maybe i need some advice (iggy)

Depuis presque une semaine maintenant, j’ai l’impression d’enchaîner les soirées à l’extérieur et celles où je ne vais pas bien. Peut-être qu’elles se ressemblent toutes finalement, mais avec quelques grammes d’alcool dans le sang, ça saute moins aux yeux. Même si je refuse de le reconnaître, il y a un élément déclencheur à tout cela : Sofia. Mes crises sont revenues avant que notre séparation soit officielle – ce qui n’aide en rien à faire un rapprochement –, mais les choses étaient tendues entre nous et j’avais l’impression d’être laissée de côté. Ça, combiné au fait que je voulais être parfaite pour elle, ça a joué sur la pression que je pouvais m’imposer et au bout d’un moment, j’ai fini par imploser. Personne ne m’a jamais mise dans un tel état, alors c’est d’autant plus perturbant. Je sais que je dois relever la tête, je me dis ça chaque matin, mais chaque soir, je rentre dépitée et je me venge sur la nourriture. Nourriture que je ressors, quelques heures plus tard, comme c’est le cas aujourd’hui. Il est deux heures du matin, je n’ai pas encore réussi à dormir et ce tour aux toilettes n’arrange rien à la situation. Je me tourne dans un sens, puis dans l'autre. Je me cache sous les draps, puis lance une vidéo dans l'espoir d'être bercée par la voix de la personne. Mais rien, les minutes défilent et je ne trouve pas le sommeil. Quitte à rester éveillée, autant m'en servir pour faire quelque chose. Je sors de mon lit, enfile un sweat et descends les escaliers le plus calmement possible pour ne pas faire de bruit au cas où Iggy aurait laissé sa porte ouverte. Arrivée en bas, j'allume la cuisine – l'une des pièces les plus éloignées du hall. Ça n'a pas toujours été cordiale entre nous, mais ce n'est pas pour autant que je souhaite lui gâcher sa nuit. J'ouvre différent placard et regarde ce que je pourrais bien me mettre sous la dent. Je fais le choix de prendre un jus de fruits, avec ça, je ne devrais pas refaire de crise et je vais réussir à me remplir un peu l'estomac. Après plusieurs minutes seule, je ne peux m'empêcher de sursauter en voyant une silhouette arriver face à moi. Il ne me faut que très peu de temps après ça pour comprendre qu'il s'agit de ma mère. « Je t'ai réveillée ? Je suis désolée. » Même si j'ai essayé d'être discrète, je ne l'ai visiblement pas été assez. « J'avais un peu de mal à dormir. Je me suis dit qu'il était mieux que je descende, plutôt que de me tourner encore et encore dans mon lit. » Je n'ai pas à me justifier, c'est tout autant chez elle que chez moi ici. Pourtant, je le fais quand même.

À bouger dans mon lit, descendre semble la seule option qui s’offre à moi. Si je n’agis pas, je pourrais dire au revoir à l’espoir d’une fin de nuit paisible. Bouger un peu me permettra sûrement de penser à autre chose, de revenir ici dans de meilleures conditions. Une fois arrivée en bas, je me dirige directement vers la cuisine pour y récupérer un jus de fruits. À ma grande surprise, je suis rapidement rejointe par Iggy. Je m’inquiète de l’avoir réveillée, mais celle-ci me rassure. De nous deux, c’était elle qui était réveillée en première et intérieurement, je la félicite d’avoir été silencieuse : jusqu’ici, je ne l’avais pas entendue. Ma boisson entre les mains, je laisse ma mère aller remplir sa tasse à la cafetière. De la caféine avant de dormir ? Je ne suis pas certaine que ce soit la meilleure des idées, mais je me garde bien de lui donner un quelconque conseil. Après ça, Iggy tente une approche et me questionne sur mon état. « Super. C’est la grande forme. » Il y a une pointe d’ironie dans mes propos et je ne m’en cache pas. Même si Iggy n’a pas été présente pour moi durant les dix-sept premières années de ma vie, elle a suffisamment appris à me connaître depuis que nous vivons sous le même toit pour le comprendre. D'ailleurs, j'ai bien conscience que sa question n'est pas arrivée par hasard : elle se doute de quelque chose. Seulement, je me demande à quel point. Est-ce qu'elle a vu que j'étais un peu moins là émotionnellement, mais plus présente à la villa ? Est-ce qu'elle a compris que j'étais retombée dans mes travers ? Sur ce sujet, je n'ai jamais été très loquace, que ce soit avec elle ou mes autres proches – mes amis les plus proches ne sont toujours pas au courant d'ailleurs. Ils ont toujours fini par s'en rendre compte seuls quelques jours ou semaines après le début de mes crises, ou alors par demander, de manière assez insistante. Pour mon bien, disaient-ils. Ce qu'ils n'ont jamais compris, c'est que ces crises me faisaient du bien. Du bien avant de me détruire. Comme aujourd'hui, mais c'est le but. Souffrir un court moment pour oublier le poids du reste. Je pourrais m'en tenir à ça pour cette conversation avec Iggy et pourtant, je tente quelque chose. « Tu es déjà tombée amoureuse ? » Sur beaucoup de points, nous ne nous ressemblons pas. Là encore, je crains de faire fausse route : elle a toujours été seule, ce n'est sûrement pas pour rien. Mais hormis avec elle, je ne vois personne d'autre avec qui en parler.

