contexte › island bay ressemble à n’importe quelle petite ville côtière de nouvelle-zélande, mais il n’en est rien. en bordure de wellington, à une trentaine de minutes en voiture, se trouve un parfait petit endroit où se mélangent étroites maisons en location et grandes villas de propriétaires fortunés. c’est un endroit où il fait bon vivre, du moins d’apparence, puisque comme on sait, l’herbe semble toujours plus verte de l’autre côté de la clôture. tous les habitants d'island bay se sentent ici comme à la maison, en quelque sorte. mais n’en est-il pas autrement de leurs voisins ?
8° - 17° // températures stables, mais vent à venir
initiales interdites. › personnages inventés de 25 ans minimum. › 3 ans de différence entre l'avatar et l'âge du personnage. › 15 lignes minimum par rp › un rp par mois.
une rencontre lors d'un stage et la seule chose qu'ils ont en commun c'est leur passion pour le sport, pour le reste ils sont diamétralement opposés
elles sont soeurs et n'ont pas connaissance du lien qui les unis
J’en ai besoin, putain. Il faut que j’en trouve. Crise de manque. Me sent pas bien. J’en ai de temps à autre, je sais les gérer mais parfois c’est plus difficile. Plus intense. L’envie qui me revient. J’ai fouillé partout, tous les tiroirs comme si j’espérais trouver de la poudre. J’ai trouvé que de la farine. De la vraie. Celle qui fait pas de mal et qui sert juste à faire des gâteaux. J’étais tellement mal que j’ai presque voulu la sniffer par dépit, mais j’ai réussi à me calmer. Enfin façon de parler. Je me suis mise à chialer, en fait. Pas de ma faute. Perte de contrôle. C’est un des symptômes. Episodes dépressifs. Et aussi la fatigue, l’incapacité de faire quoi que ce soit. Je me déteste quand je suis comme ça. En même temps, je l’ai bien cherché. Si j’avais jamais été addicte, j’aurais pas eu à subir le manque. Et je serais encore une star. Ou pas. J’en sais rien. Pourquoi je pense à ça ? Ca va pas régler le problème que j’ai là.
Je me suis calmée un peu, mais c’est toujours pas très glorieux. Je suis roulée en boule sur mon canapé, à dévorer un sachet de pop-corn comme si ma vie en dépend parce que j’ai très faim. Un autre symptôme. Je les ai tous, aujourd’hui. Vraiment pas de chance. Et en plus de ça j’ai mal un peu partout parce que j’ai mes règles et qu’EVIDEMMENT ça pouvait pas se passer en douceur. Hé, Dieu, ou Mère Nature ou j’sais pas qui contrôle ma vie, dis-le tout de suite si tu m’aimes pas. Tu veux que je crève ou quoi ? Qu’est-ce que je t’ai fait pour mériter tout ça ? Bon … bon, calme-toi Amy. Ca va aller. T’as déjà connu ça. Fais pas de conneries. Surtout pas ça. C’est que l’idée m’est passée par la tête ; l’idée d’en finir une bonne fois pour toute. Une fois que t’es mort tu ne souffres plus mais … c’est pas la solution, meuf. Ca va aller. C’est juste un dur moment à passer. Respire, essaie de penser à autre chose.
Je prends une grande inspiration et trouve la force de me lever. Qu’est-ce que je fais, maintenant ? J’étais censée travailler aujourd’hui, mais j’étais clairement pas en état. Mais mon patron est une crème, il est au courant de ma situation, et puis pendant un court moment de clairvoyance je lui envoyé un message pour le prévenir. Je ne suis pas la première ex-junkie à travailler pour lui. A ce qu’il m’a expliqué, il emploie souvent des gens come moi, ou des anciens prisonniers, histoire qu’ils puissent se réinsérer dans la société, tout ça. Je lui ai pas posé la question parce que je voulais pas passer pour une connasse mais j’imagine qu’il y trouve aussi son intérêt là-dedans. Genre moins de charges à payer, ou je sais pas quoi. Pas que ce soit important. L’important c’est que j’ai un travail et … pourquoi je parle de ça, déjà ? Doit y avoir d’autres moyens de se distraire que de penser au boulot.
Clare. Il faut que je voie Clare. Elle saura m’écouter, parce qu’elle me connaît bien. Et que c’est son boulot, l’addiction. Et puis … il faut quelqu’un pour me surveiller, pour être sûre que je fasse pas l’impardonnable. Putain. Je viens de voir, à mes pieds. Un couteau. Le plus effrayant, c’est que je me souviens même pas de l’avoir sorti du tiroir. Je me souviens pas beaucoup de ces dix dernières minutes, en fait. Mais je vois que tout est en bordel, moi y compris. Pas besoin de me regarder dans un miroir pour comprendre que je suis pas très … présentable. M'en fiche, je sors pas.
« Salut … Je me sens très mal, tu peux passer ? » J’envoie une note vocale à Clare. J’ai l’impression de faire un effort surhumain mais j’ai encore la vision trop trouble pour lui envoyer un message écrit. « Et, euh … tu pourrais me ramener des tampons, aussi ? Pas la force d’aller faire des courses … Merci. » J’ai dit ça d’une voix plus basse, comme si j’avais honte alors que ça fait quinze ans que je suis une femme quoi. Mais c’est parce que … j’sais pas, je suis fatiguée, arrêtez de me faire chier. Bon. Message envoyé. Plus qu’à attendre, en espérant qu’elle n’ait pas quelque chose de plus important à faire. Je lui en voudrais pas. Je ne suis qu’un être sans importance. Mais tout de même, j’ai bien besoin de son soutien là. J’ai pas envie de rester seule. Je dois pas rester seule.
Une fois n’est pas coutume, ce n’est pas à la clinique que Clare se trouve mais bien au supermarché, en train de faire ses courses. Parce que oui, il faut bien qu’elle pense à s’alimenter si elle souhaite pouvoir garder ce rythme de vie effréné. Pas qu’elle ait vraiment connu autre chose, cela dit. Aux autres les petites vies tranquilles, à elle les rythmes de folie quelle qu’en soit la raison. Et sans doute une vie plus courte que celle de beaucoup d’autres parce que c’est quasiment impossible de demander au corps de dormir aussi peu, de s’alimenter aussi peu et mal et de subir un stress presque constant. Mais pour l’instant, elle tient le coup et n’est pas vraiment prête à changer quoi que ce soit dans sa façon de faire. Ainsi, elle fait donc tomber des piles entières de plats tout préparés dans son caddie qu’elle remplit également de packs d’eau et de soda et de deux ou trois petites autres choses qui pourraient éventuellement plaire à Normie, son chinchilla, sans lui causer trop de troubles non plus. C’est alors qu’elle entend son portable sonner au fond de son sac et la question est toujours la même : va-t-elle devoir tout plaquer pour repartir en urgence au boulot sans avoir réussi à seulement faire ses courses ? Possible ; elle voit qu’il s’agit d’Amy. Venant de la jolie blonde, il vaut mieux s’attendre à tout. Au meilleur comme au pire. Clare se pousse dans un coin pour ne pas bloquer le passage et écoute le message vocal laissé par sa jeune amie. Aujourd’hui ça sera donc le pire. Même pas besoin qu’elle lui décrive la situation, ça s’entend très clairement au son de sa voix que rien ne va. D’ailleurs, elle ne la lui décrit pas, se contente de lui dire que ça va mal et lui demande de passer. Avant de se mettre presque à chuchoter – exactement comme dans toutes ces pubs pour tampons ou savons intimes – si elle ne veut pas lui apporter des tampons, justement. Aha ! Clare l’aurait juré. A l’extrait de nuage et toutes ces conneries. L’espace d’une seconde, elle envisage de lui envoyer un SMS pour lui demander si elle a une préférence mais se dit presqu’aussitôt que si elle n’a pas pris la peine de pianoter sur le clavier de son téléphone, c’est pour une bonne raison. Tant pis, elle prendrait donc les plus basiques. Une chance qu’elle soit au magasin, finalement. Et quitte à devoir passer par la caisse de toute façon, elle se dépêche de terminer ses courses. Avant de reprendre la voiture, le coffre à moitié plein et la direction de West Bay. Par chance – ou non, tout dépend du point de vue -, les appartement et studio des deux femmes se trouvent dans le même quartier alors elle peut même se permettre un crochet par l’appartement pour déposer ses courses – bien obligée avec tous ces surgelés – et de reprendre la route jusqu’au studio d’Amy. Avant de pénétrer dans l’immeuble, Clare fourre la boîte de tampons au fond de son sac, quitte à la cabosser un peu ; si elle chuchote pour en parler, elle n’a probablement pas envie que ses voisins soient au courant que c’est la mauvaise période du mois. Puis elle frappe à la porte et attend qu’on vienne lui ouvrir. « Hé salut ! » C’est ce qu’elle dit en entrant, un sourire illuminant son visage en espérant que ça soit ne serait-ce qu’un peu communicatif. « Je suis venue dès que j’ai pu. » Puis elle sort la boîte de son sac et la tend à Amy. « Je savais pas trop quoi prendre. J’espère quand même que ça ira. »
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Clare est prévenue. Elle arrive. Bon … je fais quoi, maintenant ? A part l’attendre. Je regarde autour de moi ; ce serait pas un mal de ranger un peu. J’ai rien d’autre à faire de toute façon et en matière de bordel celui que j’ai dans la tête me suffit bien. Ouais, allez ! ça va me changer un peu les idées. Eviter que les idées noires me reprennent même si ce n’est que pendant genre deux minutes parce que c’est tout petit. C’est pas si mal. Du coup, je me mets au boulot. Les coussins sur le canapé, les sachets de pop-corn vides dans la poubelle, un petit coup de balai et c’est déjà plus présentable. Il reste plus que le couteau par terre. A bien y regarder, c’est un couteau à beurre, enfin vous savez rond au bout, donc probablement pas très efficace pour faire ce que j’avais – peut-être, m’en souviens plus – l’intention de faire mais le fait que j’y ai songé, ça m’inquiète. C’est rare que je me sente aussi … désespérée.
