somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

Un sentiment confus se bousculait au plus profond d'elle, un sentiment qui attisait cette inquiétude en elle et l'obligeait en même temps à la repousser. Lane et elle avaient prévu de se voir cette semaine, pourtant Maxyne n'avait plus de nouvelles. Pas de réponse non plus au message qu'elle avait envoyé deux jours plus tôt pour en prendre. Loin d'être envahissante, elle respectait son espace et n'attendait pas de lui qu'il réagisse dans l'heure, mais après des mois à le fréquenter à nouveau, la nageuse savait que ce silence radio n'était pas « normal ». Lane était sensible, il avait un souci particulier des autres. Le ghosting, sans le moindre mot d'explication, elle n'y croyait pas. Il se passait quelque chose. Perdue entre son coeur et sa raison, Maxyne glissa sous le jet d'eau chaude de la douche pour lâcher prise sur ses pensées. L'inquiétude finirait bien par s'estomper... ou peut-être pas. Après tout, il lui serait facile de vérifier son intuition. Les yeux clos, la monitrice de plongée inspira profondément. Son coeur battait à coups redoublés dans sa cage thoracique ; ce n'était jamais agréable quand le subconscient prenait le pas sur la volonté. Après un moment, elle sortit de la salle de bains. La matinée était déjà bien avancée et, comme elle ne travaillait pas aujourd'hui, elle disposait du temps nécessaire pour calmer ses interrogations. Enfilant son sweat à capuche affublé des mots « centre nautique » sur le dos, Maxyne prit ensuite ses clés et son téléphone puis elle quitta l'appartement. Par acquit de conscience, elle passa d'abord devant l'appartement de Lane qui vivait tout près et frappa à la porte. Personne, comme elle s'en doutait. A l'extérieur, la météo était grise et maussade, à l'instar de l'humeur du jour. Les nuances cendrées qui s'invitaient dans le ciel n'auguraient rien de bon, pourtant la jeune femme poussa son expédition jusqu'à la plage. L'ancienne nageuse connaissait certains de ses endroits préférés. En effet, à force de traîner ensemble, ils s'étaient tous les deux confiés des choses. Par exemple, pour se vider la tête, Lane appréciait se promener souvent dans le coin ou dans la forêt en bordure de la ville, une information qu'elle avait retenue. D'ailleurs, il lui avait montré un lieu en particulier où il se réfugiait afin de s'évader de l'atmosphère du centre. Maxyne longea la plage un moment puis renonça à s'aventurer plus loin. L'avantage de cette météo mitigée était que peu d'habitants avaient eu l'idée de venir traîner sur la plage, alors elle se rendit compte très vite et à distance qu'il n'était pas dans les alentours. Emmitouflée dans son pull pour se protéger du vent, la jeune femme quitta les lieux et marcha jusqu'en lisière de forêt. Il fallait vraiment une inquiétude grandissante pour aller se perdre en randonnée improvisée, mais elle avait besoin d'en avoir le coeur net, portée par ce « nous » qu'ils avaient créé malgré eux, trébuchant sur les doutes du passé. Secouant la tête avec force, elle refusa de se laisser à nouveau inonder par ses pensées. Et puis, un peu de marche ne faisait pas de tort à moins d'une mauvaise chute. Suivant le tracé qui menait jusqu'au point de vue en haut de la forêt, Maxyne marcha d'un bon pas, habituée à l'effort physique, elle gravit rapidement le sentier et accéléra un peu alors que les nuages au-dessus d'elle se montraient plus menaçants. Dans quoi son inquiétude l'avait-elle embarquée ? Enfin, elle arriva au fameux lieu dit dont la vue donnait d'une part sur la ville, d'autre part sur l'eau à perte de vue. Soudain, la jeune femme se stoppa net. Elle aperçut Lane sur une partie plus avancée du promontoire, perdu dans ses pensées. Discrètement, elle partit s'asseoir sur un banc non loin, mis à disposition par la ville pour les marcheurs voulant s'attarder ici. Ne voulant pas le perturber, la blonde replia ses jambes sous elle et l'observa en silence, attendant un peu qu'il remarque sa présence. Par chance, personne d'autre ne s'était éternisé dans le coin, offrant aux deux amants un moment pour se retrouver. « Ce n'est que moi. Pas la peine de sursauter, je venais juste prendre l'air. » A d'autres. Il ne mettrait pas longtemps à comprendre ce qui l'avait amenée ici, elle qui ne s'aventurait pas tellement dans cette forêt, et ce que par extension, cette venue signifiait, mais le second degré était un des refuges de Maxyne alors que celui du brun était ce point de vue. « Dommage. La vue n'est pas terrible aujourd'hui. » Parler météo n'était pas le plan, cependant c'était toujours mieux que de mettre directement les pieds dans le plat. Même ainsi, les cheveux en bataille, le visage stupéfié, Lane demeurait spécial à ses yeux. Le regard de Maxyne fut attiré comme un aimant dans celui de l'animateur radio, comme un appel qu'elle lui lançait pour avoir enfin des réponses à ses questions muettes.

