Noisy neighbor ~ Noomi

Du haut de son balcon, une cigarette finissant artistiquement sa main – comme dirait Chandler -, Noomi envoyait des baisers volants à Sarah, traînant derrière sa petite valise rose alors que son père la récupérait pour les jours à venir. C’est bien un sourire que l’on pouvait voir sur son visage mais il ne fallait pas s’y fier. Dans sa tête, la blonde était en train d’élaborer un plan pour évincer définitivement Frank. Une fois que les feux de la voiture eurent disparu de son champ de vision, elle écrasa sa clope dans sa jardinière et rentra pour noter ses idées mais pas sur ses habituels post-it qu’elle collerait aux murs, sinon, son prochain visiteur aurait de quoi se poser de sérieuses questions. Non, elle avait un carnet rempli de trucs et astuces pour mieux torturer et tuer son ex-mari. Si quelqu’un venait à tomber là-dessus, ce ne serait pas mieux, vous me direz. Et vous auriez raison mais elle aimait à se dire que ça faisait partie de sa thérapie et qu’il valait mieux que ça sorte, même sur papier, plutôt que de garder ça enfoui au plus profond d’elle.

Et le temps file, sans qu’elle y prête réellement attention. Au moment où elle releva la tête de ses pages noircies par l’encre de son stylo, il était plus de minuit. Heureusement qu’elle ne travaillait pas ce soir, sinon elle serait très en retard. Minuit, c’est une bonne heure pour se faire un café, jugea-t-elle, alors elle quitta son bureau pour aller dans la cuisine et c’est à ce moment-là que sa sonnette retentit. Inutile de vérifier sur ses post-it qu’elle attendait une pizza ou encore un recommandé vu l’heure. Il faudrait que les livreurs soient déterminés à faire des heures supp’ pour ça et clairement, on en est pas encore là. La grecque eut une certaine réticence à aller jusqu’au parlophone ; son père – encore plus depuis l’accident – n’avait de cesse de lui répéter qu’après l’heure, c’est plus l’heure et qu’on n’ouvre pas aux inconnus. Mais aller jusqu’au parlophone, ce n’était pas ouvrir aussi décida-t-elle d’aller voir ce qu’on lui voulait.

Il s’avéra que c’était un de ses collègues de la radio et qu’il voulait discuter avec elle de son émission du matin. D’accord mais pourquoi pas par mail, espèce de crétin ?? Voilà ce qu’elle eut envie de lui répondre mais au lieu de ça, elle lui ouvrit la porte et rangea vite fait les jouets que Sarah s’était amusée à ramener dans le salon tout l’après-midi le temps qu’il monte. Et quand elle lui ouvrit la porte, elle ne s’attendait clairement pas à voir tout une troupe débarquer. Son collègue la salua, lui fourra une pizza froide dans les bras ainsi qu’un pack de bière alors que tout le monde entrait dans son appartement et mettait la musique à fond. Une fois la surprise passée, Noomi se dit qu’il fallait agir. Oui, mais faire quoi ? Appeler les flics. Et ça tombait bien, il y en avait justement un sur le même palier. Sauf qu’elle eut beau tambouriner à sa porte, point de réponse. Tant pis, l’autre porte. Cette fois, c’est une petite brune qui ouvrit. Une de ses nouvelles voisines avec qui elle n’avait pas encore fait connaissance. Elle n’avait pas l’air des plus rassurées et on la comprenait.

« Salut. J’suis vraiment désolée pour le bruit mais mes collègues sont en train de faire les cons dans mon appart’. Alors soit on appelle la police ensemble, soit vous venez faire la fête avec nous. »

Deux options radicalement différentes mais Noomi n’était tout à coup plus si sûre que ça soit une bonne idée de porter plainte contre des gens avec qui elle travaillait.