Voilà. C’est un peu mieux. On peut toujours pas manger par terre mais ça fait moins pitié. Maintenant, c’est peut-être moi que je devrais arranger. Bah. Pas la force d’aller jusqu’à la salle de bains. J’ai mal aux jambes. Aux bras. Au ventre, partout. Du coup, je me remets en boule sur le canapé en maudissant autant le fait d’avoir un utérus (il m’épargne pas, ce connard) que d’avoir fait des mauvais choix de vie. Si j’avais su tout ce qui m’arriverait … il y a six ans, je m’en serais tenue à un seul rail, comme je me l’étais dit. Mais ça m’avait tellement plu, fait tellement d’effet que j’avais voulu recommencer l’expérience et me voilà des années plus tard à en payer le prix. Enfin … le mal était fait …
Cinq minutes plus tard (ou dix, ou trente, j’ai plus la notion du temps), on frappe à la porte. Clare. Je me lève aussi rapidement que je peux et vais lui ouvrir. « Salut … ça me fait plaisir que tu sois venue … », je réponds à sa salutation, en souriant même si j’ai l’impression de devoir faire un effort surhumain. Non, j’exagère pas, je suis autant fatiguée que ça. « Je savais pas trop quoi prendre. J’espère quand même que ça ira », fait Clare en me tendant la boîte de tampons que je lui avais demandée. Ouais, je lui ai pas donné de détails. On va dire que … ça se rapproche plus d’un ruisseau paisible que des chutes du Niagara. « Merci. Oh, ben, tant que ça rentre … » Je tente l’humour. C’est sans doute pas aussi drôle que ça l’était dans ma tête, mais … ça veut dire que ça va pas si mal, non ? « Je les garde pour plus tard ». Comme si elle m’avait demandé des détails. Mais bref, j’en ai pas besoin tout de suite.
Cette question là étant réglée (lol), j’invite Clare à s’asseoir et lui explique la situation. « J’ai … fait une crise que de manque et je me sens vraiment mal. Je crois que j’ai voulu faire une bêtise. » Le tout en mimant l’action, deux doigts qui font le geste sans équivoque sur mon poignet. Et, je sais pas pourquoi mais … je me sens coupable. Mais bon, je ne l’ai pas fait du coup, mieux vaut pas s’attarder là-dessus, ne pas trop y penser, hein ? Ouais, on va faire ça. Du coup je m’étends à côté d’elle et pose ma tête sur ses jambes histoire d’être confortable, sans même penser à lui demander son avis. « Et toi, comment tu vas ? ». Je sais que ce n’est pas toujours facile pour elle non plus. Enfin, ça l’est pour personne en vérité. On a tous nos problèmes.
En entendant qu’Amy est contente de la voir, Clare balaye ça d’un revers de main. Evidemment qu’elle ne va pas laisser une amie dans le besoin. Certes, il lui arrive parfois d’être très occupée mais elle garde généralement son téléphone à portée de la main pour les cas semblables et essaye de rappeler dès qu’elle a une seconde à elle. Puis elle fait part de ses craintes concernant la boîte de tampons. Chaque femme est différente, après tout, avec des besoins et des préférences qui leur sont propres, mais faute de plus amples informations, elle a préféré ne prendre aucun risque en ne prenant rien de trop spécifique. Ce à quoi la jeune femme lui répond que l’important, c’est que ça rentre. Clare émet un petit rire parce que ça se veut humoristique et que c’est quand même un peu drôle en dépit du fait qu’elle ne soit pas du tout dans son assiette et que ç’aurait été bien meilleur en temps normal. D’ailleurs, elle la laisse faire ce qu’elle veut avec cette boîte parce qu’elle n’a pas l’intention non plus d’aller jusqu’à vérifier que ça va réellement lui servir et prend place dans le canapé, comme invitée à le faire. Puis elle écoute attentivement Amy lui raconter ce qui ne va pas. Une bêtise. Du genre que la plupart des patients de sa clinique connaissent bien. Mais qu’aussi loin qu’ait pu aller sa propre addiction, elle-même n’a jamais tentée. Faut dire que d’autres ont essayé pour elle. Et puisqu’elle y a survécu… Bref, tout ça pour dire que la blonde ne juge pas. « Bon, je suis contente que tu m’aies appelée, alors. » Et c’est tout ce qu’elle dirait là-dessus. Inutile de lui faire comprendre que ce n’est pas une solution parce qu’elle ne passe pas par les mêmes choses qu’elle et qu’elle ne peut donc pas tout à fait se mettre à sa place, bien qu’elle ait connu son lot de merdes elle aussi. Pas besoin non plus de lui rappeler que dans des moments pareils, mieux vaut ne pas rester seul. A l’évidence, c’est quelque chose qu’Amy a bien compris puisqu’elle est là. La laissant poser la tête sur ses genoux, elle prend appui contre l’accoudoir et c’est toujours la même réponse qui franchit le seuil dans ses lèvres quand son amie lui demande comment elle va : « Ça va super ! » Bien qu’elle soit automatique, cette réponse n’en est pas moins sincère. Contrairement à ce qu’elle a connu en Afrique du Sud, sa vie ici est un vrai rêve alors peu importe les petits problèmes qu’elle peut parfois avoir, c’est rien en comparaison de ce qu’elle a connu autrefois. « Tu sais quoi ? Je peux te consacrer les prochaines heures. Qu’est-ce que tu as envie de faire ? Regarder un film ? Aller prendre l’air ? Faire du shopping sur le net ? » Tant qu’elle ne lui propose pas d’aller prendre un verre, Clare est partante pour à peu près tout, même un film alors qu’elle préfère de loin la lecture. Si ça peut apaiser Amy, voire même lui changer les idées, c’est tout ce qui compte.
