broken hearts ft. jake bailor

Murphy avait peur de la réaction du grand blond, elle avait peur que ce qu’elle était en train de lui dire ne lui fasse prendre conscience des différences qui les séparaient. Pourtant, la réaction de Jake fut une agréable et douce surprise pour elle. Il ne la repoussait pas, il ne prenait pas peur, bien au contraire même, il était sincère, il lui ouvrait son cœur. Il lui explique alors que lui-même ne comprend pas ce qu’il se passe, mais que ce truc-là qu’elle ressent, il le ressent aussi. Quand il lui dit qu’il a besoin d’elle, qu’il la prend entièrement, avec ses problèmes et ses angoisses, le cœur de Murphy s’envola carrément. C’était tout ce dont elle rêvait d’entendre, tout ce qui au final, lui faisait du bien. Jake avait le don pour être juste, dans les situations et les besoins de Murphy. C’était étrange, qu’il soit son unique besoin, comme s’il était totalement fait pour elle, comme dans un rêve. En était-ce un ? Est-ce que tout cela n’avait pas à voir avec la magie de la nuit et que demain, à leur réveil, tout serait différent ? Murphy ne pensait pas à tout ça, il n’existait rien d’autre que lui, que ses mains sur son corps, que les siennes sur le sien, que ses mots qu’il venait de lui avouer et que ce sentiment profond, sincère et chaud qui naissait en elle. Elle sourit, comme une imbécile heureuse et très vite, sa tête retrouva l’épaule de Jake. Sa main se balada sur son tee-shirt, s’y agrippant, tandis que ses jambes restèrent mêlées aux siennes. Elle se sentait heureuse, en paix et surtout, pour la première fois depuis la mort de sa mère il y a plus de trois ans maintenant, elle se sentait en sécurité. Ici, dans ses bras, contre lui, Murphy n’avait pas peur. Ni de la mort, de l’abandon, ni des truands dans les rues, ni de son avenir. Il n’y avait rien qui ne l’atteignait ici. Alors, sereine pour la première fois depuis des années, Murphy s’endormit et se fut ainsi, la plus agréable de ses nuits. Pas de cauchemars, pas d’agitation, pas de rejet. Elle bougea, bien sûr que oui, mais à chaque fois leurs corps se retrouvaient, comme si l’un comme l’autre ne désirait pas s’éloigner trop de l’autre. Il existait sans arrêt un contact entre eux, et Murphy ne pu s’en sentir qu’heureuse.
Elle s’éveilla doucement, prenant d’abord conscience du lieu dans lequel elle se trouvait, de la position dans laquelle son corps se trouvait, et des autres détails de son environnement. Elle était allongée sur le côté droit, le bras de Jake sous sa nuque, avec dans sa main, celle de la jeune femme. Le corps de Jake collait son dos, leurs jambes étaient encore mêlées et l’autre bras du grand gaillard était sur ses côtes, leurs doigts à nouveau liés. Comme si leurs corps avaient cherchés à s’unir de toutes les façons catholiques possible. La jeune femme entendait la respiration de Jake, sifflante. Elle sourit. Elle n’avait pas rêvée, tout avait bel et bien été vrai cette nuit ? Son cœur se trouvait heureux de cette nouvelle, et elle sentit une vague d’excitation l’envahir doucement, faisant naître dans le creux de son ventre de toutes nouvelles sensations. Ses doigts commencèrent à caresser la peau de la main de Jake, doucement. Et lentement, la jeune femme ouvrit les yeux, étirant ses jambes en rompant le contact avec celles du boxeur. Elle prit quelques minutes pour se tourner vers l’homme qui faisait naître autant de nouvelles choses en elle. Elle sourit en le voyant dormir, observant alors son expression, ainsi que son corps dans le plus grand des silences. Elle n’osait pas le toucher, elle avait peur de le réveiller. Mais en examinant son visage, légèrement tourné vers l’extérieur (et donc sa vue), elle commença à froncer les sourcils. Elle se redressa légèrement et l’une de ses mains vint se poser sur la joue de Jake, pour qu’il tourne doucement son visage vers elle. Là, elle pu apercevoir l’un de ses yeux complètement bouffi et bleuté. Il s’était prit un coup ? Quand ça ? Murphy s’interrogea, était-ce arrivé hier soir dans sa famille ? Il avait pourtant dit que ça allait, non ? C’était quoi ce bordel ?
Jake s’éveilla doucement à son tour et Murphy, allongée à présent sur le ventre, redressée par ses coudes posés de chaque côté de son corps, était un peu perplexe. Quand il ouvrit les yeux vers elle, la jeune étudiante lui sourit doucement, un peu gênée. Est-ce qu’il allait regretter leur baiser d’hier soir ? Leurs aveux ? Est-ce qu’il avait changé d’avis ? Elle avait peur que oui. Alors d’une petite voix douce, elle lança « bonjour » presque un brin trop joyeux. Mais comment pouvait-elle ignorer ce sentiment de bonheur à se réveiller près de lui ? D’avoir dormi à ses côtés ? D’avoir pu embrasser ses lèvres et qu’il lui ait dit ces belles choses dans la nuit ? Bien sûr qu’elle était heureuse. Son visage se baissa légèrement, arrivant à l’épaule du blond, recouverte de son tee-shirt. Ses lèvres se posèrent sur le tissu, qu’elle embrassa alors tendrement, comme un baiser. « Bien dormi ? » demanda t-elle lorsqu’il sembla déjà un petit peu plus éveillé. Elle aimait le voir au réveil, avec sa tête grognon, c’était amusant, et elle adorait ça. « J’espère que ce n’est pas moi qui t’ai fait ça ? » lança t-elle presque amusée, en désignant de son menton son œil au beurre noir. Une façon peut-être légère de lancer ce sujet, après tout, malgré leur baiser de la veille, Jake lui paraissait toujours aussi imprévisible, insaisissable et impulsif.

