so.... maybe... ; reira

|	so... maybe... Nina & Reira

— Elle sourit tendrement lorsque Nina lui demande si à la place des cacahuètes, les chips feront l’affaire. Toujours attentive et avenante pour offrir ce qui plaît le mieux à l’autre. Reira acquiesce d’un hochement de tête. « Des chips c’est parfait ! » Ces tranches de patates frites et bourrées de sel se mangent sans faim. Parfois, elle se dit même qu’il rajoute de la drogue ou un truc qui rend accro pour autant avoir envie de piocher dedans. Le corps doit bien aimer se faire du mal de temps en temps avec de la junk food. D’ailleurs, c’est bien une des rares aliments saturés de graisses qu’elle réussit à manger. Depuis toujours, elle a du mal à manger, encore plus depuis la dépression et l’anorexie qui en a suivi. Elle n’irait pas jusqu’à dire qu’elle souffre encore de troubles alimentaires, simplement ça ne passe. La faute à un organisme trop habitué à autre chose, peut-être.

Les deux cousines ricanent ensemble alors qu’elles parlent de se contorsionner pour s’infiltrer dans des valises d’inconnus. C’est le genre de conneries à faire quand toute la bande de potes est éméchée. Ceci dit, avec la sécurité aux aéroports, l’expérience s’arrêterait bien vite. Ce n’est peut-être pas plus mal parce que l’air dans la soute n’est pas réputé super chaude et agréable. « J’pense qu’on tient une sacrée technique, faut juste s’assurer de bien contourner les caméras scanners de sécurité et le tour est joué ! » C’est beau de rêver. Parce que si c’était possible, ça se saurait. Autant se cacher dans une bagnole pour franchir des frontières, ça c’est déjà plus probable. Quelque part, cette rigolade improvisée prouve que Nina n’est pas contre cette visite. Et ça fait grandement plaisir à l’ancienne danseuse qui s’imagine déjà lui faire découvrir Moscou : l’opéra, la place rouge, le petit café où elle avait l’habitude d’aller. Elle a hâte de voir les réactions de Nina. Mais ce n’est pas encore à l’ordre du jour, pour l’instant il faut économiser. Parce que mine de rien ça coûte de bons billets de se déplacer, surtout quand t’as pas de logement gratuit sur place. En tout cas, la brune affiche un large sourire quand elle apprend que Nina a passé le plus merveilleux des anniversaires avec son meilleur ami à Disneyland. Reira n’a jamais eu besoin de grands évènements pour ses anniversaires, des repas en famille lui suffisaient. Mais elle comprend Nina, c’est le genre d’anniversaire que l’on ne refait pas mille fois dans sa vie donc ça marque. Puis visiblement, sa mère n’était pas plus investie que ça dans les anniversaires. Elle imagine avec grand plaisir les paillettes dans les yeux de Nina. Peut-être qu’elles sont encore là d’ailleurs, rien qu’à l’évocation du souvenir. « C’est clair que c’est pas le genre d’anniversaire que tu peux refaire chaque année ! Mais c’est ceux qui marquent le plus ! »

Tout ça lui fait penser à ses fameux anniversaires en famille, en même temps que la conversation dévie sur la famille russe. Après tout, Reira ne peut plus faire l’autruche, il s’agit aussi de la famille de Nina désormais, et elle est largement en droit d’en apprendre plus sur elle. Ce n’était pas son choix de ne pas les connaître, alors si Reira peut les ramener dans sa vie, elle ne va pas se gêner. Un sourire vient étirer ses lippes alors que Nina la rassure quant à sa place dans la famille. Elle sait qu’elle a raison, que ce n’est jamais trop tard. C’est simplement son foutu cerveau qui bloque, qui monte Reira contre elle-même, contre son passé. Probablement pour s’éviter de nouvelles souffrances. Elle reprend une gorgée de bière. « Si… si un jour j’suis prise d’une folie et que je tente d’appeler… Est-ce que tu voudras bien être près de moi ? » Elle la regarde avec des petits yeux ronds, presque de petit chaton. Elle est la plus vieille des deux mais là, elle cherche du soutien car elle sait que le jour J, elle finira sûrement par se défiler. À l’heure actuelle, elle a envie de se dépasser, pour Nina, pour lui offrir une vraie famille. Pourtant ça ne suffit pas pour sauter le pas, les verrous rouillés doivent sauter les uns après les autres.