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La présence de Clare me ragaillardit un peu. Ça fait du bien se sentir soutenue … d’avoir des amis, qui gens qui se soucient de vous. C’est que pendant quelques temps, je n’avais plus ça. Et c’était entièrement de ma faute. Je refusais de voir que j’allais pas bien, que j’avais un problème et ça m’a coûté des amitiés et ma place dans le groupe. Il y avait que la coke qui comptait pour moi à cette époque ; quelle saloperie. Une saloperie qui te colle aux basques en plus, parce que j’en ai encore envie alors que ça a foutu ma vie en l’air. Enfin, c’est tout comme quoi. Je remonte un peu la pente maintenant. Sauf que ça me prendra bien plus de temps qu’il m’en avait fallu pour la descendre, cette foutue pente. Mais bon. Le côté positif de tout ça, c’est que j’ai plus rien à perdre. Que ça ne peut qu’aller mieux. C’est pas si mal.
Je me mets à l’aise, me couche à moitié sur Clare qui n’a pas l’air de s’en formaliser plus que ça. Tant mieux, parce que j’ai mal partout et que je n’ai pas vraiment d’autre endroit pour m’allonger. Pendant deux secondes je me dis que j’aimerais bien qu’elle me caresse les cheveux comme si j’étais un chat mais faut pas pousser. Je suis pas vraiment d’humeur à ronronner. Puis des amis ne font pas ça entre eux. Enfin je crois ? Je ne sais plus trop … j’ai un peu oublié comment ça fonctionne, les amis. Si je me rappelle bien, ils se demandent comment ils vont et prennent des nouvelles les uns les autres. Ben moi, bien sûr, ça va pas. Clare apparemment si mais j’ai l’impression qu’elle dit ça plus par politesse qu’autre chose. Ou pas ? Je ne suis probablement pas en état de juger de sa sincérité. Je ne suis pas en état de faire grand-chose, faut dire.
« Tu sais quoi ? Je peux te consacrer les prochaines heures. Qu’est-ce que tu as envie de faire ? Regarder un film ? Aller prendre l’air ? Faire du shopping sur le net ? », me propose-t-elle. Euh … ben, je sais pas. J’y ai pas réfléchit. Mais c’est adorable comme attention. Je veux dire, elle avait peut-être des choses importantes à faire mais … ça la gêne pas de rester avec moi. De m’aider à me sentir mieux. « J’ai mal partout. Je pense pas pouvoir sortir ... », que je lui réponds. Merde. J’ai l’impression d’être chiante à me plaindre tout le temps. « Tu peux mettre la télé si tu veux. Je vais préparer quelque chose à manger. » Je sais même plus s’il est l’heure ou pas. Mais j’ai encore faim. Et puis c’est toujours l’heure de manger quelque part dans le monde, alors ça passe. D’ailleurs, ça me fait penser … Maurice aussi doit manger. Je tourne la tête vers son terrarium. On dirait presque de l’inquiétude dans ses yeux. Comme si elle comprenait ce qui m’arrivait. Faut dire que c’est pas la première fois qu’elle me voit comme ça. Elle a été témoin de bien des choses, cette tortue. Heureusement qu’elle peut pas me balancer parce qu’il y aurait de quoi m’envoyer en taule, je crois.
Bon sang … j’ai pas envie de me lever, mais y a pas le choix. « Au fait, tu veux boire un truc ? J’ai … euh, de l’eau. Et des boissons énergisantes », fis-je en me dirigeant vers le frigo. C’est que j’en oublierait presque mes bonnes manières. Bon, en attendant, je regarde ce qu’il me reste au frigo. Pas grand-chose. Evidemment. De la salade – j’en prends déjà quelques feuilles pour Maurice - deux ou trois concombres, un restant de riz et quelques plats cuisinés. Mouais. Rien qui me fait vraiment envie. Pour tout vous dire, j’ai plutôt envie de quelque chose de réconfortant là, de gras et de salé. Ouais ! « Ca te dirait qu’on commande une pizza ? », je demande à Clare. Après tout, pizza, télé, canapé, ce serait comme une soirée normale entre amis. Et je crois que j’en ai bien besoin, de normalité.
Quand Amy lui annonce ne pas être en état de sortir car elle a mal partout, ce qui est un des symptômes du manque, Clare lève les deux mains en l’air pour signifier que ce n’est rien. Elles peuvent tout aussi bien rester là à squatter le canapé. L’espace d’un instant, elle envisage de caresser amicalement la chevelure de la jeune femme dans un geste de soutien, histoire de montrer qu’elle est là. Mais, n’étant pas vraiment coutumière de ce genre de petites attentions, elle aurait peur que ça puisse être mal vu. Surtout que bien qu’elle soit devenue une amie, Amy est aussi une patiente de sa clinique. Elle se contente donc de lui tapoter tout aussi amicalement le bras tandis que la jeune femme se relève péniblement, annonçant qu’elle va préparer quelque chose à manger et qu’elle peut allumer la télé pendant ce temps si elle le souhaite. La blonde consulte sa montre pour s’apercevoir que c’est déjà la fin d’après-midi. Pas une heure anormale pour dîner. Puis elle avise la télécommande qu’elle attrape et allume la télé sans vraiment regarder sur quoi elle tombe, avant de se lever à son tour pour rejoindre la demoiselle qui vient tout juste de lui demander si elle veut boire quelque chose. En lui proposant de l’eau ou une boisson énergisante. Meilleur moyen pour qu’elle ne parvienne pas à fermer l’œil de la nuit, ça. Autant faire l’impasse. « De l’eau, ça ira très bien, merci. » Puis, s’accoudant au plan de travail, son regard fixé sur Amy qui lui tourne le dos pour fouiller dans son réfrigérateur parce que c’est pas son genre de fouiner, elle demande : « T’as besoin d’aide ? » Clare n’est peut-être pas un grand chef mais elle s’en sort plutôt pas mal dans une cuisine et pour cause, elle doit se débrouiller depuis… Oh, trop longtemps pour qu’elle puisse se souvenir de la date exacte, alors elle pouvait se sortir d’à peu près n’importe quelle situation. Mais quand son amie sort la tête du frigo, c’est pour lui demander si ça la tente de commander une pizza. Ah, elle aurait dû lui demander de lui faire quelques courses tant qu’elle y était. Mais Clare n’aime pas donner des leçons, raison pour laquelle elle répond avec enthousiasme : « Ouais carrément, ça doit bien faire des siècles que j’ai plus mangé de pizza pas surgelée ! » Retournant vers le canapé au pied duquel elle a laissé son sac, elle en sort son téléphone et demande à nouveau : « T’as une préférence pour la pizzéria ? » Parce qu’elle non, au cas où vous ne l’auriez pas encore deviné. Mais dans le pire des cas, une petite recherche sur Google devrait suffire à les aiguiller. Puis un souvenir lui revient d’un soir où Barry, le psychiatre avec qui elle s’est associée pour monter la clinique, et elle avaient dîné ensemble peu de temps après son installation. Tony’s. Non, c’était pas ça. « Y a Gino’s que je connais. Il paraît que leur livreuse n’est pas la plus aimable mais tant qu’elle ne nous balance pas nos pizzas depuis la fenêtre de sa camionnette, ça devrait le faire, non ? »
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"Et un verre d’eau pour la p’tite dame, un !" fais-je en me marrant un petit peu. Hé, on dirait que ça va déjà mieux ! pas que j’en doutais. Les crises peuvent être violente mais elles sont passagères. Enfin la plupart du temps ; surtout au début de mon sevrage, ça arrivait que je me sente horriblement mal pendant une journée entière. Avec le recul je me dis que c’était très con s’avoir tout arrêté d’un coup comme ça, sans même un ou deux médicaments aider, j’aurais très pu crever à ce moment là et c’aurait été bête quand même. Mais on m’avait dit que chez certaines personnes, c’était ce qui fonctionnait le mieux. Que le plus important c’était d’avoir de la volonté. Eh ben c’est ce que j’ai fait et effectivement ça a marché même si c’était pas les moments les plus agréables de ma vie, je vais pas vous mentir. Les premiers jours étaient les pires. Mais bon, je suis presque soignée maintenant. A part une crise de temps en temps, du coup. En même temps, après avoir pris cette merde pendant six ans, j’imagine que c’était impossible que je sois complètement désintoxiquée du jour au lendemain. Bah, tant pis. J’y suis presque. Faut juste un peu de patience. Pour ça, j’en ai. C’est pas comme si j’avais autre chose à foutre de ma vie de toute façon …
Bref, où j’en étais ? Ah, oui, à manger. Eh bien, je n’ai pas grand-chose. Ou en tout cas rien qui me fasse envie dans l’immédiat. Je ne suis pas vraiment d’humeur à faire la cuisine, en fait. Pourquoi pas une pizza ? Je propose cette idée à Clare qui est totalement pour. Je souris. Parfait ! On sera presque comme des gens totalement normaux. Euh … vous voyez ce que je veux dire. C’est qu’il faut encore que je me réhabitue à tout ça. D’avoir des amis, de fréquenter des gens qui ne sont pas simplement là pour me baiser contre quelques billets ou pour me fournir en poudre contre ces mêmes billets. Bordel, des fois je me demande encore comment j’ai pu tomber aussi bas. On va dire que c’était ce qui me paraissait être la meilleure solution à l’époque. Mais revenons à nos moutons. Ce soir, c’est pizza ! J’en connais pas vraiment, alors je compte sur Clare pour nous trouver ça. "Y a Gino’s que je connais. Il paraît que leur livreuse n’est pas la plus aimable mais tant qu’elle ne nous balance pas nos pizzas depuis la fenêtre de sa camionnette, ça devrait le faire, non ?". Ben carrément. "C’est du vécu ?", je lui demande amusée. C’est que c’est très spécifique comme métaphore. D’ailleurs c’est même pas une métaphore. J’ai un peu oublié mes figures de style vous m’excuserez. "Mais sinon, ça me va !"
