avoir lancé l’idée. Pour l’heure, ils se questionnent au sujet des habitudes du McDo. McDo reste une entreprise, leur but c’est de faire du fric, donc, ça ne serait pas super étonnant qu’ils jouent la carte Saint-Valentin si ça se vend bien. La question c’est est-ce que ça se vend bien dans un fast-food ? Ça aussi, ils verraient plus tard puisque pour l’instant, ils sont occupés à se raconter comment ils étaient adolescents. Pas trop de surprises des deux côtés ; ils n’ont pas tant changé que ça. Ou alors pour le mieux car ce n’est vraiment pas dit que quelqu’un aurait pu supporter la Vesper de l’époque. D’ailleurs, ce n’était clairement pas le but, c’était même tout l’opposé. Un sourire aux lèvres, la blonde acquiesce d’un mouvement de tête, ravie de ne pas avoir à s’inquiéter. C’est que parfois, les premiers amours sont difficiles à oublier même si ce qu’on a également tendance à oublier, c’est que les gens changent. Enfin, pas tous puisqu’eux pas trop. Bref.

« On se serait sûrement bien entendus même à l’époque. Ça doit pas mal s’associer, je crois. En tout cas sur quelques années, après ça doit être usant si c’est toujours le même qui prend les décisions et l’autre qui suit. »

Ou peut-être que non, certains couples doivent aimer rester enfermés dans ces rôles. Elle n’en sait rien à vrai dire mais elle trouve que c’est quand même mieux que chacun puisse se reposer un peu sur l’autre de temps en temps. Vient alors leur tour de commander ; un wrap pour la texane et c’est à elle que revient le choix du dessert puisqu’ils ne font pas de menu spécial Saint-Valentin mais leur propose de se partager le dessert. Ah.

« Un sundae chocolat avec deux cuillers, ça te va ? »

Cette fois, ce fut elle qui régla la note avant de poser son rosier sur le comptoir pour faire le plein de serviettes, pailles et tout ce qui s’ensuit.