 

somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

Si Lane avait l'air confus et décontenancé de retrouver Maxyne au point de vue, il se reprit rapidement comme un chat retombait sur ses pattes, la gratifiant d'un compliment accompagné d'un sourire en dépit de la situation de ces derniers jours. Cette phrase aurait pu signifier une diversion mais dans sa bouche à lui, elle savait que les mots étaient sincères. Il parlait souvent avec le coeur, bien plus ouvert qu'elle – en général – par rapport à ce qu'il ressentait, il ne se cachait pas et la désarmait régulièrement par son imperturbale honnêté. D'ailleurs, la nageuse baissa les yeux et esquissa un sourire gêné, elle n'avait jamais su comment recevoir un compliment. « Ça veut dire que je dois mettre plus souvent ce vieux sweat sur le dos ? Zut alors. » Encore cette façon détournée de répondre, il avait l'habitude. En un sens, il l'avait rassurée. Pas qu'elle doutait de lui plaire, mais ce silence radio l'avait amenée à se demander si son éloignement était lié à leur relation. Prenait-il ses distances par rapport à elle ? Elle n'avait pas envie de se prendre la tête avec une foule de questions. Depuis qu'ils s'étaient accordés une deuxième chance, les choses étaient restées simples entre eux, même si leur complicité continuait de grandir de jour en jour. Ce n'était que récemment que la situation avait changé, raison pour laquelle Maxyne s'inquiétait. Le changement ne l'effrayait pas outre-mesure, simplement elle aimait comprendre le pourquoi du comment. Et donc ce sourire qu'il lui avait adressé dissipait au moins un doute : ça avait l'air d'aller entre eux, du moins elle l'espérait. Par contre, la forme d'excuse qu'il lui formula ensuite l'interpella. Il ne sentait pas très bien et redoutait qu'elle lui en veuille de ne pas avoir donné signe de vie. « T'en vouloir ? » Répéta-t-elle, clairement étonnée. Une grimace d'incompréhension s'invita sur son visage tandis qu'elle sentait le vent soulever ses cheveux. Les mots de la nageuse ne semblèrent pas entendre écho de son côté, puisque le regard du brun la fuyait. Les yeux de la blonde, eux, ne se détachèrent pas une seconde de lui, remarquant que la lumière brumeuse mettait encore plus en évidence tout ce qui l'attirait chez lui. Le silence se prolongea une fraction de secondes, uniquement troublé par les battements de son coeur qui s'emballait contre ses côtes. Maxyne aurait pu rester longtemps ainsi, à le contempler, mais elle aussi devait rentrer dans le vif du sujet alors qu'il lui avait tendu la première perche. « Hey... Je ne suis pas venue te lancer des reproches au visage ou quoi que ce soit du genre. » La jeune femme se leva. Elle sentait qu'il n'allait pas bien, certes il lui avait dit mais chacun de ses sens le lui hurlait aussi. A l'instar des dauphins équipés de l'écholocation, ces ondes sonores qui leur donnaient des informations sur leur environnement, la nageuse, elle, avait un radar accentué envers les personnes auxquelles elle était attachée. « J'avais juste envie de te voir. » Façon de lui avouer qu'il lui avait manqué, que son coeur le réclamait, bien qu'elle ne l'avouerait pas tel quel maintenant, par peur de les précipiter vers un gouffre dans lequel ils n'étaient pas encore prêts à sauter. « Et de comprendre ce qui se passait. Je croyais qu'il t'était arrivé quelque chose. » Formulé ainsi, ça pouvait paraître idiot de s'inquiéter pour seulement quelques jours mais cette fois, au moins, elle avait posé les mots sans détour. Les mains douces et refroidies par la température extérieure de la nageuse se posèrent sur les siennes, effleurement délicat qui rétablissait le contact physique entre eux. Les iris azurées de la blonde cherchèrent à nouveau à capter ses prunelles qui recelaient de tant de mystères. Si aucun souci ne s'était présenté entre eux, comme elle tentait de s'en persuader, avait-il alors eu un problème au boulot ? Avec sa famille ? Un rhume ? Autre chose ? Tous les scénarios défilaient dans la tête de Max. L'inquiétude avait définitivement pris le dessus, la poussant d'instinct à lui poser la question, comme un sparadrap trop collant qu'on retire d'un coup sec. « Tu as dit que tu n'étais pas dans ton assiette... Tu veux en parler ? Qu'y a-t-il ? »
 

somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

« Les soirées pyjama, c'est la vie. » Maxyne détourna légèrement la phrase de Lane pour renchérir, elle qui n'hésitait pas à participer à de tels rassemblements entre amis ou même au sein de sa famille. La plupart des gens de son entourage ne se prenait pas la tête et une des raisons pour lesquelles la relation entre le brun et la blonde fonctionnait aussi trouvait son explication dans cette façon de voir la vie sans se prendre au sérieux. Lorsqu'il était entré dans sa vie, Maxyne n'aurait jamais cru que leur lien évoluerait de la sorte. Tout ce qu'elle voyait au début, c'était les innombrables barrières qui les séparaient : leur différence d'âge, ses peurs à elle, ses doutes à lui aussi. La première fois, elle n'avait pas donné de vraie chance à leur histoire, du moins en refusant de l'exposer au grand jour comme un secret précieusement gardé, en s'éloignant de l'amour que lui avait offert le jeune homme. Pourtant, Lane l'avait surprise et chamboulée, par son attachement et son engagement envers elle. Aujourd'hui, la situation avait encore avancé. D'un simple regard, il lui retournait la tête. Prudent, il lui avait tout de même ouvert les portes de sa vie et celle de son coeur. Sans détour. Et si cette petite randonnée improvisée de Maxyne démontrait une évidence, c'était qu'elle aussi avait perdu le contrôle de ses émotions. L'inquiétude de la blonde avait mené ses pas jusqu'à lui, soulignant à quel point son organe battant était devenu suffisamment vulnérable pour s'exposer. Il lui avait manqué, c'était indéniable, elle avait de plus en plus envie de sentir sa présence à ses côtés, de se réveiller dans ses bras, de l'embrasser, d'abandonner son coeur aux sentiments qui se tapissaient dans un recoin et qui attendaient la moindre craquelure pour s'engouffrer. L'humour de Lane aujourd'hui cachait pourtant la tornade d'émotions qui éclatait en lui. Un frisson parcourut l'échine de Maxyne, elle l'avait rarement vu aussi perdu. Dans l'incompréhension, elle tenta d'en savoir plus sur ce qui n'allait pas. Pour la première fois, le regard de l'animateur radio retrouva le sien plus d'une seconde. Il semblait en proie à un dilemme : son corps entier avait l'air de vouloir envoyer des signaux à la blonde, alors que son incertitude et ses angoisses le bloquèrent dans la foulée, écrasé par une peur profonde, enracinée. A cet instant, alors que le visage du jeune homme était marqué par le stress et la fatigue, elle se rendit compte à quel point il avait besoin de soutien. Bouleversé, il se ferma tandis que la façade se fissurait. La véritable raison échappait encore à Maxyne, pourtant son désarroi ne la rassurait pas, elle ne l'avait jamais vu ainsi. Touchée par l'émotion déchirante qui avait vibré en lui, elle serra un peu plus ses mains dans les siennes. L'angoisse de Lane se transforma en peine, nervosité à évacuer, nécessité de briser cette barrière pour redescendre la pression d'un cran. « Ça tombe bien, c'est ma spécialité, la nage. » Il pourrait s'appuyer sur elle, quand il serait prêt. « Une décision ? Par rapport à quoi ? Je n'ai aucune idée de ce qui t'arrive mais je suis là, au besoin. » En dépit de son interrogation grandissante, qu'elle tentait de cacher pour ne pas en rajouter, la trentenaire avait bien compris qu'il ne lui en parlerait pas maintenant pour des raisons qui lui étaient propres, alors elle respecterait sa demande, pour l'instant. Elle essayait de se convaincre que l'incertitude de Lane n'avait aucun rapport avec leur relation mais, si elle avait réellement appris ce qui lui rongeait les sangs, elle aurait sans doute préféré que sa santé à lui ne soit pas impliquée sur l'échiquier. La perle salée qui roula sur sa joue serra le coeur de l'ancienne nageuse. « Si ça a besoin de sortir, ne te sens pas obligé de les retenir. » Alors qu'il esquissa un sourire qui sonnait faux, formulant le souhait de se changer les idées et de court-circuiter ses pensées, Maxyne rompit leur contact visuel, tout en venant se blottir contre lui pour le serrer contre elle, étreinte affectueuse destinée à calmer ses angoisses. « Ça, je peux peut-être t'y aider. » Souffla-t-elle, le visage enfoui contre lui. Alors que le ciel avait tenu bon jusqu'à présent, il gronda bruyamment. La pluie s'invita soudainement à la 'fête'. Une première goutte tomba, rapidement suivie d'une autre, puis d'une bruine. Un torrent se déverserait bientôt sur eux s'ils ne décampaient pas rapidement. « Viens, ne restons pas ici. » La main de Max glissa dans la sienne et elle l’entraîna à sa suite, se mettant à courir pour redescendre le sentier. Non loin de la forêt, revenus près du centre, ils s'abritèrent dans une sorte de salon de thé, déjà à moitiés trempés par le déluge qui s'était abattu. Le chauffage qui se diffusait dans les lieux serait bienvenu pour se réchauffer. A l'intérieur, Maxyne se dirigea vers le comptoir puisqu'il fallait commander avant de s'asseoir, elle opta pour un chocolat chaud et laissa Lane choisir ce qu'il voulait. Boisson en main, la jeune femme indiqua une table dans le fond, et s'installa sur la banquette, assise juste à côté de lui. « Quelle idée de sortir par un temps pareil, vraiment. » Le sourire aux lèvres face à la situation incongrue, elle chercha à se réchauffer les mains autour de sa boisson.
 

somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

« Je les préfère avec toi. » Répondit Maxyne, un brin coquine à l'évocation de la douche, se rappelant de doux moments partagés ensemble. Un petit rire joyeux s'échappa de ses lèvres, elle s'amusait à le taquiner en retour lorsqu'il lui tendait une perche aussi facile. Le bout de ses doigts caressa doucement la joue de son ange brun. Elle se voyait déjà essayer de lui effacer la trace de chocolat chaud qu'il avait au coin des lèvres avant de l'embrasser à lui couper le souffle mais elle n'en fit rien. Les sentiments qui s'agitaient en elle étaient puissants, pourtant l'inquiétude restait l'émotion dominante. Maxyne esquissa un nouveau sourire et coupa le va et vient de ses pensées, ne souhaitant pas que son air soucieux le fasse fuir. Et si Lane prenait à nouveau ses distances envers elle dans les jours à venir ? L'attachement de Maxyne avait pris de l'ampleur, elle s'en rendait bien compte. A croire qu'il lisait en elle comme dans un livre ouvert car l'animateur radio décida lui-même de revenir sur le sujet précédemment abordé, attrapant tendrement la main de la nageuse et inondant ses yeux marrons dans les siens. Pour commencer, il lui expliqua qu'il tenait à la rendre le plus heureuse possible et éviter de la blesser. Au détour d'une déclaration enflammée, il était tout simplement en train de lui ouvrir son coeur et de lui avouer combien elle était précieuse à ses yeux. Maxyne essaya de ne rien laisser paraître au début. Le coeur serré, battant à un rythme redoublé, elle priait pour que la boule d'émotion qui la saisissait disparaisse, mais elle savait bien que Lane venait de la toucher comme jamais. Amoureux comme le nez au milieu de la figure. Il était le plus jeune des deux et pourtant tellement plus mature et courageux qu'elle dans leur relation, et surtout pour exposer ce qu'il ressentait, ici dans le but de la rassurer. Chaque inflexion qui quittait ses lèvres était un pas de plus destiné à calmer ses craintes, si pas envers lui, au moins par rapport à eux. Ainsi, Maxyne apprit bel et bien qu'il cachait un secret, qu'elle était aussi la seule qui occupait ses pensées... ou plutôt qu'il aimait, les mots avaient leur signification et celui-ci était d'une importance telle qu'il lui renversait la tête, il venait d'effectuer le grand saut et lui demandait juste d'attendre qu'il soit prêt pour s'ouvrir à elle davantage. Bien sûr, la blonde n'était pas complètement rassérénée car Lane était quand même tourmenté pour une raison inconnue, toutefois cette raison ne les concernait pas directement. Perdue entre toutes les informations à assimiler d'un seul coup, Maxyne baissa les yeux et se donna un instant pour les encaisser. Le silence qui suivit les confidences du brun lui ferait peut-être penser, à tort, qu'elle avait pris peur et se renfermait alors que la monitrice de plongée prenait juste conscience de tout de ce que ses paroles impliquaient. Elle était extrêmement chanceuse de se trouver face à une personne aussi respectueuse, bienveillante et soucieuse des autres.