Je pose le verre d’eau de Clare sur la table basse et vais vers le terrarium de Maurice lui donner quelques feuilles de salade. Il y a quelque chose d’apaisant à la voir mâchonner en prenant tout le temps du monde. Elle aime pas se presser, Maurice, ni se prendre la tête. Elle a tout compris à la vie, en fait. Faudrait que je prenne exemple sur elle. En attendant … "Je vais prendre une pizza avec plein de viande", je précise à Clare quand je reviens vers elle. "Je fais une petite entorse à mon régime mais il me faut un truc lourd et réconfortant." Le soja et les légumes c’est bien gentil, mais le gras c’est la vie. Oh, sympa la rime. Je vais la garder pour plus tard. Si je veux écrire une chanson sur la bouffe. Probablement jamais. C’est pas très rock’n’roll.
Ce qui est très rock’n’roll par contre, c’est ma tête. J’ai une sale gueule je crois. Ca me gêne pas tellement parce que je compte pas sortir mais faudrait quand même que je m’arrange un peu. "Euh, je vais me laver vite fait. Je reviens", que je m’écrie avant de partir vers la salle de bain. Ce sera l’affaire que de quelques minutes. Un peu d’eau fraîche sur le visage, puis je coiffe ma tignasse blonde en une queue de cheval et tant que j’y suis j’applique un trait de noir sous mes yeux. C’est ma signature on va dire, une partie de mon style iconique. Celui que j’avais avant en tout cas. Vous n’avez qu’à regarder de vieilles photos du temps de Terminus. Ouais, des vieilles seulement parce que maintenant c’est juste une bande de mecs normaux même si leur "nouvelle" chanteuse (ça fait six ans déjà …) aime bien souvent changer de couleur de cheveux. Et c’est une très belle fille honnêtement. Je le reconnais tout à fait. Et elle chante aussi bien que moi. Enfin presque ; sur les vieux titres, ceux que j’ai écrits, je l’explose. Faut pas déconner. C’est d’ailleurs en chantonnant l’un d’eux que je ressors de la salle de bain, toute jolie (du moins je l’espère) et revigorée.
A la question « c’est du vécu ? », Clare secoue la tête. Et encore heureux parce qu’aussi gentille soit-elle, elle n’aurait quand même pas laissé passer ça alors qu’elle paye la livraison, faut pas pousser. « Je l’ai seulement entendu dire. » Sans aller jusqu’à tomber dans l’asociabilité, ce qui ne serait pas du tout compatible avec son métier et le reste de ses activités, elle aime bien rentrer chez elle tard le soir, refermant la porte derrière elle tout en sachant qu’elle ne la rouvrira pas avant le lendemain. Ce qui n’est pas toujours le cas puisque son filleul ne se prive pas pour venir tambouriner à sa porte à toute heure du jour et de la nuit s’il se sent replonger. Tant mieux, ce n’est en aucun cas un reproche puisqu’elle se sent responsable de lui et qu’elle s’en voudrait pour le restant de ses jours s’il lui arrivait quelque chose simplement parce qu’elle n’a pas répondu présente à un moment ou à un autre mais tout ça pour dire que malgré qu’elle aime bien ça, rien n’est jamais sûr. La blonde suit ensuite son verre d’eau jusqu’à la table basse et se rassied dans le canapé tandis qu’Amy lui fait savoir qu’elle a l’intention de se commander une pizza avec de la viande, tant pis pour le régime. Avec un petit sourire en coin, Clare acquiesce : c’est l’idée ! Certes, c’est aussi pour ça que quelques personnes en dépression ont tendance à prendre du poids entre les plats réconforts et les antidépresseurs mais est-ce que ça n’en vaut pas la peine ? Elle est d’avis que si. Et puis si les gens sont incapables de vous aimer parce que vous avez des kilos en trop, c’est qu’ils n’en valent tout simplement pas la peine et qu’il vaut mieux leur fausser compagnie dès que possible. Là-dessus, son amie enchaîne en annonçant qu’elle va se laver. Clare pourrait lui dire que c’est inutile, qu’elle l’a déjà vue comme ça et que ça ne la dérange pas, mais si ça peut lui faire du bien de s’apprêter un peu, alors autant la laisser faire. « Okay, je vais commander sur ce temps, tu sais déjà ce que tu veux ? » Avec de la viande, oui, mais y en a de toutes sortes, alors elle pouvait peut-être spécifier encore davantage ? Elle attend la réponse avant de passer l’appel. Ce qui l’occupe le temps qu’Amy en ait terminé dans la salle de bains. « Wow, c’est que t’as carrément sorti le grand jeu ! » C’est ce qu’elle lance non sans une pointe d’humour en voyant que la jeune femme est même allée jusqu’à se maquiller un peu. Le genre de choses qu’elle serait bien incapable de faire dans ses propres moments de crise. « Les pizzas devraient arriver d’ici quinze à vingt minutes. Y a plus qu’à se trouver un film. » Ou une série ou des vidéos sur YouTube ou de la musique, Clare n’est pas bien difficile.
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Sujet: Re: I Feel So Bad ♪ (#) Mar 11 Juil - 22:36
I Feel So Bad
Rien que l’idée de passer du temps avec Clare et une bonne pizza me fait me sentir mieux. C’est que c’était devenu rare les moments comme ça. Parce que je n’avais plus d’amis et que je mangeais plus beaucoup. Et parce que j’avais pas eu la tête à ça. Et putain ce que ça m’avait manqué en fait. J’en avais besoin. De me sociabiliser à nouveau, de sortir un peu de ma routine. Bien sûr pour la plupart des gens c’est très normal et courant ce qu’on fait là. Mais pour moi, ça signifie beaucoup de choses. Que je vais mieux, même si je le savais déjà, que je commence une nouvelle vie et … j’en fais sans doute légèrement trop, hein ? Ouais, on parle d’une soirée pizza et télé, après tout. Que voulez-vous, j’ai appris à me contenter de peu. A trouver le bonheur dans les petites choses, de toujours voir le côté positif des choses et toutes ces conneries. Pardon. C’est pas des conneries, mais des fois … Comment expliquer ça ? Des fois j’en ai marre de tout ça et … vous comprenez ce que je veux dire ? Non ? Normal, moi non plus. Ca arrive de temps en temps. Mon esprit qui s’embrouille pour rien. Des questions inutiles que je pose. Mon cerveau qui fonctionne à plein régime sans raison. Je sais pas si c’est un symptôme ou une hyperactivité jamais diagnostiquée ou autre chose. Faudrait que je me penche sur la question.
