contexte › island bay ressemble à n’importe quelle petite ville côtière de nouvelle-zélande, mais il n’en est rien. en bordure de wellington, à une trentaine de minutes en voiture, se trouve un parfait petit endroit où se mélangent étroites maisons en location et grandes villas de propriétaires fortunés. c’est un endroit où il fait bon vivre, du moins d’apparence, puisque comme on sait, l’herbe semble toujours plus verte de l’autre côté de la clôture. tous les habitants d'island bay se sentent ici comme à la maison, en quelque sorte. mais n’en est-il pas autrement de leurs voisins ?
8° - 17° // températures stables, mais vent à venir
initiales interdites. › personnages inventés de 25 ans minimum. › 3 ans de différence entre l'avatar et l'âge du personnage. › 15 lignes minimum par rp › un rp par mois.
une rencontre lors d'un stage et la seule chose qu'ils ont en commun c'est leur passion pour le sport, pour le reste ils sont diamétralement opposés
elles sont soeurs et n'ont pas connaissance du lien qui les unis
14 février ○ Fumée opaque qui s'échappe de tes lippes, une main sur le volant tandis que l'autre s'occupe du bâtonnet de tabac calé entre tes doigts, sourire satisfait collé sur le bout de tes lèvres. Tu souriais seul, sans occupe raison, juste plongé dans tes pensées pendant que tu conduisais ta voiture. Petite merveille sur laquelle tu étais tombée, bonne occasion que tu ne pouvais pas manquer, encore un coup du destin : quelques jours seulement avant ton anniversaire, comme prévu. Parce que t'avais pas encore entamé tes recherches, ou que trop brièvement. Parce que tu te sentais pas encore prêt, jusqu'à voir l'annonce pour une belle Mercedes. T'aurais pas parié sur cette voiture, à la base. Mais le brillant de sa carrosserie noire t'a attiré, tout de suite. Il te fallait une caisse : elle était apparue devant tes yeux sans que t'ai à crier gare. Nouveau bijoux que t'allais chouchouter, tu t'es fais un plaisir d'aller au boulot avec les jours qui ont précédé celui-ci. Paradoxalement, tu t'es bien gardé d'en parler à une personne. La russe de ton cœur ne savait pas que ta mobilité n'était plus réduite aux transports en communs et à la marche à pied. Surprise de taille que tu lui réservais; deux, en fait. C'est peut-être pour ça que ce sourire ne voulait plus quitter la pulpe de tes lèvres, déjà en manque de la vitamine addictive qu'était devenue Reira. Le mois de janvier avait été un véritable ascenseur émotionnel, évènements brusques auxquels s'est enchaîné un début de mois de février mouvementé : l'incendie. T'as dû faire face à une Loreleï affolée, et rassurer tous ceux qui avaient eu vent du feu qui avait ravagé le manoir. Reira comprise. T'aurais pas cru, il y a un mois, que t'allais retrouver la chaleur des bras de la russe. Ni même ses lèvres. T'aurais pas cru, il y a un mois que tu serais encore plus accroc à son parfum ou à son sourire que tu ne l'étais déjà. Tu pensais que la barre ne pouvait pas monter plus haut, mais tu te trompais. Sentiments exultés, t'as eu envie de marquer le coup. La fête des amoureux tombait à pic. Un détail pourtant venait obscurcir le tableau lumineux qu'était votre relation depuis quelques semaines. Tu savais pas si t'étais légitime à l'inviter fêter la saint-valentin; tu savais pas non plus quelle signification ça aurait. Nom inconnu de cette relation qui vous unissait, vous ne vous étiez pas enfermés. Peur de reprendre un chemin escarpé, comme cette fois où tu as essayé et que tu as finis par lui dire adieu, pendant quatre mois. Peur pourtant infondée : les mots de l'ancienne danseuse avaient pourtant tout pour te rassurer, te permettre de définir un peu mieux cet alter évident entre vous. Sentiment profond de savoir de quoi il s'agissait, le terrer au fond de ton âme pour le préserver, prendre le temps qu'il vous fallait pour protéger ce lien qui se tissait entre vous depuis quelques semaines. Trop précieux pour le rompre d'une parole maladroite, t'as préféré laisser les étiquettes de côtés; axiome naturel qui se ferait avec le temps. Tu gares la voiture devant la maison et vérifie que ta cigarette était éteinte sur le béton; tu la jette dans une poubelle résidentielle avant de t'avancer pour toquer à la porte de la maison dans laquelle tu te rendais souvent, depuis quelques temps. En fait, dès que tu finissais une garde, tu venais retrouver la russe. Quelques minutes parfois, ou encore des heures. Tu te perdais dans la mer dégelée de ses yeux, le nuage harmonieux de ses bras, profitant de chaque minutes que tu passais avec elle comme si tu pouvais ne plus revenir. Mais cette idée était loin, très loin d'effleurer ne serait-ce que ton esprit. Esquisse qui s'élargit sur tes lèvres quand tu vois la porte s'ouvrir sur une russe qui n'avait plus de béquilles. Soleil rayonnant qu'elle était, tes iris bleus se figent sur ses traits doux. Tu restes quelques instants à la contempler avant de te rendre compte qu'elle attendait; tu ris un peu et humecte le rictus permanent de tes lippes avant de t'avancer tendrement vers elle, une main qui vient caresser sa taille et lui offrir un baiser. « Salut toi. » Tu souffles quand tes yeux se posent à nouveau sur elle. Tu lui tend ta main pour qu'elle la prenne une fois la porte de sa maison fermée, espérant qu'elle soit prête à la fin de journée que tu lui avais préparé. « Après toi. » Tu rajoutes alors que tu la conduis jusqu'à la voiture garée non loin de la sienne, l'oeil brillant de malice. « Le carrosse te convient ? » Nouveau sourire qui dévoilait tes dents alors que tu fais face à son regard surprit. Finalement installés tu conduisais en direction de votre activité de la soirée. Vous n'étiez jamais allé à la fête foraine ensemble, préférant les soirées au restaurant puis dans des bars, quelques sorties culturelles, aussi. Alors t'as eu envie de changer et le parc se prêtait parfaitement à cette saison, surtout en soirée. Lèvres pincées entre tes dents, tu tournes parfois la tête vers la jeune femme; gestes naturels que tu aimerais faire, montrer à quel point tu étais heureux avec elle, ce soir, tu te restreint cependant. Tu ne savais pas encore totalement comment te comporter, essence nouvelle pour vous deux. Comme si c'était plus simple quand vous n'étiez que deux inconnus qui couchaient ensemble. Pourtant, vous étiez encore un peu des inconnus, non ? « T'as une idée de l'endroit où on va ? » Tu finis par demander, joueur. « Allez, t'as le droit à un indice. On a un point de vu particulièrement beau de la ville. » Ton sourire s'élargit encore, décuplé enfin quand elle devine.
— Retour de la gamine des débuts qui se détaille sous tous les angles dans le miroir. Elle peut enfin vivre sans les béquilles, sentiment de liberté retrouvée. Patiente toujours en récupération, processus de guérison qui sera long, les mirettes se posent tout de même sur le genou encore meurtri, chair à nouveau marquée à vie par la cicatrice disgracieuse. La belle petite robe blanche qu’elle a choisi devrait attirer le regard ailleurs, pourtant le sien se pose bien sur la peau encore boursouflée qui se reconstruit au même rythme que l’esprit de la russe. C’est qu’elle a mis du temps Reira a reporté des robes après sa première opération, refus catégorique de laisser un bout de sa peau blessée aux yeux des autres, sans parler de sa cuisse lacérée. Sauf que là, elle s’en fiche, ou presque. Le coeur crie encore sa douleur, plaie à vif toujours couvée. Tout le monde a pris soin d’elle pendant un mois, Piotr a été aux petits soins même si elle a senti qu’il y a un truc qui crée de la distance entre eux depuis son retour et surtout, sa proximité avec un certain pompier. Mais, elle met donc ça sur le compte de sa peur de la voir fuir à nouveau face à son combat. Reira elle n’est plus la gamine désespérée d’il y a sept ans, et puis elle n’est plus seule. Le frère en première ligne n’éclipse pourtant pas celui qui adoucit l’amertume de l’accident. Chance. Le mois de toutes les émotions, ils ont vogué ensemble sur cet océan enfin accessible, et ils découvrent leur monde à leur rythme. Les craintes de Septembre effacées, la russe n'a plus peur de se livrer, de s’abandonner à la relation providentielle. Source d’apaisement, il lui avait déjà beaucoup apporté, mais la nouvelle dimension qui se dessine entre eux à de quoi exciter un peu plus le myocarde. Depuis le début Chance a posé ses empreintes dans sa cage thoracique, et même les meilleures raisons du monde n’auraient pas suffi à écarter Reira de la trajectoire de sa destinée, à ses côtés. Elle savoure chaque instant avec délicatesse et bonheur, l’incertitude qui plane toujours au-dessus de la tête car ils ne sont liés que par les paroles émouvantes et l’accord tacite d’être là l’un pour l’autre. Pourtant, ils se voient aujourd’hui. Le 14 Février, la Saint-Valentin. Est-ce qu’ils pouvaient faire plus officiel ? Sûrement pas. La brune ne s’est pas demandée ce que ça signifiait, se perdant encore un peu trop dans ces non-dits habituels, parce que cette fois, elle sait que l’issue ne sera pas le rejet. Et puis, ils s’étaient mis d’accord pour prendre leur temps, d’où la renaissance de cette relation innommée à la signification, cette fois, certaine. Le palpitant tonne un peu plus alors qu’elle s’observe une nouvelle fois son reflet dans le miroir, embellit sa vénusté d’un coup de doigt sur les lèvres teintés d’un rouge à lèvres vieux rose pour estomper le tout. Touche finale en écho aux toquements, ceux qu’elle connaît désormais bien grâce au visiteur assidu. Le prince charmant est là. Gazelle galopante elle peut enfin dévaler ses escaliers, récupère le reste de ses affaires. Bisous aux animaux, pochette avec les éléments de première nécessité et une légère veste, juste au cas où. Car elle ne sait pas où ils vont, le pompier muet comme une carpe quant au déroulement de cette soirée. Reira ouvre enfin, regard qui peut détailler le maître de son coeur sans même remarquer que plusieurs secondes s’écoulent. Toucher délicat contre sa taille et baiser tendre, endocarde qui se gonfle d’euphorie. « Cher prince charmant. » dit-elle avec un rictus amusé avant de fermer la porte et glisser sa main sur la sienne. Devant la voiture, elle reste bouche bée. Déjà parce qu’il a une voiture, et ensuite parce qu’il a cette voiture. Prunelles écarquillées, elle déshabille la carrosserie et lorgne sur les courbes félines de la Mercedes. Ses lèvres se contractent en un sifflement, rire qui s’échappe juste après. « Dis donc t’as mis le paquet, t’essayes de m’impressionner ? C’est réussi. Le carrosse est parfait. » Le ton taquin est plus fort qu’elle, mais ça aurait été tout aussi parfait avec un vieux tacot. Ceci dit, depuis le temps qu’il doit s’acheter une voiture, il a suffisamment eu de temps pour se dégoter ce petit bolide. Beauté extérieure et intérieure, la berline a tout d’un modèle premium. Ça rappelle à Reira les voitures des chauffeurs de son père, toujours des allemandes. Il faudrait qu’elle l’appelle d’ailleurs… Quand même. Pas le moment de penser à ça, elle tente de décrypter le chemin emprunté par Chance. Direction Wellington visiblement… Ses yeux se plissent alors qu’il lui demande justement si elle a des idées sur leur lieu de destination. Avant même que la brune n’avoue qu’elle n’en a aucune, il lui offre gracieusement un indice, qui, en réalité, ne l’aide absolument pas. Ses lippes se pincent alors qu’elle tourne son visage vers lui. « Il y a une tour à Wellington, comme à Tokyo ou Seattle ? » Point de vue beau rime avec prise de hauteur dans son esprit. Mais elle n’a pas le souvenir d’avoir vu le ciel de la capitale se faire envahir d’une quelconque tour. Moue presque déçue de ne pas trouver, Reira finit par esquisser un sourire. « Tu ne veux pas m’en donner un autre ? C’pas moi qui suis née ici tu sais… » Ces cils galbés par le mascara papillonnent devant les beaux yeux du brun, histoire de l’amadouer un peu plus alors que la voiture avale l’asphalte pour les rapprocher du lieu de rendez-vous. « T’as trop bien gardé le secret c’est pas juste… » Elle a littéralement aucune idée. Déjà, parce qu’elle ne sait pas ce que les couples sont censés faire pour la Saint-Valentin à part aller à un ballet. Les représentations du 14 Février étaient toujours complètes et le public souvent en duo. Sauf qu’elle sait bien que Chance ne l’emmènerait pas là, pas après l’accident. Puis au loin, elle voit les néons colorés de la fête foraine, manèges aux ampoules clignotantes et aux spots stroboscopiques. Et la grande roue se dessine au travers des rayons du soleil couchant. Le visage de Reira s’éclaire alors qu’elle remarque le chemin qu’il prenne, celui qui mène jusqu’à la fête foraine. « Tu m’emmènes à la fête foraine ? Sur la grande roue ? » Les pièces du puzzle s’emboîtent tandis qu’un large sourire prend possession des traits de son visage. Elle trouve l’idée incroyablement bonne, un lieu rattaché à l’amusement, au rire. Bien-être dans les sensations recherchées, joie et gourmandise un peu partout. La voiture s’arrête sur le parking laissant les deux silhouettes en sortir. Reira ne peut retenir son rire d’excitation, saisit la main de Chance qui apparaît à ses côtés, doigts qui ont toujours ce besoin délicieux de s’agripper. L’iris bouillonne, luit sous l’effervescence du lieu qu’ils approchent doucement, pas lents pour profiter de chaque instant, chaque vision. « L’idée est géniale Chance ! Heureusement pour toi, j’ai pas le vertige ni la peur des manèges à sensations. » La soirée aurait bien été différente s’il n’avait pas fait attention à ce genre de détails. Elle admire toutefois l’idée vraiment bien trouvée, originale. Malicieuse, la russe vient lui glisser à l’oreille. « Tu gagneras pour moi une grosse peluche au tir à la carabine, comme dans les comédies romantiques ? »
14 février ○ La surprise semblait réussie. L'oeil brillant, tu souriais inlassablement à la russe, la zieutant dans le rétroviseur central de la voiture dès que tu en avais l'occasion. Tu lui demande si elle avait deviné où tu l'emmenais, mais c'était un peu un piège : tu ne lui avais rien dis du tout, comment est-ce qu'elle aurait pu deviner à moins d'être voyante ? Indice donné, tu continues de suivre la route que tu connaissais, la fête foraine se trouvant un peu à l'écart, entre Island Bay et Wellington. Tu laisses sortir un rire malicieux alors qu'elle te demande si il y a une tour à Wellington comme dans d'autres grandes villes. « Pas que je sache, à moins qu'ils en aient érigé une en dix ans... » Tu réponds, les yeux sur la route. Esquisse mesquine quand elle te fait les yeux doux, tu évites de la regarder en sachant parfaitement à quel jeu elle jouait. Sérieux surprenant alors qu'il y a quelques secondes un sourire était pendu à tes lippes, tu avais soudainement l'air grave et concentré sur une route que tu connaissais parfaitement. Quand elle abandonne enfin, tu t'autorise à la regarder, commissure qui se courbe, satisfait. « C'est pour ça que ça s'appelle un secret. » Tu lui réponds calmement. Tu savais que t'aurais craqué en voyant les beaux yeux bleus de la brune, c'était évident. Et tu savais aussi qu'elle ne tarderait pas à deviner seule où tu comptais l'emmener, panaché de lumières et de néons qui commençaient à apparaître à l'horizon. Alors ça ne servait à rien finalement de lui dire si elle pouvait s'en rendre compte et que tu pouvais admirer l'éclatant de ses iris émerveillées lorsqu'elle se rendrait compte de la soirée qui vous attendrait. Dans l'idée où cette soirée lui plairait et qu'aucune embûche d'ordre personnel ne se mettrait en travers de votre chemin. Du style un vertige dont tu n'avais jamais entendu parler, ou une peur monstre du monde. Ces deux éventualités t'étonneraient, cela dit. C'est pour ça que tu avais pensé la soirée sans vraiment te soucier de ce qui pourrait poser problème. Tu souris à pleines dents quand tu vois les lippes de la russe s'agrandir. Finalement, l'attente en valait la peine. Lui dire simplement aurait été trop facile, et tu étais plutôt content de voir ses yeux briller comme ceux d'une enfant qu'on emmènerait à DisneyLand. Peut-être que tu extrapolais un peu, c'était qu'une fête foraine. Mais sa réaction laissait se dissiper une chaleur dans ton ventre, soulagement que la surprise ne soit pas raté. « Et oui, c'est pas la tour de Tokyo, mais c'est pas mal, une grande roue. » Tu ris un peu avant de t'humecter les lèvres pendant que le paysage défilant vous rapprochait de la source de vos sourires. Cercle joyeux de transmission, les risettes de Reira faisaient les tiennent. Tant qu'elle était contente, tu l'étais aussi. Parce que ce soir, c'était un peu son soir. Tu arrives à trouver une place assez rapidement après avoir payé le parking et vous sortez de la voiture, une russe en effervescence au bras. Tu retiens pas un rire, plus discret en voyant la réaction enfantine de la jeune femme. Tes rétines ne la quittaient pas, sourire discret et attendrit alors qu'elle enlace ses doigts autours de tiens. C'était par des petits gestes tendres comme ceux-ci que tu te rendais compte à quel point la brune était différente qu'il y a quelques mois. Ce contact, indispensable entre vos mains qui se cherchaient, rassurait ta myocarde encore fragilisé par la russe. Il fallait du temps pour réparer l'organe interne blessé, pourtant, il semblait s'être rétablit au même rythme que le genoux blessé de l'ancienne danseuse. Alors que vous avancez, elle complimente l'idée, soutenant qu'elle n'avait heureusement pas le vertige ou une peur bleu des sensations. « Et même si ça avait été le cas, on en aurait profité pour jouer à tous les attrapes nigauds qui s'y trouvent, visiter la maison hanté ou encore les labyrinthes. C'est l'avantage d'une fête foraine.» Tu souris en enserrant un peu la main de Reira qui se trouvait enveloppé par la tienne. Le pas lent, vous avanciez au rythme de la russe qui prenait visiblement son temps pour observer les lumières et les premières attractions que vous pouviez voir. Sa voix vient trouver le chemin de ton oreille et tu souris, malicieux à sa demande. « Ah ça, je peux te dire que tu vas être servie. » En fait, tu n'en savais rien : c'était la première fois que tu remettais les pieds dans une fête foraine depuis l'armée. Tu imaginais que oui, ça devait être pour un militaire entraîné à tirer à distance et sans viseur. Mais si tu ne voulais pas t'avancer à ce propos, c'était raté. T'avais intérêt à réussir à lui dégoter une peluche, ou alors ton égo en prendrait un coup. Alors qu'elle souhaite reprendre le chemin, ta main vient retenir sa silhouette enveloppée dans une jolie robe blanche pour l'attirer vers toi. Tes doigts libres viennent courir sur la mâchoire fine de la brune avant de se poser derrière son oreille, ton pouce sur sa joue rosée. Tes lèvres viennent retrouver les sienne, faire durer un peu plus longuement le premier dont tu n'avais pas assez profité à ton goût. Tu la retiendrais presque pour le plaisir de goûter à nouveau à ses lèvres sucrées, caresser encore un peu le derme de ce visage sur lequel t'aimerais faire courir tes lèvres. Mais ce n'était pas vraiment l'endroit pour ça, alors tu te contente du rebondi de ses lippes. Tu récupères sa main après quelques secondes et l'emporte avec toi dans la foule. « En fait, tu es très belle ce soir. » Tu lances par dessus ton épaule. Tour rapide du parc, vous découvrez les différentes attractions et stand qui pourraient vous intéresser avant de faire votre choix. C'est vrai que tu aimerais profiter de la grande roue pendant le crépuscule et pouvoir admirer le coucher de soleil sur l'étendu bleu des côtes. En tournant la tête, tu remarques une petite échoppe avec peu de clients, l'enseigne principale dévoilant une pomme d'amour. « Ça te tente ? » Tu proposes à la brune en lui montrant d'un signe de tête le stand. Vous vous y dirigez après qu'elle ait accepté et tu en prends une que tu confies à Reira. « Un petit tour sur la grande roue, ça te va ? » Tu demandes ensuite, l'heure du coucher de soleil n'allait pas tarder. Là aussi, elle accepte ta proposition. Ce sera probablement les deux seules que tu ferais ce soir, lui laissant le luxe de choisir l'ordre de passage des autres attractions qui vous ont fait de l'oeil pendant votre tour. La file d'attente était invraisemblablement courte, chose rare à cette heure puisque normalement, tout le monde avait la même idée de profiter du coucher de soleil. Tu ne fais pas vraiment attention à ce détail, ne te doutait pas que la grande roue avait eu un problème technique un peu plus tôt : les gens n'avaient pas envie de se retrouver à nouveau bloqués. Tu embarques Reira avec toi et vous montez dans votre nacelle. D'autres couples ou familles suivaient le rythme, laissant monter les cabines assez rapidement, ton bras placé au dessus de ses épaules d'un geste protecteur et décontracté. « Tu me fais goûter avant que tu ne finisses par tout manger seule ? » Tu lances taquin, les yeux écarquillés après avoir vu la russe croquer un gros morceau de la confiserie. Elle l'approche de ta bouche et tu t'appétais en prendre un morceau quand un ébranlement brusque arrête l'attraction. Tu regardes autours de toi, alerte, essayant de comprendre ce qu'il se passait. Tu ris aux éclats en voyant uns des employés se diriger vers la cabine de maintenance assez rapidement et après avoir entendu quelques protestations du genre "pas encore". « Je crois qu'on n'a pas choisi le bon moment, finalement. » Sourire réprimé en une grimace amusée, tes yeux brillaient : être coincé ici avec Reira, toi, ça t'allait bien.