La réponse du blond à propos de son œil au beurre noir fut évasive. Apparemment hier soir, on lui avait cherché des noises... Murphy pensait avoir droit à une meilleure explication que celle-ci, mais Jake ne semblait pas prompt à lui en dire plus. Que s'était-il passé ? Une agression en rentrant à l'hôtel ? Est-ce qu'il était retourné au bar ? Murphy se posait tout un tas de question à vrai dire, mais bien vite, le blond changea de sujet. Elle répondit quand même « oui un peu » quant au fait que ça se voyait, et lorsqu'il lança qu'il fallait rendre la chambre assez vite et que donc, c'était pour eux déjà l'heure de partir, Murphy eu un pincement au cœur. Cette chambre, désormais, elle l'aimait bien, mais déjà, elle avait la sensation que le blond s'éloignait d'elle. La main qu'il avait passé dans ses cheveux et qu'il avait ensuite retiré lui manquait déjà. Regrettait-il ce qu'il s'était passé entre eux cette nuit ? Peut-être que désormais, tout était différent dans sa tête ? Peut-être qu'il avait agit sous le coup de la fatigue et que ce matin, il réalisait ce qu'il s'était passé ? Murphy aurait eu envie qu'il l'embrasse, qu'il la prenne contre lui, mais il n'en fit rien. Si bien que déçue, elle fini par quitter le lit, prenant soin de tirer sur son tee-shirt pour ne pas paraître trop déshabillée. Arrangeant ses cheveux, elle se dirigea vers la salle de bain tout en lui répondant « on pourra partir dans cinq minutes » parce que finalement, elle n'en avait pas pour longtemps à se préparer. Avançant jusqu'à la salle de bain, Murphy referma la porte pour aller faire pipi, puis se passa de l'eau sur le visage. Elle avait l'air fatiguée, du moins, son visage, elle ne l'aimait pas plus que ça. La jeune femme ressortit pour prendre quelques affaires dans son sac, et retourna à la salle de bain. Elle se brossa les dents, coiffa légèrement ses cheveux en essayant un chignon, mais ses cheveux étant trop fins, ils tombèrent de partout. Elle enfila ensuite un short en jeans et un tee-shirt noir simple. Sortant de la pièce, elle s'assit sur le lit et enfila ses chaussures. Une question lui taraudait l'esprit, mais elle avait peur de la poser. Seulement, elle se lança finalement et se tournant vers le grand blond, elle demanda doucement « est-ce que je dois m'inquiéter ? » en parlant bien évidemment de son œil. Après tout, ce n'était pas bon signe, et ce n'était pas comme si c'était la première fois qu'elle le voyait amoché. Le jour de leur rencontre, il s'était dévoilé à elle le nez cassé, la gueule en sang et pourtant, il lui avait plu tout de suite. Etrange quand on y pense, non ? Il avait la tête parfaite du gangster, du mec qui traîne dans des histoires louches, qui a dix milles problèmes, qui se bat, qui boit, et peut-être même qui va aux putes. Oui, il avait cette tête là et malgré tout les préjugés, il lui plaisait. Putain... dans quoi elle se fourrait ? Si son père apprenait ça... d'ailleurs, il allait falloir qu'elle parle à son père, qu'elle rentre chez elle et qu'elle laisse ici, dans cette chambre, les problèmes, les angoisses et les interrogations qu'elle trimbalait avec elle depuis des années... en serait-elle seulement capable ? « C'est une habitude chez toi de revenir avec un truc cassé apparemment » plaisanta t-elle alors, suite à leur conversation. Cela l'extirpait quelques instants de ses pensées. « Entre le nez et ton œil je vais finir par croire que t'es un vrai gangster » rigola t-elle alors insouciante. Finalement, alors que son visage se paraît d'un doux sourire, elle haussa les épaules et fini par dire comme un secret « à croire que ça fait son petit effet » avant de contenir un plus large sourire et de se lever du lit pour finir son sac. Une fois ce dernier fermé, elle regarda la pièce, Jake et puis l'observant s'approcher pour accéder à la porte -qui était du côté de Murphy, la jeune femme leva légèrement son bras, de façon à ce que sa main vienne caresser doucement le ventre du grand blond. Plongeant ses yeux dans les yeux de Jake, observant son œil abîmé mais surtout, son expression et ses lèvres, elle fini par dire « ce qu'il s'est passé cette nuit restera dans cette chambre où tu comptes m'embrasser à nouveau ? » avant de sourire, timide. Murphy ne se serait jamais connue aussi entreprenante, ni aussi à l'aise, bien au contraire même. Pourtant, il lui plaisait, elle en avait envie et surtout, elle voulait qu'il en ait envie lui aussi. Alors il fallait lui montrer qu'il pouvait en avoir envie, parce que pour elle, c'était le cas. Attendant qu'il réagisse, qu'il fasse quelque chose, qu'il la recale ou qu'il l'embrasse, elle resta ainsi. Et s'il la recalait ? Et s'il lui disait qu'il ne voulait pas que ça perdure ? Il serait incohérent avec son discours de la veille, mais surtout, le voyage allait être tellement gênant... oh non, elle n'aimerait pas du tout qu'il lui dise que ça ne se reproduirait jamais. Elle préférait qu'il le fasse tout de suite, sans détour, sans hésitation, comme si on retire un sparadrap d'un seul coup.