Pour l’heure la question importante c’est : on mange quoi ? J’ai bien envie de viande. Même si je suis végétarienne. Enfin normalement. Ca ne fait que quelques mois. J’ai le droit de ne pas toujours respecter. Entre autres parce que je fais pas ça par principe. C’est surtout que ça peut pas me faire de mal et que je me dis qu’en un sens ça pouvait, euh … me « purifier » ? Enfin, me détoxifier, tout ça, nettoyer un peu mon organisme et le soulager de tout ce que je lui ai fait subir. Alors que c’est probablement des conneries. Bah … Amy, arrête de réfléchir. Arrête de penser, putain. Tu t’étais un peu calmée. Alors reprends-toi. « J’ai super envie de poulet ! Avec de la sauce barbecue et des poivrons ! » Ouais. J’ai besoin de ressentir quelque chose. Même si c’est juste la brûlure de la capsaïcine et des additifs douteux. De toute façon j’ai déjà mal partout alors autant qu’il y ait du plaisir si c’est pour se faire mal à nouveau. Oh. Une autre phrase intéressante. Potentiellement. Je la garde en tête alors que je me dirige vers la salle de bain pour me refaire une beauté. Ouais. Malgré le fait que je ne sois pas au mieux de ma forme. C’est que j’ai toujours eu un faible pour ça. Le maquillage. La coiffure, sublimer son visage, voire le transformer. Ca me fascine en un sens. Je crois que j’aurais travaillé dans l’esthétique si je n’étais pas devenue une célébrité mondiale. Oh … je pourrais me reconvertir là-dedans, en fait, maintenant que j’y pense ? Pourquoi j’y ai jamais pensé ? Bah, il faut sûrement un diplôme et pour le passer j’imagine qu’il faut avoir été à l’école. Jusqu’au bout je veux dire. Et c’est pas mon cas. Mais je me pencherais là-dessus quand même. On ne sait jamais.
Bref. Me voilà peu plus présentable. Je retourne vers Clare l’esprit un peu léger, en chantonnant de vielles chansons. « Wow, c’est que t’as carrément sorti le grand jeu ! » Je souris. Clare, tu m’as jamais vue totalement sortir le grand jeu. Mais j’apprécie. « Merci ! Je te plais ? », que je lui demande avec un clin d’œil. Ouais, je la taquine un peu. Je la drague pas. Enfin pas vraiment. Je suis pas lesbienne. Enfin pas bisexuelle plutôt. Enfin … je crois pas ? C’est un peu compliqué, en fait. Je me suis parfois posé la question, je vais pas vous mentir. J’ai couché avec des filles, j’y ai prit beaucoup de plaisir mais … ben j’ai jamais été amoureuse d’une nana donc la question elle est vite répondue je crois. Arf, comme si j’en avais quelque chose à faire de ce que je suis ou pas. Enfin oui, j’aimerais bien en être certaine mais disons que j’ai d’autres priorités. Genre … choisir ce qu’on va regarder en mangeant nos pizzas. C’est clairement plus important.
« Hum … un film d’action ? Quelque chose pas prise de tête ? », que je propose à Clare. L’espace d’une seconde j’ai eu envie de voir un de mes anciens concerts sur YouTube mais je me suis dit que c’était un peu narcissique et puis ça allait juste me rendre triste. Du coup un bon film avec de la bagarre, des explosions et une ou deux scènes de sexe non protégé, ce serait très bien. « Un film avec Jason Statham ! J’ai toujours eu un faible pour lui » Je plaisante même pas. Il est musclé, il est anglais et puis je sais pas, j’aime bien les chauves. Le côté vachement viril, tout ça. Enfin je sais que je suis pas dans la majorité sur ce coup-là. « Ou un James Bond, je sais pas. » Mes goûts en matière de cinéma ne sont pas très raffinés on va dire. C’est surtout que j’y connais rien. Et puis en réalité l’important c’est pas tellement le film, mais de passer du temps avec quelqu’un qu’on apprécie. Oh. Bizarre comme phrase. On dirait que j’ai l’intention de pécho Clare alors que je serais même pas en état de faire quoi que ce soit avec elle. Et puis je sais même pas … euh, ses goûts. Maintenant que j’y pense, il me semble pas l’avoir déjà vue avec quelqu’un. Bah, ça ne veut rien dire. On est pas si proches que ça, notre relation est surtout professionnelle alors elle n’a peut-être jamais eu l’envie de me présenter quelqu’un. Hum. Je sais même pas pourquoi je pense à ça. « Franchement, choisis ce que tu veux. Je suis pas difficile » Histoire de clore ce sujet-là.
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Clare van der Linde
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Sujet: Re: I Feel So Bad ♪ (#) Jeu 13 Juil - 21:11
En tant que personne assistant aux réunions des alcooliques anonymes depuis son arrivée dans ce pays, Clare entend sans cesse les gens clamer qu’ils vont arrêter quelque chose du jour au lendemain. La cigarette, l’alcool, la drogue, le fait de manger de la viande et tout ce qui s’ensuit. Pour les entendre ensuite avouer qu’ils ont fait une petite entorse au règlement mais que ce n’est pas grave parce qu’ils veulent vraiment y parvenir alors la prochaine fois sera la bonne. Et pour être passée par-là elle aussi, elle sait que c’est tout sauf simple, que tout le monde a besoin de pouvoir craquer à un moment ou à un autre. C’est bien pour cette raison que dans ces moments-là, elle ne fait aucun commentaire, afin de ne culpabiliser personne davantage. Ça serait contre-productif. Hochant la tête, Clare cherche son téléphone au fond de la poche de son manteau pour ensuite chercher la carte de la pizzéria sur le net, tout en laissant Amy à ses ablutions. Une fois qu’elle a repéré à peu de choses près la pizza que son amie lui a décrite, elle se pose enfin la question de savoir ce qui lui fait envie à elle. Ça n’a pas toujours été le cas, mais depuis son sevrage, la blonde a tendance à faire passer tout le monde avant elle. Une attitude des plus altruistes si on ne prend pas la peine gratter un peu le vernis. Et c’est très certainement ce qui la motive le plus, bien sûr, mais elle ne peut pas nier qu’en s’occupant des autres, c’est elle qu’elle met volontairement de côté et pas uniquement par bonté d’âme – dire qu’elle donne un peu raison à son filleul en en arrivant à cette conclusion, ça fait mal. Par chance, elle n’est pas du genre à se voiler la face – ce qui serait condamné par les AA, déjà -, et elle travaille là-dessus quand elle ne se désiste pas pour sa séance psy, sous prétexte qu’elle a trop de travail. Tout ça pour dire qu’elle prendra une margherita. Pas besoin de quelque chose de trop complexe. Sans plus tarder, elle passe donc l’appel et la commande et on lui donne une heure approximative de livraison. Une fois qu’elle a raccroché, Clare prend une gorgée d’eau et voit Amy sortir de la salle de bains, toute pomponnée. Qui, suite à sa remarque, lui demande si elle lui plaît. Le tout accompagné d’un clin d’œil, ce qui signifie qu’elle n’est pas sérieuse. Qu’à cela ne tienne, elle est bien placée pour savoir que ça fait beaucoup de bien de recevoir un compliment de temps à autre. « T’es très jolie. » Avant d’acquiescer à nouveau. Va pour un film d’action sans prise de tête. Un film avec Jason Statham… Clare fronce les sourcils, fouillant sa mémoire pour voir si la tête qui va avec ce nom lui revient, mais c’est pas le cas. « C’est qui ? » C’est pas que Clare est inculte… Enfin, peut-être un peu, mais disons qu’elle préfère lire. Alors si ce Jason Statham a joué dans des films adaptés de bouquins, ça l’intéresse. Ou alors un James Bond. Là, Clare est en terrain connu parce que, vous l’aurez deviné, elle l’a lu. Réactivant son téléphone, elle cherche le nom de l’acteur pour tomber sur sa filmographie et, fermant les yeux, pointe l’écran du doigt. Quand elle rouvre les yeux, c’est pour voir le titre « En eaux troubles ». Ça ne lui dit rien mais est-ce vraiment surprenant ? Non. « En eaux troubles ? C’est bien ? »
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Sujet: Re: I Feel So Bad ♪ (#) Sam 15 Juil - 19:36
I Feel So Bad
Je ne suis pas vraiment sérieuse quand je flirte avec Clare. Enfin, si on peut appeler ça flirter … c’est surtout histoire de voir sa réaction. Et puis bon, on est des nanas, on pourrait presque se rouler des pelles que ce serait pas perçu comme gay, juste qu’on serait des très bonnes amies. J’exagère ? Ben évidemment que ouais. Après j’avoue que ça ne me déplairait pas. Ca fait longtemps que je ne me suis pas amusée avec une autre fille ; à l’époque (pas si lointaine) où j’étais pute, je n’ai pas eu beaucoup de clientes féminines. Ce n’est pas dans les mœurs de faire appel à quelqu’un lorsqu’on est une femme qui se sent seule. Bon c’est surtout lié au fait qu’une femme trouve plus facilement quelqu’un pour coucher avec elle qu’un homme, la misère sexuelle tout ça mais on va pas parler de politique parce c’est pas mon truc, pas envie de me faire chier avec ça. Tout ça pour dire que … merde, je sais même plus ce que je voulais dire. Ah ouais. Moi qui dragouille gentiment Clare. Ça me vaut un nouveau petit compliment de sa part et c’est tout ce que j’espérais. Je m’attend pas à ce qu’on se retrouve à faire les ciseaux à poil sur le canapé ou à ce qu’elle me mange le Crustabri parce que de toute façon … faudrait qu’elle soit une vampire. Ne me remerciez pas pour cette métaphore.