A la réflexion, non. A vrai dire, c’est même sûrement une très mauvaise idée que de balancer ses collègues à la police si elle voulait que tout continue à bien se passer. Ouais, mais en attendant, elle avait quand même la désagréable impression de se laisser marcher sur les pieds et elle avait horreur de ça. Parce qu’ils étaient quand même en train de foutre le bordel dans son appart’ habituellement si bien rangé lorsque Sarah n’était pas là. Bref, Noomi en arriva à la conclusion que sa sympathique nouvelle voisine devait être dans le vrai. Il valait mieux y voir une occasion de faire la fête. Et en profiter un maximum car ce n’est pas souvent que cette occasion se présente souvent. Oh, ce n’est pas qu’elle ne sort pas mais boire dans les bars en attendant qu’un boulet l’aborde histoire de se changer les idées cinq minutes, ce n’est pas ce qu’on appelle une fête. Elle répondit par un hochement de tête accompagné d’un petit sourire et attendit sagement que sa voisine ait passé quelque chose de plus festif devant sa porte d’où s’élevait les notes très connues de Let’s Groove de Earth, Wind and Fire. Bon sang, est-ce que c’était une soirée disco ?

La blonde n’eut pas l’opportunité de se poser plus longtemps la question puisque sa voisine vint la rejoindre. Elle se présenta alors. Odessa. Tiens, c’était marrant ; comme la ville en Ukraine ? Mais Noomi savait pertinemment qu’elle était mal placée pour faire une remarque sur un autre prénom vu le sien, sorti de nulle part. Tiens d’ailleurs, en parlant du sien, il s’avéra qu’elle n’eut pas besoin de le dire et l’espace d’une seconde, elle regarda Odessa avec un rien de suspicion dans le regard. Comment pouvait-elle savoir ? Oh non, elle espérait qu’elle n’était pas déjà allée se présenter puis l’avait complètement oublié ensuite… Sinon, l’explication pouvait être bien plus simple : peut-être la jeune femme avait-elle tout simplement regardé les différents noms de ses voisins collés sur les boîtes aux lettres ou vissé juste à côté des sonnettes. Ça devait être ça.

« Oui, c’est ça. Ravie de faire ta connaissance, Odessa. »

Puisqu’elles s’apprêtaient à faire la fête ensemble, autant qu’elles se tutoient dès maintenant. C’est en restant tout de même un peu en retrait que Noomi poussa la porte de son propre appart’, craignant que ça soit Bagdad à l’intérieur. Et effectivement, c’était un peu ça. Des ballons multicolores et des confettis partout, super. Ce qui était sûr, c’est qu’elle gonflerait son collègue avec les heures de ménage qu’il venait de lui causer. Mais soit, d’abord et avant toute chose, la grecque se fraya un chemin parmi les gens qui se tapaient l’incruste chez elle jusqu’à la cuisine où elle prit deux bières. Une pour elle et une pour Odessa.

« Y a de la pizza froide aussi, si tu veux. » fut-elle obligée de crier tellement on ne s’entendait plus.

Sa compagne était venue se présenter… Il fallut une bonne minute à Noomi pour se rappeler de sa gentille voisine, celle qui était venue avec de délicieux macarons. La blonde n’aurait plus su dire son nom – encore qu’elle l’ait marqué sur un de ses sacro-saints post-it, il faudrait juste qu’elle vérifie – mais elle se souvenait parfaitement de ses macarons. Comme quoi, la mémoire retient vraiment ce qu’elle a envie de retenir. Toujours est-il que ça la rassurait, ça faisait tout de suite moins creepy. Parce que ça serait tout de même pas de chance d’avoir, en plus de tout le reste, des psychopathes pour voisines, non ? Bien que, ces gens-là, mieux valait s’en faire des amis pour éviter tout problème. Enfin bref, c’était donc rassurant pour la suite. En attendant, elle avait d’autres problèmes sur les bras. Comme la bande de squatteurs qui était en train de foutre le bordel – il n’y a pas d’autre expression – chez elle. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Odessa n’aurait pas pu mieux formuler sa pensée à la seconde où elle avait poussé la porte de son appartement. Bon courage pour le nettoyage… ouais, ça, on peut dire que la grecque avait subitement très envie d’étrangler son collègue. Heureusement qu’elle parvenait à résister à la tentation.