Lorsque Jake lui prend la main, puis qu’il l’attire contre lui, Murphy sent son cœur bondir dans sa poitrine. C’est dingue l’effet que ce grand blond a sur elle. C’est électrisant, c’est revigorant, c’est enivrant. La jeune femme se laisse ainsi diriger par Jake, alors que leurs nez se frôlent, que leurs souffles se mêlent et que leurs corps se rapprochent. Murphy sourit, car Jake semble prendre un malin plaisir à ne pas l’embrasser tout de suite. Mais lorsque leurs lèvres se retrouvent, la jeune femme sent que son cœur et son corps s’envolent. Embrasser Jake est l’une des choses les plus excitantes, passionnées et intenses qu’elle ait pu ressentir à ce jour. Ses lèvres jouent sur celles du blond, découvrant à nouveau sa chair tendre et rosée, avant que leurs langues ne se trouvent enfin. Murphy sent un courant électrique, rempli de frissons, parcourir son corps. Ses mains se posent sur les hanches du boxeur, alors qu’il la pousse à reculer jusqu’à ce que son dos touche le mur de la chambre. Le souffle de la gamine est court, tandis qu’elle ne peut s’empêcher de continuer à l’embrasser. Elle en veut plus. Elle se sent profondément excitée par ce baiser. Les mains de Jake sur son corps, qui l’electrisent, finissent par l’abandonner afin de se poser sur le mur derrière elle. La jeune femme trouve cela très excitant, et son désir pour lui ne fait que s’accroître. Lorsqu’il lui murmure ces quelques mots à l’oreille, la jeune femme plonge son regard dans le sien, un léger sourire amusé sur les lèvres encore rougies par leur baiser. Murphy lui répond alors simplement « tu n’imagines même pas » dans un souffle encore très court. Les mains de la gamine vinrent autour de la nuque du blond, bientôt, ses pieds se levèrent sur leurs pointes, lui donnant quelques centimètres de plus. La, elle émit une légère pression afin de faire comprendre au grand gaillard devant elle son désir. Sautant presque, ses jambes encerclèrent rapidement le corps de Jake, tandis que ses bras entouraient sa nuque, laissant ses mains se perdre par instant dans le vide derrière lui, ou bien dans sa chevelure blonde. Ainsi dans ses bras, la jeune femme approcha à nouveau ses lèvres des siennes pour l’embrasser, toujours avec cette même envie et fougue qui la caractérisait tant lors de leurs baisers. Elle était folle de lui. Elle le réalisait. Pourtant, ils ne se connaissaient pas bien, ni depuis très longtemps, et surtout, ils s’étaient embrassé pour la première fois il n’y avait que quelques heures seulement. Mais déjà, Murphy ressentait une affection toute particulière envers le blond. Elle avait vraiment envie que ça fonctionne, que ça dure, que ça ne reste par entre les murs de cette chambre. Elle avait envie de passer du temps avec lui, l’envie d’être à ses côtés, l’envie de partager, l’envie de grandir, l’envie de tellement de choses. C’était peut être dingue, peut être que c’était le fait qu’il soit le premier, ou peut être parce que ça ressemblait à un coup de foudre, mais elle savait que Jake allait être une personne importante pour elle et dans sa vie. En tous cas, c’était ce qu’elle voulait, peu importe la difficulté d’une telle relation. Elle n’y pensait pas en réalité, bien trop prise dans le feu des sentiments et émotions vécues et ressenties en sa présence. Le corps ainsi collé contre celui de Jake, la sensation de ses mains sur son corps, leurs baisers tout aussi fous, cette attirance passionnée qui les unissaient, tout était rassemblé pour lui faire perdre pied. Murphy ne pouvait pas s’arrêter de l’embrasser, jouant alors que ses lèvres, ce qui les faisait sourire; débordant alors de sa bouche pour venir embrasser sa barbe, ses joues, sa nuque de petits baisers doux et tendres tandis que ses mains glissaient sur les bras du boxeur, découvrant sous ses doigts ses muscles tendus sous l’effort. Il y avait une alchimie, une passion qui étaient sensibles entre eux. Comme une évidence, comme si tout était naturel, comme si l’un comme l’autre était attiré par l’autre comme une moitié dont il aurait besoin. Elle n’avait aucune envie de mettre fin à cela, aucune envie que cela s’arrête, aucune envie de partir.

Lorsqu’ils quittèrent cette chambre, marchant dans les couloirs de l’hôtel pour en sortir et finalement regagner le pick-up, Murphy soupira. Jake venait de lui demander si elle était prête à rentrer. En réalité, non. Ses yeux croisèrent ceux de Jake et elle repondit très sincèrement « non... » dans un premier temps. Sa main vint chercher sa ceinture de sécurité pour l’assembler et sa voix se fit à nouveau entendre « mais il faut bien rentrer à un moment donné » tout en haussant les épaules. Un sentiment de peur et un vent de questionnement la submergèrent alors. Est ce qu’ils allaient se revoir à Island Bay ? Est ce que tout ceci allait perdurer une fois rentrés? Elle voulait tellement que oui. Mais même avec ce que Jake avait dit plus tôt, Murphy avait peur de ce côté imprévisible chez lui. Et s’il cogitait tout seul et qu’il finissait par se dire que ça n’avait aucun sens? Que ça ne mènerait nul part? Qu’il valait mieux tout arrêter?