C’est bien joli tout ça mais le plus important ça reste de savoir ce qu’on va regarder. Eh bien, ça me semble assez évident ! Un film d’action. Ca va me changer les idées et puis c’est une valeur sûre. Et y aura toujours de l’intérêt à regarder même si on choisit un truc nul. Mais tant qu’à faire, autant utiliser la prochaine heure et demie environ à bon escient. Du coup, c’est assez évident : Jason Statham. Ses films sont sympas généralement et puis c’est un régal pour les yeux, cet homme. Après j’ai peut-être des goûts bizarres mais ce serait tout à fait mon style de mec. Grand, musclé, un côté froid. Enfin … dans l’absolu je peux craquer pour n’importe quel homme. Tant qu’il est plus grand que moi. Je fais un mètre soixante-treize d’ailleurs, si ça vous intéresse. Ouais, je suis grande, il paraît. « C’est qui ? », me demande Clare lorsque j’évoque le nom de mon anglais préféré. « Un acteur anglais, le chauve le plus connu du cinéma », fais-je en riant un peu (et en oubliant Bruce Willis aussi). Vous méprenez pas, je me moque pas de sa calvasse, mon père en a une. « Il est super beau ! » je poursuis comme si mon avis avait une quelconque importance ou que ça jouait sur ses compétences d’acteur. En plus, maintenant que j’y pense, tous ceux qui travaillent dans le cinéma sont beaux. De manière générale, quiconque est un minimum connu est considéré comme tel par la plupart des gens. Ouais … c’est un peu triste mais si t’es pas au moins un peu beau, tu perces pas, sauf exceptions. Moi-même on ne me connaissait pas que pour ma jolie voix, on va pas se leurrer. J’en jouais d’ailleurs. Je mettais beaucoup en valeur certaines parties de mon corps. Ouais … pendant quelques temps j’étais belle, riche et populaire. Maintenant je suis seulement belle (enfin je pense), ce qui n’est pas si mal j’imagine.
On finit par trouver un film. « En eaux troubles ». Hum … je le connais pas celui-là. Mais s’il y a Jason dedans, il faut que je le regarde. « Celui-là je le connais pas, mais pourquoi pas ! » C’est probablement un film qui parle, euh … d’eau ? Wow, Amy, quelle déduction, Sherlock Holmes n’a qu’à bien se tenir. Bon, je profite d’aller me chercher une canette de boisson énergisante dans le frigo pour consulter rapidement le synopsis du film sur mon téléphone. Plongeur, eaux profondes, épave, Mégalodon. Bien compris. Ca a l’air sympa. « Ca a l’air de faire un peu peur » aussi, dis-je à Clare en revenant m’asseoir sur le canapé. « Mais pas grave, ça va me changer les idées ! » J’ai besoin de ressentir quelque chose. Et puis ce sera pas un film d’horreur non plus. Ca, je supporterai pas. C’est quoi l’intérêt de regarder un film si c’est pour pas te sentir bien ? Jamais compris. Après je suis loin d’être une cinéphile donc mon avis n’a sûrement aucune importance. En tout cas, c’est décidé ! Ce sera ce film-là. Bien. J’ai hâte, ça fait longtemps que je n’ai pas fait ça. « On attend les pizzas avant de commencer ? », je demande à Clare. De toute façon, il faut que je me renseigne sur comment le voir, ce film. Il est probablement en VOD quelque part. Faudra bien, car j’ai pas le temps ni l’envie de le télécharger. J’ai même pas d’ordinateur. J’ai plus grand-chose en fait. Tout revendu soit à l’époque pour m’acheter de la drogue, soit lorsque j’ai décidé de venir ici. Et bizarrement, le strict minimum, ce n’est pas si mal.
Un acteur chauve et anglais ; voilà une description qui fait rire Clare. Pour quelqu’un qui n’en a plus un sur le caillou, c’est quand même un poil réducteur de ne le résumer qu’à sa capillarité. Mais ce n’est pas tout ce qu’elle apprend à son sujet puisqu’Amy lui annonce également qu’il est anglais. Le plus connu et que, d’après son amie en tout cas, il est trop beau. Et comme elle n’a aucun moyen de savoir si c’est vrai puisque c’est un nom qu’elle ne connaissait pas y a encore dix minutes, elle ne remet rien de tout ça en doute. D’ailleurs, elle serait bien incapable de citer un seul autre acteur chauve et anglais. Pourtant il doit forcément y en avoir. « Bon, ben même s’il n’est pas très doué, ça sera déjà ça de pris. » Bien qu’elle ne soit pas certaine que ça soit son genre à elle. Mais ça pour le savoir, fallait encore savoir quel était son genre et le fait est que Clare ne s’est jamais vraiment posé la question. Pas eu le temps entre l’or, les diamants, l’alcool, la désintox et puis le boulot. Un jour peut-être. Ou pas, c’est pas comme si elle avait l’impression de passer à côté de grand-chose en n’accordant pas plus d’importance que ça à sa vie sentimentale de toute façon. Ça serait même plutôt le contraire. Bref, pour en revenir au film, le choix lui revient. Et comme elle ne connaît pas, la blonde ne peut se fier qu’aux titres. Parmi lesquels elle ne choisit même pas puisqu’elle préfère laisser faire le hasard. En Eaux Troubles. Le titre a l’air pas mal, en tout cas. Même si ça peut vraiment parler de tout et n’importe quoi. En tout cas, elle n’est pas la seule à ne pas connaître puisque la fan numéro un du fameux Jason lui apprend alors que ça ne lui dit rien, ce film, mais pourquoi pas, du coup. Clare approuve d’un mouvement de tête avant d’hausser les épaules en entendant que ça a l’air de faire un peu peur. Tout ça, c’est toujours très relatif mais elle ne va pas juger de la sensibilité de qui que ce soit. « Si tu préfères, j’en choisis un autre. » Celui-là ou un autre, c’est pareil pour elle. Mais Amy lui assure alors que pas besoin, ça devrait lui changer les idées. Puis elle acquiesce à nouveau quand elle lui demande si elles attendent les pizzas d’abord. C’est peut-être plus judicieux que de lancer le film et avoir à le mettre sur pause au coup de sonnette. D’ailleurs, elle se met à fouiller dans son sac à la recherche de son portefeuille, histoire d’être prête quand le livreur arrivera parce que Clare est du genre à détester faire attendre. Puis, pour occuper le temps jusqu’à la livraison, elle se lève et retourne côté cuisine. « De quoi on a besoin ? » Pas de couverts en théorie. Enfin, elle, ça ne la dérange pas mais elle sait que la plupart des gens trouvent ça bizarre parce que pour une fois qu’on peut manger avec les doigts, pourquoi s’en priver ? Des serviettes peut-être ? Ou de l’essuie-tout, en fonction de ce qu’Amy a chez elle. Du papier toilette pourrait même faire l’affaire si elle est à court de tout le reste. A la guerre comme à la guerre, et un sevrage ressemble clairement à une guerre personnelle. C’est alors qu’elle se fait surprendre par le retentissement de la sonnette et regarde la porte d’entrée d’un air surpris. Ça ne fait pas quinze minutes, si ? Peut-être, le temps passe vite quand on s’amuse. Dans tous les cas, Clare récupère son portefeuille laissé sur la table basse avant qu’Amy ait le temps d’esquisser le moindre geste et annonce : « J’arrive tout de suite. » A moins bien sûr qu’il ne s’agisse d’un voisin de son amie qui aurait besoin d’un peu de sucre pour son gâteau ou quelque chose comme ça.
