l'histoire de ma vie
J'ai confiance en tout le monde, ce dont je me soucis, c'est du démon tapis en chacun de nous.
Les sangles de mon sac à dos m'arrachent une grimace qui me sort de ma marche mécanique. Mon sac à dos ! Ma maison oui ! Toute ma vie tient dans un sac de randonner. Une paire de basket usée pend à côté de mes gants de frappe, une casserole équilibre l'autre coté et mon sac de couchage sur le dessus. La loose!
Toute ma vie n'a été qu'une succession d'échecs et de fuite en avant. D'aussi loin que je me souvienne, les choix que j'ai faits ont été guidés par l'argent facile. Mes meilleures années sont celles dont je ne me souviens pas.
Je suis née à New-York dans un arrondissement de Manhattan appelé "Little Italy". Italienne de souche, je crois que c'est grand-père qui a immigré aux états unis. Je vivais avec mon père, ma mère et mon grand frère dans un immeuble sur Mulberry street.
Mon vieux était un pseudo-mafieux de bas étages qui distillait et revendait de l'alcool dans la cave. C'était un homme sévère, peu enclin à la discutions, qui préférait laisser parler ses points. Ma mère, elle, était son sac de frappe. Elle vivait sous la terreur de cet homme qu'elle adulait. Elle ne travaillait pas, mais était la première levée et la dernière couchée. L'appartement était un sanctuaire aseptisé qu'elle rangeait à chaque objet déplacé. Présente et opprésente, elle débordait d'amour pour Giovani et moi. Mon grand frère, de dix ans mon ainé, était la figure que j'aimais regarder. Il ressemblait à père, les coups en moins et avait la tendresse de notre mère. Il m'emmenait partout avec lui, fier de me montrer au voisinage. A la "san Gennaro, la fête annuelle qui durait onze jours, il me hissait sur ses épaules et me trimballait toute la journée de stands en attractions.
A dix neuf ans, il intégra l'US Army et mourut un an plus tard sur un champ de bataille pour une guerre absurbe. Ce jour-là, mon Coeur se brisa et ce fut le début de ma déchéance.
Mon vieux gagnait plutôt bien sa vie avec son trafic, mais il en voulait toujours plus. Mais c'était sans compter sur la pègre locale qui gérait d'une main de maître les trafics de Little Italy. Nous fument dans l'obligation de déménager et de nous cacher pour ne pas retrouver le vieux découpé en morceau ou les pieds celés dans le béton au fond de la baie. Les cinq ou six ans de cavale achevèrent notre famille. Les coups du vieux eurent raison de ma patience. Aux derniers déménagent pour moi, ils partirent tous les deux. Ma fugue était déjà bien avancée.
Sea, sexe and sun me voilà!
Mon cul, oui! Pour une ado, seule à New-York, c'est...
Street, sexe and druggs!
Les années qui ont suivi m'ont permis de découvrir que le vieux m'avait légué quelque chose. La capacité à encaisser les coups comme personne. Je vivais de squat en squatte, me battais pour dormir au sec et me droguais pour oublier que j'avais perdu. Vers mes dix-neuf ans, je crois, je fis la connaissance de Lucas, un petit dealer qui me filait quelques doses pour quelques heures sous les draps. Il vit en moi un potentiel pour les combats illégaux et fit naitre en moi le goût pour l'argent facile. Les quatre années à ses côtés ne furent pas désagréables et nous permirent de nous remplir les poches.
Mais ! Car il y a toujours un mais. Je l'ai retrouvé un matin, dans son vieux break, tout pâle, les yeux sombres, écumant de bave avec une seringue dans le bras. Dealer et junkie ne font pas bon message.
Nouvelle fuite en avant après avoir récupéré son fric et sa voiture.
Nouvelle période, dite celle du routard. Pas d'attache, une voiture qui sert de maison et une somme confortable pour commencer à bouger. Rien de mieux pour visiter le pays. Ces années n'ont as été très trépidante en anecdotes, mais très riches culturellement parlant. Elles m'ont permis de gagner un peu en sagesse (haussement de sourcils) et surtout d'apprendre à se construire. Je faisais quelques petits boulots ici et là. Plongeuse ou serveuse dans un motel, femme de chambre ou fille de joie... Oups ! J'ai pensé à voix haute. D'ailleurs, j'ai connu une fille de nouvelle Zélande, qui m'a initié aux plaisirs entre filles, c'était... Orgasmique !
Je ne me souviens plus de son nom, je l'ai mangé. Y a pas que ça que j'ai mangé. Oups ! Repensé à voix haute. Enfin bref, quoiqu'il en soit, après quelques mois torrides, elle s'en alla en me disant que je serais bienvenue à Wellington.
Donc, après Washington, Columbia, Atlanta et Miami, j'ai vendu le break et pris un billet d'avion pour la Nouvelle-Zélande.
Auckland ! À peine sortie de l'aéroport, je savais que j'allais aimer cette île et qu'une vie nouvelle allait commencer. Il était temps d'aller de l'avant pour vivre et non fuir. Nos démons sont tapis en nous, à nous de ne pas les réveiller.
Je suis fauchée, heureuse mais fauchée. Le voyage à fini d'épuiser mes économies. Il me faut travailler pour avancer encore. Wellington est mon point de chute. Je veux revoir cette fille dont j'ai oublié le nom.
Je rentre dans un bar, où l'affiche dit "cherche serveur". Deux jours plus tard, Hamilton, une journée à repasser des draps. Otorohanga, bar miteux où je sers des poivrots et ainsi de suite, jusqu'à...
Devant moi, la route s'étale et un panneau affiche Wellington, trois miles.
J'ai faim, le nom sonne bien pour une pose. J'imagine la mer, mes pieds dans le sable et je suis lasse de courir.