Murphy avait grimpé dans la voiture de Jake, un pincement au cœur. Cette chambre refermait le secret de leur relation, de son évolution, et bien aussi triste cela soit-il pour elle, la jeune femme fermait la porte à cet épisode. Elle avait peur que ça ne meurt entre les murs de cette chambre, qui avait été le témoin de leur rapprochement physique, de leurs baisers, de ce début de complicité tactiles qui naissait entre eux. Et si une fois à Island Bay Jake n'avait pas le temps pour elle, une petite gamine de dix-neuf ans ? Et s'il réalisait que leur relation était bien trop compliquée ? Parce que bon... Murphy n'était pas indépendante, elle vivait sous le toît de son père, elle était à l'université, et bien que ça soit l'été en ce moment, bientôt, Jake allait réaliser ce que cela impliquait de sortir avec une fille si jeune et inexpérimentée. Une fois les portes closes dans le pick-up, Jake lui demanda si elle était prête à partir. Non, elle ne l'était pas. Il essaya de la rassurer, et ce qu'il avoua sur elle la fit rire. Courageuse ? C'était bien la première fois qu'on lui disait ça, à dire vrai, Murphy ne se voyait pas comme telle. Au contraire. Elle se trouvait lâche, sa façon qu'elle avait de se punir, de s'auto-mutiler, ça n'avait rien de brave, bien au contraire. Mais elle aimait que Jake la voit ainsi. Elle sourit, ne sachant pas trop quoi répondre, après avoir ri légèrement à sa petite blague. Assez vite, Jake proposa l'idée de la déposer ailleurs que chez elle, mais elle n'avait nul autre endroit où aller. Sven lui avait bien dit pourtant que chez lui était un endroit qui lui serait toujours ouvert, mais malgré la peur, Murphy ressentait le besoin de rentrer chez elle, d'affronter son père, d'avoir une réelle discussion avec lui. Jake pourtant, commença à dérailler légèrement. Il semblait s'en vouloir de l'avoir laissé entrer dans ce bar où ces hommes avaient tenté de s'en prendre à elle. Sa voix changea, son visage se durçi et elle comprit bien vite qu'il s'en voulait énormément. Au point que sa voix trahisse sa propre haine. Ce souvenir la fit frissonner, et Murphy savait que cette nuit, en compagnie de Jake, elle n'avait pas eu peur parce qu'il était là. Mais ce soir, qu'en serait-il ? Est-ce qu'elle allait pouvoir se sentir autant en sécurité sans lui ? La peur que ces types la retrouvent et finissent ce qu'ils prévoyaient de faire la terrorisait, mais pouvait-elle seulement le lui dire ? Il semblait déjà tellement énervé. La jeune femme baissa les yeux. Sa démarche avait été inconsciente et pas murement réfléchie. Elle n'avait pas tenu compte des aveux de son père, sur la dangerosité de ses frères et de leurs relations à Auckland. Elle avait cru qu'elle découvrirait autre chose, l'inverse, qu'on lui aurait confirmé que ses frères étaient des anges, comme elle l'avait toujours pensé. Mais elle avait eu tord. Aujourd'hui, elle comprenait que ses frères n'étaient pas ce qu'ils prétendaient être. Est-ce qu'elle aussi, elle avait ce côté sombre en elle ? Est-ce qu'elle aussi, elle serait un jour capable du pire sur autrui ? Elle n'en savait rien, elle doutait lourdement. L'image de cette scène, seule, au milieu de ce bureau étouffé pendant que ce type s'approchait d'elle, ça restait dans sa tête. Elle ferma les yeux une seconde, pensant oublier cela, mais bien au contraire, c'était comme si elle se replongeait dans ce moment horrible qu'elle avait vécu. Heureusement pour elle, Jake était revenu, il l'avait sorti de là et avait empêché le pire d'arriver. Alors lorsqu'il lui prit la main, entremêlant ses doigts aux siens, nettement plus fins, elle ouvrit à nouveau les yeux, et c'était comme si sa peur venait de s'envoler à nouveau, comme par magie. Jake avait ce don, ce pouvoir presque magique auquel elle ne croyait pas encore. Comment faisait-il ? Par sa simple présence, sa voix, ses mots, son contact, il parvenait à effacer toute trace de peur en elle. Cette peur avec laquelle elle vivait depuis tellement d'années déjà. Murphy tourna la tête et rompit le silence en répondant enfin « oui, mais tu es arrivé » ses doigts resserèrent leur étreinte et son autre main vint caresser le dessus de la main de Jake. « T'es r'venu et clairement... je préfère ne pas penser ni imaginer ce qu'il se serait passé sinon » parce que non, elle ne voulait pas se créer une hantise en plus. Elle ne voulait pas en rajouter. « J'ai juste... » elle baissa les yeux une seconde et continua « j'ai juste vraiment peur qu'ils n'en restent pas là... » parce que Jake avait du les énerver, parce qu'ils voulaient récupérer leur argent, parce qu'il savait que Murphy était en vie, quelque part. Et que ce genre d'hommes n'en reste pas là, Murphy craignait pour son avenir. Devrait-elle en parler à son père ? Oui, très certainement. Jake ne voulait pas la déposer ailleurs que chez elle, alors pour le rassurer, tandis qu'il retirait sa main des siennes, elle lui lança « déposes-moi chez mon père » comme ça au moins, il saurait. Il saurait où est-ce qu'elle vit depuis quelques années déjà, il saurait où la trouver en