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Sujet: Re: I Feel So Bad ♪ (#) Mer 26 Juil - 21:49
I Feel So Bad
Ca s’annonce pas mal comme soirée. Rien de mieux qu’un moment comme ça pour se sentir mieux. Ca me rappelle un peu quand j’étais plus jeune et que les garçons et moi on passait des nuits entières à regarder la télé et jouer à deux jeux-vidéo en mangeant des conneries. On faisait aussi de la musique, évidemment, beaucoup, même si c’était risqué passé une certaine heure parce que ça dérangeait les voisins et qu’on se faisait engueuler du coup. Sur le moment on faisait pas les fiers même si ça nous faisait surtout marrer au final. Ah, c’était des bons moments tout ça … parfois je me dis que c’était pendant les années de galère de mon groupe que j’étais le plus heureuse. Parce que tout était … plus simple, en un sens ? On attendait rien de nous, y avait pas notre label, le producteur ni notre manager pour nous foutre la pression, y avait pas de fans qui nous harcelaient … Paradoxalement, quand on a commencé à être vraiment connus on est devenu un peu moins libres. Mais c’était quand même génial hein, je vais pas me plaindre de tout ça ! le fait que ce soit devenu moins génial c’était entièrement de mon fait. Ouais, la coke. Comme d’habitude, hein. Chaque fois que je me pose la question d’où ça a merdé dans ma vie, c’est la dope qui me vient en tête. Merde … des fois je me dis que ça aurait peut-être été mieux que ça ait fini par me tuer, que je succombe à mon overdose. T’as plus de problèmes si t’es plus de ce monde.
Ben merde alors, v’là que je me remets à penser à ce genre de choses. Faut que j’arrête, genre immédiatement et que je me concentre sur ce qu’il passe, là. Je veux dire, ce soir. Pizza, Clare, Jason Statham. Je veux penser à rien d’autre. Penser au passé, ça va pas m’aider dans ce cas-là. Le mal est déjà fait, tout ça … Bref. Clare et moi nous sommes mises d’accord sur le film, plus qu’à attendre les pizzas et à s’installer confortablement. Ca va me faire du bien. Et je saurais pas dire pourquoi mais j’ai comme l’impression que Clare en a bien besoin aussi. Ca me fait plaisir qu’elle soit là, en tout cas.
« De quoi on a besoin ? », demande-t-elle. Hum … pas grand-chose. « Y a de l’essuie-tout dans la cuisine » Et puis ça ira bien. Ca se mange avec les mains la pizza. Bon je suis allée en Italie quelques fois et ils le font pas, mais aucune importance, on est pas en Italie. Et puis vaut mieux que je continue à rester loin d’un couteau ou de quelconque objet tranchant et/ou piquant, au cas où ça me reprenne. Même si bon, j’ai de la volonté et … ah, ça sonne à la porte. Déjà ? Elles sont en avance, les pizzas. C’est rare ça. Après c’est peut-être quelqu’un qui me rend visite à l’improviste ou je sais pas. Je regarde Clare se diriger vers la porte d’entrée. On va en avoir le cœur net. Bon … oh, ben ouais, c’est les pizzas ! « Ils se sont pressés on dirait », fais-je non sans plaisir en aidant Clare à les ramener à l’intérieur. Pas que je m’en plaigne, j’ai très faim. Une bonne chose de faite du coup ! Maintenant, plus qu’à se poser.
Bon, deux heures plus tard … il était pas mal ce film. Et je me sens beaucoup mieux ! Comme quoi, il suffisait de peu. La clé, je pense, c’est de focaliser son esprit sur autre chose. De s’occuper, pas de se morfondre. Enfin ça je le savais déjà, c’est pas ma première crise de manque. C’est surtout que je l’ai pas vraiment vue venir celle-là. D’habitude j’arrive à le prévoir. Je sais pas trop comment l’expliquer. Quoiqu’il en soit, ça va mieux. Mais je veux pas que Clare s’en aille pour autant. Pas tout de suite.
« C’était pas mal, je trouve ! », fais-je à Clare en m’étirant. Y a juste un moment où on a dû interrompre le film cinq minutes à cause mes … problèmes de fille, mais à part ça j’ai pas décroché un seul instant. Je suis sûre que le beau crâne dégarni de Jason Statham a un effet thérapeutique sur moi. La pizza c'est certain que oui en tout cas. « J’me sens beaucoup mieux ! » Si ça se trouve j’en avais juste marre d’être seule. C’est pas bon pour moi la solitude, même si j’ai fait semblant du contraire pendant un paquet d’années. En vérité, la foule me manque. Celle des concerts, je veux dire. Celle qui chante à tue-tête, qui t’acclame, qui te vénère. Je sais pas pourquoi je le réalise seulement maintenant par contre. Est-ce que c’est très courant d’avoir une épiphanie en plein visionnement d’un film d’action ?
« J’ai envie de sortir », je m’écris soudainement à Clare en prenant mon sweat à capuche sur le dossier du canapé. Me demandez pas pourquoi. Je le sais pas moi-même. Peut-être que c’est seulement parce que je me sens mieux, ou peut-être que c’est le destin ou je sais quelle connerie. Ou bien c’est juste parce qu’il s’est mis à pleuvoir un peu et que j’ai toujours trouvé la pluie inspirante. Je sais pas.