« Merci. »

Bon, le point positif c’est qu’elle ne faisait pas grand-chose de ses journées à part dormir. Alors au moins ça l’occuperait un peu. Ainsi que son esprit. Et c’était bien ça le plus important. Et puis qui sait, peut-être que son père serait d’accord de lui donner un coup de main ? Alors elle n’aurait même pas besoin de s’en occuper seule et ça leur permettrait de passer un peu plus de temps rien que tous les deux, elle en avait bien besoin. Soit, toujours voir le côté positif des choses c’est le mot d’ordre. Alors que les deux jeunes femmes sont accoudées à son plan de travail, en train de siroter leur bière presque tiède, Odessa semble curieuse au sujet de ce qu’elle peut bien faire dans la vie pour avoir droit à ce genre de petites fiestas improvisées. En effet, on peut se poser la question.

« Non, en général, ils sont quand même un peu plus coincés d’habitude. C’est moi qui ai l’émission la plus libre et fun. Je suis animatrice à la radio. N’hésite pas à écouter 93.5, d’ailleurs. »

Puis elle chercha du regard son collègue – cette enflure en mini-short rose avec les lunettes de soleil sur le nez – et le désigna du menton.

« Tu vois ce type là-bas ? En train de danser comme s’il avait un balai dans le cul ? Il s’occupe de l’émission du matin et il a cette chronique, celle où il s’invite chez les gens pour faire la fête avant de repartir comme il est venu. D’habitude, c’est drôle. Moins quand c’est à ta porte qu’il vient frapper. »

Mais bon, ainsi va la vie.

« Et toi, dans quoi tu bosses ? »

Et une auditrice de plus, une ! Franchement, ils pouvaient être fière d’elle, à la radio, elle leur ramenait tout un tas d’auditeurs jeunes et dynamiques quand les émissions de l’après-midi ne leur rapportent que des quadra ramollis. Mais bon, fini de se lancer des fleurs. Pour l’heure, l’essentiel c’est surtout de se moquer de ce bon vieux Vince et de sa façon ridicule de danser. Il le mérite après tout, c’est lui qui a foutu tout ce bordel dans son appartement. D’ailleurs, il fallait impérativement qu’elle trouve un moyen de se venger. Et pour ne pas l’oublier, Noomi s’empara du bloc de post-it qui traînait sur le plan de travail pour noter l’idée. Voilà, il n’y couperait pas. Ce qui la rassura, ce fut d’entendre qu’Odessa trouvait elle aussi qu’il n’avait pas la tête de l’emploi. Et effectivement, Vince avait l’air emprunté dans gens qui se font embarquer dans ce genre de délires sans savoir comment ni pourquoi et ça la fit rire qu’elle lui annonce qu’il a l’air vraiment ridicule mais qu’il ne faut pas le lui répéter. Ah c’est sûr qu’avec un tel concept, les gens tournent toujours sept fois leur langue dans leur bouche avant de lui dire quoi que ce soit à celui-ci.

« C’est promis, je ne dirai rien. Mais j’suis d’accord. »

C’est donc ainsi qu’elles en vinrent à parler boulot. C’est également ainsi que Noomi apprit que, du côté de sa voisine, c’était un peu compliqué. Elle savait pourquoi, ça faisait partie de ses choses qu’elle s’était répétées suffisamment longtemps pour ne pas avoir à les oublier et faire une gaffe. Le fils d’Odessa était gravement malade et elles avaient toutes deux plaquer la France ainsi que leur vie là-bas pour venir s’installer ici dans l’espoir de sauver le petit. Elle sait pourquoi et c’est déjà pas mal mais jamais il ne lui viendrait à l’idée de ramener ça sur le tapis. Alors elle écouta sa voisine lui expliquer qu’avant ça, elle était journaliste. Qu’elle l’est toujours, probablement, mais qu’elle a démissionné l’année passée. C’est triste. D’ailleurs, ça ne signifie en aucun cas qu’elle a arrêté d’écrire puisqu’il a un roman en parallèle. Le problème c’est que ces choses-là demandent de la patience. Ainsi que de la chance. Rares sont les personnes qui parviennent à se faire éditer du premier coup.

« Oh, il faut garder espoir. De quoi ça parle ? »

Pile à ce moment-là débarque un de ses collègues qui trébuche et manque de lui renverser son verre. Fort heureusement, Odessa a le bon réflexe de la tirer à elle pour éviter le désastre et la blonde l’en remercia.