cas de besoin, il saurait venir à elle. Sans téléphone, en reprenant le rythme de leurs vies respectives, Murphy se doutait bien que Jake n'aurait pas beaucoup de temps, qu'elle ne serait pas une priorité pour lui dans les jours à venir et pourtant, elle en rêvait. De passer du temps avec lui, de dormir à ses côtés, de pouvoir lui parler, ou l'embrasser encore et encore. Jake avait replacé sa main sur le volant de sa voiture, il s'était un peu éloigné d'elle et Murphy voulait profiter de leurs derniers moments rien que tous les deux. Comme si elle savait que bientôt, ils seraient éloignés l'un de l'autre et qu'il allait terriblement lui manquer. C'était même certain. Elle se pencha en avant et alluma l'autoradio. Là, une chanson se fit entendre dans la voiture « parachute » de Chris Stapleton. Murphy écouta les paroles, en se disant que cette chanson était clairement pour eux. C'était même, tellement eux. Alors un peu amusée, elle tourna la tête vers Jake et lança « est-ce que tu crois aux coïncidences ? » avant de rire légèrement. La musique continua, Murphy se surprit à l'aimer plus que de raison. En rentrant chez elle, elle savait qu'elle écouterait du David Bowie et cette chanson en boucle. Elle se sentait néanmoins un peu stressée, parce qu'elle ne savait pas à quoi s'attendre une fois de retour en ville. Elle n'osait pas non plus en parler à Jake, parce qu'elle ne voulait pas être cette fille qui veut passer tout son temps avec lui. Ses yeux se perdirent sur le bord de la route, alors qu'ils traversaient Auckland pour quitter la ville. « Tu voudras qu'on se revoit à Island Bay ? » demanda t-elle alors, sans oser le regarder tout de suite. Ses yeux bleus se posèrent sur le grand blond quelques secondes après, écoutant soigneusement sa réponse. Finalement, après plusieurs minutes, la jeune femme s'installa en tailleurs sur la banquette du pick-up et lança, d'un ton plus joyeux « bon, quitte à faire presque huit heures de route, autant s'amuser un peu... » sourit-elle malicieusement. « Action ou vérité ? » demanda t-elle alors, histoire d'en apprendre plus sur lui.

La panique que Jake avait d'abord ressenti, ou plutôt la colère qui l'avait animé à propos de ces types et de ce qu'il s'était passé dans ce bar à Auckland ; venait de se transposer à la jolie blondinette. Un instant, elle s'était elle-même perdu dans l'imagination de ce cauchemar. Un cauchemar où ces types la retrouveraient, où ils lui mettraient la main dessus, où Jake n'aurait peut-être pas le temps d'intervenir ? Qu'il ne pourrait simplement pas être là ? Au détour d'une ruelle après le travail, à la sortie du bus après les cours, ou bien même sur le campus ? Après tout, ça lui était déjà arrivé l'année dernière sur le campus universitaire... Son père et Keny s'en souviennent encore probablement. Pourtant, malgré tout, quand Jake lui fit la promesse qu'il serait là, qu'il ne les laisserait pas s'approcher d'elle et que rien ne lui arrivera, sa peur s'envola. Elle y croyait. Sa main dans celle du blond se serra davantage contre sa chair, tandis que ses yeux observaient tendrement le profil de ce type sorti de nul part dans sa vie, et qui... qui prenait tellement de place, qui se faisait lui-même sa place en fait. Oui, elle avait envie d'y croire, de croire à ses paroles, non seulement c'était réconfortant, mais surtout aussi agréable qu'un homme soit prêt à tout pour elle, qu'il soit prêt à les battre, à se battre. Il y avait quelque chose de très primitif et de très sexy à tout ça. A sa première question, le blond répondit que non et Murphy ne pu s'empêcher de sourire. Un homme tel que lui, bien sûr qu'il ne croyait pas au destin, ou à toutes ces conneries. Il ne devait croire qu'à ce qu'il voyait, cartésien pur souche, ça se sentait. Elle rigola une seconde, avant de profiter de la musique qui envahissait l'espace de cette voiture, essayant de recouvrir le bruit du grondement de ce vieux pickup. La fenêtre ouverte, les cheveux blonds de la jeune femme s'envolèrent, tandis que sa main restait fermement accrochée à celle du blond. Par besoin, envie, nécessité. Une question lui trottait dans la tête, et après avoir hésité, elle se lança. Jake lui retourna tout de suite la question, faisant en sorte que Murphy esquisse un léger sourire incontrôlable. Elle avait l'impression de lire la réponse de Jake sur son visage, dans sa posture, dans ses yeux quand elle réussissait à les croiser. Il fini par lui dire qu'il en avait envie, et Murphy sourit davantage. D'ailleurs, elle se détâcha une seconde pour glisser sur la banquette du pick-up afin d'être au plus près de Jake. Sa main dans la sienne, posée sur ses cuisses, la jeune femme ne tarda pas à la quitter pour enrouler sa main autour du bras du blond. Posant ses lèvres sur sa chair, elle y déposa des baisers tendres. Un geste doux et affectueux dont elle avait envie, et aussi besoin. Elle ressentait le besoin de s'enivrer de lui, avant que leurs routes ne se séparent. Elle n'avait aucune envie de le quitter, aucune envie de dormir seule cette nuit, de ne plus avoir sa