Sans demander son avis à qui que ce soit, et donc pas même à la principale intéressée, Clare s’apprête à descendre chercher les pizzas. Mais en ouvrant la porte, elle tombe nez à nez avec le livreur. Ah, quelqu’un a dû lui ouvrir la porte en bas et il n’a plus eu qu’à se repérer dans le bâtiment. Où, d’après ses dires en tout cas, il vient souvent. Et vous noterez qu’il s’agit donc d’un livreur et pas de la fameuse livreuse dont on lui a déjà parlé. Bonne nouvelle puisque lui n’a pas l’air d’avoir envie de s’amuser en jetant ses pizzas comme des frisbees. La blonde règle ensuite le repas, ne remarquant même pas que le livreur a commencé à gentiment flirter avec parce que oh, c’est jamais qu’une façon comme une autre de vendre plus, pas vrai ? Et retourne à l’intérieur, cartons de pizzas en main quoique bien vite aidée par Amy qui l’en débarrasse. Puis il n’y a plus qu’à récupérer l’essuie-tout et s’installer pour lancer le film. Ce qu’elles font. Dans le silence. C’est pas pour déplaire à Clare qui, après ses journées super mouvementées à la clinique et ses soirées aux AA pas beaucoup plus calmes, n’est jamais contre le fait de ne pas avoir à faire la conversation en permanence. D’autant que si tel était le cas, alors elle n’entendrait plus rien de ce que ce fameux Jason Statham était en train de raconter. Déjà qu’elle comprenait pas bien comment, pourquoi y avait un mégalodon dans l’histoire ou même ce qui avait fait qu’il soit sorti de ses eaux tranquilles pour s’en prendre à l’homme à la calvitie. Alors non, elle comprend rien mais elle a le sentiment que c’est pas grave et ne cherche pas beaucoup plus que ça non plus. Ce qui fait que les deux heures passent vite entre les parts de pizza dégoulinantes de gras et les répliques si peu subtiles de ce film – et c’est bien tout ce qu’on lui demande, d’ailleurs. Puis, une fois que le générique commence à défiler à l’écran, son amie déclare qu’elle a trouvé le film pas mal et à la manière dont elle le dit, on sent que c’est sincère et que ça a suffi à lui faire du bien. Clare acquiesce d’un mouvement de tête enthousiaste. « Et j’ai trouvé que le mégalodon était assez réussi. » Mais elle dit ça avec son peu d’expérience en la matière étant donné que le seul autre film de requins qu’elle a vu, c’est les Dents de la Mer. Y a fort longtemps, d’ailleurs. Alors forcément, les effets spéciaux ont sûrement beaucoup évolués depuis. Bref, pas vraiment le temps d’épiloguer sur le sujet puisque c’est alors qu’Amy s’écrie qu’elle a subitement envie de sortir. Ah. Maintenant ? Alors qu’il pleut ? Pas que ça la dérange. En fait, la pluie en Nouvelle Zélande n’a strictement rien à voir avec celle d’Afrique du Sud et c’est dans ces petits moments-là que Clare prend réellement conscience des changements opérés dans sa vie depuis qu’elle a changé de pays. Voyant qu’elle prend son sweat à capuche, elle se lève à son tour et récupère ses affaires en vitesse, abandonnant les cartons de pizzas sur place avant qu’elle ne change tout aussi subitement d’avis et demande : « Okay, on va où ? » Marcher sous la pluie ? Voilà qui collerait parfaitement à l’idée qu’on se faisait généralement des auteurs, compositeurs et tout ce qui s’ensuit. Mais Amy a peut-être un but plus précis que ça en tête ? Du genre, oh, elle n’en sait trop rien, un concert, peut-être ? Ou bien la plage. Ou mieux encore, les deux en même temps. Island Bay pouvait être une ville étonnante.
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Je saurais pas vraiment l’expliquer mais je me sens comme si mon cerveau avait rebooté. Je veux dire par là que … je sais pas, j’ai l’impression que mes soucis, que tous les trucs qui m’emmerdaient plus ou moins ont disparu. Ou du moins qu’ils me préoccupent plus autant. C’est chelou, mais pas désagréable. Je pensais pas qu’un film pouvait faire ça, à priori un film qui n’est pas vraiment un chef d’œuvre – mais après tout, ça peut faire beaucoup de choses, l’art. Je le sais bien, je suis une artiste moi-même. J’en étais une en tout cas. Evidemment, le cinéma et la musique c’est complètement différent mais les deux sont des moyens de faire passer des émotions, des sentiments et moi j’y suis pas mal sensible, semblerait-il. Pas étonnant. C’est le cas de tous les artistes. C’est juste qu’on le dit pas tous parce que dire qu’on pleure devant Forrest Gump par exemple c’est pas très crédible pour un rockeur barbu et tatoué. Parce qu’on doit tous plus ou moins se conforter à une certaine image, à des stéréotypes, tout ça. Et je dois bien avouer que même moi j’y échappait pas. Parfois j’avais l’impression d’être un cliché sur pattes. Peut-être bien que le vrai moi, la véritable Amy c’est celle que je suis maintenant.
Ouais enfin … peut-être que je réfléchis trop, hein. Désolée, je pensais pas que regarder un film me ferait faire de la philosophie. En tout cas, ça m’a bien revigorée. C’était pas mal. Même si je suis pas objective parce que je suis obligée d’aimer un film avec Jason dedans. Comme je vous l’ai dit, c’est plutôt mon style de mec. Hélas, notre amour est impossible. Il a trente ans de plus que moi, des gamins et surtout une femme (super jolie). Dommage … « Et j’ai trouvé que le mégalodon était assez réussi », commente Clare. Grave ! « Ouais, t’as vu ?! Il paraît qu’ils sont vraiment existés d’ailleurs. Certains disent qu’il y en aurait encore aujourd’hui. » Après tout, c’est rien de plus qu’un gigantesque requin. Les calmars géants et des animaux improbables comme l’ornithorynque existent alors un mégalodon ce serait pas déconnant. Même si j’aurais pas spécialement envie d’en rencontrer un. Contrairement à, euh … une licorne par exemple. Ca non plus c’est injuste que ça n’existe pas alors que c’est rien de plus qu’un canasson avec une corne. La vie est tellement mal faite …
J’ai envie de sortir, que je dis à Clare. Ouais. J’ai envie de prendre un peu l’air. Ou de partir à la chasse au mégalodon, je sais pas trop. Même si je devrais plutôt avoir l’envie de plus jamais refoutre les pieds dans l’eau en toute logique. Paraît que ça a fait ça à pas mal de personnes à l’époque des Dents de la Mer. J’en sais trop rien, j’étais pas née bien sûr. Enfin bref. On y va. Mais où donc, que me demande Clare. « Soirée entre filles, on va s’amuser », que je lui dis en l’entraînant dehors. Pour tout vous dire, je ne suis pas certaine qu’où on va ni de ce qu’on va faire. Je pense que j’ai juste envie de passer encore un peu de temps avec elle et … oh, je crois que j’ai une idée en fait !
« Suis-moi, c’est pas très loin ! » que je dis à mon amie avec un sourire au coin des lèvres. En fait, on va à l’autre bout de ma rue. Chez un voisin avec une petite piscine. Vous comprenez où je veux en venir, n’est-ce pas ? Non ? Eh ben, disons que j’ai subitement retrouvé l’envie de faire quelque chose de stupide et rebelle ; et probablement illégal aussi. Comme quand j’étais plus jeune et un peu bête. Et doit y avoir aussi l’envie de dévergonder un peu Clare. Pas dans le sens sexuel du terme. C’est juste que j’ai bien vu qu’elle n’était pas forcément au mieux de sa forme non plus et j’ai envie de lui faire passer un bon moment. A condition qu’elle joue dans le jeu, ce qui n’est pas garanti et … ah, on est arrivées !
Parfait, y a pas de lumière dans la baraque, ils doivent être sortis. Ça veut dire qu’il n’y aura personne pour nous déranger. Ou en tout cas, pas tout de suite. Bon, allons-y ! Saisissant Clare par le bras, je longe la haie qui clôture la maison jusqu’à ce que je retrouve l’endroit, là où la haie est un peu plus basse. Sans la moindre hésitation, je saute par-dessus et encourage Clare à faire de même. « On va se baigner ! T’inquiète pas, c’est la maison d’un ami, il dira rien ! » C’est faux évidemment, mais il paraît que je mens bien. Au pire, qu’est-ce qu’on risque ? Ils sont sympas les néo-zélandais, ils vont pas nous lâcher la police dessus pour ça, non ? On risque pas de se prendre une balle par le proprio non plus - c’est sûr que c’est pas la même mentalité que dans mon pays, hein.
Maintenant, la suite du plan. La piscine n’est qu’à quelques pas. Elle est probablement super froide mais pas grave, une fois qu’on est dedans elle est bonne comme on dit. Sans hésiter, je me désape. « C’est pas très hygiénique de se baigner toute habillée », j’explique à Clare non sans me marrer un petit peu. Je sais, je devrais sans doute me sentir gênée d’être comme ça devant une simple amie dont je suis même pas si proche mais il fait nuit après tout donc on voit pas grand-chose. Au pire, elle en a vu d’autres ! Enfin peut-être. Bref. Je trempe un premier orteil dans l’eau histoire de prendre la température (littéralement). Putain, c’est froid. Normal. Mais maintenant que j’y suis, autant y aller à fond, alors après une petite seconde d’hésitation je me jette dans la piscine en faisant un gros plouf comme si de rien n’était. « Tu viens ? », je demande tout sourire à Clare.