Avant même que le doute de Lane puisse s'installer durablement,  elle rapprocha son visage du sien et unit ses lèvres aux siennes dans un tendre baiser. La passion s'infiltra dans ses veines, tandis qu'elle prolongea l'échange, leurs souffles se mêlaient tout comme leurs sentiments s'entrecroisaient dans une mosaïque floue depuis des mois. Interruption de contact lorsque le besoin de prendre une inspiration se fit sentir, elle se détacha de lui. Les yeux marrons foncés et remplis d'émotion du jeune homme provoquèrent un nouveau sourire chez Maxyne. « Je sais ce que tu viens de faire. Comme je te l'ai dit, je serai là pour toi. Quand tu te sentiras prêt, si tu en as besoin aussi, peu importe. » La jeune femme prit une autre inspiration avant de poursuivre sur sa lancée. « Ne me laisse juste plus sans nouvelles, d'accord ? Sinon, je ne resterai pas en place et je pourrai bien retourner cette ville. » Elle avait encore le goût de ses lèvres sur les siennes, comme une sensation légère, une parenthèse merveilleuse. Elle ne cherchait plus à lutter contre le bonheur qui s'offrait à elle de l'avoir dans sa vie. Il habitait ses pensées et son coeur comme une moitié d'un tout le ferait. Le souvenir des paroles qu'il avait prononcées resurgit. Maxyne se remémorait le vide qu'elle avait ressenti ces derniers jours, lorsqu'il avait 'disparu'. Alors que la main de la jeune femme était toujours entrelacée à celle de Lane, son regard retrouva le sien, connexion entre eux, fil d'Ariane qui les reliait trop facilement sous couvert du peu de prudence qui continuait à subsister entre eux. Il était devenu une composante indissociable de sa vie, était-ce vraiment important qu'elle n'arrive pas à le lui avouer avec la même insouciance ? « J'espère que tu sais que même si je ne dis pas les choses facilement, je suis sur la même longueur d'ondes que toi. » Maxyne ramena ses mains contre sa boisson et but quelques gorgées de son chocolat chaud. Les douces retrouvailles avaient aidé à redescendre l'inquiétude d'un cran. N'ignorant pas que Lane ne souhaitait pas s'attarder sur le sujet, elle lui raconta une anecdote plus légère. « J'ai parlé de toi à Liam, l'autre jour. » Autrement dit, Maxyne avait franchi un cap. Comme le brun le savait, Liam était son meilleur ami depuis l'adolescence. Son mariage partait en cacahuète. Lily et lui avaient décidé de faire une pause. A la suite de cette séparation temporaire, il avait quitté le domicile pour s'éloigner un peu de sa femme et que chacun retrouve un espace. La nageuse lui avait alors proposé d'emménager chez elle le temps que la situation s'éclaircisse entre eux, une proposition qu'il avait acceptée. Dans un souci  de le rassurer aussi, Maxyne en avait brièvement parlé à Lane pour qu'il ne se fasse pas des idées. Au détour d'une soirée passée en compagnie de Liam qui s'était intéressé à sa vie amoureuse, la jeune femme lui avait finalement révélé la relation qu'elle entretenait avec le plus jeune des Wade et elle avait partagé son bonheur avec son meilleur ami.

 

somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

Livre ouvert pour Lane dans ses émotions, dans ses mots et jusque dans ses pensées, Maxyne n'avait pas besoin de tout lui dire. La déclaration du brun l'avait définitivement rassurée quant aux liens très forts qui les unissaient. Elle aussi se dévoilait de plus en plus, et ce qu'elle ne formulait pas à voix haute, se traduisait au travers de regards tendres et de gestes affectueux. Sentiments tus, secret de polichinelle, elle lui appartenait déjà corps et âme, se perdant dans ce regard marron. Le coeur de la nageuse manqua un battement. Maxyne n'avait pas beaucoup de regrets dans la vie, mais celui de l'avoir blessé lors de leur première histoire resterait l'un d'eux. Le ventre de la blonde se contracta, admirant silencieusement le brun, elle était hypnotisée par l'éclat qui brillait dans ses prunelles. Fou d'elle, au point de leur accorder une nouvelle chance au lieu de s'enfuir en courant, Lane s'était immiscé plus profondément dans son organe battant. Un éclat de rire s'échappa des lèvres de la blonde, lorsqu'il décrivit la une d'un article amusant si elle ratissait la ville pour le retrouver. Avait-il une idée à quel point il lui retournait la tête présentement ? Maxyne songea à la réponse de l'animateur radio. Dans le fond, que ne feraient-ils pas l'un pour l'autre ? Elle était incapable de lui refuser quoique ce soit, hormis peut-être jusqu'à présent les trois mots murmurés du bout des lèvres. La main de la jeune femme entrelaça la sienne, son sang bouillonnait dans ses veines. Chacune de ses cellules hurlaient à quel point elle tenait à lui. Dans cette relation, elle ne reculerait plus, elle continuerait d'avancer. Il le comprit lui aussi, une lueur d'espoir s'illuminant au fond de ses iris, il lui rendit le baiser précédemment initié pour laisser parler son coeur. Doux échange qui électrisa Maxyne. Dire qu'elle avait failli laisser passer la chance que leur relation reprenne, le coeur tiraillé entre l'envie qu'il la fuit, qu'il ne revienne jamais souffrir à ses côtés, et l'égoïste version d'elle qui s'était éprise de lui et qui ne voulait que lui. Alors que la vie l'avait amenée à recroiser sa route, elle s'était promis de ne plus le blesser  - dans la mesure du possible – et de le garder auprès d'elle. La jeune femme ne souhaitait pas louper ce second acte. Lane en était conscient tout comme il l'était des raisons qui avaient mis en péril leur première liaison.