— Il garde le silence, le secret ne passe à aucun moment la barrière de ses lèvres. Et ça amuse autant que ça agace la russe. Parce qu’elle aimerait savoir, comme elle aimerait conserver l’effet de surprise. Elle a bien saisi que c’est ce qu’il veut préserver le petit Chance. Il doit sûrement être fier de son idée, alors qu’il élude ses questions, répondant d’un air impassible, évitant soigneusement le regard d’une Reira-Chat potté. Au moins, elle aura essayé. Moue boudeuse d’une enfant capricieuse, ses yeux se perdent sur le paysage qui défile jusqu’à tomber sur les néons qui colorent le ciel et la grande roue qui perce les rayons solaires. Incertaine quant à leur destination, le chemin se dessine dans son esprit, évidence sous les yeux. Les traits s’étirent naturellement, joues gagnées par un sourire des plus émerveillés, paillettes dans les mirettes. La petite fille en elle reprend le dessus, car dans sa vie elle n’a pas fait tant d’attractions que ça, hormis à Disneyland Paris quand elle était petite, trop petite encore pour secouer son coeur de grosses sensations. Quoi que voir Mickey avait de quoi la faire autant chavirer qu’un grand huit. La joie ne se tarit pas quand ils atteignent le parking, pire encore, elle trépigne sur place, excitation qui bouillonne dans ses veines alors qu’elle se rapproche de Chance, ses doigts qui retrouvent les siens. Il semble aussi amusé qu’elle, à moins qu’il ne le soit à cause d’elle. En tout cas il peut se laisser embarquer par la certitude qu’il a fait un super choix. « Oh il y a une maison hantée ? » En fait, elle n’a jamais vraiment mis les pieds dans une fête foraine Reira, se contentant de remarquer de loin les manèges à sensation. Le coeur n’en est que plus conquis. Par les lieux, par cette intimité partagée aux yeux de tous. Cette main, elle avait de la sentir souder à la sienne peu importe le lieu ou les circonstances. Il y a encore quelques mois de ça, quand ils se perdaient dans une relation plus incertaine, elle n’aurait probablement jamais osé. Heureusement, peut-être, la douleur n’aurait été que plus aiguisée entre eux au moment de poursuivre leurs chemins propres. La voix mielleuse de la russe vient susurrer au creux de l’oreille du brun une demande des plus romantiques selon Hollywood. Lippes qui s’étirent en un sourire délicat, la commissure qui cherche à rejoindre le lobe des oreilles quand il lui annonce qu’elle va être servie. Elle n’a pas pensé à son passé de militaire pourtant omniprésent, il risque donc de lui gagner tout le stand de tir à la carabine avec ses compétences. Et même s’il venait à rater, ce ne serait pas bien grave, elle ne ferait que le charrier gentiment pendant le chemin du retour. Le moment importe plus qu’une quelconque peluche, bien qu’elle serait le signe éternel de leur soirée passée ensemble un 14 Février. La main de son rencard glisse contre sa taille pour attirer à lui la silhouette russe qui s’apprêtait à partir à la découverte de la fête foraine. Les doigts taquins glissent sur son épiderme, peignent docilement les contours de son visage avant que leurs lèvres ne se scellent dans un tendre baiser. Plus long que le premier échangé sur le palier de sa maison, plus délicieux alors que la foule aux alentours s’efface pour ne laisser que les deux tourtereaux dans leur sphère radieuse. Un simple baiser, assemblage des âmes face au monde entier. Dimension officielle en expansion, ce truc qu’elle évitait alors jusque là, cette chose dans laquelle elle plonge sans flancher aux côtés d’un Chance encore tout juste retrouvé. Il n’est plus question de le repousser en fuyant ses responsabilités, la brune a appris, et elle continue d’apprendre à ses côtés. Malgré le manque d’expérience, la nature de leur amour fait le travail à leur place. Sillon d’un couple qui se trace, relie leurs coeurs. Elle aurait aimé pouvoir rester un peu plus près de lui, mêler son souffle au sien. À la place, Reira ne dispose que d’une fraction de seconde pour sourire contre le rond de ses lèvres. Les joues déjà fardées de la rouge s’empourprent au compliment d’un Chance sincère mais malicieux, qui l’entraîne enfin dans les festivités. « Il fallait bien te faire honneur… » lance-t-elle sans savoir si le brouhaha des rires et des mécaniques des attractions permettra au brun de l’entendre.
Ce n’était qu’un tour succinct des lieux, de quoi découvrir les diverses attractions avant de s’accorder sur un ordre de passage après avoir passé du temps dans les airs, dans la grande roue promise. Reira n’espère pas faire preuve d’un vertige inconnu, car c’est qu’elle n’a pas monté sur un tas de trucs en hauteur. Cependant, elle n’a pas défailli en grimpant au dernier étage de l’Empire State Building, donc il n’y a sûrement rien à craindre. Puis, ce n’est pas comme si la grande roue allait faire l’objet d’un souci technique. La voix de Chance l’appelle pendant que d’un signe de tête il indique le stand des pommes d’amour. Rarement attirée par les sucreries, être perdu dans l’effervescence des lieux et le bonheur du moment a du bon puisqu’elle acquiesce d’un vive signe de tête. Premier croc d’une longue série, accompagné de son râle adulateur. Aussitôt, il propose la grande roue. Grande sourire approbateur et nouveau signe de tête d’une brune toujours excitée. Reira n’attend que ça en réalité depuis qu’il lui a confirmé dans la voiture qu’il était question de profiter d’une belle vue. En plus, ils font bien de profiter du manège maintenant car la queue est quasiment inexistante. Rapidement ils entrent dans leur cabine, brunette protégée aux épaules par son garde du corps personnel. En s’installant, elle se délecte un peu plus du sucré de la pomme d’amour qu’elle croque à pleines dents. Mastication soudainement interrompue par la réclamation de Chance. Le visage de Reira s’illumine d’un sourire malin. « Dis donc, c’est pas toi qui dois reprendre des forces. » Même si les béquilles ont disparu, le chemin de la guérison est encore long. Alors oui, le pompier a eu une mésaventure en début de mois avec une intervention qui lui a bien valu quelques bleus et plaies superficielles. Mais, il avait sûrement déjà retrouvé ses forces, bien qu’elle craigne toujours qu’il y a un truc sous-jacent que personne n’a vu. Ça arrive ce genre de choses. « Je plaisante, tiens, goûte. », voix douce qui porte à travers le calme de leur cabine montante. Reira lui approche la pomme des lèvres pour qu’il puisse se les enduire de sucres mais le tremblement de l’engin la stoppe. Dieu merci, la confiserie ne roule pas au sol, toujours fermement accrochée à son bâton. L’éclat de rire du brun attire son attention sans qu’elle ne comprenne tout de suite de quoi il s’agit. Une grande roue ça s’arrête toujours pour laisser le temps d’admirer la vue, non ? Sauf qu’ils ne sont pas vraiment à pleine hauteur encore… Finalement, les murmures désappointés, plus râleurs, et les paroles de Chance lui font comprendre qu’ils sont coincés. Fameuse panne mécanique à laquelle elle pensait un peu plus tôt. C’est son tour d’éclater de rire tout en regardant Chance. « Tant que la nacelle se décroche pas ça va, la soirée devrait pas se ternir. Et puis, t'es pas en trop mauvaise compagnie. » Sourire malicieux, en fait coincer ou pas ça ne change pas grand chose pour la russe, tant qu’elle est aux côtés de son prince charmant. « Tiens, récupère donc ton dû. » Parce qu’avec ça, il n’a pas eu le droit à son bout de pomme d’amour. Elle observe ses lèvres s’écrasent contre la carapace sucrée, se refermer avec envie sur la pomme juteuse qui trempe la partie charnue de son visage. Intimité retrouvée dans la nacelle, en voyant une goutte perlée au coin de ses lippes, elle vient la récupérer du bout de la langue avant de l’emprisonner dans un baiser. Elle aussi, elle peut désormais s’ouvrir au monde et ne pas limiter sa tendresse aux moments privés. Son front s’attarde contre le sien après le baiser, le temps d’apprécier un peu plus les embruns de leur affection, le palpitant qui s'agite dans sa cage thoracique. « Moi je suis bien contente d’être bloquée avec toi, même si j’espère que ça ne durera pas toute la nuit quand même… » Sourire contre la pulpe de ses lèvres avant de s’écarter pour replonger dans sa pomme. Pour ne pas le laisser en reste, elle lui tend à nouveau la sucrerie tout en observant les alentours. Paysage, mécaniciens paniqués à l’idée de devoir régler le problème rapidement, mais surtout les lueurs de la ville. Ils ne sont pas vraiment tout en haut encore, mais déjà ils peuvent observer un minimum les alentours. Les lippes russes esquissent un sourire épanoui alors que ses doigts grappillent les quelques centimètres qui les séparent de ceux de Chance, pour que sa paume se pose contre le dos de sa main. « Ça ne vaut sûrement pas encore la vue de tout haut, mais j’aime déjà beaucoup. Avec le coucher du soleil au loin sur l’océan… c’est magnifique. » Prunelles luisantes qu’elle tourne vers lui sans se départir de son sourire. « Tu venais ici quand tu étais plus jeune ? Ou tu as eu l’idée comme ça ? À moins que ce ne soit ton attraction préférée ! » La nostalgie s’imprègne de la russe alors qu’elle songe aux manèges empruntés par la gamine en elle il y a des années de ça. L’odeur de la barbe à papa, des crêpes et la musique entêtante des carrousels. C’était sûrement ça son attraction préférée, le carrousel. Rien de plus simple, et pourtant, grimper sur un cheval ou dans un carrosse avait de quoi la ravir pour un bon mois. « Moi j’crois que j’ai toujours aimé les carrousels, leur côté ancien et simple, j’aime bien. On en fera, ça te dit ? » Reira lui demande, parce qu’elle ne voudra pas l’entraîner dans un manège qu’il exècre, ce n’est pas le but. De fait, elle préfère partager des moments qu’ils apprécient tous les deux. Toutefois, pour l’instant ils sont bloqués sur la grande roue donc à part échanger sur leurs goûts en matière d’attractions, ils ne peuvent pas faire grand chose d’autre. Ceci dit, ce n’est pas plus mal de pouvoir profiter de cet instant suspendu dans les airs pour découvrir l’autre.
14 février ○ Euphorie polychrome entraînée par les néons bigarrés du parc, tu vis l'instant en ayant l'impression d'avoir quinze ans de moins, et une jolie fille à ton bras. Enfants de la nuit, vous vous éveillez en même temps que la boule de feu se cache derrière l'horizon bleu. Excitation lancinante au fur et à mesure que le temps passe, tu savais que la nuit serait longue sur le papier et pourtant... qu'elle passerait à vitesse éclaire. Exactement comme à chaque fois que tu étais en compagnie de la belle russe. Si le temps semble s'arrêter dès que tu poses tes lèvres sur les siennes, laissant durer le baiser en la retenant, passion enchaînée à ton âme, l'aiguille continue d'avancer sur le cadrant, cliquetis interdit. Tu pouvais te perdre des heures sur ses lèvres ou dans ses yeux, ça n'empêcherait pas pour autant que les minutes défilaient toujours uniformément. Proportions immuables dans ce monde qui était le votre. Ça ne t'empêche pas de profiter de chaque seconde, surtout quand tes mains viennent caresser ses hanches et épouser la courbe de sa mâchoire. Tu ressens son sourire contre tes lippes alors que vos fronts restent collés quelques secondes. Tu pourrais rester encore longtemps comme ça. Mêler ton souffle au sien et sentir la joie qui émanait d'elle, d'un simple contact. Mais tu ne l'avais pas emmenée ici pour te perdre dans le bleu de ses yeux, ou tu serais resté dans la voiture confortable que tu venais d'acheter. Tu te force à t'éloigner d'elle, sans jamais pourtant lâcher sa main douce, pas même du bout des doigts. Jonction omniprésente, sa main dans la tienne était synonyme de ce cœur dans lequel elle te laissait entrer et déposer une emprunte indélébile. Compliment qui passe par tes lèvres pour se frayer un chemin jusqu'aux oreilles de la brune. Tu la trouvais belle, vraiment belle. Elle l'avait toujours été, à tes yeux. Que ce soit cette nuit là, au Cameroun, ou encore il y a un mois sur son lit d'hôpital. Pourtant, tu ne lui a pas toujours dit. Alors tu voulais rattraper ces fois où le compliment n'avait pas dépassé le seuil de ta pensée et tu risquais de le lui rappeler plusieurs fois dans la soirée. Même quand sa jolie coiffure sera détruite par une attraction à sensation et que la vitesse aura fait pleuré ses rétines. Parce que son sourire la fera toujours rayonner, même une fois le soleil couché. Tu l'emmènes avec toi, main protectrice qui tient la sienne sans entendre le son de sa voix qui venait te répondre, engloutie par la foule. Pomme d'amour entre les doigts de ta princesse, tu l'entraînes vers la grande roue, ravi de ne pas avoir à faire la queue pendant de longues minutes et rater le coucher de soleil qui se profilait. Confortablement installé, les épaules de Reira enveloppées sous ton bras, tu la taquine en lui demandant de partager la pomme d'amour avant qu'elle ne la finisse. Mais ta gourmandise est arrêtée par le tremblement bruyant de l'attraction qui se stoppe net. Tu ne met que quelques secondes avant de comprendre qu'il s'agissait d'une panne technique et que l'attraction en avait déjà été victime un peu avant que vous n'arriviez. Ironie de la situation, toi qui aurait pu rester plongé dans le bleu des iris de la russe allait devoir y être obligé pendant un temps encore incertain. Certainement pas contrarié, d'autant que même si votre nacelle n'était pas montée tout en haut, vous aviez déjà une jolie vue en plein sur l'océan. Elle approche quand même la pomme d'amour de tes lippes pour te laisser enfin goûter à la confiserie qui te faisait de l'oeil, d'autant que tu la voyais se régaler avec. Tu n'étais pas spécialement friand de ce genre de plaisirs sucrés, mais c'était l'esprit fête foraine qui t'avait convaincu. Et aussi l'idée de la partager avec Reira. Alors que tu sens une goutte du jus de la pomme se faire la malle au coin de tes lèvres, ce sont celles de la russe qui viennent l'en empêcher. Bouche sucrée, vos langues viennent se trouver et jouer entre elles quelques secondes. Surpris d'abord, tu te laisse embarqué par le baiser donné par la russe, ta main derrière son dos venant chatouiller sa nuque. « Mince, j'avais prévu de te perdre dans la foule pour rentrer tranquille. Si je suis bloqué avec toi ici, ça va être compliqué. » Tu réponds alors que vos lèvres ne sont encore qu'à quelques millimètres, exagérant et jouant de ta langue entre tes dents pour la taquiner avant de l'embrasser une dernière fois avant qu'elle ne s'éloigne. Ton corps s'était rapproché de celui de Reira pendant que votre passion s'exprimait et tu laissais maintenant courir le bout de tes doigts sur son bras opposé. Sa main vient retrouver la tienne et tu accueille la chaleur de sa paume avec plaisir. « On reste mieux lotis que ceux qui ont le nez sur les panneaux électriques de l'attraction.» Tu rigoles un peu, demi malheurs donc d'être coincés à mi-chemin entre le sol et le sommet de l'attraction. Comme la brune disait, vous aviez au moins une belle vue. « Tiens, regardes. Tu me demandais s'il y avait une maison hanté, on la voit d'ici. » En embarquant sa main avec la tienne, tu lui montre du doigts la fameuse maison, un peu excentrée du chemin que vous avez empruntés pour faire un tour rapide du parc. Avant de reposer vos mains tu viens déposer tes lèvres sur les phalanges de la brune. Tu réponds finalement à sa question. « On venait quelques fois avec mes parents, puis j'ai emmené Lo' et Milan quand j'étais un peu plus vieux aussi. C'est toujours de bons souvenirs de revenir ici, ça n'a quasiment pas changé. Même si j'espère quand même que les attractions ont été améliorées depuis. » Tu ris face à ta dernière remarque. Ce serait bête : si ta mémoire était bonne, tu connaissais le chemin de la maison hantée par cœur et les quelques labyrinthes aussi. Tu pourras peut-être essayer de faire peur à Reira, sinon. « J'avais envie de revenir, et c'est toujours mieux pendant cette saison vu qu'il fait bon. Je voulais te faire partager un peu de mon enfance. » Tu lui souris. Tu avais toujours aimé les fêtes foraines et les attractions, que ce soit celles à sensations comme celles un peu plus calmes comme la grande roue. Aujourd'hui, tu partageais ce moment avec Reira, un souvenir que tu espérais garder encore longtemps et être le premier d'une longue liste pour la renaissance de votre relation. Reira te parle alors des carrousels qu'elle avait toujours affectionné en te demandant si vous pourriez y aller. Mirettes attendries, tu la regarde quelques secondes. Depuis qu'elle avait découvert où vous vous rendiez, dans la voiture, son visage avait changé, retrouvant une lueur enfantine dans son regard brillant. Sourire aussi installé sur ses lippes, tu te dis que tu avais finalement fait le bon choix en l'emmenant ici ce soir, et que la soirée ne pouvait finalement pas mieux commencer. « On ira, oui ! Tu vois dans les carrousels, moi j'étais le gamin qui se mettait dans la montgolfière et qui la faisait tourner super vite au point de ressortir avec le tournis. » Passe temps quand tu avais une dizaine d'années, tu te souviens que ton frère et ta sœur adoraient monter dans la montgolfière avec toi pour justement, ressentir cette petite adrénaline qui n'existait ordinairement pas dans ce manège calme. Tes yeux viennent retrouver les mécaniciens qui s'affairaient pour faire redémarrer la grande roue, au moins pour vous permettre d'en descendre le plus vite possible. Heureusement pour eux, personne n'avait l'air d'être claustrophobe ou avec une peur bleu du vide, ce qui leur permettait de ne pas se presser et qu'il n'y aurait aucune intervention de pompiers. Tu inspires un coup avant de rediriger ton regard vers l'horizon. « En fait... Enchanté, je m'appelle Chance O'Brien. Vu qu'on est coincés ici, peut-être pour longtemps, j'aimerais bien à vous connaître un peu. » L'oeil malicieux, ton taquin, rappel discret à cette matinée et aux reproches qui vous avaient séparés. C'est vrai que tu ne connaissais pas grand chose de la jolie Reira jusqu'à il y a encore deux mois. Finalement, être bloqués sur la grande roue était certainement un coup du destin : tu n'aurais jamais posé cette question si vous n'aviez pas été coincés. « J'adore savoir que tu aimes les sushis et les carrousels, et que tu as un petit frère qui s'appelle Piotr... Mais pour t'offrir une soirée digne de ce nom à ton prochain anniversaire, on va peut-être commencé par ça ? » Esquisse de ton sourire qui s'élargit. C'est vrai que ça ferait bientôt un an que tu côtoyais la russe, et pourtant, vous n'avez jamais fêté son anniversaire.