« Allez viens danser, Noom ! C’est quand même toi l’hôte, faut en profiter. Venez danser toutes les deux ! »

Eh bien, il semblerait qu’elles n’aient pas le choix.

A la question « de quoi ça parle », Odessa mit quelques minutes à répondre. Comme si elle avait oublié. Et c’était cocasse parce que c’était généralement Noomi qui oubliait plein de choses, ces temps-ci. Puis ça lui revint. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la demoiselle savait teaser. Un monde d’après-guerre avec des enfants pour personnages principaux et tout un tas de choses bizarres qui se passent, ça m’était l’eau à la bouche. Là-dessus, sa voisine s’excusa sous prétexte qu’elle n’allait pas très douée pour faire des résumés. La blonde n’était pas tout à fait d’accord à ce sujet. Certes, c’était dit de manière un peu maladroite mais elle était carrément parvenue à créer du suspense et c’est l’essentiel : donner aux lecteurs l’envie de s’y plonger.

« Oh non, je trouve que ça a l’air passionnant, au contraire. J’ai hâte de pouvoir le lire. »

Puis son collègue débarqua avec toute la subtilité et la grâce qu’elle lui connaissait habituellement – c’est-à-dire zéro – pour les embarquer de force sur la « piste de danse » qui n’était autre que le milieu de son salon dont ils avaient poussé les meubles. Odessa crut alors bon de la prévenir qu’elle dansait à peu près aussi bien que son autre collègue – le débile instigateur de tout ça. Ça fit rire la blonde car il n’y a pas cinq minutes, elle était en train de se moquer de sa façon de bouger. Mais elle avait une excuse : elle ne s’invitait pas chez les gens pour leur imposer une fiesta d’enfer au pire moment. Mais cet aveu la fit observer d’un peu plus près la façon dont elle se trémoussait, évidemment. Et elle ne mentait pas, ce qui la fit d’autant plus rire.

« J’avoue que tu n’as rien à lui envier de ce côté-là. »

Ceci dit, Noomi ne pouvait pas vraiment parler non plus car elle était loin d’être une experte. Oh, c’est sûr qu’elle avait le sens du rythme parce qu’elle était musicienne depuis sa plus tendre enfance et qu’elle en avait vu des fêtes de ce genre jusqu’à il y a environ cinq ans. Quand Sarah avait décidé de pointer le bout de son nez, la grecque s’était un peu calmée mais c’était comme le vélo, ça ne s’oubliait pas. Et puis ils étaient restés sur du disco et ça, c’était simple.

« T’inquiète, ça restera entre toi et moi, si tu veux. »

Encore qu’elle était sûre que ç’aurait très drôle si elle avait été là, elle aussi.

Pouvoir lire quelques extraits d’un futur best-seller – elle n’en doute évidemment pas - en exclusivité, ça ne se refuse pas. C’est même un super honneur qu’on lui fait là, alors c’est tout excitée par cette perspective qu’elle répond :

« Ce sera avec plaisir ! »

Ensuite, Odessa enchaîna avec l’excuse qu’elle était trop vieille pour ce genre de trucs. Quel genre de trucs ? Faire la fête ? Allons, on n’est jamais trop vieux pour faire la fête. Certes, plus le temps passe et plus on a envie de rentrer à vingt-et-une heures maximum au lieu de faire la bringue jusqu’au petit matin comme avant. Moins on a envie d’aller se frotter à tout un tas de corps en sueur à force de danser, entassés sur la piste de danse, aussi. Et ainsi de suite. Mais on a quand même toujours envie de faire la fête, juste différemment.