Resserrant sa main autour de celle de Max, il mettait tout sur la table. Mention du bien-être qu'il ressentait, il s'avouait tout simplement heureux, comblé, à ses côtés. Les yeux de la monitrice de plongée se noyèrent dans les siens, elle cessa de respirer durant de longues secondes, apnée qui se prolongea dans son corps, il lui coupait le souffle. L'amour pulsait dans ses veines comme un feu aux flammes incandescentes. Une passion transcendante difficile à juguler. Lane était si beau, les yeux pétillants de joie, l'innocence désabusée accrochée à ses lèvres, alors que cette sensation de bonheur tendait les muscles de son épiderme. Elle aussi, elle l'aimait. D'un amour aussi tempétueux que la météo, aussi paisible que la sérénité qu'il lui apportait. « Ça tombe bien, je n'ai nullement l'intention de partir. Je suis bien avec toi aussi. » A nouveau, Maxyne ne le formulait pas avec les mêmes mots que lui, mais il savait le plus important. D'ailleurs, elle lui raconta qu'elle avait parlé de lui à Liam ; ces petits changements démontraient qu'elle s'engageait vraiment envers lui. Alors qu'une pluie diluvienne continuait de s'abattre sur la ville, le sourire de Lane illumina la pièce comme un rayon de soleil. « Bien, il était à la fois surpris et heureux. Je lui ai dit pour les deux fois... J'ai aussi expliqué qu'on prenait notre temps et que tout se passait bien. » Liam avait aussi compris que les deux amants n'avaient pas collé d'étiquette entre eux pour définir leur relation. Lui qui était marié à l'amour de sa vie depuis toujours avait pourtant saisi l'intérêt d'aller à leur rythme sans se précipiter, même si Maxyne, plutôt discrète sur ses histoires amoureuses, avait désormais envie de partager ce bonheur auprès des siens. « Il va mieux. Ce sont toutes nos soirées bouffe et karaoké qui l'ont détendu. » La jeune femme avait ce grain de folie qui entraînait les autres dans son sillage, ce qui contrastait avec le caractère plus réservé de Liam. Les meilleurs amis se complétaient bien sur leur personnalité mais aussi en tant que colocataires : elle qui n'aimait pas cuisiner disposait de son chef personnel à l'appartement, lui qui mettait plus de temps à se dérider avait une pile électrique à ses côtés pour le dynamiser. « Le dialogue s'est rétabli entre sa femme et lui. A partir de là, ils pourront avancer. Je suis plutôt optimiste. Un amour comme celui qu'ils partagent ne s'arrête pas du jour au lendemain. » En réalité, Maxyne espérait sincèrement que les Middleton trouveraient les solutions pour régler leurs soucis. Au fil du temps, ils étaient devenus l'exemple à suivre, la dream team absolue. Tous les couples traversaient des turbulences, la façon dont celles-ci étaient traversées déterminaient la survie ou non de la relation. Si eux n'y parvenaient pas, la positivité de l'ancienne nageuse en prendrait un sérieux coup. « A vrai dire, il s'est donné une motivation. S'il réussit à recoller les morceaux avec Lily, il a proposé qu'on organise un repas tous les quatre. » A la base, Maxyne ne comptait pas en parler de suite, pour ne pas mettre la charrue avant les bœufs. Toutefois, cette idée séduirait probablement le jeune Wade au vu de sa réaction lorsqu'elle lui avait appris qu'elle s'était confiée à Liam à son sujet.

Toujours refroidie par la pluie un peu plus tôt, la nageuse se blottit contre Lane pour chercher sa chaleur, passant un bras en dessous du sien et posant sa tête contre son épaule. Ce qu'elle ressentait pour lui, elle ne l'avait plus éprouvé depuis longtemps. Il était temps qu'elle cesse de laisser un passé révolu peser dans sa relation présente, d'autant plus alors qu'elle était assise auprès d'un homme unique, qui ne demandait qu'à l'aimer sans autre intention. Il la complétait bien lui aussi, et elle refusait de le laisser filer entre ses doigts. Vivre au jour le jour, c'était bien un temps. Il était temps de lâcher-prise. De donner complètement son coeur aux mains frémissantes d'un homme qui avait peur de la perdre aussi et qui avait pour seul vœu qu'ils soient heureux ensemble. « Je sais que nous n'avions rien défini, peut-être parce que nous n'en avons jamais eu besoin. Pour moi, c'est toi, et juste toi depuis que je t'ai retrouvé. Et je donnerai la même réponse à toutes les personnes qui me demanderont si j'ai quelqu'un dans ma vie. » Voilà qui rendait tout plus officiel. Ce n'était pas une obligation, juste une étape logique pour s'engager davantage. Dix mois qu'ils se fréquentaient à nouveau, alors si Lane aspirait aussi à plus ou à autre chose, elle était prête à l'entendre. Terminant son chocolat chaud, elle retrouva ce sourire insouciant. Deux coeurs battaient à l'unisson, celui d'un couple qui vivait un moment heureux composé d'espoirs réciproques.

somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

Les yeux de Maxyne s'arrêtèrent net sur le visage de Lane. Son cœur avait péniblement craqué dans sa poitrine lorsqu'elle avait constaté l'inquiétude qui le rongeait plus tôt. Impuissance ressentie face à la douleur interrogatrice qui se lisait dans ses prunelles, il esquissait pourtant un sourire désormais empli de joie, heureux de partager ce moment spécial en compagnie de la monitrice de plongée. Relevant les yeux dans l'océan bleuté de la femme qui détenait son cœur, il la dévorait du regard, ainsi Maxyne ne fut pas surprise de le prendre sur le fait, amusée par la lisibilité touchante et déroutante de celui qui lui déclarait sa flamme. Dans ce salon de thé, leur relation prenait un tournant différent. Tout d'abord, la jeune femme avait parlé de lui à son meilleur ami, meilleur ami qui avait proposé de le rencontrer quand elle se sentirait prête. Les yeux ronds de Lane traduisait son trouble, cependant il joua la carte de l'humour, pondant une histoire rocambolesque de voyage dans le temps. « Fais gaffe, tu en auras peut-être avant moi. » Maxyne rebondit sur la taquinerie des cheveux blancs. Par chance, elle était épargnée pour l'instant, avantage des cheveux clairs. Il lui sortit son fameux regard, ce qui les amusa tous les deux. Il réagit ensuite à la situation que Liam traversait et lui souhaita de pouvoir retrouver le bonheur. « Je l'espère aussi, il en a bien besoin. » Et puis, sans prévenir, Lane lui adressa des mots qui témoignaient à nouveau de toute l'estime qu'il avait pour elle. Touchée, Maxyne se réfugia dans son chocolat chaud, le terminant avant de lui répondre. « Wow merci mais c'est ça, les amis. Être là dans les bons comme les mauvais moments. J'ai grandi avec lui, alors depuis le temps, on se connaît par cœur et on en a vu d'autres. J'espère aussi que tout s'arrangera entre eux. » Les mains de la jeune femme se retrouvèrent dans celles du brun. Ému, il lui avoua avoir été pris de court par sa nouvelle, heureux comme jamais de la voir sur la même longueur d'ondes que lui, voeu enfoui enfin nourri d'une réponse espérée, plus belle preuve d'amour que la nageuse pouvait lui adresser selon lui. Pourtant, Maxyne poussa plus loin ses intentions. Au diable les craintes et tout le reste. En sa présence, elle se sentait merveilleusement bien, en confiance, prête à s'engager davantage et à lui abandonner complètement son cœur. Envahi par les émotions, il poussa un soupir, comme délesté d'un poids qu'il portait depuis longtemps. C'est à cet instant-là qu'elle comprit à quel point il s'était adapté à son rythme à elle, déjà fixé de son côté.

Lorsque Maxyne sentit Lane l'entourer doucement de ses bras, rapprochement inattendu, le souffle chaud de l'animateur radio qui effleura la peau de son cou lui donna un frisson. Son pouls s'emballa soudainement. Répondant à son étreinte, elle se réfugia dans l'étau de son corps, tentation à portée de main, elle ne cherchait plus à lutter contre le destin. Et son ange brun remonta ensuite son visage près de son oreille, brisant le silence émotionnel qui s'était installé entre eux. Dans un murmure, il lui ouvrit les derniers remparts de son coeur, l'inondant de tout l'amour qu'il lui vouait, une vague suivie d'une promesse d'éternité qui acheva de renverser Maxyne. L'écho de ses mots retentit en elle tel une onde de choc. Avait-il seulement idée à quel point elle désirait à la fois soigner son coeur et prendre possession de son corps en cet instant ? Une foule d'émotions se bouscula dans son ventre, représentative de l'affection fiévreuse qu'ils se vouaient. Bien malgré lui, il était devenu un des éléments capitaux de sa vie. Elle tourna légèrement son visage vers le sien, soutenant son regard, alors qu'il se redressait légèrement. Toujours blottie dans la prison de ses bras, la jeune femme voulut lui faire ressentir tout ce qu'il venait de provoquer en elle. La passion la gagna, elle rapprocha son visage et écrasa ses lèvres sur les siennes avec une douce avidité, celle de partager ce tourbillon de sentiments qu'il avait réveillé, frénésie d'un amour débridé et enfin libéré de toute emprise extérieure à leur bulle. Elle aussi, elle l'aimait, c'était une évidence. Totalement sienne. « Tu es fou... » Souffla-t-elle doucement, pour redescendre l'atmosphère d'un cran. Ou juste trop honnête et tellement désarmant dans cette honnêteté. « Et tellement... toi. » Il comprendrait sans doute ce que Maxyne essayait de dire. Ce n'était pas la première fois qu'il l'emmenait sur des montagnes russes, néanmoins ce grand huit aérien dépassait de loin tous les ascenseurs émotionnels qui avaient précédé. Il lui donnait son coeur, la priant d'en disposer à sa guise, maintenant qu'il savait lui aussi l'amour qu'elle lui portait. Elle aussi, elle le sentait, ce bonheur se diffuser dans son corps, et la sérénité qui l'accompagnait renforçait ce sentiment de bien-être. Volonté de redescendre la tension d'un cran, envie de se poser ailleurs, Maxyne proposa ensuite de lever le camp des lieux, note déjà réglée, grain de folie passager, au diable la pluie torrentielle. D'un coup, elle bondit sur ses pieds et se dirigea vers la sortie, jetant un regard amusé vers Lane. « Prêt ? » Elle glissa sa main dans la sienne et reprit ensuite la course, direction l'appartement du brun. Avec un peu de chance, ils arriveraient avant d'être complètement trempés, charmante lubie qui lui donnait l'impression de voler. Après tout, c'était connu : l'amour donnait des ailes.

somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

La révélation de Maxyne par rapport aux sentiments qu'elle éprouvait rendait divine chaque seconde de cette journée. Son coeur s'était emballé dans sa poitrine, tant l'émotion qui avait submergée Lane l'avait touchée, délivrance d'un homme amoureux, angoissé à la simple idée de la perdre et que le rythme cardiaque de sa moitié ne s'aligne jamais totalement au sien. Un pincement au ventre la saisit. L'ancienne nageuse retint la boule d'émotion qui remontait dans sa gorge tandis que les muscles de son visage, se figeaient dans une rigidité inconfortable, retenant une pression importante. Il ne lui fallut qu'une fraction de secondes pour comprendre qu'elle aussi relâchait les craintes et la crispation accumulées ces derniers mois. Ses yeux ne s'inonderaient pas, larmes de joie contenues parce qu'elle ne mettait pas facilement ses sentiments à nu, mais elle était heureuse, foncièrement heureuse à ses côtés. L'amour que Lane lui vouait était d'une insouciance et d'une pureté sans égale, oublieux des blessures que Maxyne avait involontairement causées, pleinement attaché et épris d'elle. La main froide la jeune femme se posa contre son torse, comme pour s'approprier encore un peu plus le palpitant de l'animateur radio, alors que les deux amoureux étaient enfin arrivés dans l'appartement du brun et qu'il l'avait entraînée vers la chambre des invités. Et alors qu'aucune ombre ne venait plus noircir leur journée, ni polluer leurs esprits, elle lui offrit un nouveau baiser, de ceux qui lui démontraient l'amour sans limite qui existait entre eux. Elle voulait retourner la tête de Lane au point que seul son nom reste imprimé dans son cerveau démuni et que sa respiration devienne le seul son qui résonne à ses tympans. Les mains de la jeune femme reprirent place dans les siennes tandis qu'elle écouta d'une oreille distraite sa proposition sur les vêtement de ses soeurs. « Et dans la mesure où je viens te rendre plus souvent visite que tes frangines ? J'ai aussi laissé traîner des affaires. » Répondit-elle, amusée par un Lane timide et soudainement innocent. A la différence, qu'elle, elle ne les abandonnait pas dans la chambre des invités. Piqué au vif, il déposa un tendre baiser sur ses lèvres et lui adressa un clin d'oeil, avant de s'éclipser dans ses quartiers, rendant son espace personnel à Maxyne. A l'ouverture d'un des placards, la monitrice de plongée trouva un short et un débardeur en coton, propriété probable de la jumelle de son homme. Emportant les affaires, elle se rendit dans la salle de bains où elle se sécha corps et cheveux avant de se changer.

Peu après, elle rejoignit Lane dans sa chambre. Plongé dans ses réflexions, il ne sembla pas entendre la nageuse arriver. Elle s'assit sur le lit et s'approcha de lui, tandis qu'elle l'attirait doucement contre elle, son souffle caressant son cou, alors qu'elle s'imprégnait de lui. Elle n'avait pas vu ce qu'il regardait exactement, concentrée. Maxyne prit une inspiration, tandis que son coeur s'accordait à nouveau à celui de Lane, elle ferma les yeux et posa son front contre lui, ivre  de sa simple présence, exaltée par l'évidence de son besoin de lui. Il était incrusté dans son être au point que le soleil avait cessé de briller ces derniers jours, lors de son silence radio. La nageuse n'oubliait pas si facilement qu'un sujet le préoccupait, mais elle gardait désormais cette inquiétude pour elle. « Tes yeux. C'est eux qui m'ont fait comprendre l'étendue de ce que tu ressentais pour moi. » Murmura-t-elle, dans un souffle. « Je voudrais te dire ces mêmes mots, mais je n'y arrive pas encore. Je sais juste que je ne veux plus jamais te quitter. » Maxyne se détacha alors de lui, s'enivrant de son parfum, l'emportant avec elle avant de s'éloigner de quelques centimètres. Depuis que son ex toxique avait vrillé avec son coeur et sa tête, elle était devenue beaucoup plus vulnérable, et pendant longtemps, elle n'avait plus été que l'ombre d'elle-même,  se barricadant sous une carapace énorme, mais elle s'était relevée et était devenue plus forte, à nouveau prête à se laisser porter par ce que la vie avait à offrir. Le coeur de Maxyne se mit alors à battre furieusement dans sa poitrine. La jeune femme avait relevé le changement d'atmosphère, les pensées du brun dérivaient vers d'autres horizons. La blonde posa une main dans le cou de son amour pour qu'il tourne son visage vers le sien, elle sentit la froideur de sa peau, la chaleur de son sang et aperçut ses lèvres légèrement pincées. Depuis le temps qu'ils se fréquentaient, il ne pourrait plus jamais lui cacher ses émotions et ses cicatrices, elles lui appartenaient toutes autant qu'elles étaient. Parce que même ce qu'elle ne savait pas, elle le pressentait en sa présence. « Que regardais-tu quand je suis entrée ? Tu avais l'air pensif. »