— La vue est belle, assurément, mais Reira préfère se perdre contre le charnu des lippes désirées, mirettes trop absorbées par la goutte fuyarde. Parce qu’elle est prête à tout partager, ne plus se contenter des pensées égoïstes d’une gosse trop faiblarde pour s’ouvrir à ses propres failles. Baiser délicat des âmes, coeur à la dérive sur un océan douceur. La plus belle des mélodies se joue sous leurs yeux ; contemplation affable de ce moment suspendu aux lèvres joueuses. Égarés dans cette bulle bienfaitrice, ils en oublieraient presque le problème technique, la grande roue et la fête foraine. Il ne reste que le liquide sucré entre leurs lèvres, mets partagé. Et les doigts glissent contre sa nuque mise à nue, délicieux frissons qui lui parcourt l’échine. Il n’y a plus qu’eux, sans la foule, sans le brouhaha ni la panique en demi-teinte dans la salle des machines. Front contre front, la russe se pelotonne dans ce moment distingué, réalité propre aux amoureux. Elle sourit à ses paroles, zygomatiques exploités à leur maximum, un ricanement s’échappe même d’entre ses lèvres pour rebondir contre celles de Chance. Appel céleste qui pousse à nouveau les bouches à se trouver, contact plus furtif mais pas dénué de moins d’intérêt. Les corps se séparent malgré eux, parce qu’il faut bien sortir de cette bulle palpitante, de temps à autre. Réplique tendre à la pique du brun, peu importe le lieu ou l’endroit, Reira ne réclame que sa présence. Coincer dans la nacelle ou dans les bouchons, qu’est-ce que ça peut bien changer ? Au final, ils restent tous les deux. Et même s’il essayait de la perdre, elle resterait solidement accrocher comme une moule à son rocher, pour l’éternité. Fourmis graciles se dessinent sur son bras, pulpe des doigts qui caressent son derme ; frissons exquis, épiderme qui réclame plus. Ses lèvres s’étirent en sourire alors que sa propre main vient se nicher sur celle de Chance, liaison nécessaire. En observant les mécaniciens en train de s’affairer à moitié. « S’ils veulent prendre leur temps, moi ça me va. Comme ça, j’aurais pas besoin de te partager avec la foule. » lance-t-elle en tournant le tête vers son interlocuteur favori, grand sourire aux lèvres et prunelles amusées. Les mains nouées se posent sur la maison hantée, index du brun qui l’indique. Loin du reste des attractions, elle se tient seule, presque menaçante, rôle parfait. Tout en observant la baraque délabrée pour l’occasion, Reira joue la curieuse et s’intéresse aux raisons qui ont poussé Chance a la conduire ici, sans se retenir de sourire en sentant les baisers humides jonchés ses phalanges. Une habitude de l’enfance, peut-être. Sûrement même, les moments à la fête foraine sont assez communs. Iris perses sur le brun, elle l’écoute attentivement, tendresse collée à la rétine. Elle rit en même temps que lui, espérant effectivement que depuis le temps les attractions ont subi des maintenances. Et elle sourit également, écho à celui de Chance. Myocarde caressé par le zèle amoureux, l’endocarde se gonfle de tendresse. Partage joyeux, loin des êtres brisés qui s’observent dans le miroir de leurs âmes. Brin de fierté et de reconnaissance, Reira est touchée, émue, d’être l’heureuse élue. Celle avec qui il décide de partager ce bon d’enfance, de se récréer des souvenirs à l’image de la mémoire du gamin qu’il était. Celle avec qui il passe la Saint-Valentin. Le sourire ne quitte pas ses lèvres quand elle répond. « Je suis contente que tu aies choisi ce lieu, et de pouvoir partager ça avec toi. Moi, j’ai jamais fait de maisons hantées ou de fêtes foraines. Ça ne se faisait pas vraiment chez moi… J’ai juste eu le droit à Disneyland Paris, une fois. » Ses lèvres se teintent sûrement d’une pointe de regrets, gosse qui ne décidait de rien. Chez les Tsvetkov, l’apparence et l’argent passaient avant tout. Les gentilshommes ne se perdent pas dans des endroits pareils, ce serait pêché. Et puis, c'est sûrement un truc d'américains. Alors Reira, elle n’a eu le droit qu’aux carrousels. Ceux de la Place rouge de Moscou, quand des propriétaires avaient le droit de s’y installer. C’est pour ça qu’aujourd’hui elle revêt autant de traits enfantins, parce qu’elle vit en quelque sorte ce qu’elle n’a jamais vraiment vécu. Et, si Chance souhaite partager ses souvenirs d’enfance, il en va de même pour la russe qui aimerait pouvoir partager un moment tout aussi intime sur le dos d’un cheval, sur le carrousel. La princesse et son chevalier servant, ou plutôt son prince charmant. Sauf s’ils terminent dans la montgolfière et que le pompier joue les dissipés. Elle rigole à son anecdote, ose même un roulement d’yeux. « Du coup t’es aussi le gamin qui allait gerber dans la poubelle juste à côté ? » Même ton malin, la taquinerie toujours de mise. Son regard suit celui de Chance, les mécaniciens ne semblent pas avoir avancé. En effet, la nacelle n’a pas bougé d’un pouce depuis le début de cette conversation, stabilité imperturbable. De toute façon, ce n’est pas comme si elle pouvait se lasser de cette situation, ça l’arrange même plutôt bien. Ses mirettes se reposent automatiquement sur Chance quand il reprend la parole. Mais elle cligne plusieurs fois des yeux, interloquée par sa présentation soudaine. Sans avoir le temps de répliquer pour lui demander ce qui lui prend, elle écoute le reste de ses paroles, sa question. La surprise se dessine sur ses traits, autant que le divertissement et la joie. Ces détails occultés depuis presque un an, ces choses à l’apparence peu importantes de prime à bord mais qui avaient été l’argument principal d’une russe réfractaire à l’idée d’officialiser l’union charnelle des semaines passées ensemble. Tableau bien différent aujourd’hui, elle veut partager ses détails et connaître tout de Chance. Avec du temps toujours, cadeau qu’il faut découvrir chaque jour, chance qu’il faut savoir apprécier. Les lippes russes s’étirent à leur tour, Reira qui rentre dans son jeu. « Enchantée Chance O’Brien, je suis Reira Tsvetkov mais vous semblez déjà tout savoir de moi, ou presque. » Car il ne connaît pas sa date de naissance, personne ne la connaît en réalité. Depuis son dix-neuvième anniversaire, l’horloge s’est arrêtée. « Je suis née le 17 Mai 1994, à Moscou. Oui… l’année dernière je te l’ai pas dit. En fait, t’es la première personne hors Russie à qui je donne ma date d’anniversaire. » Déni d’une danseuse brisée, le temps a arrêté de s’écouler un 17 Mai, celui de 2012. Date d’un mal qui ronge l’être, aucun intérêt à le célébrer. Le regard de Chance apaise de suite la douleur encore trop présente qui tente de se faire une place. Ses doigts s’enroulent un peu plus autour des siens, et avec un sourire, elle lui renvoie sa question. « Je crois déjà savoir cet élément sur toi alors… j’ai le droit de te poser une autre question je suppose ? » Il vient tout juste de passer une année Chance, se rapproche d’un âge charnière sans pour autant sembler craintif. Le visage de Reira s’illumine soudainement, se rapproche de celui du brun. « Et puisque je n’ai pas pu te le dire en face hier… Joyeux anniversaire Chance. » Un petit surnom mignon aurait bien eu sa place, mais ce n’était peut-être pas encore le bon moment, surtout compte tenu du fait que la russe n’en connaît aucun. Vocabulaire limité en matière amoureuse. Ils échangent un nouveau baiser, cadeau chaste qui en cachera peut-être d’autres. Embrassade délectable qu’il faut stopper, et sans quitter son sourire, elle se lance dans ce jeu de questions réponse. « Moi je sais que tu as une soeur, un frère et même une voiture. Je sais aussi que tu as des origines françaises, que tu es accro à la clope, un peu maladroit mais bienveillant, et que tu es du genre sportif. » Reira connaît aussi un tas d’autres choses, plus profondes qui n’ont pas lieu de sortir ici ou ce soir, qui n’ont pas de raison de sortir tout court. Maux imprégnés dans leurs coeurs, ils se comprennent sans avoir à poser des mots. « Du coup… Quelle est ta couleur préférée ? Et aussi ton sport préféré tiens. » Elle se permet deux questions, malin qui s’esquisse en un sourire, curieusement impatiente de découvrir le Chance plus léger, loin des fléaux de son âme, plus proche d’un badinage.
14 février ○ Cœur prospère, tu souriais allègrement à la brune qui te rendais un sourire des plus lumineux. T'as jamais été aussi serein près de Reira, en tout cas, jamais aussi longtemps. Cette fois, c'était le cas depuis que tu avais toqué à sa porte, découvrant la princesse que tu étais venu chercher avant de lui présenter le nouveau carrosse qui s'occuperait de la conduire où elle le souhaiterait. Ça ne s'était pas pour autant tassé en arrivant à la fête foraine, lèvres qui se sont trouvées réciproquement avant que vos silhouettes ne se suivent sans jamais se perdre dans cette foule de monde. L'accroche fidèle de Reira réchauffait ton palpitant comblé de la voir aussi à l'aise malgré l'endroit bondé. T'aurais cru que ça aurait mit un peu plus de temps, pour qu'elle s'y fasse sans jamais a brusquer. Mais c'est toi qui te retrouvait prit de court par la liaison officialisée au grand jour, allant au delà même des danses en duo et têtes à têtes au restaurant lorsque vous sortiez, il y a plusieurs mois. L'activité qui vous liait ce soir offrait un tout nouveau goût à vos papilles gourmandes d'amour, réalité réalisée. Voilà que vos bouches se trouvaient à nouveau, goût sucré qu'était celui de la confiserie qui empruntait vos langues. Taquinerie exagérée, tu prenais la liberté de l'embêter car tu savais qu'elle réagirait bien, la russe conaissant parfaitement le second degré. Alors qu'elle sourit en se retournant vers toi, tu regrettes immédiatement que la scission se soit évaporée. Mais l'heure était à attendre que l'attraction se remette en marche, et quoi de mieux pour attendre que d'observer le paysage et discuter ? Tu rigoles alors qu'elle insinue qu'elle ne voulait pas te partager et ta main vient serrer la sienne. Découvertes listées avec le soleil couchant et la maison hanté, elle t'interroge sur les raisons qui t'ont poussées à l'emmener ici ce soir. Souvenirs d'une enfance lointaine, t'avais jamais remit les pieds ici depuis ton retour. Pourtant, ce n'était pas l'envie qui manquait, seulement le temps, et l'histoire que t'avais avec ce lieu t'empêchait de faire le pas. Parce que ça t'aurait fait voyagé dans un passé trop ancien. Passé abandonné quand tu t'es engagé pour le pays, passé regretté, aussi. Il te fallait une bonne raison pour revenir. Créer de nouveaux souvenirs avec Reira en était une. L'euphorie de votre relation tout juste retrouvée prenait l'ascendant sur la mémoire qui remontait à la surface. Elle était tout ce dont tu avais besoin ce soir et tous les autres soirs, aussi. Tu souris quand elle répond, yeux rivés son profil gracieux. « Raison de plus pour tout faire, dès qu'on descendra de là ! Je ne suis jamais allé à DisneyLand Paris, mais je suis presque sûr que la fête foraine l'égale, avec le rêve et la magie en moins. » Parce que si tu n'avais jamais été à Disney, tu en avais tellement entendu parler que tu savais que l'attraction principale était évidemment l'ambiance permanente qui y régnait. L'architecture digne des dessins animés, les mondes propres à chaque univers, les personnages et surtout, la musique qui pourtant, pouvait s'avérer entêtante. C'est qu'une fête foraine, ça n'avait rien de tout ça. Pas de décors dans les allées, pas de personnages emblématiques; il y avait bien de la musique, mais c'était celle qui passait à la radio, principalement, ou encore une playlist de ce qui était populaire en ce moment. Alors forcément, tout ce qui était intéressant, c'était les attractions bien différentes de celles des parcs Disney. Et peut-être aussi les stands et échoppes truquées dans lesquelles il était presque impossible de gagner un prix. Pourtant, t'avais presque promis à la jolie russe de lui avoir une peluche, alors tu n'allais pas te laisser dominer par un jeu un peu trafiqué. Alors qu'elle te parle de carrousels, tu imagines en effet la jeune fille qu'elle était chevaucher un cheval, accroché à sa barre pour monter et descendre au rythme de la rotation de la machine; princesse du nord faite pour la liberté. Tu lui raconte à quel point tu pouvais être intenable, même dans un manège aussi calme. Rire cristallin qui s'échappe de ses lèvres alors que tu la rejoint, te moquant aussi de toi-même. Pourtant une voix te disait que tu serais capable de refaire exactement la même chose, même après vingt ans. « J'ai toujours eu l'estomac bien accroché. » Tu lui réponds avant avant de froncer les sourcils, souvenir récent de l'année dernière qui te revient. « Enfin, presque toujours. Disons qu'à l'époque, on ne m'offrait pas un verre de vodka pur avant un tour de carrousel. » Rétine unique qui cligne avant que ton regard ne se pose sur les mécaniciens qui s'afféraient. Détails encore inconnus de la russe que tu cherches à percer, tu voulais à présent connaître Reira jusqu'au bout des doigts. Discussion que tu n'avais jamais eu l'opportunité de lancer, c'était le bon moment pour rencontrer autrement cette femme qui faisait battre ta myocarde. Vouvoiement enfantin, blagueur dans l'âme, ton regard ne manquait cependant pas de sérieux alors que tu la regardais, esquisse subtile, l'oeil brillant. Tu laisses échapper un soufflement amusé quand elle signale que tu savais presque tout d'elle : c'était faux. T'aimerais tellement en savoir plus, lui demander quel était son plat préféré, ou encore le pays qui l'avait le plus marqué pour son tour du monde. Son ballet favoris, la musique qui la faisait vibrer dès la première note. Ce qui la faisait sourire quand les larmes voulaient s'échapper de son océan bleu, ce qui la faisait pleurer quand le bonheur empruntait le chemin de son cœur. Mais peut-être que tout ça, tu l'apprendras plus tard; parce que t'avais envie de croire que vous aviez tout le temps du monde pour découvrir l'autre et la profondeur de son âme. Alors tu l'écoute livrer ce qui semblait être son plus grand secret, pour l'instant. Courbe de la commissure qui se tend tendrement, tu dévores son visage de tes iris bleus. Tu sentais que réponse était douloureuse, idée sous-jacente de ce qui rongeait l'ancienne danseuse. Promesse intérieure de lui faire apprécier cette date particulière, l'année 2021 deviendrait la votre. Renaissance partagée de vos histoires, enfin reliées. La pression de la main de la russe autours de la tienne t'appelle et alors que tu veux répondre, elle t'en empêche reprenant la parole, mots mystérieux qui attisent ta curiosité. Tu hoches la tête à sa question, attendant impatiemment celle qui suivrait. Lippes pincées alors qu'elle rapproche les siennes, tu la suit des yeux jusqu'à devoir choisir une seule des deux iris perses. Mots doux soufflés qui trouvent le chemin jusqu'à tes oreilles, tu n'étouffe pas le sourire qui se dessine sur tes lèvres et le "qui ?" soufflé avant de recevoir son baiser avec reconnaissance. Ta main vient retrouver sa place sur sa joue presque trop furtivement. T'aurais aimé faire durer un peu plus l'échange enjôleur entre vos bouches. Tes lèvres se rejoignent quand elle les quitte, comme pour emprisonner le baiser qu'elle venait de te donner, et tu te retourne, faussement frustré par la vitesse de celui-ci, le regard narquois. Sifflement surprit qui vient délier tes lèvres entre elles quand elle fait sa description de toi, tu hausses les sourcils. « Tu m'as percé à jours, comment je fais, moi, si je n'ai plus de secrets pour toi ? » Point qui vient s'écraser contre ta joue alors que tu es accoudé à la barre de protection de la nacelle, moue à nouveau boudeuse sur le bout des lèvres. Son commentaire sur la cigarette t'avait touché en plein cœur, et pourtant, depuis que tu l'avais récupéré tu n'avais pas sorti ton paquet. Petite victoire contre le temps, malheureusement, tu t'en grillera une sûrement une fois redescendus. Les questions qui sortent de la bouche pulpeuse de Reira te font rire, tu laisses tomber ta tête, les yeux fixant le sol en réfléchissant. Mordillement de la lèvre inférieure, tu finis par te redresser. « Je risque de te surprendre, mais j'aime bien le violet. Sinon, pour faire moins original, le kaki. Franchement, en porter pendant dix ans ça m'aura vraiment fait aimé cette couleur. » Tu souffles un peu amusé; pour le coup, elle venait de te faire t'interroger sur une question que tu ne t'étais jamais posé. Enfin, sauf en primaire. « Pour le sport... C'est la boxe. Comme ça t'es au courant, si jamais y'a une main trop baladeuse quand on retrouvera la terre ferme. » Mais la question du sport était identique à celle de la couleur, au final, tu ne t'étais jamais interrogé. Finalement, si tu aimais ce sport c'était parce que c'était l'uns des seuls que tu avais besoin de pratiquer. Tu pouvais te passer de la musculation ou de la course, mais pas de la boxe. Besoin de te défouler, mais aussi de te rappeler. « C'est encore à moi ? » Tu demandes finalement, le regard innocent. « Je suis sûr que les sushis ne sont pas ce que tu préfères. Il doit bien y avoir un repas typique de Russie que tu aimerais retrouver ? Parce qu'autant, la vodka, tu en trouve partout, autant les recettes... »
C'est après une bonne quinzaine de minutes qu'un léger tremblement se fait ressentir sur l'attraction. Yeux écarquillés, tu te demandes ce qu'il se passe. Bras toujours autours des épaules de Reira, tu l'enserres un peu plus, comme si tes bras allaient la protéger d'une possible chute. Pour le coup, tu n'étais pas un super-héros capable de créer un champ de force. Et puis, il fallait le faire pour que l'attraction soit endommagée au point que vous ne tombiez. Finalement, le tremblement annonçait juste le retour à la normal des mécaniques qui se remettent en marche tranquillement. Le crépuscule ne durait que quelques minutes dès lors que le soleil dépassait l'horizon. Vous aviez raté le coucher de l'astre sur l'eau, mais le ciel gardait cette couleur orangée qui tirait petit à petit vers le bleu de la nuit. « On sera bientôt libres ! » Tu lâches en levant la tête et le poing au dessus de toi. Rires qui s'ensuivent, tu laisses la russe admirer la vue et les lumières de la ville qui commençaient à scintiller. La fin du tour se fait sans encombre et une fois à vous de descendre, tu sautes de la nacelle avant Reira pour lui offrir ta main et l'aider à se réceptionner. Courbette improvisée, tu remercies les mécaniciens par un sourire amusé avant de t'éloigner de l'attraction maudite de la soirée. « Tu veux faire une pause dans les sensations fortes ou on enchaîne avec le carrousel ? » Tu tires la langue alors que ta main vient se poser sur les hanches fines de l'ancienne danseuse, possessivité cuisante.