|	so... maybe... Nina & Reira

— Les yeux de la brune s’écarquillent lorsqu’elle apprend que Nina n’est pas réellement rousse. Il faut dire que depuis leur rencontre, elle ne l’a vue que sous cette couleur. Couleur qu’elle trouve d’ailleurs très belle. Enfin, elle ne se doutait vraiment pas que elle était loin d’être naturel. « Sérieux ? T’es pas rousse naturellement ? Mais c’est tout un mythe qui s’effondre ! » Reira rit de bon cœur, parce que oui, elle pensait dur comme fer que Nina était rousse, et ça lui fait bizarre d’apprendre que non. En fait, elle réalise surtout qu’elle ne connaît pas grand-chose sur Nina. Elles ont beau s’être revues quelques fois après leur rencontre au café, finalement elles ne connaissent pas encore beaucoup de choses l’une sur l’autre. Pourtant, curieusement, elles connaissent la plus difficile partie de la vie de l’autre, pas en détails. Reira sait que Nina n’a pas connu son père et que visiblement elle a eu pas mal de soucis d’argent avec les dettes de sa mère, et Nina sait que Reira a abandonné son pays. Les gens ont toujours tendance à s’ouvrir aux inconnus, d’où le fait que souvent, des connaissances savent des choses profondes sur Reira alors que des proches de longue date pourraient l’ignorer. C’était pareil avec Chance au Cameroun, et plus récemment avec la saxophoniste Lara. C’est à se demander pourquoi Reira a du mal à s’ouvrir à un psychologue alors qu’elle peut aisément se confier à des gens sortis d’un coin de rue. Elle se reprend, redonne toute son attention à Nina. « Pardon, j’ai toujours cru que c’était ta couleur naturelle, parce que ça te va tellement bien que… Bah on pense que c’est ta vraie couleur ! » Elle ne veut surtout pas que Nina prenne mal sa réaction. Non, elle n’a rien de négative, c’est juste qu’elle est surprise. « C’est vrai que ça se remarque assez bien mais peut-être que justement, ils ne te repéreront pas. On dit bien qu’on ne voit pas ce qu’il y a sous notre nez, même le plus évident. » Combien de fois il est arrivé à Reira de chercher un truc qui se trouvait juste sous son nez ? Même quelque chose de coloré ! Oui, ce qui est trop évident ne saute pas toujours aux yeux, parce que le cerveau cherche quelque chose qui passerait inaperçu, qui pourrait aisément se camoufler et se cacher. Peut-être que la rousseur a un avantage pour le coup !

Enfin, pour l’instant, elles sont encore loin de pouvoir aller en Russie. Par manque de budget, déjà. Et puis surtout, parce qu’il faut que Reira soit prête. Même Nina, ce n’est pas tellement un pays comme un autre. Reira peut imaginer qu’elle puisse entretenir un lien difficile avec la Russie. Ainsi, peut-être qu’il lui faut aussi du temps pour se préparer psychologiquement à fouler ses terres, à elle aussi, natales. Et puis, si d’ici-là, Reira réussit à renouer avec sa famille, cela voudra aussi dire pour Nina qu’il sera le temps d’énièmes retrouvailles. Ce n’est pas rien. Bien que pour le moment, la famille russe soit un sujet plus compliqué pour Reira. Elle reprend une gorgée de bière, et pignoche dans les chips. En même temps, elle écoute Nina lui dire que sa famille doit penser à elle, attendre, ne serait-ce qu’un coup de fil. Elle en a conscience Reira, elle y pense. Mais elle n’y arrive pas. Alors elle se dit que si un jour elle trouve le courage de le faire, elle aura besoin de quelqu’un auprès d’elle. Et dorénavant, Nina est la mieux placée pour cela. Le geste de tendresse qu’elle a pour elle la conforte dans cette idée. Reira serre doucement ses mains en lui souriant. Ça peut paraître un rôle anodin, seulement c’est bien plus que cela. Un véritable rôle de soutien. Elle n’aurait même pas besoin de parler ou de la serrer dans ses bras, sa simple présence suffirait. Et puis, si ça devait mal tourner… Hé bien. Nina sera sûrement là pour la réconforter. Parce que c’est ça la famille : l’entraide et le soutien. Elle la prend dans ses bras. « Merci beaucoup Nina. Je sais que ce n’est pas demain la veille, mais ça représente beaucoup pour moi. » Pendant quelques instants, elle la garde dans ses bras avant de se décoller pour la regarder. Ses lèvres s’étirent un peu plus. « À vrai dire, je crois que j’avais besoin de ça. De toi. Pour avoir un déclic… et me dire qu’il faut que je reprenne contact. » Le déclic n’est pas totalement, loin de là. Mais c’est un premier. « Je veux le faire pour moi, mais aussi pour toi… Pour te permettre d’accéder à plus de savoir sur notre famille, et puis… pour que tu aies des contacts aussi avec la famille de là-bas. » Son sourire donne à son visage un air compatissant. « Je me doute que ça a vraiment pas dû être facile de grandir sans famille, alors si je peux t’offrir un petit bout de famille, je le ferais. » Elle est plus que sincère pour le coup. De nature compatissante, Reira aimerait pouvoir offrir à Nina cette famille qu’elle n’a pas eu avant que le temps ne passe de trop et que ce soit trop tard. Un jour, elle y arrivera, parce que maintenant elle va pouvoir grandir et revivre avec un bout de Russie, avec Nina.