somewhere only we know
crédit/ ncentineosource ✶ @lane wade

La réponse de Lane au souhait formulé par Maxyne sonna comme une promesse sur le long terme. Il paraissait tellement sûr de lui vis-à-vis d'elle qu'il ne viendrait jamais à l'idée de la nageuse de douter de lui ni de ses intentions. A croire qu'il avait toujours su, bien avant elle, que leurs sentiments étaient ce dont lui avait fondamentalement besoin à son bonheur et son équilibre. Toutefois, l'atmosphère s'était chargée d'une tension que la jeune femme avait senti dès qu'elle était entrée dans la pièce. Et son instinct ne la trompait pas. Les pensées du brun voguaient vers d'autres horizons, curseur de sa boussole orienté vers le passé. Lane craignait d'ailleurs que Maxyne ne le voit plus de la même façon. C'était difficilement concevable mais ignorant ce dont il était question, elle préféra ne rien répondre. Au coeur de cette chambre, prisonnier de ses souvenirs, asphyxié par un secret qui paraissait lourd, il noyait son regard sur cette photo qu'elle n'avait jamais vue. La température ambiante était bonne, pourtant tous les deux frissonnaient, lui se perdait dans ses songes et elle, elle attendait patiemment le moment fatidique où il se confierait à elle, chahutée par le rythme frénétique de son coeur inquiet. Soudain, ce fut comme si Lane trouva le courage de se jeter à l'eau. Il redressa la tête brusquement et lui tendit la photo tandis qu'il entreprit de lui expliquer ce qui le rongeait et qu'il n'avait jamais révélé à quiconque, pas même à Lou. Bien sûr, elle connaissait déjà en partie l'histoire de cette escapade en forêt qui s'était conclue par la disparition tragique du dénommé Brian, ami du brun à l'époque. Les deux enfants s'étaient perdus et n'avaient été retrouvés que le lendemain. Cette affaire avait fait grand bruit, le personnel de l'école avait été durement touché et accablé. Cependant, la version de Lane différa aujourd'hui en ce sens qu'il se déclara premier responsable. Perplexe, Maxyne continua de l'écouter sans l'interrompre, prenant les mains de l'animateur radio dans les siennes alors que des perles salées roulaient sur ses joues au fur et à mesure qu'il développait son récit. La vérité avait bousillé son coeur d'enfant jusqu'à ce que la souffrance le transperce. Elle l'entendait dans ses mots teintés de tristesse. Baissant la garde, sous la confiance de son amour pour elle, le Wade ne reculait plus devant le précipice dans lequel il sombrait. Déni désormais invivable, son palpitant scellé fissurait la carapace, peu importait la douleur qui le labourait de ses serres empoisonnées. Depuis longtemps, Maxyne avait compris que les véritables fantômes qui existaient dans ce monde n'étaient pas les revenants ou les monstres dépeints dans les films. Les pauvres chimères qui les hantaient étaient cachées au fond d'eux. Un désespoir au goût affreux émanait de Lane, à l'instar d'une impuissance qui s'emparait de lui et le privait d'être heureux lorsqu'elle prenait le dessus, terreau pour que les ténèbres envahissent un esprit torturé, écorché par la vie, qui avait l'impression de vivre dans une nuit sans lune, conséquence de ses rêves brisés et espoirs déçus.

Dépassé par le tumulte d'émotions qui l'inondait, Lane lui expliqua la peur et la honte qu'il avait ressenties à l'époque si quiconque découvrait qu'il avait désobéi aux consignes des professeurs. Enhardi, l'enfant avait proposé de couper à travers bois, suivi aveuglément par son ami. Le reste de l'histoire, Maxyne la connaissait déjà. Terrifié, il avait tu cette partie. Les choix que l'on faisait amenait souvent de nombreuses conséquence. Dans son introspection, Lane se renferma dans une spirale de pensées négatives, se maudissant d'être à l'origine du drame et s'accrochant au souvenir passé d'une responsabilité lourde comme le monde sur ses épaules. Au fil du temps, il avait peut-être espéré que les sentiments indésirables s'atténueraient mais ceux-ci continueraient de le poursuivre tant qu'il ne ferait pas la paix avec ses fantômes et qu'il ne vidait pas son coeur du poison de la culpabilité éprouvée. Lui qui se confiait avec la force du désespoir ne constatait pas encore la triste réalité. Plus que n'importe qui, il avait besoin de soutien et à présent qu'il avait trouvé une personne capable de l'écouter bien malgré lui, l'ange brun s'entêtait à s'acharner contre lui-même. Lane avait besoin d'exorciser ses remords, synonymes de peine et de souffrance, et Maxyne saisit à quel point il avait besoin d'être rassuré et apaisé. « Ton histoire, c'est wow. Ça me donne la chair de poule. » Elle serra le jeune homme dans ses bras et attendit silencieusement que l'émotion passe. Dire qu'elle n'était pas touchée par sa révélation serait un euphémisme, elle était même plutôt ébranlée par sa détresse mais la nageuse garda sa composition et répondit présente. « Tu sais, je pense que tout le monde l'a compris, que vous vous étiez perdus. C'est ce qui est arrivé. On ne peut pas tout anticiper. Ni les responsables éducatifs, ni vous. Considérer que des enfants vont naïvement obéir aux consignes, c'est aussi une erreur. Les adultes savent bien que c'est improbable et ce n'était sûrement pas la première sortie organisée par l'école. » Loin de l'idée de Maxyne de charger l'établissement ou les encadrants, elle énonçait simplement des évidences par rapport aux enfants. « Je sais que tu ne le verras sûrement pas comme ça mais parfois, c'est juste la faute à pas de chance et à tout un tas de circonstances. Vous auriez pu retrouver votre chemin, être retrouvés plus tôt ou même encore beaucoup plus tard. Pourquoi lui et pas toi ? Je sais que c'est aussi une question qui te traverse l'esprit. Avait-il un souci de santé non connu ? On ne le sait pas. » Marquant une pause, Maxyne chercha à mieux formuler son idée car elle pouvait parfois se montrer maladroite. « Ce que je veux dire c'est qu'avec des si, en retirant ou en ajoutant tel facteur, tu peux refaire le monde, tu ne sauras jamais. Je comprends que tu puisses te sentir en partie responsable et que tu vivras avec ça tout le reste de ta vie. Mais n'oublie pas que tu n'étais qu'un enfant toi aussi et tu ne voulais pas que ça arrive. C'est un accident. On sait tous les deux que si tu pouvais réécrire l'histoire, tu lui donnerais une issue différente. » Peut-être qu'elle n'était pas la personne la mieux placée à qui en parler pour l'aider dans ce processus d'acceptation, peut-être qu'il serait mieux entouré par des personnes habituées à gérer les traumatismes de l'enfance, mais elle lui montra tout de même qu'elle était là pour lui. « Tu t'es ouvert à moi et je suis touchée de ta confiance. C'est une première étape. La chose la plus difficile à faire, ce sera de trouver la force de te pardonner. » Lane aurait certes un sacré chemin à parcourir avant d'en arriver là mais il fallait bien commencer quelque part.