— Moment suspendu dans cette nacelle dans le vide céleste, la tête dans les étoiles et le regard voguant entre l’océan scintillant et les prunelles azurées de son partenaire. La soirée à peine commencée s’est retrouvée mise en parenthèse par l’incident technique. Instant loin d’être détesté, Reira préfère se délecter de cette intimité partielle avec le roi de son palpitant. Peut-être que l’accroche pourrait paraître précipitée, cependant impossible de contrôler la dépendance. Être addictif, la russe a trouvé sa drogue douce. Pureté dans l’âme, elle s’attache toute entière à Chance. Lien présent depuis des années, deux amants d’une nuit loin de se douter que quelques années plus tard ils se retrouveraient dans la même ville, bloquée dans une nacelle le soir de la Saint-Valentin. La brune aurait sûrement ri aux larmes si une voyante lui avait prédit son avenir à l’époque où l’espoir a refusé l’habitacle de son cœur. Chance placée sur son chemin, elle a l’impression de ne plus rien avoir à craindre. Ni les pannes de grande roue, ni même la chute la nacelle. A ses yeux ne gît que ce moment unique, presque trop officiel pour une femme bloquée dans un passé tourmenté. Reira s’en fiche de dévorer les lèvres de Chance en public, car elle n’a plus rien à cacher. La relation officieuse semble loin derrière eux, brûlée avec les maux de cœur. Sourires aux lèvres, l’espérance rayonne et chante en chœur avec la joie. Les doigts entremêlés, elle se dope à la chaleur que la poigne masculine émane. Le myocarde s’enveloppe de son manteau de félicité alors que les tympans captent les coïncidences de l’ancien gamin qui a passé du temps ici. Habitant des lieux, il partage ce soir cela avec Reira, la russe qui n’a jamais foutu les pieds dans une fête foraine. Les regrets tentent de s’emparer d’elle un instant, mémoire qui divague vers les anciens souvenirs, ceux qu’elle a espéré pouvoir oublier. L’étreinte de leurs mains se renforcent tandis qu’elle se confie à son tour, absorbation du calmant humain. Un sourire vient se dessiner sur ses lèvres tandis que les prunelles perses se perdent dans l’océan bleuté des yeux de Chance. « Tu crois que tu serais capable de suivre et supporter une enfant qui découvre la fête foraine ? Non parce que c’est un peu ce que je suis. » Ricanement qui résonne à la simple énonciation de la vérité. Ça ne vaut sûrement pas Disneyland, mais ça a de quoi attiré l’attention et la curiosité de la brune. Il n’y a pas d’âge limite pour faire des expériences, mieux vaut tard que jamais. Avec Chance en guide, elle ne peut que se délecter de cette expérience-ci. Sauf s’ils se retrouvent bloqués dans toutes les attractions, elle risquerait de voir la banane sur ses lèvres se transformer en fruit périmé. Se retrouver la tête à l’envers dans un grand huit… bof. Surtout avec un Chance capable de recracher ses repas. Elle ne retient pas son rire quand il fait remarquer qu’il a l’esprit bien accroché, le gosse addict au tournis de la montgolfière du carrousel. Elle s’apprête à répliquer, pour rappeler que l’alcool russe a gagné par ko technique il y a presque un an de cela. Incident risible qui a relancé le train de l’amour entre les amants oubliés. Début d’une nouvelle aventure, d’une histoire aux bosses chaotiques entre deux êtres aux démons intérieurs nargueurs. Finalement, Reira abdique d’un hochement de tête en l’entendant rendre à la vodka ce qui appartient à la vodka. « Puis-je te rappeler que tu n’as même pas eu à tourner dans la montgolfière pour te faire battre par la vodka ? Il faut bien remettre les choses dans leur contexte. » Sourcil malicieux qui se hausse en réponse au clin d’œil complice, un rictus railleur étire la commissure des lèvres au rouge à lèvres avalés par les baisers échangés.
Speed-dating improvisé, l’intimité des confidences a effacé les détails d’apparence insignifiants. L’anniversaire, le nom de famille, l’animal préféré, le boulot rêvé des gosses désormais adultes, la passion qui fait vibrer les âmes, ce qui déclenche la larme à l’œil ou ce qui serre le myocarde. Il y a tant à apprendre de ces petites choses subtiles. Le jardin intérieur n’a presque aucun secret, les blessures exposées, plaies à vif révélées. Aveux lourds loin de la simple question de son anniversaire. Jour noir, la date qu’elle ne regarde jamais sur le calendrier. Un jour désormais comme les autres. Elle hésite presque à s’excuser de ne pas l’avoir prévenu il y a un an de ça. Sans le faire, elle sait que Chance comprendra les raisons qui l’ont poussé à garder la porte des souvenirs fermée. 2021 sera assurément différente, bouleversement dès le début, s’ouvre une nouvelle ère en même temps que le cœur de la russe laisse échapper les craintes du passé. L’importance de Chance force sa confiance, certitude que le monde sera plus rose à ses côtés. En attendant, il y a plus notable à fêter à commencer par l’anniversaire de Chance, paroles qu’elle vient susurrer au creux de son oreille avant de s’emparer de ses lèvres, goût exaltant retrouvé, toucher délicat contre la peau frémissante de sa joue. Jeu des muqueuses en pause, sans se départir de son sourire, Reira s’éloigne à contrecœur. Parce qu’elle pourrait passer la soirée accrochée à ses lippes, prête à oublier la nacelle bloquée ou l’océan qui bruit sous les rayons solaires, couleurs chatoyantes qui bercent temporairement la rétine avant qu’elle ne pose ses indiscrétions. Et c’est qu’il la connait bien, car elle écarquille justement les yeux en entendant sa première couleur préférée. Violet, pourpre éternel ou couleur de la pénitence, améthyste symbole de paix, de liberté. Signification diverse aux pans compatibles à l’ancien soldat, elle esquisse un sourire à sa remarque. « J’serais bien curieuse de te voir vêtu de violet tiens. J’suis sûre que ça t’irait mieux que le kaki. » Le kaki militaire n’a rien de particulièrement gracieux, bien au contraire, il n’a jamais fait de l’œil à Reira. Le violet a déjà une sympathie plus familière. La russe manque presque d’éclater de rire à la menace explicite d’un Chance s’adressant aux futurs idiots qui pourraient tenter de s’en prendre à elle. Sauf qu’à la place, elle reste bloquée dans un grand sourire qui se termine en pouffement de rire. « Prince et garde du corps. Je note. Après les matchs de rugby, il faudra que je m’intéresse à la boxe. » Gardien de ses nuits, de ses craintes et maintenant de son intégrité physique. Tout être doté de suffisamment de conscience plaiderait la cause d’un Chance parfait, toutes les bonnes cartes en main. Reira a toujours su se défendre, mais elle ne dira jamais non aux beaux muscles du pompier près à en découdre. Héros du film, sauveur de la demoiselle en détresse, la vision l’amuse. La nacelle n’a toujours pas redémarré, russe qui ne prend même pas la peine d’observer les mécaniciens, trop perdue dans les iris bleues. Alors elle a le droit à une nouvelle question. Faussement vexée, elle tourne le menton, bras croisés sous la poitrine. « Dis donc j’vais presque croire que tu me penses accro à la vodka. » Rapidement, le sourire regagne ses lèvres alors qu’elle incline à nouveau son corps en direction de Chance, prunelles qui se retrouvent. « J’aurais bien dit les pirojkis, mais j’en ai fait avec Piotr il y a pas longtemps donc… Pour changer, j’dirais les pielmeni, des raviolis que tu peux fourrer avec un peu ce que tu veux, viande ou poisson. Les chachlik me manque aussi, des brochettes de porc mariné au lait fermenté. Ça donne pas envie comme ça mais je t’assure que tes papilles se régalent. Je te ferais goûter un jour, ça doit pas être si compliqué à faire… » Accent russe au garde-à-vous, elle arque un sourire. Égarée dans ses souvenirs, Reira n’a jamais été cordon bleu avant de vivre seule, à vrai dire elle évitait même la cuisine, se contentant de mettre les pieds sous la table en rentrant de l’entraînement. Si elle a bien réussi à faire des pirojkis avec son frère, ce ne sont pas des brochettes qui auront sa peau. Chance lui montre ses souvenirs à travers la fête foraine, en retour elle l’enverra en voyage culinaire dans son passé.
Zénith de la grande roue enfin atteint, l’engin s’est décidé à repartir afin de leur offrir ce passage rapide au sommet. Le soleil a eu le temps de disparaître derrière l’horizon, laissant simplement un ciel mêlant orange, rose et violet tombant vers la nuit. La belle vue promise est rapide, mais Reira n’en perd pas une miette, ancre sur ses rétines la beauté du moment, le corps qui s’est approché de la silhouette, depuis le début de la conversation, au point de laisser l’épiderme de sa cuisse flirtant avec le tissu de son pantalon. Amusée, ses pupilles perdent le contact avec l’océan pour se nicher dans les prunelles d’un Chance forçant la joie d’enfin pouvoir sortir de la nacelle et se dégourdir les jambes. « Parle pas trop vite, la nacelle pourrait encore se bloquer à deux mètres du sol, ce serait dommage… » dit-elle avec une lueur maline dans le regard tout en riant de bon cœur avec lui. Tout compte fait ils atteignent enfin le sol, le prince charmant joue de séduction et courbettes alors qu’elle plonge sa main dans la sienne pour se libérer de la cabine métallique. « T’es sûr que t’as l’estomac accroché avec le carrousel ? J’voudrais pas avoir à te porter pour rentrer si t’es malade… » Réplique taquine contre la langue tirée, elle ricane doucement. Possessivité contre la hanche, doigts qui s’enfoncent sur le tissu fin de la robe pour titiller la hanche. Un sourire large s’active sur ses lèvres, le cœur au bord de l’explosion face à cette scène typique de tourtereaux empreints l’un de l’autre. Parce que c’est ce qu’ils sont au final, de jeunes amoureux drogués à l’euphorie. « Le carrousel ça me va, j’te laisserai même tourner la montgolfière, même pas peur. Mais t’es obligé de monter sur un cheval d’abord. » Sa main vient glisser contre la taille de Chance pour s’aimanter un peu plus à lui tandis qu’ils marchent jusqu’au carrousel. La queue est un peu plus longue que pour la grande roue, mais ils parviennent rapidement à poser le pied sur le parquet de l’attraction. Les doigts graciles de la russe ont retrouvé ceux du brun pour l’entraîner vers deux chevaux côte à côte. Elle serait bien montée sur le même que lui, pour jouer la princesse qui fuit avec son prince charmant et son cheval blanc, sauf qu’elle n’est pas certaine que l’attraction soit adaptée à deux poids adultes. Tant pis, chacun le sien c’est bien aussi. Bien installés, la petite clochette retentit et le manège tourne, lentement. Chevaux qui s’agitent, Reira tourne la tête vers Chance, grand sourire aux lèvres et pupilles d’enfant de cinq ans activées. « Tu feras gaffe à bien t’accrocher, ce sera dommage de tomber et perdre une dent au moment où il se cabre. » Mensonge plaisantin pour embêter le brun, vision de la silhouette masculine qui se projette sur sa rétine. Son sourire s’agrandit, se teinte de la couleur du passé. Sans regrets, simple nostalgie. « C’est toujours mon père qui montait avec moi, même toute petite, il me laissait mon propre cheval parce qu’il voulait que je me sente grande. J’me sens encore plus grande avec toi. » Étape du déni passée, il a embrassé la gamine pétrifiée pour la libérer. Véritable sauveur d’une âme mortifiée à l’idée de vivre, là elle se sent vivante, heureuse. « T’as déjà fait de la montgolfière ? De la vraie hein. C’est quoi le truc le plus fou que tu aimerais faire ? » Le jeu des questions-réponses ne s’arrête pas, rythme lent de l’attraction qui autorise toujours la discussion pour le bonheur des esprits qui se découvrent.