Je ne m’attendais pas à tomber sur ma mère au plein milieu de la nuit, mais maintenant que nous sommes là, toutes les deux bien réveillées, c’est peut-être l’occasion d’échanger un peu. Qui sait, avec la lune à la place du soleil, peut-être que les choses seront plus simples entre nous. Sans réelle surprise, ma question prend de court ma mère : juste avant ça, j’ai été expéditive sur le sujet qui me concernait et on ne peut pas vraiment dire que nous avons déjà essayé de parler de l’amour ou des sentiments en général ensemble. Mais il faut une première à tout, n’est-ce pas ? Alors qu’elle pourrait laisser ma question sans réponse et simplement passer à autre chose, ma mère décide d’être honnête avec moi. Elle a déjà rencontré quelqu’un qui lui a fait battre le cœur de la sorte, une seule fois dans a vie, Iggy a ressenti quelque chose qui se rapprochait de l’amour, mais elle ne l’a jamais formulé de la sorte. C’est touchant et triste à la fois. Si elle ne l’a jamais dit à haute voix, alors peut-être que cette personne ignore encore l’impact qu’elle a eu dans la vie de la brune. Ce récit terminé, elle ne peut s’empêcher d’ajouter que ces sentiments n’étaient pas pour mon père. Autant dire que ça, je le savais déjà. Sinon je suppose que nous aurions tous les trois vécus heureux, dans une belle et grande maison. Un peu comme ici finalement, sauf qu’il n’y aurait pas eu de séparation à ma naissance et il y aurait un homme ici. Contrairement à ce qu’elle vient de dire, je me retrouve à mon tour prise de court par ce qui arrive. Pourtant, j’aurais dû anticiper une telle question : il ne faut pas s’appeler Einstein pour faire le rapprochement entre mes sentiments, ainsi que l’état dans lequel je suis actuellement, et la brune qui est venue passer Noël avec nous. « Il n’y a plus de Sofia et moi. » Je dis cela froidement, comme si je m’en fichais. Mais de le dire à haute voix, ça blesse tout autant que le jour où c’est arrivé chez elle. « C’est sûrement mieux comme ça. » Elle n’avait pas de temps pour moi, alors autant que les choses se soient arrêtées vite. Je n’ai pas eu le temps de m’attacher, de m’ouvrir pleinement à elle et de me confier sur des choses que beaucoup de personnes ignorent. « C’était le gars de Noël ? Celui qui a été si particulier pour toi. » Être le centre de l’attention, ça peut être bien, mais ce n’est pas forcément ce que je veux dans les minutes à venir. Parler de Sofia, je ne sais pas si c’est une bonne idée. Je n’ai jamais été sentimentale avec ma mère, ça serait quand même dommage que je lui tombe en larmes dans les bras ce soir.