présence, son odeur, de ne plus pouvoir lui parler, rire avec lui, ou même l'embrasser. C'était la toute première fois qu'elle ressentait ça pour un garçon, c'était la première fois qu'elle vivait autant de choses avec l'un d'eux, c'était impressionnant et surtout, elle ne savait pas si tout ceci était normal, ou si elle en faisait peut-être trop ? « Bien sûr que j'en ai envie aussi » murmura t-elle tout bas les lèvres presque encore collées contre sa chair. Se frayant un chemin contre lui, Murphy resta ainsi quelques minutes, ne parvenant pas à se détacher de lui. « J'aurai aimé avoir plus de temps avec toi aussi » osa t-elle avouer. Mais il ne fallait peut-être (sans nul doute) ne pas être trop gourmande dès le départ. Alors finalement, la jeune femme se détacha de son beau blond, après lui avoir à nouveau embrassé le bras afin de ne pas le déranger pendant sa conduite. Regagnant sa fenêtre, elle s'attacha à nouveau et se recoiffa légèrement. Elle aimait voir Jake aussi à l'aise, aussi détendu, aussi souriant... il était tellement beau, et puis il avait vraiment l'air de bien aimer ce moment avec elle. C'était tout ce qu'il lui fallait à elle en tous cas. Finalement, elle eu l'idée de lui proposer de faire un petit jeu, afin d'en apprendre plus sur l'un et sur l'autre. Et à sa grande surprise, il accepta. Elle rigola à ce qu'il disait, posant ses pieds sur la banquette, remontant ainsi ses genoux près de son visage. Ainsi bien plus à l'aise, elle répondit à son petit ami (OMG) « C'est drôle parce que moi je préfère les actions » rigola t-elle sincèrement. Mais c'était bien réaliste de se dire que dans cette voiture, ils seraient vite limité en terme d'action. Finalement, elle eu la réponse de Jake quant à l'avenir de ce jeu, il choisissait une vérité et prévenait même qu'il serait peut-être un peu chiant. Murphy sentait qu'il y avait des questions à ne pas poser, et puis... ce n'était pas son intention de lui tirer les vers du nez. Elle n'avait pas besoin de savoir ce qu'il ne voulait pas lui dire. Elle voulait simplement apprendre à le connaître... d'une façon rigolote. « Alors... » tapota t-elle sur ses genoux en regardant l'horizon. Elle cherchait une question à lui poser, à la fois intéressante, pas vraiment intrusive et en même temps... rigolote. Elle espérait détendre un peu l'atmosphère, du moins, conserver cette douce et bienveillante atmosphère qu'ils savaient créer autour d'eux à chaque fois « ça y'est j'ai trouvé » lança t-elle en tournant son regard vers le visage de Jake. Elle rigola et demanda tout aussi joyeuse « raconte moi ta pire honte, de toute ta vie » sourit-elle alors comme la jeune femme innocente qu'elle était encore à ce moment-là.

Jake commença à raconter son histoire, et à l'écouter, Murphy se forgea une idée du personnage de sa mère. A vrai dire, elle semblait ressembler au père de Murphy. Dans son excessivité pour son enfant, sa famille, son sang. Murphy avait toujours vu ça comme une volonté de son père de faire en sorte que sa fille soit la meilleure dans tous les domaines, afin de ne pas entacher le nom de Gallagher. Et elle, elle s'était fait un malin plaisir à faire tout le contraire, rien que pour faire chier son père. La jeune femme hocha la tête, un léger sourire sur les lèvres quand elle croisa le regard du garçon qui faisait vibrer son cœur. « Ca me va parfaitement... mon p'tit buisson » rigola t-elle alors, espérant qu'il ne se vexerait pas pour cela. Murphy passa sa main dans ses cheveux blonds, afin de ranger les quelques mèches volantes derrière ses oreilles. Ses pieds vinrent se poser sur le bord de la banquette, afin de pouvoir être dans une position différente. Les genoux à hauteur de son visage, elle patienta jusqu'à ce que Jake lui demande à son tour quelque chose. La plus grosse connerie qu'elle avait pu faire ? Murphy se pinça les lèvres. Pour être tout à fait honnête... Murphy était le genre de nana hyper tranquille, hyper calme, qui ne faisait jamais de vague. Jake semblait voir en elle un esprit rebelle, alors qu'en vérité... pas tellement. Dans la tête de Murphy, ses pensées fusèrent, alors que dans sa poitrine, son cœur se mit à battre plus fort. Devait-elle inventer quelque chose pour paraître plus rebelle aux yeux du blond ? Devait-elle lui dire la vérité et avouer qu'elle était vraiment très sage ? Elle n'avait jamais fait de grosse bêtise. Au temps où sa mère était en vie, Murphy était une petite fille vraiment très sage et ses frères veillaient d'ailleurs à préserver cela. Puis, quand elle a commencé à vivre avec son père, Murphy avait prit un malin plaisir à lui en faire baver, oui ; mais jamais au point de faire de grosse bêtises. « A vrai dire... » commença t-elle à dire en posant son crâne sur l'appui-tête derrière elle, observant la route qui s'étendait face à elle. Elle hésitait. Dire la vérité, ou mentir ? Elle était profondément tenté d'inventer un truc, pour ne pas prendre le risque d'ennuyer Jake et qu'il se dise qu'elle n'était qu'une gamine bien trop sage pour lui. Et Murphy allait mentir, lorsque finalement... « j'crois