14 février ○ Enigmes de vos vies, jeu de connaissance de l'autre, tu réponds aux interrogations de la jeune femme sans honte, sans rien lui cacher. De toutes manières, une couleur fétiche et un sport passionné, ça ne se cache pas. Le jeu t'amuse, il vous fait passer le temps, perd vos iris dans l'horizon et vos mémoires dans un passé lointain. Souvenirs oubliés puis retrouvés. Tu te laisse porter par le fil de la discussion, joue à l'équilibriste alors que vos corps tanguent déjà dans la nacelle de l'attraction. Rires échangés, tu repenses à la pique taquine que la fleur du nord t'a envoyé. La vodka avait bien eu raison de toi il y a quelques mois, et à noël aussi. Mais tu n'avais pas bu, ce soir, et tu ne comptais pas boire : chauffeur de sa dame, tu t'improvise chevalier servant et garde du corps, aussi. Tu n'avais qu'une hâte, et c'était bien de descendre de la grande roue qui installait un fourmillement désagréable dans tes jambes qui s'étaient préparées à piétiner toute la soirée. Si tenir Reira dans tes bras en observant la vue installait une chaleur réconfortante dans ton palpitant, ce n'était pas ce que tu avais prévu pour cette soirée que t'imaginais particulières. Attentes idylliques de l'union des astres, étoiles scintillantes qui ne se cachaient plus, tu comptais bien quitter cette nacelle, recommandé ou non. Mais tu n'allais pas jouer le turbulent tout de suite, et tu en profite pour poser ta question à la russe. T'aurais aimé lui en poser une tonne, pourtant, certains sujets étaient encore sensibles pour les rétines perses. Les perles salées n'étaient pas invitées à participer à votre soirée. Tu te rabat sur un sujet gourmet, sans t'attendre à ne rien comprendre de ce que t'annoncerait la brune. Mâchoire serrée, pupilles écarquillées, tu hoches la tête, le regard vide alors qu'elle te sort plusieurs noms inconnus pour ton esprit occidental. Tu essayes de reconnecter quelques fils, comprendre de quoi elle parlait exactement avant qu'elle ne te soulage de cette réflexion en précisant de quels types de plats il s'agissait. Tu te tourne vers elle, sourcils froncés de reconnaissance et imagine un peu mieux ce qu'elle te présentait. Description pas vraiment appétissante, c'était clair, pourtant tu hoches la tête quand elle te dit qu'elle t'en fera. « T'as de la chance que je sois curieux. » Souvenir des voyages militaires qui vous ont parfois fait visiter des villages aux coutumes culinaires particulières. Tu la taquine pourtant, puisque tu faisais confiance au palais affiné de la princesse russe. Tu inclines la tête vers elle, sourire taquin, signe d'obtempération. « En tout cas, j'ai hâte que tu me fasse goûter ces... chalkik. » Russe approximatif qui sort d'entre tes lippes, tu grimaces alors en comprenant que tu avais mal prononcé et sûrement déformé le mot. Mais tu auras tout le temps de rattraper cet écart; au moins jusqu'à ce qu'elle t'en prépare. Contre-jour éblouissant alors que la nacelle montre, tu regardes la silhouette du profil de la russe qui se détache du ciel coloré. Traits fins et doux, ton regard se perd sur son visage, regard délicat qui vient embrasser des rétines chaque détail de sa peau, la courbe de son nez, la pulpe de ses lèvres. Alors que tu te réjouissais du retour à la normal de l'attraction, sa remarque te fige, tu baisses les bras, oeil alerte. « Porte pas la poisse. Et au pire, si on est à deux mètres du sol, j'm'en fout je saute. Je ne reste pas encore une demi-heure dans cette attraction de malheur. » Lippes qui s'élargissent, tu jettes un coup d'oeil à la brune alors que la nacelle descend petit à petit. « Mais si tu veux rester ici, même à deux mètres du sol... tant pis pour toi, j'irais tourner ma montgolfière tout seul. » Vous retrouvez assez rapidement la terre ferme malgré les allégations de la russe et avant de t'étirer tu lui tend la main pour l'aider à descendre, chevalier servant au rapport. Question sur la suite du programme, taquinerie sur les sensations fortes inexistantes que vous avez vécu avec le tour de grande roue, insinuant que le carrousel le serait tout autant. Sa réponse te fait claquer la langue contre tes dents de devant. Touché. Le regard rieur tu continues ta marche jusqu'au carrousel qui se trouvait à quelques minutes. « Je pense que je devrais m'en sortir, c'est pas une pomme d'amour et un cheval en bois qui auront ma peau. » Tu lances en bombant le torse, inspiration entre les dents. L'ambiance légère de la soirée qui se passait parfaitement bien te donnait l'impression d'une bouffée d'oxygène, air pur qui entrait dans tes poumons pour les réparer quelques minutes avant que tu ne sorte le bâton meurtrier d'un paquet. Il attendrait la fin des tours de carrousel. « Attention, un tour dans ma montgolfière c'est encore plus excitant qu'un grand huit. T'es prévenue. » Vantard, la résistance de ces jeux là devait quand même être bloquée à un moment donné. Tu pourrais y mettre toute ta force, il devait y avoir une vitesse maximale de rotation, que tu atteignait sûrement déjà quand tu étais enfant. Mais tu verras bien. Vous décidez néanmoins de commencer le manège par les chevaux puisque c'était la requête de Reira. Et si elle n'avait pas elle-même proposé de faire deux tours de l'attraction, tu en serais resté là; souvenirs d'enfance de la russe que tu voulais préserver. La file d'attente est un peu plus longue qu'avec la grande roue, public de tous âges, vous attirez quand même quelques regards surpris puisque les autres accompagnaient leurs enfants. Une fois à votre tour, t'es entraîné par la douce main de la jeune femme que tu ne voulais pas lâcher et qui vous emmène près de deux chevaux côtes à côtes. Tu la laisse choisir le sien et t'installe sur l'autre, un peu à l'étroit sur le siège. Tu rigoles en ne sachant pas vraiment comment t'asseoir sur ce truc, genoux vers l'extérieur et bien accroché à la barre latérale qui tenait l'engin. La clochette retentit et signale le début des quelques minutes de tour. Pas franchement à l'aise sur la monture qui commençait à s'activer, tu réussis quand même à garder un certain équilibre, concentré sur ton cheval et tes mains qui restaient bien accrochées. Rire enfantin qui vient chérir tes oreilles tu finis par tourner la tête, sans pour autant être plus rassuré par les tremblements du cheval. Panique qui s'installe dans tes yeux, tu grimaces. « Attends ça se cabre ce truc là ? Franchement Rei', t'aurais pu me prévenir quand même, j'avais jamais monté uns de ces trucs. » Parce que quand t'avais dix ans, les chevaux des manèges c'était pour les filles. Tu laissais ça à celles qui voulaient jouer les princesses pendant que tu t'éclatais dans la montgolfière ou l'avion. T'étais au moins assis plus confortablement, dans ces deux là. Tu serres encore plus la barre sur laquelle la sculpture de bois montait et descendait un peu alors que la rire de la russe montrait qu'elle se moquait de toi, quand même. Voix douce qui emprunt l'atmosphère, tu essayes de te concentrer sur ses paroles plutôt que sur la peur que l'engin ne bouge. Regard tendre qui se pose sur elle, tu découvres une lueur encore inconnue des iris bizut. Tu connaissais celle du regret, de la peur et de la peine. Mais pas encore celui de la nostalgie, mélancolie renversante du visage rajeunit de plusieurs années. Chimère passée de sa vie. Courage de lâcher d'une main la barre à laquelle tu te cramponnait, tu viens récupérer celle de la brune pour laisser pendre vos bras dans l'espace qui vous séparait. « En l'espace de deux minutes tu as fais de moi un homme. On est tous les deux grands, maintenant. » Tu montres le cheval en bois d'une rotation des yeux avant d'éclater de rire. Pas forcément très doué pour exprimer tes sentiments, maladresse attrayante de ton être, sourire sincère que tu adresses à la jolie russe. Pique de panique passée, tenir la main de Reira avait calmé l'adrénaline de ton palpitant. Siège trop libre et étroit, tu étais finalement plus à l'aise dans un wagon de grand huit et bien attaché que sur ce cheval tremblant. « De la montgolfière, non. Mais j'ai fait du saut en parachute pour ma formation militaire. Puis on a dû utiliser ces compétences pour une mission. » Tu réponds simplement, souvenirs flous de cette journée : dix ans de missions, tu ne te souvenais pas de tout. Seul le saut libre t'avait marqué. « Je pense que le truc le plus fou ce serait... La chute libre. D'un pont, ou quelque chose du style. Tu sais, cette idée de se laisser tomber avec juste un élastique autours du corps. » Pourtant, t'en avais fais, des choses bien plus folles qu'un simple saut à l'élastique. Mais revenir aux bases, c'était peut-être ce dont tu avais besoin, finalement. « Pas très original mais j'avoue que le sujet est intéressant, alors je te retourne la question. C'est quoi le truc le plus dingue que t'ais fais, et ce que tu voudrais faire ? » Il paraît qu'on apprend à connaître une personne à partir de ce qui la fait vibrer. Tu savais que la danse ne ferait plus vibrer la russe, en tout cas, plus de la même manière. Adrénaline poussée à se révéler par les mots; idées probables à venir.
— La russe aurait bien continué ce petit jeu encore longtemps, curiosité qui vient gratter la surface pour se délecter de ces éléments nouveaux sur Chance. Naturel dans l’air, ils échangent sans grandes formalités, les prunelles posées sur l’océan illuminé et les corps liés. Contact obligatoire entre les épidermes, logo d’un amour enfin dévoilé. Rires et sourires jonglent sur les lippes jamais fatiguées de s’étirer à chaque nouvelle réponse. Ça réchauffe le cœur, estomac friand de toutes ces informations l’un sur l’autre, de ces anecdotes rapides sur l’enfance. Oui le passé fait encore mal, ronces toujours enroulés autour de l’endocarde fragilisé par les mensonges révolus. Comme cette nuit au Cameroun, Reira ne ressent aucune peine à ouvrir les tiroirs de son cœur, nostalgie qui glisse sur ses lèvres pour chatouiller les tympans de Chance, heureux élu de ses confessions. Même s’ils sont toujours bloqués dans cette nacelle, elle a hâte de découvrir le carrousel avec lui, d’aller se faire des frayeurs dans la maison hantée avant de se renverser le cœur dans un grand huit. Elle veut tout faire, tout vivre, distendre le temps pour allonger le moment à l’infini. Le sablier s’est déjà arrêté, instant suspendu dans cette nacelle qui ne s’écoule plus ; elle pourrait y rester des heures sans s’en rendre compte, égarée entre les bras musclés de son pompier. Et elle se perd un peu plus dans l’évocation des plats de son pays. La russe sent qu’elle laisse Chance pantois face à ces noms qui sonnent discordants pour l’oreille d’un occidental. D’ailleurs, elle ne cache pas son sourire amusé en le voyant soudainement soulagé lorsqu’elle détaille la nature de ces plats, proposant même si de lui en faire. Ricanement obligatoire quand ses lèvres tentent d’articuler le mot russe avec indélicatesse. Grimace qu’elle vient effacer d’une douce caresse sur sa cuisse, paume contre tissu aspirant la chaleur de l’épiderme. « Bon, ce n’est pas gagné pour t’apprendre le russe, va falloir prendre plus d’heures avec ta prof particulière. » Esquisse maline sur ses lèvres, elle ricane doucement, son infime rire surpassé par le bruit sourd d’une grande roue qui se remet en mouvement. Enfin les iris peuvent profiter d’une vue dégagée, sommet du manège atteint, vue grandiose légèrement volée par l’attraction bloquée. Cependant, ça ne déçoit pas Reira. Bien au contraire, elle savoure chaque bribe visuelle, chaque ficelle temporelle. Impression sur la rétine, ses prunelles photographient l’instant. L’océan aux nuances orangers, le ciel étoilé qui se dessine, leurs mains entrelacées, leurs corps enserrés, son cœur exalté. Le mouvement de victoire de Chance est bien vite arrêté par une Reira terre à terre, sérieux taquin pour animer la situation. « Tu sautes ? » Incrédule, elle le juge du regard, ne sachant s’il est inconscient ou juste un peu trop casse-cou. Son petit doigt se dit qu’il serait presque capable de le faire. Les traits russes se tordent en une moue outrée, faussement vexée par l’abandon implicite du pompier. « Tant pis ? Quoi ! Tu oserais m’abandonner ? C’est vraiment pas sympa… Comment tu veux que je saute deux mètres alors que mon genou est même pas remis ? Quand je t’utiliserai comme matelas, faudra pas t’plaindre. » La brune n’a pas le temps de jouer la comédie plus longtemps parce que la nacelle finit par atteindre le sol, prince charmant qui s’occupe de l’extirper sans embûche de la prison métallique. Leurs corps se retrouvent, courant d’air trop frais entre les silhouettes aimantées par automatisme alors que le programme de la soirée est discuté, pique adressée d’un ton malicieux. Russe qui abdique d’un haussement d’épaules, sourire désopilant niché sur les lèvres. « Bien, bien, je crois que je t’ai sous-estimé en fait. Le grand O’Brien peut supporter une pomme d’amour et un cheval, en bois. » Pupilles qui se perdent sur le torse bombé, fier coq qui pavane narquoisement sur le chemin du carrousel. Lippes russes qui s’étirent à la remarque du lion fier qui vante les mérites de sa montgolfière. « Ah ouais ? Tu m’en promets beaucoup, j’espère pour toi que je ne serais pas déçue… » Lueur de défi dans les prunelles, elle arque un sourcil, amusée par la situation légère. Marivaudage séduit par le lieu atypique, activités enfantines pour couple naissant. Les regards curieux des parents en compagnie de leurs enfants dans la queue n’atteignent même pas Reira qui se perd dans le bleu des iris de Chance, enveloppée dans sa bulle rafraîchissante. Depuis leur arrivée, il n’existe personne d’autres que lui à ses yeux. Même à Disneyland, Mickey n’aurait pas pu voler la vedette du brun. Astre divin qui brûle la rétine, s’il est son soleil, elle sera son Icare sans hésiter ; à attraper le soleil sans se préoccuper des brûlures. Don aveugle de soi, elle serait prête à tout Reira, sans même se douter de la dimension de ces sentiments dont elle prend conscience un peu plus chaque jour. Affection flagrante dans cette queue, amants enchaînés. Quand les vannes du manège s’ouvrent enfin, elle se précipite en tenant fermement Chance par la main. Hors de question qu’un mioche lui pique le cheval qu’elle zieute depuis tout à l’heure. Comme si le corps de la russe n’avait jamais changé, elle retrouve ses aises sur ce petit cheval, jambes trop longues pour ne pas pendre proches du sol. Le malaise du pompier sur son cheval a de quoi titiller la russe qui ne se retient pas longtemps de le taquiner à nouveau. Blague qui marche plus qu’elle ne l’aurait pensé, brun incrédule qui tombe dans le panneau. Reira ne peut retenir le rire qui lui fait vibrer la cage thoracique, ni même retenir ces larmes surprises dues à un éclat de rire un peu trop puissant. Abdos travaillés qui tiraillent alors qu’elle reprend son sérieux. « Chance c’est une attraction pour gosses, tu crois franchement qu’il prendrait ce risque ? » Ce serait bien compliqué pour eux au niveau de la sécurité de l’attraction. Un gamin inattentif qui lâche le cheval, s’éclate le crâne par terre : mauvais plan. Ceci dit, elle regrette presque que l’option du cabré ne soit pas disponible, ne serait-ce que pour lire la panique incongrue dans le regard de Chance. Peureux des chevaux mais pas des montgolfières tournoyantes, en voilà une sacrée combinaison. L’amusement provoquée par cette crainte irrationnelle n’empêche pas son regard de se teinter d’une pointe de nostalgie, sa propre place la projetant des années en arrière. Petite princesse de Russie accompagné du paternel protecteur, des sourires loin de la réalité future. Les confidences passent la barrière des lippes, Reira profite de ne pas avoir le ton affligeant pour évoquer ce souvenir. Ça ne lui fait pas mal, elle est juste nostalgique de ces moments insouciants de l’enfance. Et puis, elle se sent bien avec lui. La gamine qui voulait devenir plus grande, ascension fauchée, débauche trouvée et finalement libération. L’oiseau blessé guéri par le sauveur aux paroles réconfortantes, plaies suturées par l’amour. Délicat contact des doigts entremêlés qui recouvre son myocarde d’une couche d’allégresse. Il lui répond sur le même ton, sourire qui s’esquisse sur les lippes attendries. Deux êtres recroquevillés qui s’allient face à l’adversité, pour grandir à deux. Ils sont tous les deux grands, même s’ils sont sur des chevaux destinés aux enfants. Son pouce vient délicatement caresser le dos de sa main, liaison bienfaitrice des âmes. En lui demandant ce qu’il a bien pu faire de plus fou dans sa vie, elle s’attendait forcément à le voir parler de l’armée. Sur le coup, elle se mord l’intérieur de la rouge, regrettant de l’emmener sur cette pente glissante. Le voile ne se lève pas sur ses yeux, soulagement indicible chez la brune. L’idée de la chute semble l’attirer, restes de son fameux saut en parachute peut-être. Curieuse et surprise par l'autre réponse, Reira hausse les sourcils en l’observant. « T’as pas peur que l’élastique se pète ? » Ces trucs-là, ça l’a toujours angoissée. L’idée sur le papier est géniale, pour sûr, mais les conditions techniques ont de quoi la faire douter. Qu’est-ce que ça vaut un élastique ? Elle en casse un par semaine quand elle veut se coiffer déjà… Ce n’est pas parce qu’il est plus gros que la casse est annihilée. « Mais c’est une bonne expérience ça doit être… spéciale. Tu pourras toujours t’entraîner en faisant les attractions qui recrée la chute libre. » dit-elle le sourire rieur. Forcément, il lui retourne la question alors ses sourcils se froncent, le temps de trouver quoi dire. « Je crois que j’aimerais bien tenter le parachute, ne serait-ce que pour voir la terre d’un peu plus haut, à défaut de pouvoir aller dans l’espace, et puis pour les sensations évidemment. » Réponse classique, elle ne le fera sûrement jamais, mais l’expérience doit être incroyable, petites cellules humaines bouleversées par la chute libre. « Et pour le truc le plus fou… Je pourrais bien dire tous les ballets que j’ai pu faire, qui sont l’équivalent pour la gamine que j’étais à un voyage dans l’espace. Et pour quelque chose d’un peu plus insolite… Ben mon tour du monde. Les conditions étaient certainement pas idéales, mais… c’était vraiment une expérience unique parsemée d’un tas de moments uniques. J’ai rencontré tellement de gens, embrassé tellement de cultures… Bref, c’est vraiment quelque chose à faire quand on en a l’occasion. » Tout le monde ne fait pas le tour du monde dans sa vie, donc sa réponse a quelque chose d’insolite, non ? « Et puis, c’est grâce à ça que je t’ai rencontré. » Tendresse dans le sourire, tout est parti de cette décision radicale. Comme quoi, même dans le passé brumeux se cache des témoins luminescents, boules d’espoir et de positivité. Ils papotent sans se rendre compte que le manège ralentit, tour de carrousel déjà terminé. Le couple princier descend de leur monture, mais avant de regagner la sortie, la main russe l’entraîne à nouveau sur le parquet du manège. Foule qui s’entasse sur l’attraction, le gérant ne remarque même pas les deux tourtereaux qui profitent d’un second tour sans avoir à refaire la queue. La montgolfière vaut au moins une petite fraude. Installés dans l’espace trop exigu pour des adultes, Reira ricane doucement. « T’es prêt à donner tout ce que t’as ? J’risque d’être déçue si j’ai pas le ventre en vrac à la fin. » Le pompier donne tout ce qu’il a, mais forcément, la vitesse est un minimum contrôlé pour éviter aux gamins de voler à cause de la synergie. Ça n’empêche pas Reira de rire aux éclats quand ils tournoient à une vitesse relative, mèches brunes qui volent et couvrent ses yeux. Les deux grands enfants s’amusent, sans prêter aux regards curieux des parents qui se demandent encore ce que deux adultes peuvent bien faire ici, probablement vexés aussi que leurs enfants n’aient pas le droit à la montgolfière. Tournis qui ralentit, le manège qui s’apprête à s’arrêter une seconde fois, estomac bien en place. Fin de l’amusement pour cette attraction, cette fois ils rejoignent la sortie, toujours main dans la main. Le palpitant pulse, soumis à l’adrénaline, à la gravité perturbée par les manèges à sensations -même moindres-. « Franchement, c’est pas pire que des tours fouettés ton histoire… Tu veux qu’on fasse quoi maintenant ? » Questions qui s’alternent, attractions également. Large soirée en perspective, l’euphorie toujours présente, prête à en découdre avec la moindre attraction. Sourire toujours fixé sur les lèvres, la belle observe Chance et lui recale précieusement une mèche en l’air, passion dans les prunelles luisantes. Puis sa voix douce en profite pour lui glisser une nouvelle question. « Si un génie te donnait trois voeux, tu demanderais quoi ? » Chevelure brune en place, Reira se faufile contre Chance, proximité qui le permet, pour glisser au coin de ses lèvres un délicat baiser. « T'étais un parfait cavalier et conducteur de montgolfière. »