Pourquoi est-ce que je me livre ainsi à Iggy ? Je ne sais pas vraiment. Peut-être que pour une fois, j’ai besoin de me livrer à quelqu’un. Bien sûr, je pourrais aborder ce sujet lors d’une séance avec ma psychologue, mais ça n’aurait pas la même saveur. Et pour une fois que j’accepte de parler à cœur ouvert avec ma mère, il faut en profiter. Même si nous ne sommes pas proches, les choses ont tendance à s’améliorer et je suis sûre qu’elle peut être de bons conseils. Après tout, elle a plus de vécu que moi. Je lui avoue que c’est terminé entre Sofia et moi et sa première réaction me laisse un peu perplexe. Est-ce que c’est quelque chose qu’elle avait vu venir ? Avant même que je n’ai le temps de répondre à cela, elle enchaîne, me demandait si c’est cette séparation qui me met dans un tel état. Oui ? Je ne trouve pas cela si surprenant, contrairement à elle. Mais c’est peut-être lié à son "déjà". « Je tenais à elle. » De là à dire que j’étais amoureuse d’elle, je ne sais pas. Je n’ai jamais éprouvé de tels sentiments pour quelqu’un, alors j’ignore à partir de quel moment on considère cela comme de l’amour. « Je ne sais pas. Elle était différente, c’était facile entre nous. » Et j’étais bien. « Mais ça n’était visiblement pas réciproque, sinon elle n’aurait pas préféré son boulot à notre relation. » Je hausse légèrement les épaules. Plus je donnerais l’impression d’être détachée, plus je le serais, non ? Ce n’est pas comme cela que ça fonctionne ? Car si je suis novice en sentiments, je le suis aussi en déception amoureuse. Curieuse de son passé, j’interroge Iggy sur ses précédentes histoires d’amour – même si je ne les connais pas, je suppose qu’elles ont existé. Elle me révèle avoir été amoureuse une fois, mais pas de mon père, ce qui n’est pas vraiment surprenant. Avec la visite surprise que nous avons eu pour Noël, je m’avance un peu et demande si c’est cet homme qui a fait chavirer son cœur. Même sans connaître ce qu’il s’était passé entre eux, ça se voyait qu’il était spécial pour elle. Bingo. Mais ce n’est pas la seule chose que j’apprends. En effet, elle continue dans ses révélations et m’apprend avoir été mariée. « Tu as été mariée ? » Je pense qu’il est facile de voir que je ne m’attendais pas à une telle chose. Iggy la solitaire, Iggy la femme seule contre tous ne l’est peut-être pas tant que ça finalement. Cette information assimilée, je ne peux pas m’arrêter à ça. Je vis avec ma mère depuis plus de quatre ans maintenant et pourtant, plus les jours passent et plus je me rends compte que je ne la connais pas vraiment. Ce soir est peut-être l’occasion de remédier à tout cela. « Pendant combien de temps ? »

Qui aurait pu croire qu’une discussion nocturne aurait lieu entre nous et qu’elle aurait comme sujet l’amour ? Sûrement personne. Car même en plein jour, Iggy n’aurait pas été celle vers qui je me serais tournée. En réalité, depuis la mort de ma grand-mère, je n’ai jamais vraiment cherché à obtenir de conseils de qui que ce soit. À l’époque, c’était elle qui donnait les meilleurs. Même si à plusieurs reprises, elle s’est sentie dépassée avec tout ce qui pouvait m’arriver. « Je n’avais pas vraiment la tête à parler après ça. Son boulot est prenant et il est difficile pour elle de libérer du temps pour moi. » J’aurais dû le voir venir. La jeune femme espère devenir chirurgienne, comme sa mère, et je suis sûre que même pour les plus incultes, un tel boulot est synonyme d’emploi-du-temps chargé. Ça doit pourtant exister ceux qui ont une vie de famille, enfin je suppose. Il est vrai que pour Sofia, son père est parti quand sa mère a préféré mettre sa carrière en avant. Peut-être que ça n’existe pas finalement, que toute relation est vouée à l’échec dans un tel environnement. Peu importe, ça n'a plus de réelle importance maintenant. Il est peut-être même mieux que l'on passe à un autre sujet et pour ça, rien de mieux que la relation d'Iggy, celle qui a compté pour elle. Sans réelle surprise, j'apprends qu'il s'agit de l'homme qui est venu à Noël, Asher. Par contre, je tombe un peu des nues quand elle évoque avoir été mariée. Est-ce surprenant que quelqu'un puisse l'apprécié au point d'accepter de vieillir à ses côtés ? Non. Enfin peut-être. Ce qui l'est, c'est de savoir que ma mère a eu quelqu'un dans sa vie et de manière sérieuse. Venant de quelqu'un qui disait il y a quelques semaines que c'était toujours mieux d'être seule que mal accompagnée, ça sonne un peu bizarre. « Waouh. C'est pas mal. » Six ans. À bien y réfléchir, ce n'est sûrement pas fou. Il y en a qui vivent ensemble dix fois plus longtemps. Mais disons qu'à l'échelle de notre foyer, c'est énorme. « Pourquoi est-ce que ça s'est terminé entre vous ? » Dis-je, tout en fronçant légèrement les sourcils. « Vous semblez toujours proches. Enfin, je suppose. Rares sont les anciens maris qui débarquent le jour de Noël. » Après plusieurs années de divorce – si mes calculs sont bons et qu'on ne m'a rien caché depuis mon arrivée, si un homme qui vient à l'improviste, les mains pleines, c'est qu'il tient encore à la personne qui a partagé sa vie.