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— La russe ne peut que rire lorsque Nina se met à le faire après avoir vu l’once de déception dans son regard en apprenant que la rousse n’a en fait rien de roux. Elle lui explique alors qu’avec une mère ultra blonde et un père brun, le roux ne risquait pas de teinter ta tignasse. Reira lui sourit avant de lui répondre. « Oh tu sais, ça peut ressortir de n’importe où dès lors que c’est dans les gènes. Mais de notre côté, j’crois pas qu’il y ait de roux, en tout cas pas du pur roux, des reflets oui probablement ! » Elle comprend l’envie de se faire des couleurs, d’autant plus que sur une base blonde ça doit être assez facile. Il arrive à Reira se teindre les cheveux en noir, juste pour le plaisir d’avoir une autre tête le temps de quelques shampooings. Elle n’a jamais tenté de se décolorer les cheveux, elle attache trop d’importance à sa couleur naturelle. Certes, les cheveux ça repousse mais elle n’a pas envie d’attendre trois ans avant de retrouver toute sa chevelure dans sa couleur d’origine. Donc elle se contente de couleurs plus foncées qui partent bien et vite. En attendant, elle complimente sa cousine, en lui disant que la couleur lui va vraiment bien et ça semble la toucher. Tout naturellement, un sourire s’empare des lèvres de Reira alors que Nina lui précise que la couleur, au-delà du fait qu’elle l’aime, est surtout là pour lui éviter les blagues sur les blondes. Un petit pouffement de rire s’échappe d’entre ses lippes. « C’est bien pensé ! Pourtant les blagues sur les roux il y en a aussi ! Enfin non… Ce ne sont pas des blagues, plus des surnoms à la « poil de carotte », ça te dérange pas ? » C’était une question un peu bête à son goût, parce qu’avec le temps, Reira a appris à s’en foutre de l’avis des autres, et quelque part elle espère que tout le monde est comme ça. Nina n’est peut-être pas comme ça si elle a été amenée à changer de couleur pour éviter les remarques, souvent irréfléchies et à force blessantes, des autres. Toutefois, Reira fait remarquer que ça peut être une force dans leur conquête de l’aéroport car bizarrement les gens ont tendance à chercher des choses « communes » et à ne pas faire attention à ce qui diverge. Donc oui, ce serait totalement possible de passer incognito auprès des agents de sécurité, et ainsi atterrir en Russie en ayant économiser un billet parce que Nina aurait voyagé dans la soute, dans sa valise. Malgré l’amusement d’imaginer un tel périple, il vaut mieux qu’elles y aillent de façon totalement banale et légale, en payant chacune leur billet. Ce n’est pas encore pour maintenant à cause de soucis pécuniaires, mais aussi personnels. En effet, pour aller en Russie et permettre à Nina de rencontrer sa famille, il faut tout d’abord que Reira reprenne contact avec eux et ce n’est pas encore gagné. Alors, elle évoque la possibilité de le faire, mais elle sait très bien qu’elle n’y arrivera pas seule. Elle alterne entre regards sur Nina, gorgées de bière et soupirs avant de se lancer et de lui demander si ça la dérangerait d’être là en soutien, le jour où elle choisirait de franchir le pas. Elle accepte et lui propose même de lui parler quand elle veut, même par sms. « Quand je vais t’envoyer tous les memes internet qui passe par là, il ne faudra pas te plaindre. » La brune laisse échapper un rire, amusée à l’idée d’harceler Nina de sms aussi inutiles les uns que les autres. Elles s’enlacent, puis c’est alors que Reira se confie un peu plus, disant que ce ne serait pas facilement, probablement pas dans un futur proche mais qu’elle fera tout en son possible pour offrir à sa cousine la famille qu’elle n’a jamais eu. Du coup, Nina lui dit qu’elle n’est pas obligée de le faire juste pour elle. « Oh non rassure-toi, je le fais aussi pour moi. Ce n’est pas que j’ai pas envie… c’est… » Elle marque un temps de latence avant de reprendre. « C’est que j’ai peur, que j’appréhende. Et je pense que j’avais besoin de ce genre de déclic, toi, pour me faire prendre conscience que j’ai aussi sûrement besoin de retrouver la famille. » Elle sait très bien que ce ne sera tout de même pas facile à faire, mais elle y arrivera. « Je sais que ce sera dur de franchir le mur que j’ai construit moi-même, mais je pense que te retrouver, et t’avoir près de moi, ça me fera beaucoup de bien. »