14 février ○ Libération imminente, tes jambes se languissaient de fouler à nouveau le sol bétonné de la place où était installée la fête foraine à l'année. Signe victorieux au bout du poing, ta mine l'était tout autant, jusqu'à ce que la beauté russe ne s'enquiert à parler malchance. Arrêté dans ton élan, tu la regarde d'abord en espérant que ses paroles ne seraient pas entendues par la machine capricieuse et que vous pourriez sortir de là. Mais ce n'était pas deux petits mètres qui allaient t'arrêter, dans tous les cas. Une esquisse qui s'élargit à mesure que la moue vexée de la brune s'installe sur son visage, tu rapproches ta bouche de son oreille, taquin. « Promis je te rattraperais, quitte à finir écrasé. » Lippes qui viennent effleurer la peau fine qui lui couvrait le cartilage, tu t'en sépare aussi vite que tu l'avais rejoins, l'air innocent. Quand la roue finit enfin son tour tu t'extirpe de la nacelle avant de tendre ta main à Reira, signe de ta bonne volonté. T'aurais même pu la porter, si tu avais poussé le jeu encore plus loin. Mais t'avais toute la soirée pour jouer au prince charmant. Question qui vient brûler tes lèvres, le programme s'annonçait à la hauteur des espérance. L'optique de faire le plus d'attractions à sensations ne t'avait pas effleuré l'esprit, simple sortie hors de votre quotidien. Tu voulais faire plaisir à Reira, et s'il fallait passer la soirée sur le carrousel, toi, ça t'allait. Visage angélique que tu pouvais contempler des heures durant, tant que tu étais avec la russe et qu'elle était contente, tu te fichais bien de ce que tu faisais. Enfin, c'était avant de te rendre compte de l'étroitesse de la machine sur laquelle tu étais censé t'asseoir pendant quelques minutes. Promesses indélébiles, tu t'étais venté, tu devais serrer les dents et rester sur cette monture immobile avant d'essayer de faire tout ton possible pour donner le tournis à la brune lorsque vous passerez à la montgolfière que tu avais déjà repéré du coin de l'oeil. Aisance mise à rude épreuve lorsqu'il est question que le cheval se cabre. Toi, t'avais jamais vu de carrousel aussi sophistiqué, et t'espérais sincèrement qu'il n'y avait que les manèges russes qui en étaient capable. Expression incertaine d'imprimée sur le visage, tes yeux paniqués cherchaient la vérité dans les yeux de la russe avant qu'elle ne rigole, moqueuse. « Faut pas faire ce genres de blagues, moi, les chevaux c'est pas mon dada. » Tu marmonnes en inclinant la tête, froissé d'avoir été inquiété pour rien. Peur d'enfant, monter ces grandes bêtes majestueuses c'était pas ton truc. Imprévisibles, t'étais effrayé rien que d'y penser. Pas faute de vouloir suivre ta famille en balade, t'as bien finis pas réessayer dans ton adolescence, mais le caractère libre de l'animal t'avait mis mal à l'aise dès que tu as posé les fesses sur la selle et depuis, tu n'es jamais remonté à cheval. Faussement boudeur, tu abdiques quand la jeune femme confie un souvenir de son passé en Russie, famille qu'elle n'avait jamais évoqué en ta présence. Tendrement tu viens emmêler tes doigts aux siens, extrémités électrisées au contact désiré. Maturité grandissante depuis que tu connaissais Reira, tu te sentais différent, de jours en jours. Erreurs passées et à venir, c'était ce qui forgeait ton âme, petit à petit; mais c'était grâce à elle. Même ces quatre mois de silence et d'éloignement avaient fortifiés ton être fissuré, indépendance dont tu avais besoin malgré tout ce que tu aurais pu croire. Malgré elle, sa présence comme son absence t'ont fait mûrir, et tu voulais l'en remercier. Enfant du soir, t'avais encore beaucoup à faire pour être l'homme que t'aurais dû être. Patience invétérée de la russe, la pression du temps n'existait pas. Sa main dans la tienne t'avait fait oublier le manque d'équilibre et ton corps reprenait ses dispositions sur la sculpture mobile de l'animal. La voix de Reira n'est pas couverte par la musique guillerette de l'attraction et tu réfléchis à sa question quelques secondes avant de te lancer, confier un peu de ta formation et de ton expérience militaire, sans grande peine néanmoins. Parce que ce souvenir n'était pas mauvais, au contraire. Medrick était encore là, toute votre équipe aussi. Premiers temps d'un passé hanté, ils faisaient partis des meilleurs. L'adrénaline de sauter dans le vide à plusieurs kilomètres du sol, les cris d'excitations des formation, puis après, le sérieux des missions, la question essentielle du matériel, cette peur du dysfonctionnement. C'était ce qui t'éclatait, à l'époque. Gosse en feu, ton cœur avait besoin de battre à cent à l'heure pour te faire vivre. Palpitant qui s'est calmé, assagit par la prise de conscience du monde, c'était quand même ce qui te manquait. Ce que tu retrouves aussi, lors des interventions avec les pompiers. Comme cet incendie à Island Bay dans lequel t'as retrouvé une partie de toi que tu croyais restée à l'hôpital. « Si, justement, c'est ça qui est excitant. » Tu réprimes ton sourire en te mordant la lèvre inférieure, pommettes gonflées et regard rieur. Tu ne changeras pas totalement, Chance. Ta vie n'avait de sens qu'en cherchant l'exaltation, pousser un peu plus loin les recherches, demande irrépressible de ton corps, contact nerveux qui se faisait. Prise de responsabilité qui t'empêchait néanmoins de foncer tête baissée comme tu le faisais avant, tu reprenais peu à peu le contrôle : la peur se terrait au fond de ton âme, se faisait petite et ne se montrait qu'en cas d'extrême urgence. Guérison lente, elle ne disparaitrait jamais, instinct de survie dont tu avais manqué tant d'années, t'étais marqué. Mais finalement, un saut à l'élastique, ce n'était pas grand chose. « En fait, j'ai confiance. Si je le fais un jour, ce sera pas avec n'importe qui, forcément. Je le ferais encadré, et pas par mes propres moyens. C'est devenu tellement populaire ces dernières années qu'ils mettent les moyens et font attention. Les accidents c'est rare. » Tu ajoutes en cherchant à rassurer la russe dont le regard s'était perdu, doigts qui serrent un peu plus sa main toujours enfouie dans la tienne. Interrogation posée en retour, tu te replace un peu sur le cheval, équilibre faussé par un tremblement causé par l'attraction. Regard calculateur quand elle parle du parachute, tu la laisse finir de répondre, idée intéressée derrière la tête. L'évocation de son tour du monde te fait hocher la tête. Les voyages, tous à leur manière, transformaient des vies. Vision d'un aspect autrefois inutile, ils ouvraient les yeux sur les cultures, les conditions de vie et étaient toujours annonciateurs de changement, chez une personne. Qu'ils soient bons ou mauvais. Souvenirs impérissables, tu comprenais la conception de Reira, tu avais eu presque la même. Echelle moins importante, ton tour du monde n'en était pas un. T'as pas pu profiter comme Reira, toi, c'était le travail. Pourtant, t'as aussi découvert des cultures, la précarité et les horreurs du monde. Comme les moments plus joyeux, la bienveillance et la bonté. Once affectueuse qui teinte tes iris bleus quand elle t'évoque. Toi aussi, tu avais ta place dans le tour du monde de Reira. Mémoire éternelle de cette soirée, votre première. Quand rien n'avait encore vraiment commencé pour toi, et que tout explosait pour elle. Comme un alignement des planètes ce soir-là, et puis cinq ans après aussi. Heureux hasard ou axiome temporel, rien ne pouvait vous confirmer quelle hypothèse était la bonne. Et pourtant, vous étiez là, main dans la main, sur le carrousel de la fête foraine de ton enfance. Réalité qui avait dépassée le phantasme, il n'y avait plus de doute à avoir. Vos étoiles s'étaient suivies, chemins croisés, séparés et retrouvés. « Tu sais que j'ai un brevet de parachutisme, du coup. A tout moment je t'emmène à 4000 mètres et on saute. » Tu reprends, rieur. Mais il y avait cette lueur dans tes yeux qui montrait que t'étais sérieux, et que le fantasme exaltant de la russe saurait trouver le chemin pour être réalisé. Rotation déjà lente du manège qui s'atténue, tu attends le moment opportun pour descendre enfin de ta monture, position inconfortable enfin quittée. Tu t'apprêtais à descendre de la structure écliptique pour refaire la queue, soldat discipliné, mais la main de la brune t'entraîne dans la foule qui s'agglutinait sur les différentes formes. Cohue évidente, tes lippes s'étirent, transgression amusante que personne ne verrait. Tu suis la silhouette féminine qui te pousse sur le banc de la montgolfière. Plus petite que dans tes souvenirs, ou alors, c'est juste que tu avais grandis. Rires des enfants que vous étiez, tes lèvres viennent se poser fougueusement sur la bouche rosée qui se tenait à tes côtés. Avant que la cloche ne retentisse à nouveau, tu t'étires, fait craquer l'articulation de tes mains, déliant les phalanges et les muscles que tu sollicitera. Exagération des gestes à la manière d'un athlète du cent mètres, tu poses finalement tes mains sur le mécanisme qui permettait de faire tournoyer la petite structure qui vous abritait. « Accroche-toi, c'est parti ! » Tu dis tout sourire, alors que tu assailli le mécanisme de toute ta force au moment même où la sonnette de début retentit. Quitte à être brimés sur la vitesse de la rotation à un moment donné, tu comptais bien le faire durer le plus possible. Flou accéléré qui vous entoure, tu ne vois plus que le visage de Reira et les lumières de la fête foraine qui disparaissent puis reparaissent. Ton rire se joint à celui de la russe et les quelques tours passent plus vite encore que sur les chevaux. Finalement, la vitesse de rotation se retrouve bafouée lorsque le manège ralentit et tu arrêtes de te fatiguer pour rien, laissant tomber tes bras et reposer ton dos, stimulation de tous les muscles du haut de ton corps. Vous ne vous faites pas prier pour sortir du manège et aucun mot n'est échangé : toi, tu attends le verdict, et Reira semble laisser durer le suspens. Bouche qui se fige en une expression déçue alors qu'il semblerait qu'elle n'ait pas été transcendée par ton dévouement. « C'est un manège pour gamin, aussi. Il n'y aurait pas eu de résistance, t'aurais volé. » Tu dis, boudeur, intégrité masculine touchée en plein centre. « Pour la peine, j'vais me fumer une clope. J'ai des forces à reprendre, moi. » Paquet que tu sors en quelques secondes, tu lâches la main chaude de Reira quelques secondes pour allumer le bâton de tabac pendant qu'elle replace une mèche rebelle de ta tignasse bouclée. Feu rangé, tu récupères la main que tu avais laissé. Vexé, mais pas buté, la mine boudeuse n'était que l'expression de ta déception, t'aurais pu moins te donner, ça n'aurait rien changé. Clope coincée entre les lippes, tu lèves les yeux vers le ciel qui s'était considérablement assombrit, nuit tombante. Réflexion importante, tu hausses les sourcils. Présence qui vient se blottir contre toi tu baisses les yeux pour retrouver le visage de Reira qui vient se coller au tien, contact imminent de ses lèvres contre les tiennes. Pulpe de la peau rosée qui s'étire, elle reste dans tes bras pendant que tu décides de lui répondre. « Sérieux, j'te posais pas des questions cornéliennes comme celle-là. » Tu ris un peu en recrachant la fumée qui s'était engouffrée dans tes poumons. Un génie, trois vœux. Chimère enfantine, conte impossible. Pourtant, la réponse révélait beaucoup sur les personnalités. Mais c'était pas le genre de questions que t'aimais, partagé entre altruisme et égoïsme, tu préférais laisser ces bonnes paroles à ceux qui pouvaient vraiment changer le monde. Nouvelle inspiration du tabac qui se glisse contre les parois de ton corps, tu souffles. « J'éradique la pauvreté, pareil pour les maladies. Ça me fait deux vœux et... Je souhaite avoir un autre génie qui m'offre trois vœux supplémentaires pour être multimillionnaire et les libérer. » Flot de paroles rapide, tu ponctue ta déclaration par un large sourire. « Ne me dit pas que c'est pas possible, t'as jamais dit qu'il y avait des règles. » T'ajoutes immédiatement en haussant les épaules. Corps qui se sont excentrés contre une barrière, clôture du parc, tu profites de la présence de la russe, essaye de ne pas recracher la fumée qui empruntait tes poumons trop près d'elle, voulant préserver son parfum fleurit encore un bon moment. « On t'offre la possibilité d'avoir un pouvoir. N'importe lequel. Tu choisis quoi ? » Tu demandes à ton tour. Question juvénile, dilemme que vous vous posiez tous à un moment donné dans votre vie. Ta main libre vient caresser le derme des épaules de la jeune femme, descendre le long de ses bras, frissons qui parcourent le tien a son contact. Iris plongées dans les siennes, nouvelle bouffée d'oxygène malade. « Pour me rattraper de ma montgolfière ratée, je m'occupe de ta peluche ou tu veux attendre ? » Souvenir de la promesse que tu avais faite plus tôt, si la russe n'aurait pas un souvenir impérissable de votre tour de carrousel, elle aurait au moins une peluche géante qui lui tiendrait compagnie quand tu ne seras pas là pour la prendre dans tes bras.
— La gêne du brun sur le cheval attire les prunelles perses et attise un rictus moqueur. Boutade de mise histoire d’embêter un peu plus l’homme qui perd ses grands airs sur sa monture. La blague était pourtant évidente, mais Chance ne capte la réelle dimension des propos de la russe qu’à sa nouvelle intervention. Au jeu de mots du pompier, bien que marmonné dans sa barbe, Reira laisse échapper un éclat de rire, cage thoracique qui vibre plus encore quand son regard se pose sur sa moue froissée. Traits déplaisants qui tirent son visage tandis qu’il reste accroché à la monture en bois. C’est qu’à cet instant, Reira serait prête à dépenser beaucoup pour voir le brun se tenir sur une véritable monture. Fous rires en prévision, surtout si la bête se met à fuir comme une furie, cavalier débutant accroché aux rênes autant qu’à sa propre vie. Adieu les balades romantiques à cheval sur la plage, visiblement. Idylle qui pourra vivre aux travers d’autres clichés, ou au-delà. Le lieu choisi pour cette soirée symbolique brise les codes des règles préétablies, vision nouvelle et originale d’un amour naissant. Il n'aura qu’à opter pour un poney, dans le pire des cas, si balade à cheval il devait y avoir un jour. La grimace de l’enfant boudeur quitte son visage quand elle ouvre son cœur au passé, doigts qui s’emmêlent dans le vide entre leurs chevaux. La russe a toujours pensé pouvoir tout gérer seule, panser ses plaies, se perfectionner, grandir. Sauf que personne n’en est capable, tout le monde a besoin d’un coup de pouce. Elle le comprend, avec Piotr, avec Chance. Personne ne s’attend à ce qu’elle soit parfaite, personne ne l’est de toute façon. Myocarde dégelé, neurones empreints des paroles et des actes révélateurs. À ses côtés, elle se sent capable de guérir et suturer ses blessures, parce que dès que ses doigts effleurent les siens, Reira devient invincible. Tant de bienfaits qui remplissent son palpitant, bienveillance et dévouement décuplé, le positivisme prend le pas sur les démons pour envoyer paître les craintes disproportionnées. Apprendre des erreurs passées, la russe l’a bien fait comprendre à son petit frère. Elles sont faites pour être commises mais pas répétées. Aujourd’hui, la brune s’efforce d’appliquer le même schéma avec Chance, cœur brisé qu’elle bichonne de ses lèvres et de ses mains. Si le destin s’est toujours arrangé pour recoller les morceaux, placer sur le chemin de l’autre la silhouette familière, elle ne compte pas abuser de la magnanimité de l’univers. Le temps est venu de se construire à deux, repousser ses limites pour découvrir à quel point Chance peut la combler de bonheur, plus encore qu’aujourd’hui. Pour cela, ils se plaisent dans leur jeu de question-réponse. La russe manque un battement quand il lui avoue que le danger de l’attraction représente son pouvoir d’excitation. Pendant une seconde, elle se demande si elle ne passe pas la Saint-Valentin avec un suicidaire. Se procurer des sensations fortes, aucun souci mais la logique a de quoi surprendre. Iris qui scannent l’air rieur du personnage pourtant bien caché derrière un voile à demi-sérieux, ça ne l’étonne pas vraiment quand elle se remémore leur rendez-vous au restaurant, l’annonce de son poste au sein des pompiers. L’adrénaline pulse dans ses veines, il en a besoin Chance, autant que Reira a besoin du stress avant la montée sur scène, des endorphines qui se libèrent en masse après une performance. Des vies rythmées par un besoin animal, viscéral de se doper à l’adrénaline malgré le rôle de la maturité, gardien qui tempère les élans fougueux des âmes en pleine croissance et jeunesse. Le palpitant reprend un rythme normal lorsqu’il finit par expliquer qu’en réalité, les accidents sont assez rares, que l’explosion de la pratique fait que les organisateurs se montrent particulièrement minutieux et responsables. Reira approuve d’un hochement de tête, ravie de savoir que le bien-aimé se renseigne et troque l’adolescent impétueux pour l’adulte réfléchi. « C’est sûr, ils n’ont pas vraiment d’intérêts à proposer une activité risquée et absolument pas contrôlée, ça leur ferait perdre toute la notoriété acquise. » Réflexion pragmatique, il n’est dans l’intérêt de personne d’offrir des élastiques défectueux. Et même si le risque zéro n’existe pas, ça a de quoi rassurer suffisamment pour laisser les clients abandonner leur cœur dans le vide et sauter. Cependant, ce n’est pas le genre de trucs que pourrait faire Reira, alors que le parachute, oui. Saut depuis bien plus haut, l’encadrement et le parachute en lui-même lui inspirent bien plus confiance qu’un simple élastique. Folie qu’elle avoue quand il lui retourne la question, les doigts toujours sagement entrelacés aux siens qui résistent à chaque mouvement du manège. Et évidemment, elle parle de son voyage. L’œuvre d’une vie proche de l’idéal si le point de départ n’avait pas été l’ultimatum posé par les viles plaies aux paroles méphistophéliques. Ses neurones ne s’imprègnent désormais que des bons souvenirs, les tourments foutus au placard. Actions à l’effet papillon d’une certaine envergure, ces décisions l’ont conduite aujourd’hui ici. Dans cette fête foraine, avec Chance, celui qu’elle n’aurait rencontré sans ça. Est-ce que leurs âmes auraient trouvé le moyen de rentrer en contact en l’absence de cette nuit suspendue au Cameroun ? Signes qui n’ont cessé d’émerger depuis cette nuit, astres qui s’alignent pour effacer les ruines désastreuses de décisions précipitées. Paupières qui clignent à l’évocation d’un saut en amoureux. Nouvelle activité trouvée, prête à remplacer le cheval en chair et en os qui risque de mettre mal à l’aise le brun. « Ça veut dire que tu serais prêt à te jeter dans le vide avec moi ? » Précipice déjà sauté, ils ont bravé le fossé qui s’était créé entre eux en quatre mois, prêts à sauter dans le vide d’une vie de couple encore innommée. Inconnue face à laquelle Reira ne se pensait pas suffisamment forte pour succomber ; raison finalement retrouvée, elle a compris que la force se trouvait dans cette alliance avec Chance. Saut effectué alors que les démons se faisaient à nouveau menaçants, un saut dans le véritable vide ne lui ferait assurément pas peur dès lors qu’elle serait avec lui. Ses prunelles luisantes rencontrent les siennes dans un accord implicite, folie qu’ils pourront vivre à deux. La tendresse dans les lèvres de Reira s’étire en un sourire tandis que ses doigts se resserrent autour des siens, touchée d’avoir le droit à son moniteur privé de parachutisme.