Est-ce que j’ai capitulé trop vite pour mon histoire avec Sofia ? Peut-être. Mais je ne veux pas être seule à me donner dans une relation. En réalité, avant la jeune femme, je ne pensais même pas vouloir me lancer dans quelque chose comme ça. C’est sûrement pour cela que ça blesse autant : je m’ouvre enfin à quelqu’un et voilà que je me retrouve déçue. D’après ma mère, si Sofia et moi tenons l’une à l’autre, alors les choses devraient s’arranger. Enfin.. si et seulement si, nous y mettons toutes les deux du notre. Iggy a plus de vécu que moi, je devrais peut-être l’écouter. Surtout qu’avec ce qu’elle rajoute, je comprends que nous avons un point commun. Pas le plus heureux c’est vrai, mais il a le mérite d’être là. Les Rayne – demi Rayne pour moi, les filles délaissées de mère en fille. Maintenant que j’ai connaissance de cette histoire, d’une partie du passé de ma mère, je ne peux m’empêcher de vouloir en savoir plus. « Il te manquait ? » Je ne sais pas pourquoi, mais imaginer ma mère "addict" à quelqu’un, ça me fait bizarre. Après plus de quatre ans passés sous le même toit, il est peut-être temps que je supprime l'image négative et solitaire que j'ai d'elle – même si elle ne dit jamais non à un peu de temps seule. « Est-ce que c'est encore le cas aujourd'hui ? Peut-être qu'il a un peu plus de temps maintenant. » Les temps changent, les occupations aussi. Il est venu le jour de Noêl, alors qu'il n'était pas invité et même si ce n'est pas grand-chose, ça veut dire beaucoup selon moi. Ce n'est pas un jour comme les autres – ce n'est pas censé l'être pour toute personne normale – et il a fait le choix de venir jusqu'ici, un cadeau en sa possession. J'ai beau pensé cela, à bien y réfléchir, cela ne me regarde pas. Si Iggy essayait de s'immiscer dans ma vie privée et plus précisément dans mes relations amoureuses, je crois que ça ne me plairait pas. Fais ce que je dis, pas ce que je fais. Je pourrais partir sur ce dicton, mais à la place de ça, je préfère l'interroger de nouveau sur son histoire. « Tu as attendu longtemps avant de demander le divorce ? Enfin.. je suppose qu'il n'a pas été absent du jour au lendemain. » Même si ça ne ressemble en rien à Sofia et moi, je me dis que peut-être, je peux me servir de certains points de mon histoire. Si j'ai sur-réagit, alors peut-être que certaines choses de son discours pourront m'être utiles.