que j'suis pas le genre à faire des conneries » haussa t-elle les épaules, les joues rouges, le regard fuyant. « J'ai juste... enfin... le seul truc que je vois dans cette catégorie ça serait la fois où j'ai fumé un joint avec ma meilleure amie et où... on s'est embrassé toutes les deux » avoua t-elle alors mais pour elle, ce n'était pas vraiment une bêtise mais plutôt une expérience. Et Murphy ne réalisa pas du tout qu'elle venait d'avouer à Jake avoir embrassé une fille. Est-ce qu'il allait se demander de quel bord elle était, si toutefois elle avait un bord ? Murphy tourna la tête pour observer légèrement sa réaction et puis avoua « ça s'est produit qu'une fois et... et elle s'est barré juste après pour l'Angleterre, je... j'la vois même plus » sourit-elle pour camoufler la douleur de cet abandon. Lily. Elle avait été sa voisine, sa camarade universitaire, la fille qui l'avait emmené dans sa première soirée étudiante, avec laquelle elle avait essayé plein de nouvelles choses... Une partie d'elle avait toujours été fascinée par cette jolie blonde, et en même temps... une autre partie d'elle la jalousait un peu. Murphy frappa doucement ses cuisses de ses mains et réfléchi à haute voix à une prochaine question pour Jake. « Hum.... » fermant les yeux un instant, essayant de réfléchir à quelque chose qu'elle aimerait savoir. « C'est quoi ton plus grand rêve ? » demanda t-elle curieuse, en se tournant pour l'observer à nouveau. Oui. Elle voulait connaître son rêve, était-il lié à l'argent ? L'amour ? La famille ? Les voyages ? Les expériences ? La gloire ? Qu'est-ce qui le définissait au plus profond de lui ? Murphy savait qu'elle allait en apprendre beaucoup sur lui grâce à cette question. Elle pourrait ainsi visualiser sa nature profonde. Ce petit jeu était en tous cas, bien amusant pour elle et surtout, ça faisait passer le temps du trajet en voiture. Murphy espérait tout de même que ce trajet serait assez long pour qu'elle puisse profiter encore de Jake. Elle n'était pas encore prête à le laisser, à se retrouver sans lui, sans sa présence, son odeur, sa voix, son humour.

Jake commença par sourire, puis par dire à voix haute que ce que Murphy venait d'avouer, ce n'était pas des bêtises d'adolescente, mais bel et bien des expériences. Elle était d'accord, seulement son père ne l'avait pas vu de cet œil là lui. Et elle se souvient encore de la punition qu'elle avait du subir pendant de très longues semaines ensuite. Le début des enfers pour être honnête. Alors quand Jake se moqua un peu, même si ce n'était pas méchant, elle se sentie nulle. Nulle de ne pas avoir eu cette adolescence là, que tout le monde semble avoir, nulle de n'avoir aucune anecdote à raconter, nulle de rien avoir osé dans sa vie. Parce que dans le fond, le souci c'était ça. Trop jeune, elle avait du faire face au chagrin, à la perte de ses proches et tout ceci aurait pu la faire sombrer dans la drogue, l'alcool ou les conneries, mais son caractère trop solitaire l'avait plutôt enfermée à l'intérieur de son propre corps. Lorsque la main de Jake vint se poser sur sa joue, Murphy esquissa un léger sourire. Son contact physique l'apaisait, ça lui faisait du bien, ça la rassurait et surtout, ça la faisait vibrer. Le grand blond ne tarda cependant pas à relever un point important. Dans la théorie, non, il n'était pas le premier à l'avoir embrassé, c'était Lily qui avait cette place là. Elle sourit légèrement et replaçant une mèche de cheveux derrière son oreille, elle lui lança « tu es le premier garçon à m'avoir embrassé » et ça, c'était la pure et stricte vérité. « Et non, y'a rien que mieux… que toi » dit-elle à demi-mots, les joues légèrement gênées et baissant les yeux vers ses genoux, soudain bien plus timide que tout à l'heure. Finalement, elle en vint à lui demander s'il avait un rêve. Et elle se serait attendue à tout, sauf à cette réponse. Il n'avait pas de rêve ? Le visage de la jolie blondinette se tourna vers son amant, scrutant son regard. Est-ce qu'il faisait une blague ? Le regard de Murphy s'attrista lorsque Jake avoua ne pas avoir droit de rêver. Pour quelle raison au juste ? Elle l'interrogea du regard et instinctivement, sa main se posa sur la sienne, bien plus chaude d'ailleurs. Ses doigts caressaient sa chair et doucement, elle demanda « c'est triste que tu penses ça » et en même temps, c'était ce qu'elle pensait pour elle-même. Souvent, la jeune étudiante se demandait ce qu'elle avait pu faire pour recevoir autant de merde dans la gueule à longueur de temps. Et Jake dans tout ça, qu'avait-il bien pu faire pour penser ça ? C'était tellement… tragique et aussi pessimiste. Il ne rêvait pas… d'une vie de famille heureuse ? De rencontrer l'amour ? De nager avec les dauphins ou je ne sais quoi ? Murphy baissa son regard, alors que son amant reprenait la parole. Oui, peut-être qu'il aurait du inventer quelque chose, mais en fait, non. Il était sincère, comment pourrait-elle lui en vouloir pour ça ? La jeune blondinette retrouva tout de suite le sourire lorsqu'il évoqua le fait de partir en voyage avec