« Tu serais quand même pas en train de sous-entendre que tu es déjà rouillée à ton âge ? C’est vrai, je sais pas quel âge tu as exactement mais je pense quand même qu’il te reste quelques belles années devant toi avant que les rhumatismes s’installent définitivement. »

Cette bonne blague l’amusa mais seulement cinq secondes parce que quand on en réduits à rire de ses propres blagues, c’est qu’on est tombé un peu bas. Ou qu’on est un génie, au choix. Toujours est-il que Noomi n’en dira pas un mot à la compagne d’Odessa. Elle l’a promis. Et sa voisine s’empressa de lui faire savoir qu’elle trouverait un moyen de lui revaloir ça. Un sourire étira ses lèvres. Bien sûr qu’elle n’attendait rien en retour mais c’était proposé si gentiment qu’elle n’eut pas le cœur à décliner la proposition. Ou bien peut-être qu’elle espérait secrètement qu’Odessa en viendrait à penser aux macarons. Comme ceux de l’autre fois ; ils étaient tellement super que de ça, elle s’en souvenait parfaitement. Quoi qu’il en soit, c’est alors que sa voisine lui demanda si sa fille n’était pas là. De toute évidence, non, sinon la blonde aurait rapidement écourté cette petite fête car il n’était pas question de troubler le sommeil de sa princesse. Mais la logique voulait qu’elle se pose la question.

« En ce moment c’est son père qui en a la garde. Le temps que ma mémoire se décide à refonctionner correctement. Mais Sarah est là un week-end sur deux en attendant. »

Ce qui était ridicule quand on pense qu’avant ça, elle en avait la garde exclusive. Et que Frank n’avait même pas donné signe de vie depuis cinq ans, d’ailleurs. Oh ça, elle ne lui en voulait pas. Par contre, elle lui en voulait d’être réapparu du jour au lendemain, au moment où elle était sans défense. Mais à quoi bon ressasser tout ça encore et encore ?

Comme dit précédemment, ça ne la dérange pas du tout de lire le manuscrit de sa voisine alors la blonde hocha la tête avec un petit sourire pour bien le faire comprendre à Odessa qu’il ne faut pas hésiter. Puis, de fil en aiguille, c’est ainsi qu’on en vient à parler technique de danse. Le moins que l’on puisse dire, c’est que celle d’Odessa n’était pas très au point. Et la sienne non plus sans doute mais elle parvint tout de même à sauver les apparences. Elle lui apprit qu’elles ont à peu de choses près le même âge – ce qui signifie qu’elle n’est pas si rouillée que ça, sinon il faudrait se rendre à l’évidence qu’elle l’était tout autant et ça, non merci – mais que depuis qu’elle est maman, elle a la sensation d’en avoir le double. Ce que Noomi ne put que comprendre. Il est vrai qu’une fois que Sarah était arrivée dans sa vie, elle avait délaissé la plupart des soirées autres que celles où elle travaillait. La plupart, oui, car elle s’accordait quand une sortie de temps à autre. Ça lui paraissait important même si elle était bien entendu mère avant tout. Et puis Sarah avait toujours eu une santé de fer alors elle n’osait s’imaginer ce que ça devait être quand votre enfant est souffrant.

« J’vois tout à fait ce que tu veux dire. Mais y a pas à dire, ça fait quand même du bien de se vider la tête par moment. »

En tout cas, c’était facile à dire pour elle qui n’avait plus la garde de sa fille que tous les quinze jours ; elle pouvait se permettre de sortir et de se vider la tête quand elle n’était pas là, justement. C’était même devenu une obligation : se changer les idées à tout prix pour ne pas s’enfermer dans sa dépression. Ce qui impliquait donc pas mal de fêtes et tout ce qui va avec, depuis quelques mois. Bref, fatalement, il faut bien mentionner le fait que Sarah n’est présentement pas là et si elle n’est pas là, c’est parce qu’elle est chez son père. Bien sûr, si elle avait été là, cette petite fête n’aurait pas lieu car elle aurait appelé les flics et ça n’aurait pas traîné. La grecque répondit à l’excuse d’Odessa d’un geste de la main voulant dire que ce n’était rien.

« T’en fais pas, c’est normal que tu te poses la question. »

Puis elle enchaîna directement en lui faisant savoir que ça lui plairait de la rencontrer un de ces jours. Et la réciproque était vraie car Sarah était très excitée à l’idée d’avoir de nouvelles voisines. Et surtout un nouveau voisin de son âge même si Noomi lui avait expliqué qu’il était malade et qu’il faudrait donc qu’elle soit sage.

« Elle aussi a hâte de faire votre connaissance à tous les trois. »