Il faut croire que finalement, la vie de ma mère m’intéresse un minimum, car maintenant que je sais qu’elle a été mariée, j’enchaîne les questions. Ou alors, peut-être que je fais cela seulement dans le but de m’en servir pour plus tard, pour utiliser cette information contre elle ou contre quelqu’un d’autre – même si j’ai un doute sur l’effet que cela pourrait avoir. Elle commence par me dire qu’Asher ne lui manquait pas, que c’est venu un peu plus tard. Pour le coup, ce point-là diffère de mon histoire avec Sofia, puisque actuellement, la brune me manque. Un détail qui j’espère finira par passer avec le temps. Quand j’évoque que son ancien mari – qu’est-ce que c’est bizarre à dire – a sûrement plus de temps aujourd’hui, pour Iggy, pour leur couple. La principale concernée approuve, mais elle ne sait pas exactement si c’est ce qu’elle veut pour eux maintenant. Loin de moi l’envie de donner des conseils à ma mère, je suis bien trop novice pour ça et je ne voudrais surtout pas m’immiscer à ce point dans sa vie, mais si c’est ce qu’elle pense vraiment, alors elle devrait suivre son coeur. Avec ce qu’elle me dit, j’apprends que les choses s’étaient ternis entre les amoureux, avant qu’Iggy demande le divorce. Asher aimait son boulot et comme elle le souligne, c'était toujours mieux que de devoir se lever et d'aller au boulot en espérant que la journée se termine au plus vite. Comme a pu le dire ma mère, nous avons ce point commun : l'invité surprise de Noël et mon ancienne petite amie mettent leurs métiers au premier plan. Il s'agit de deux boulots prenants et passionnants, alors qui sommes-nous pour leur reprocher cela ? « Tu ne lui en as jamais voulu de préférer son boulot à votre mariage ? » Un mariage, ce n'est pas rien quand même. C'est bien loin de la relation que j'avais à Sofia et déjà, je ne peux m'empêcher de lui en vouloir de m'avoir mise au second plan, en quelque sorte. « Tu aurais aimé que les choses continuent avec lui ? S'il n'y avait pas eu tout ça. » S'il n'y avait pas eu ce boulot bien sûr, ou plutôt cette priorité mise sur quelque chose d'autre qu'elle. Et est-ce qu'elle aurait fait les choses différemment si elle avait su que l'homme lui reviendrait un jour ? Finalement, tout ça, ça ne la rend que plus humaine à mes yeux. Ou alors, peut-être que j'ai de l'affection pour elle, malgré ce que j'essaye de faire croire depuis presque cinq ans maintenant. Il était plus facile de la détester que de comprendre ce qu'elle avait pu faire.

D’un point de vue extérieur, cette scène est sûrement étrange : en journée, c’est à peine si nous nous croisons, et là, en plein milieu de la nuit, voilà que nous nous lançons dans une longue conversation. Pour quelque chose de sérieux en plus. Comme quoi, tout peut arriver. Alors que je commence à jouer avec la brique de jus de fruits qui se trouve entre mes doigts, j’interroge Iggy sur son ancienne relation. Sans retenue, elle prend le temps de répondre. Si elle lui en a voulu ? Oui et ce n’est pas vraiment surprenant vu ce qu’elle m’a déjà dit. Et puis, c’était un peu un mal pour un bien : à lui en vouloir, elle n’a pas ressenti la sensation de manque. Au début au moins. Mais je suppose qu’après, avec le temps, elle avait moins envie de le voir revenir. Elle avait réappris à vivre sans lui et ça lui allait comme ça. D’ailleurs, en parlant de moments solitaires, est-ce à cause de lui qu’elle apprécie autant être seule ? Est-ce que maintenant, elle ne donne plus autant d’énergie aux autres, de peur d’être déçue ? Je pense et finalement, cela la rend un peu plus humaine. Au début, je pensais qu’elle n’aimait juste pas être avec d’autres personnes. À mon autre question, la brune répond qu’elle aurait aimé que l’homme s’implique un peu plus dans leur relation, à l’époque, cela aurait sûrement permis à leur histoire qu’elle dure plus longtemps. Combien de temps exactement ? C’est difficile à dire. En réalité, seul l’avenir aurait pu le faire. Maintenant, il ne s’agit que de "peut-être". « À quel moment la colère s’est-elle transformée ? » En repassant la scène de Noël dans mon esprit, ils ne semblaient pas en colère, que ce soit l’un ou l’autre, alors je suppose qu’un jour, ils ont tiré un trait sur ce qui s’était passé entre eux pour redevenir amis – ou quelque chose comme ça. « Est-ce que c’est toi qui a fait le premier pas pour apaiser un peu les choses ? » Les questions commencent sérieusement à s’enchaîner, mais c’est plus fort que moi. Sans vraiment le vouloir, je me nourris de son expérience pour savoir ce que je dois faire ou non avec Sofia. Notre relation n’est pas similaire à celle de ma mère et de ce Asher, nous n’en sommes pas là encore – si un jour nous y sommes – mais qui sait, ça peut toujours servir. Que ce soit avec la résidente ou quelqu’un d’autre d’ailleurs. Malgré tout, si Iggy me dit que c’est elle qui l’a fait, est-ce que je devrais en faire autant avec Sofia ? Je ne sais pas. Je pense lui avoir montré que je tenais à elle, c’est maintenant à elle de faire un bout du chemin.