La force qu’il met à actionner le mécanisme amuse la russe. Rapidement, elle perd des yeux ses mouvements pour se laisser enivrer par la rotation. Lèvres souriantes qui s’entrouvrent pour rire quand la vision se trouble et que ses mèches brunes lui coupent la vue. Ça ne dure pas longtemps, manège plus court dès lors que l'ivresse de l'amusement pointe le bout de son nez, comme si les tours avaient accéléré le temps, sablier qui s’était écoulé bien plus vite. Russe malicieuse, elle ne dit rien avant d’avoir quitté le manège, main du brun retrouvée. Ignorance feintée, elle finit par lui offrir son verdict. Moue déçue qui lui donne envie de rire, elle se retient pourtant. Un simple sourire se dessine sur ses lèvres en le voyant se perdre dans un boudin. « Volé ? Ah oui ? » Sourcil arqué, elle l’observe de ses yeux perses tandis qu’il sort son paquet de cigarettes. Les doigts se séparent pour mieux se retrouver quelques secondes après, réflexe automatique des âmes qui s’enlacent. « C’était pas mal quand même, je t’assure. Tu pourrais te reconvertir en tourneur de montgolfière. » Esquisse amusée sur les lippes, elle rassure le petit cœur presque vexé de l’homme qui a usé de ses muscles pour venir à bout du manège. Ses doigts glissent dans ses cheveux pour remettre une mèche rebelle avant de lui offrir une nouvelle question. La silhouette russe se cale contre le vaillant avec qui elle vient de passer deux tours de carrousel, lèvres qui se glissent contre la pulpe rosée de celles de Chance qui s’étirent sous son contact. « J’ai décidé de compliquer un peu le jeu, j’ai été trop gentille avec la couleur et le sport. » Rictus taquin sur les lèvres, les vœux en disent tout autant sur une personne que ses goûts. Cependant, l’exercice est à double tranchant car les réponses basiques ressortent forcément, et annihilent toute empreinte de la personnalité. Plaisirs personnels avant les intérêts du monde ou l’altruiste mensonger pour s’assurer la réputation d’un ange. Chance opte d'ailleurs pour l’altruisme, mais la russe n’analyse pas l’action comme réfléchie avec un but lucratif derrière. Bienveillance bien connue du pompier, dévotion au monde qui l’entoure présente chez lui depuis toujours. Opportuniste, il profite du manque de règles pour contourner la question. Ses globes oculaires roulent dans leurs orbites, sourire qui peint ses lèvres rosées. « Bon, j’ai pas donné de règles donc… J’accepte la réponse. Au final, tu veux un peu être Iron Man, nan ? » Ricanement qui la fait décoller superficiellement de son corps, pause contre une barrière, loin de la foule. Quand elle ne sourit pas en plongeant son regard dans l’océan bleu, sa tête se pose contre son torse, palpitant qui s’exprime contre le coquillage de son oreille. Son nez remonte vers lui pour accueillir sa réponse, rictus coincé sur les lippes. « Toi aussi, tu poses pas des questions faciles. Si je choisis l’invisibilité, j’vais manquer d’originalité. » En plus, l’invisibilité ne l’intéresse pas tellement. Trop commun, sans réelle utilité hormis pour espionner. En effet, inutilité zéro pour une russe sans raison d’aller coller aux basques de ses proches pour obtenir des informations, plutôt partisane de laisser le libre arbitre et le choix à l’autre de se confier, ou non. Reira ne s’est jamais véritablement demandée quel type de pouvoir elle pourrait avoir, ses amis de l’Académie ne lui posait pas véritablement ce genre de questions, se perdant trop peu dans des dessins animés super-héros. Bout de langue qui passe pour humecter la pulpe avant de sourire, pupilles qui ne lâchent pas les traits masculins. « J’crois que je m’en créerai un. Pas d’invisibilité, de lecture dans les pensées. J’pense que je me donnerai le pouvoir de soulager le malheur des autres juste en les touchant. Tu sais, faire disparaître toutes les mauvaises pensées, les tracas, etc. Une remise à zéro émotionnelle mais en mettant le curseur au maximum de la joie. » La délicatesse des doigts de Chance caresse l’épiderme à nu de son épaule pour glisser langoureusement jusqu’à son bras, poils qui se dressent sous les frissons qui suivent la chaleur de sa main. Le sourire de la russe grandit un peu plus. « C’est un pouvoir qui existe sûrement par le biais des thérapies, mais tu vois, ce serait plus rapide, plus immédiat. Comme une drogue, mais sans effets secondaires négatifs. » Prête à enchaîner les questions, il la dévance en parlant de la peluche. Lueur enfantine dans le regard, sa caboche approuve d’un hochement de tête, lèvre inférieure emprisonnée entre ses dents, excitation qui la fait sautiller sur place. « La peluche ça me va ! Comme ça, si tu m’abandonnes dans la maison hantée pour me faire peur, j’aurais toujours la peluche à serrer dans mes bras. » En plus du souvenir palpable de cette journée, peluche qui trônera fièrement dans sa chambre. Ses prunelles pourront se poser dessus chaque matin, moment exquis où le cœur se gonflera d’amour en songeant à cette soirée délicieuse. Clope consumée, mégot jeté dans l’endroit dédié, le couple officieux se dirige vers le stand de tir à la carabine. Légère queue devant l’attraction qui attire autant les quelques couples venus passer une soirée originale comme eux, que les parents et les enfants qui tentent en vain de viser correctement les cibles. En attendant leur tour, les prunelles perses se posent sur les lots, zieutent la plus belle des peluches, celle qui fait vibrer son petit cœur. L’éléphant gris avec sa moue adorable capte automatiquement le regard de la russe, grandeur de la peluche qui va donner du fil à retordre à son ancien soldat. Son index pointe la peluche imposante. « C’est celle-là que j’veux, tu penses pouvoir me la gagner ? » Toujours lovée contre Chance, elle lève son regard vers lui, contorsion des lèvres en un tendre sourire. Leur tour vient plus vite que prévu, Reira répète le lot qu’elle souhaite gagner, ou plutôt voir Chance gagner et le gérant lui indique le score à marquer. Sourire fière sur les lippes, elle se détache de lui doucement, main qui glisse contre son dos. « J’te fais confiance, mon champion. » Adjectif possessif glissé sans même se rendre compte de la sincérité d’un mot presque insignifiant dans la phrase, au sens pourtant bien plus profond, coeur tatoué par le brun.
14 février ○ Si tu étais prêt à sauter dans le vide avec Reira ? Plus que jamais. Pourtant, t'avais pas répondu à sa question, laissant planer le doute, rétines taquines, sourire malicieux. Tu t'es laissé emporté sur le parquet du manège, rejoignant la montgolfière sans vous faire repérer par ceux qui géraient le carrousel. Gosses en feu, pulsions passionnées de ce début de soirée, éclats de rire euphoriques. Tu mets toute ta force pour faire tourner la structure au ballon le plus vite possible; perdu dans la joie que tu voyais peinte sur le visage de la russe, tu te laisse emporter par le vent et la célérité. L'inconnu t'effrayait, pas les bras de Reira, qui n'étaient plus dissimulés. Grands ouverts à toi, tu pouvais t'y glisser, te laisser porter et bercer par le parfum russe qui t'englobait de tout son être. Te laisser tomber dans le vide, c'était comme suivre une voie inconnue, finalement. T'avais bien été capable de suivre ce raccourcit pour une ligne d'arrivée indéterminée. T'as fais confiance, t'as laissé l'aura te porter, sans te douter que tu tomberais amoureux. Obstacles que t'as su surmonter, erreurs que t'as faite, encore. Blessures que tu répares, petit à petit : sur les autres, mais sur toi aussi. T'as suivi l'inconnue, myocarde accrochée par des fils invisibles. C'est ton corps qui te portait, l'esprit ailleurs. Alors non, ce n'était pas un saut dans le vide avec elle qui t'effraierais. Au contraire, tu savais encore plus où tu allais maintenant. Comme si l'univers effacé par la vitesse de la rotation laissait apparaître les lumières qui suffisaient à ton avenir, et parmi elles, le visage de Reira était le plus clair. Etoile scintillante dans la nuit noir, centre de l'aurore boréale créée par la décoration bigarrée. A mesure que la soirée passait, l'évidence se reflétait dans tes rétines. Avenir brillant que tu ne voyais qu'avec la russe, seul remède à tes maux indélébiles. L'enfant boudait, fallacieusement frustré par le manège oppresseur. Odeur du tabac qui vient chatouiller tes narines, addiction rappelée par la brune lorsque vous observiez l'horizon, perchés sur la grande roue, tu t'empêche pas pour autant de foutre ta clope à la bouche, rapidement allumée. Apaisement tactile, touché tacite dans lequel tu voudrais t'enfermer, plonger tête la première. A la place, tu plonges dans le regard clair de la princesse aux yeux clairs, demi-réponse à la question qu'elle avait posé. Temps gagné pour y réfléchir encore un peu, tu finis par baisser les bras : les questions cornéliennes n'étaient pas pour toi, originalité dépassée par l'évidence des propos altruistes pourtant pas faux : t'aurais aimé être un peu plus atypique, laisser les lippes de la russe s'élargir, redécouverte des dents blanches par l'extravagance de ta réponse. Unique fantasme, tu pourras toujours te rattraper à la prochaine question. Haussement d'épaules penaud alors que tu vois l'expression de son visage changé, t'as joué avec les règles puisqu'il n'y en avait pas. Esquisse qui se forme au coin de tes lippes, comparaison héroïque qui gonfle ton égo. « J'me voyais plutôt en Batman, ou si tu veux rester chez les Marvel pourquoi pas en Hawk-Eye, même si je suis pas sûr qu'il soit super riche... Mais Ironman c'est pas mal, finalement. » Le corps de la brune se détache du tiens, proximité immédiatement regrettée. Tu prends la main sur les questions, puisqu'il était question de super-héros, il fallait bien un pouvoir. Evocation de l'invisibilité, ce n'était pas ce que tu aurais choisi non plus. De ton côté, tu hésitais entre la torche humaine ou une force hors du commun, attraction pour la vitesse et le terrain. Coïncidence amusante avec la nouvelle profession que tu avais choisi il y a plus de six mois. De la même manière que toi, quelques minutes plus tôt, la question bouleverse les idées préconçues de Reira. Elle reste malgré tout plus originale et tu hausse les sourcils, intéressé par la suite de sa réponse. Pas vraiment surpris par son utopie, tu viens caresser les pétales de sa peau, douceur électrisante. « Rassure-moi, les douleurs ensuite elle sont détruites, tu les stockes pas ? Parce que hors de question que je te laisse avoir ce pouvoir si tu deviens une éponge, ma petite. » Tu lances, faussement ferme. Regard qui se voudrait dur, tu ne peux pas résister au bleu des iris de l'ancienne danseuse, chat potté vraiment convaincant. Tu laisses tes doigts courir sur le derme attractif, balade addictive que tu retracerais les yeux fermés. « J'aime bien ton pouvoir. Je t'imaginais pas en femme invisible, de toutes manières. Au moins, tu pourras garder tes vêtements. » Possession qui glisse entre tes lèvres, langue qui vient se nicher derrière tes dents; fantasme de la femme invisible nue que le pouvoir pouvait piéger, une capacité plus psychique irait très bien à la belle brune, finalement. Corps précieux que tu voulais égoïstement garder pour toi, regards indiscrets que tu n'accepterais pas. Fleur à chérir, panser et aimer. Tu voulais être le seul capable de la protéger, qu'elle se réfugie dans tes bras quand elle avait peur, cherche ta présence quand tu n'étais pas là. Clope bientôt consumée, tu regardes autours de vous, lumières pétillantes de la vie qui continuait de tourner quand tout s'arrêtait à vos deux uniques personnes. Sons secs qui rejoignent tes oreilles, tu reconnais le tintement des billes en plastiques des carabines et l'éclat rare des ballons touchés. Discussion du début rappelée, tu demandes à Reira si elle veut récupérée la peluche promise tout de suite. Fourberie surprenante, sa réponse laisse le rictus de tes lippes en suspend. Ta main récupère la sienne pour l'emporter vers la source des fausses détonations entendues, bien différentes de celles que tu connaissais par cœur, qui hantaient encore tes songes, de temps en temps. Tu lâches ton mégot dans une poubelle une fois qu'il est bien éteint et rejoins le stand où une petite foule attendait déjà. Russe à ton bras, tes yeux cherchent la faille de l'échoppe, celle que tu devras contrer pour lui montrer ce que tu valais, finalement. Virilité que tu recherchais depuis que tu avais posé tes fesses sur le cheval en bois, soirée qu'il fallait reprendre en main après ces quelques failles. Mais finalement, le tir à la carabine était sûrement le jeu le moins truqué de la fête foraine : cibles mouvantes et aériennes qu'étaient les ballons accrochés à un fils, il fallait en toucher deux pour daigner avoir une petite peluche, six pour les plus grosse. Esprit tactique aiguisé, contraste de vos esprits qui se croisaient : elle, elle cherchait le teddy-bear qui lui ferait envie. Attente agréable puisque la belle était blottie contre toi, silence préparatoire, sa voix vient te tirer de tes réflexions. Sourcil arqué en découvrant l'énorme éléphant qui trônait fièrement avec les gros prix, tu prends une inspiration, inclinaison de la tête. « J'ai pas vraiment le choix si je veux me rattraper. » Rotation des pupilles, tu finis par sourire. « Si je gagne, j'ai droit à quoi, moi ? » Méprise d'un service intéressé, elle pouvait te proposer un simple baiser que ça t'irait. File qui avance, précédents joueurs qui se sont foirés en beauté, c'est à toi. Reira indique la peluche qu'elle souhaite au forain. Comme tu l'avais deviné, six ballons à éclater. Il te propose dix balles, pour avoir plus de chances. La chaleur de la main de la brune vient se glisser dans ton dos, derme fébrile au touché, regain d'énergie qui traverse chaque vaisseau, oxygène motivant. C'est un sourire confiant qui s'installe sur tes lippes quand elle t'encourage, terme possessif qui ravit ton esprit, frissons qui parcourent ton corps. Fier challenger, tu secoues la tête. « Sept billes, ça ira. » Comme si tu te sentais pousser des ailes, miroir déterminé de les rétines, le forain n'insiste pas malgré son air surprit. Un tir joker, seule raté que tu te laissera. Il te confie les billes que tu entres dans le chargeur, agilité des doigts pour de si petites balles. Pieds ancrés au sol, un oeil fermé pour une visibilité plus précise, tu prends une large inspiration, importance de ce jeu relative à celle d'une mission, ce soir. La mission de décrocher ce putain d'éléphant géant pour une princesse du Nord heureuse. Cible verrouillée, premier tir, premier éclat. Tu souffles, laisses tomber tes bras, détente des muscles crispés. Lippes étirées, pommettes remontées, tu regarde Reira d'un air suffisant. Sérieux bien vite reprit, tu éclate les deux autres ballons de baudruche de deux tirs suivis, à peine une seconde d'écart. Encore trois; quatre balles. Quelques enfants curieux viennent derrière vous, retenus par leurs parents. Concentration pourtant pas mise de côté, tu cherches les cibles les plus faciles à atteindre : joueur mais par suicidaire, si tu pouvais ne pas prendre de risque et avoir cet éléphant du premier coup, le choix était vite fait. Tu tires sur les deux ballons suivants avec un peu plus de précision : plus qu'un. Gros yeux que te fait le forain, tu espères qu'il ne sortira pas une botte secrète pour t'empêcher de gagner le prix si près du but. Nouveau tir. Râle frustré, tu l'as raté. Mâchoire qui se sert, t'as voulu aller trop vite. Tes iris bleus se font plus dures, sens mis de côtés pour ne te concentrer que sur la perception du viseur imaginaire. Doigts sur la gâchette, tu détends tes épaules encore trop crispées avant d'appuyer pour laisser la bille atterrir contre le rebondit du dernier ballon que tu t'étais fixé. Large sourire qui dévoile tes dents, tu laisses échapper ce rire saccadé, signature de ta victoire. « Le gros éléphant gris, s'vous-plait. » Tu rappelles au forain en lui rendant la carabine, l'oeil brillant et en montrant d'un signe du doigts la peluche désirée. Enfin dans tes mains, tu t'éloigne du stand, mains et peluche dans le dos avec une Reira impatiente. Innocent, tu décales tes lèvres sur le côté de ton visage. « Ma récompense avant, je crois que je l'ai méritée. » Requête imprévue, tu laisses tes yeux percer les rétines azurées de la russe, lèvres pincées.