elle. Cette idée lui plaisait, mais il devait sûrement dire ça comme ça, non ? Sa main toujours en train de caresser celle du boxeur, remontant à son poignet, elle sourit plus largement et lança « être riche n'a absolument rien d'intéressant... » et elle en savait quelque chose : son père l'était. Et il était devenu matérialiste, il l'était même à 2000 % alors que sa mère à elle, lui avait apprit tellement d'autres valeurs dans la vie. Et même si son père voulait et pouvait tout lui payer, elle insistait pour travailler à la boutique de Wellington, elle ne réclamait plus d'argent sans raison à son père, ce n'était pas… comme ça qu'elle concevait la vie, ni sa relation avec lui. « Mais si tu me proposes un jour de partir, j'te suis les yeux fermés » et ce moment là, tout de suite, maintenant, en était la preuve. Quand elle était montée dans ce pick-up, ils ne se connaissaient presque pas, et pourtant, elle l'avait suivi jusqu'ici. Enfin suivi… on se comprend. Mais Murphy savait qu'à ses côtés, elle serait prête pour tout affronter, et qu'il ne lui arriverait jamais rien. Cette confiance naturelle et aveugle était enrichissante au plus haut point à ses yeux. « Moi si j'avais un rêve... » lança t-elle alors, reposant sa tête sur le repose-tête de son siège, le regard perdu sur la route devant eux en réfléchissant. « Un mariage réussi... » oui, c'était ça. Pas comme ses parents. Pas un mensonge. Pas une histoire de cul. Pas une histoire pseudo d'amour, de mensonges, de trahisons. Elle voulait une vraie histoire, un couple fort, qui dure, qui traverse tout, qui soit solidement encré dans le sol, qui puisse tout combattre, résister à tout. Ainsi, elle aurait au plus profond d'elle, ce sentiment de sécurité qu'il lui manquait cruellement : ce sentiment que non, il ne partirait jamais. Que cela serait totalement impossible. « Même si je sais que le mariage c'est… c'est qu'un bout de papier, et que les gens ne veulent plus se marier » et elle n'était pas sûre de vouloir signer un « contrat » non plus. « Mais quand je dis mariage, je pense surtout à un couple fort, robuste, qui résiste à tout, peu importe… ce que c'est » elle baissa les yeux, sourit face à la stupidité de ses propres et demanda alors « j'suis utopiste hein ? » avant de rire doucement.

Finalement, les deux amants continuèrent leur petit jeu pendant encore de longues minutes. Apprenant à se découvrir, à partager des souvenirs, à rigoler ensemble, à parfois chanter sur la musique qui continuait de passer dans ce vieux pick-up. Au fond d'elle, Murphy savait qu'il allait lui manquer une fois qu'elle l'aurait quitté, qu'il l'aurait déposé devant la villa de son père. Elle savait que dès l'instant où il ne serait plus à ses côtés, ses angoisses, ses inquiétudes et sa solitude allaient la ronger de l'intérieur. Elle commençait à repenser à son père, à la discussion qu'ils devraient avoir et elle angoissait -alors que finalement, tout se passerait très bien. Mais voilà, en compagnie de Jake, tout semblait si simple, si normal, si naturel... et il n'y avait pas la moindre once d'angoisse à l'horizon. Après s'être arrêté manger un morceau sur le bord de la route, les deux amants commencèrent à réaliser que bientôt, ils allaient arriver à Island Bay. Et quand les panneaux de leur ville commencèrent à apparaître, le cœur de la jolie blonde se serra. Elle avait envie de lui dire à quel point il allait lui manquer, elle voulait déjà le revoir, mais... elle n'avait pas de portable, et Jake l'avait prévenu comme quoi il allait être très prit, qu'il avait beaucoup de choses à faire... elle devrait alors attendre ? C'est ça ? Et s'il ne revenait jamais vers elle ? Et si tout ceci n'était qu'un rêve ? Murphy prit la main de Jake sur les derniers mètres et alors qu'ils arrivaient enfin devant la villa Gallagher, son cœur se serra davantage dans sa poitrine. Elle se détacha, glissa sur la banquette et trouva refuge dans les bras de son amant. Nichant son visage contre sa peau, qu'elle embrassa tendrement, la jeune étudiante profita de ces derniers instants. Embrassant sa peau, ses lèvres, lui adressant quelques dernières paroles le cœur à la fois léger et lourd. Elle n'avait rien à lui, rien qui porterait son odeur, ou qui lui permettait d'entendre sa voix, elle ne savait pas où il bossait, ni où il vivait. Là, tout dépendait de Jake lui-même. Et peut-être aussi du destin, parce qu'il semblait vouloir danser avec eux lui aussi. Finalement, au bout de longues et tendres minutes, le jeune couple se détacha l'un de l'autre. Le regard triste, un doux sourire sur les lèvres, Murphy fini par le regarder partir, sentant qu'on lui retirait une partie d'elle en même temps. Elle essaya de se ressaisir avant d'entrer dans la maison de son père, où la confrontation avec ce dernier aurait lieu d'ici peu. Mais à peine sa main fut-elle posée sur la poignée de la porte, que son cœur, son esprit et son âme toute entière étaient déjà prisonniers de ce pick-up, de ce grand blond, de ce mystérieux boxeur, de cet homme qui lui faisait voir le monde tout à fait autrement.

FIN