— Question complexe aux facettes multiples, des réponses reflets des désirs profonds des personnalités. Reira ne sait même ce qu’elle pourrait bien choisir hormis du positif, l’âme suffisamment rongée par ses propres maux, elle n’a jamais cherché à semer la douleur autour d’elle. Pourtant, elle a plongé son entourage dans l’affliction par ses choix égoïstes. Alors la russe, elle ferait sûrement en sorte de supprimer les marques gravées par la peine, maigre lot de consolation pour ceux qu’elle a blessés. Et puis, peut-être qu’elle libérera le monde des ordures puis s’offrira un pouvoir, afin de faire perdurer sa volonté d’un monde meilleur. Chance choisit la voie de l’altruisme pour le monde et l’égoïsme d’un portefeuille à qui ça ne ferait pas de mal de se remplir. Traits qui reflètent pour la brune le caractère d’un super-héros particulier, Iron Man, l’égocentrisme et le narcissisme en moins chez le pompier. « Hawkeye ? Tu sais tirer à l’arc au moins ? Quitte à opter pour un riche sans pouvoir particulier à la base, j’te conseille de prendre Iron Man… J’le trouve barbant Bruce Wayne. » Les limites de ses connaissances cinématographiques ne l’ont pas éloignée des univers super-héroïques, monde dans lequel elle s’est vite plongée pour assurer le maximum de conversations possibles avec des gens différents. Émergence du MCU qui force la moindre entité esseulée de la pop culture a connaître les héros, ne serait-ce que de nom. Loin d’être fine connaisseuse, elle dispose simplement des bases pour ne pas passer pour une inculte. Parlant super-héros, vient sur la table les questions de pouvoir bien dans le thème de leur discussion. Manque d’originalité qui ne lui donne pas envie, Reira crée son propre pouvoir. Entité absorbante, l’éradication de la désolation au bout des doigts pour un monde purgé de ses supplices. Peut-être que ça n’a rien d’original au final, pouvoir déjà entre les mains des psychologues et autres thérapeutes bien qu’au délai plus allongé. La russe se fonde sur les maux autour d’elle, en elle, quête d’un équilibre entre le bien et le mal qui pencherait plus vers le bien. Ça détraquerait sûrement le monde de ne plus avoir de blessures psychiques pour se construire et grandir. Enfin peu importe, ce n’est qu’une question posée comme ça, sans impact sur la vie réelle. Les doigts qui effleurent son épiderme dessinent un sourire sur ses lippes, intérêt pour son bien-être qui glisse le long de son endocarde. Ses prunelles perses se perdent dans l’azur de ses yeux, pattes qui se forment au coin externe à force de sourire, iris luisantes qui se croisent. Elle approuve d’un hochement de tête. « On va dire qu’elles partent sur un disque dur externe qu’on peut brûler. Ça te va ? » Ça ne l’aurait pas dérangé d’être une éponge, d’être la boîte de Pandore du monde pour assurer aux autres une vie paisible, surtout à ses proches. Fardeau qu’elle serait assurément prête à porter pour le bien-être commun pour garantir que personne ne sera forcé de prendre les mêmes décisions qu’elle. La remarque de Chance la fait rire, possessivité et jalousie à peine déguisée, comme un écho de sa blague sur la boxe. « Quoi ? Tu serais inquiet que mon pouvoir disparaisse et qu’on pose le regard sur moi ? » Rictus sournois sur les lèvres, elle niche son nez dans son cou, hume un instant son parfum. Narines empreintes de l’odeur ambrée masculine, lèvres en une esquisse radieuse. Ses lippes déposent un baiser délicat dans le creux de son cou avant de murmurer. « Je préfère aussi garder mes vêtements, tu peux te détendre. » Silhouette qui se plaît dans les tenues de danse dénudées ou moulantes, mais loin d’aimer l’exposition non-nécessaire. Ancienne danseuse filiforme exclusive au regard du pompier. Aucune envie de s’offrir à un autre, ni même de détourner son propre regard sur une autre ombre masculine, Chance seul dans sa ligne de mire. Galbe luminescent qui éclipse le monde alentour à ses yeux, alors qu’ils se faufilent parmi la foule pour aller vers le stand de tir à la carabine. C’est qu’elle tient à sa peluche la russe, symbole enfantin de l’amour. Simple cadeau, probablement trop facile à décrocher pour un ancien soldat habitué à manier les armes. Présent pourtant cher au myocarde qui a besoin de sentir la présence de Chance même lorsqu’il est loin. La peluche trônera fièrement entre ses bras lorsqu’il ne pourra pas se glisser dans les siens.
Au stand, le regard aguerri du militaire prend le dessous alors qu’il scanne le stand avec assiduité, comme si une faille allait soudainement apparaître. Est-ce que les stands étaient truqués ? Sûrement, comme les UFO catchers japonais où la force de la pince est ajustée suivant que le lot vient d’être remporté ou non. Ceci dit, Reira ne voit pas véritablement comment il serait possible de truquer un stand de tir à la carabine… Après tout, les forains ne s’attendent sûrement pas à avoir des dizaines de militaires surentraînés au tir à leur stand. Les iris perses, elles, se perdent plutôt sur les peluches pour travailler la meilleure, celle qui fera le plus vibrer son cœur. Silence qui règne, qui joue avec les battements à l’unisson de leurs cœurs serrés l’un contre l’autre dans la file d’attente. Index russe qui pointe enfin l’éléphant qui lui fait de l’œil, rétine qui se tatoue de sa fourrure duveteuse. Le gamin boudeur se cache toujours en lui, écho masculin bousculé par la pique sournoise du carrousel. Pas le temps de répliquer, l’arcade sourcilière se contracte. Sourcil haussé, Reira jauge du regard son acte intéressé. « Tiens donc. C’est pour te rattraper mais tu y gagnes quelque chose ? T’essayes pas de m’rouler dans la farine un peu ? » Regard suspicieux, elle le sonde avant d’abdiquer d’un sourire. « Bon, ta mine me fait pitié alors j’veux bien t’offrir quelque chose. » La brune n’a pas de compétences qui permettrait à Chance de repartir avec un cadeau. Même la pêche aux canards risquerait de lui donner du fil à retordre. Autant lui offrir le seul gros lot qu’elle peut lui offrir avec certitude. « T’as le droit à moi. » Un sourire malin se dessine sur ses lippes avant que leur tour ne vienne enfin. Un encouragement glissé au rythme de sa main sur son dos, puis elle le laisse face à son défi. Assurance soudaine qui imprègne le pompier, Reira cligne plusieurs fois des yeux en retenant un rire mutin. Elle retient cet élément, juste au cas où Chance se rate monumentalement après un tel excès de confiance. Tout le monde a les yeux rivés sur l’ancien soldat à fond dans sa mission, c’est à se demander s’il a conscience que ce n’est qu’une attraction. Première cible atteinte qui étire un sourire sur leurs deux bouches pendant que leurs regards se croisent. Elle sait qu’elle va l’avoir sa peluche. La suite des tirs la cloue sur place, surprise par l’agilité et la précision de Chance. Le reste des spectateurs est sur les fesses en voyant la dextérité de l’ancien soldat. Encore sous le choc des premiers tirs, personne ne remarque l’avant-dernier raté, sauf le forain qui étire un rictus narquois. Finalement, le lot est remporté, brun qui récupère la peluche et bombe le torse, fier comme un paon alors que son rire unique remplit l’endocarde russe de joie. La brune s’est légèrement éloignée du stand pour laisser les autres clients prendre place, attend son prince charmant et son cadeau. Éléphant caché derrière la carrure du mâle qui réclame sa propre récompense. Incapable de résister à l’appel de ses iris bleutées, elle capitule d’un roulement de globes dans les orbites. Silhouette russe que s’approche, tend les bras pour les enrouler autour du cou de Chance alors qu’elle se presse contre lui ; poitrine qui embrasse le torse tandis que ses lèvres s’écrasent goulument sur les excroissances charnues. Le baiser s’étire dans le temps, langues qui se délient même pour jouer ensemble un cours instant. Discrètement, une de ses mains se referment sur la tête de l’éléphant et quand il relâche sa prise, elle renforce la sienne. Baiser intéressé à l’image de sa requête, elle le fait pourtant durer, besoin de le sentir contre elle, d’afficher l’amour qui les enveloppe. Aura passionnelle qui ne s’interrompt même pas quand vient le moment de se séparer, la brune tenant fièrement l’éléphant dans ses bras après l’avoir subtilisé à un Chance endormi par le bécot. « J’te laisse l’honneur de choisir la prochaine attraction. Grand huit ou maison hantée ? » Ses doigts s’emmêlent à nouveau aux siens tandis que son autre bras serre fièrement la récompense dégotée par son bien-aimé. Trophées au bout des deux mains, elle les entraîne sur le chemin principal de la fête foraine, qui mène à toutes les attractions. Apaisement dans le cœur, Reira se sent divinement bien aux côtés de Chance, comme si la douleur n’avait jamais existé. Pansement délicat qui forme une membrane autour de son myocarde, il la protège de tous les dangers extérieurs et la gonfle d’amour. Définition du sentiment difficile à donner, la russe sait pourtant pour qui bat le palpitant, évidence frappante. Ses lèvres se pincent alors qu’elle tourne le visage vers lui, prunelles brillantes de la lueur amusée, signe du retour des questions-réponses. « Puisque je te pose des questions trop difficiles… C’est quoi ta musique préférée ? De tous les temps ? Si t'arrives vraiment pas à en choisir une, je t’autorise à en citer plusieurs. » Sinon, il va encore râler, elle le sent venir gros comme une maison.
14 février ○ Débat héroïque, questions taquines qui viennent révéler des principes débridés, utopies vivantes de vos mots. Super-héros milliardaire, c'était un beau métier. Si seulement ce monde fictif existait, tu sais que plutôt que de t'engager à l'armée t'aurais tout fait pour faire partie de cette élite, détachement de l'ordinaire. T'aimais pas forcément les protagonistes tout blancs, t'identifiais plus facilement à ceux que les vices avaient éconduits. Justiciers parfois égoïstes qui n'hésitaient pas à aller à l'encontre de leur intégrité. Ceux qui faisaient des erreurs, ceux qui n'étaient pas invincibles, ceux qu'on avait peur de perdre à l'écran. L'évocation d'Ironman te fait sourire, héros égocentrique et individualiste, tu espérais qu'elle ne te comparais pas entièrement au mufle qu'il avait été dans les films. Surpris aussi qu'elle évoque la culture pop, premier rendez-vous qui ressurgit et où ce n'était pas particulièrement ce que la brune appréciait. « Ok, non, je sais pas tirer à l'arc. Mais Bruce Wayne, au moins, il casse des têtes. » Pupilles qui roulent vers le ciel sombre, tu poses ta question à la brune. Don d'éponger les maux, retirer tous les malheurs psychiques du monde, bienveillance empathique de la russe, bonheur étranger avant le sien. Ça ne t'étonnait pas, au contraire. Souhait de bonté qui amplifiait l'estime déjà haute que tu avais d'elle. Inquiétude non dissimulée pourtant, tu imagines son équilibre troublé, dans ce monde fictif que vous inventez. Réponse rassurante alors que tu hoches la tête, esquisse tendre au coin des lippes. Iris qui la scannent quand même, tu sentais la réponse presque forcée, juste pour toi. Là encore, tu ne serais pas étonné d'apprendre que la brune serait capable d'annihiler sa propre peine pour panser celle des autres. Pensée que ce serait à toi, maintenant, de soigner ses maux si elle en était incapable. Rôle que tu prenais déjà sérieusement alors qu'il n'était question que d'un univers chimérique, souhaits conditionnels. Une part de toi quand même aurait dû essuyer une frustration complexe si la brune avait pensé au don d'invisibilité. Tu ne peux pas t'empêcher de lui faire la remarque, mi- soucieux mi- jaloux qu'un autre que toi puisse poser ses rétines sur le derme chéri. Rire ironique qui fait vibrer tes cordes vocales, nouvelle rotation des yeux à la taquinerie de Reira. Tu ne réponds pas, commissure étirée perdue au bord de tes lippes, tu entraines son corps élancé vers le stand de tir à la carabine, possession tactile, emprunte tatouée à l'encre invisible. Ta demande de récompense semble la surprendre, service intéressé finalement pour qu'elle puisse avoir sa peluche. Regard mielleux, la russe voit clair dans ton jeu alors que tu joues les innocents. Motivation qui devait être alimentée, mirage d'une médaille gratifiante. Tu hausses les épaules, une moue enfantine collée sur tes lèvres, et tu les laisse s'entrouvrir d'amusement alors qu'elle abdique, presque à contrecœur. Malin sournois, elle glisse la récompense que tu gagneras si tu lui obtient l'éléphant, énigmatique. L'oeil brillant, tes iris glissent sur la malicieuse, lèvre inférieur que tu viens grignoter avant de te rendre compte que la file avançait et que c'était à ton tour. Derme électrisé au contact de ses doigts dans ton dos, voix suave que tu entends raisonner dans tout ton être. Dessein de la récompense qui se fraye un chemin pour venir prendre la place de l'éléphant molletonné. Images loin d'être fictives, la russe avait de quoi de motiver en un clin d'oeil. Concentration à son paroxysme, tu savais qu'en temps normal, tu n'aurais jamais raté ces cibles mouvantes. Pourtant, les conditions étaient différentes. Jouets plus légers, la sollicitation de tes muscles était différente. Et il y avait du bruit, du mouvement, de l'action. Tu devais omettre chaque détail pour ne te concentrer que sur ces ballons multicolores qui te permettraient de décrocher la peluche. Challenge dont tu finis par douter, assurance mise à rude épreuve par le trop plein de confiance. Tu éclates quand même les six ballons, après seulement sept billes : presque un sans fautes. Passé militaire qui finalement te rapportait toujours des points auprès de la gente féminine, c'était plutôt une seule silhouette qui t'intéressait ici. Tu récupères la bête aux grandes oreilles pour rejoindre Reira qui s'était excentrée du stand. Mains et peluches dans le dos, tu n'allais pas te laisser rouler par la brune : si elle comptait avoir sa peluche, tu devrais avoir un gage de sa bonne foi. Lippes étirées ta nuque reçois la chaleur de ses bras nus, l'éloignement de vos corps est oublié, inexistant; pression soudaine de vos bustes l'un contre l'autre, anatomie féminine qui fait monter un feu troublant. Lippes rosées qui s'emparent des tiennes, tu laisses Reira diriger le baiser offert. Une de tes mains vient lâcher la tête de l'éléphant pour se poser dans la chute de rein de l'ancienne danseuse, pans de sa robes qui cachaient les formes que tu viens épouser, paumes baladeuse. Attention relâchée, tu perds sans crier gare le trésor attendu; ses lèvres ne quittent pas pour autant les tiennes et tu te délecte du contact prolongé, langues taquines. Elle s'éloigne finalement, courant d'air frais qui parcourt ton corps une fois sa propre chaleur retirée de ton épiderme. Déception qui s'empare de tes lèvres gourmandes de passion, tu les laisse s'étirer alors que tu toises l'éléphant qui trônait fièrement entre les mains de la russe. « Alors c'est comme ça ? A peine arrivé que je suis déjà remplacé ? » Tu secoues négativement la tête, exagérément dépité. Tes lippes se rejoignent finalement, pincées entre tes dents avant que tu ne demandes, l'oeil brillant: « C'était un avant-goût ? » Regard taquin qui se plonge dans l'océan bleu de la russe, tu la dévore d'un coup d'oeil, passion fulgurante due au baiser fougueux auquel tu as eu droit, même si c'était pour mieux te subtiliser l'animal durement gagné. Tu fais mines de réfléchir quand elle te laisse la possibilité de choisir votre prochain arrêt. « Je suis d'humeur à la maison hanté. » Large sourire ironique derrière un regard malicieux, tu embarques à nouveau Reira -et maintenant la peluche- dans la foule pour rejoindre la structure de la maison hantée, plus éloignée des autres attractions. Vos doigts entremêlés entre eux se balancent entre vos silhouettes et Reira était comme une enfant qui portait fièrement l'éléphant dans ses mains. « Tu vois, je sais pas tirer à l'arc mais je suis pas trop mauvais avec une carabine. » Mot que tu corrige au dernier moment, langue qui aurait voulu fourcher pour prononcer "flingue". Terme à connotation effrayante, la carabine se rattachait au jeu. Tu restais persuadé que tu ferais un bon Hawkeye, et s'il fallait apprendre à tirer des flèches... Question qui vient titiller les lèvres roses de la russe, tu clignes des yeux un peu perplexe. Une chanson ? Marche continue, tu réfléchis, les yeux haussés vers les étoiles. Une ou plusieurs chansons, tes oreilles n'avaient pas prit le temps d'écouter les classiques depuis un moment, musique reléguée au second plan, peut-être même au troisième, de ta vie. « C'est toujours aussi difficile. » Tu réponds d'abord en riant avant d'humecter tes lèvres par un coup de langue succinct. « Les grands classiques chez moi, c'était The Clash, Oasis et Radiohead. Alors je dirais Wonderwall, ou Karma Police. Ça me rappelle mon enfance et la radio de la voiture avec mon père. » Nostalgie joyeuse de cette époque où rien n'atteignait le gamin que t'étais, monde rose d'une vie innocente. « Sinon j'me suis engagé à peu près à la sortie d'un album d'Eminem, et c'était l'époque de Rap God et Bad Guy. Ça a bercé mes débuts. » Tu hausse les épaules, nouveaux souvenirs de vos soirées dans le dortoir à écouter la radio lorsqu'ils passaient le dieu du rap américain. Suspendus à la fréquence vous attendiez impatiemment que les chansons passent, populaires à l'époque. Aujourd'hui, elles étaient démodées. T'étais même pas sûr que les jeunes les connaissaient, disparues des ondes. « Désolé de pas pouvoir t'en donner une seule, j't'avoue que ça fait un moment que j'ai pas écouté de la musique par envie. Et en soirées, c'est pas ce à quoi je fais attention. Mais toi, tu dois bien en avoir une ou deux à me faire découvrir ? » Mine navrée sur le bout des lèvres qui s'achève sur un sourire narquois, vous arrivez enfin devant la maison hantée qui n'avait pas de file d'attente, entrée libre des visiteurs après avoir achetés les tickets d'entrée. Labyrinthe effrayant, musique sinistre qui sortait des hauts parleurs, l'ambiance festive et bigarrée de la fête foraine avait véritablement disparue, surpassée par l'épouvante recherchée. Tes yeux scrutent les façades, elles semblaient avoir bien changées depuis la dernière fois que tu avais visité l'antre hantée. Finalement, peut-être que tu serais surpris, toi aussi. Pas au point d'hurler de peur; habitué aux blagues de mauvais goût à l'armée, et à une peur bien différente, ce n'était pas un visage tuméfié qui apparaissait dans la lumière qui te ferait défaillir. C'était quand même une attraction que tu affectionnais, envieux de découvrir ce qui faisait hurler les enfants que vous entendiez dans le bâtiment. « C'est bon, t'as ton éléphant pour te protéger, t'es prête à entrer ? » Tu demandes rieur après un coup d'oeil à l'éléphant gris bien entouré par les bras de la russe. C'est qu'il avait droit à plus d'attention que toi; peut-être finalement que tu feras mine d'être effrayé par une poupée de cire, pour le simple plaisir d'être pris dans les bras réconfortants de la jeune femme.