#220 alright (nina)

Tu roules des yeux ! Si seulement ! T’en as déjà des problèmes de fric, ça oui, mais si tu n’avais que ça, tu vivrais bien plus heureux, c’était certain. Pas de problèmes d’un ordre différent, que peux-tu demander de plus ? Pas de paternel lâche comme pas deux, pas de demi-sœur à son tour abandonnée qui débarque pour faire partie de ta vie, pas d’ancienne collègue supposément enceinte de toi, pas de tante décédée, et pas de mère dans des services psychiatriques. Juste Zoë et toi. Ah oui, et tes colocs. Mais ça, c’est juste ce qu’il te faut pour être heureux. Rien de plus, rien de moins. Mais voilà, t’as tout, même si dans le fond t’es bien content d’avoir une nouvelle sœur. Ça t’ennuie un peu de te dire que ton père a recommencé ses frasques avec une autre et a abandonné un autre enfant, mais toi qui as vécu comme l’enfant unique adopté par son oncle et sa tante, avec un frère qui ne partage que la moitié de son sang… enfin, bref, t’es pas le genre qui va s’en plaindre non plus après tout, mais quand même. Tu hoches la tête. Oui, si seulement. « On serait heureux même sans argent, j’en suis certain. » Quant au destin, elle n’y croit pas, mais toi si, et t’as pas besoin de plus pour y croire. Alors tu n’ajoutes rien.
Anais sur le tapis, parler de tes soucis va peut-être te permettre de trouver une solution auprès de Nina. Tu n’es pas vraiment d’une grande utilité pour elle, et tu es plus venu parce que tu t’inquiétais que parce que tu avais besoin de conseils. Mais quand même. Nina avait su que vous vous étiez retrouvés dans le même lit au beau matin, sans aucun vêtement, mais elle sait aussi que, même si tu ne te souviens de rien, tu penses n’avoir rien fait avec elle. T’en es quasi certain, mais pas totalement. Faut dire que c’est plus compliqué sans les souvenirs. « Je préfèrerai que ce soit une blague. Mais… je sais même pas si c’est possible. C’est le trou noir... et tu sais à quel point je ne l’ai jamais supportée… » Ca c’est un scoop pour personne non plus, hein. « Tant qu’il est pas né... je suis apparemment le numéro un pour prétendre à la paternité. Comme si j’en avais envie. » t’es clairement pas prêt à assumer une telle chose, et même si tu te révélais être le père, malgré ton caractère responsable, tu assumeras clairement pas et la laisseras tomber. Tu aurais préféré, s’il est vraiment de toi, qu’elle prenne pas la décision seule de l’avoir.

Tu soupires. T’es pas très bien à l’idée de discuter de tout ça. Tu es très angoissé par cette nouvelle et tu as du mal à la gérer au quotidien, alors autant dire que le déballer, c’est pas simple. Mais c’est Nina, et tu as toute confiance en elle, tu pourrais lui dire un peu tout et n’importe quoi de ce qui te passe par la tête qu’elle ne te jugerait pas. Et pour ça, tu apprécies vraiment d’avoir une amie à qui en parler. D’ordinaire, tu n’es pas le genre à avoir besoin de te confier ou à réussir à te confier à quelqu’un d’autre que Reid, Jay et Ava. Mais là, c’est différent. Terriblement différent. Parce que c’est sans doute tout ton avenir qui est en jeu et tu n’as pas envie d’assumer des responsabilités qui, à tes yeux, ne sont clairement pas tiennes. Tu hausses les épaules. Peut-être, peut-être pas. Une chose est sûre, tu n’es pas vraiment à la place idéale dans ce puzzle entre la vérité et le mensonge. « Je sais pas Nina… D’après ce que j’ai vu, elle a plusieurs symptômes. Comme des sautes d’humeur… enfin, tu me diras qu’elle en a toujours eues, mais quand même. » À tes yeux Anaïs a toujours été une girouette des humeurs. Sans doute parce que tu ne l’as jamais appréciée, c’est vrai. Mais faut dire que tu sais pas si c’est une conséquence de sa grossesse ou non. T’y connais strictement rien aux symptômes d’une grossesse. « En tout cas, j’aimerais bien que ce soit un mauvais tour. Je n’ai aucune envie de m’embarquer dans tout ça. » Non, vraiment pas. T’es même prêt à ne jamais assumer tes responsabilités, aussi lâche soit-il. Tu secoues la tête. « Elle refuse catégoriquement et son médecin est de son côté. Soit disant qu’il y a un risque pour son bébé. » Mais toi, tu n’en as rien à faire du risque, au contraire. Tu la trouves terriblement égoïste, si vous avez vraiment eu une relation, de décider de le garder sans te prévenir, sachant le rôle que ça te donne. Mais toi, tu veux pas être le père du bébé d’une femme que tu ne supportes pas et que tu n’as jamais supportée. Alors tant pis pour le rôle que ça te donnera, même si tu n’as aucune envie d’être comme ton propre père. « Si elle disait oui, tout serait tellement plus simple... » Et tu pourrais, seulement si tu t’avérais être le père de ce fœtus, avoir un droit de regard sur cette grossesse qui t’ahurit complètement.

La vérité, c'est que tu l'avais bien compris, mais tu te disais qu'avec toutes les difficultés que tu avais surmonté jusque là, tu ne pouvais pas bêtement être confronté à une menteuse. C'était trop pathétique. « Peut-être. Après tout personne ne connaît vraiment sa vie. Elle a toujours été discrète à ce niveau. » Et encore, discrète, c'était un piètre mot face à la véritable tombe que pouvait être Anais. Être père avec une fille que tu n'aimais pas du tout, c'était le meilleur moyen de te faire fuir. Tu n'étais pas contre l'idée d'avoir des enfants, mais juste pas avec elle. Non, ça, jamais. Tu n'étais pas non plus trop jeune pour en avoir, fallait le dire. Seulement, tu l'avais vécu avec ton père, c'était pas la peine d'avoir des enfants avec une personne si on n'aimait pas cette personne et, pire encore, si on n'était pas prêt à être parent. Voilà, c'était ça. Tu n'avais pas envie de te comporter comme ton père, mais tu n'aimais pas cette fille et tous les défauts qu'elle transpirait. « Si seulement tu pouvais avoir raison. » Tu n'étais pas naïf au point d'écarter totalement cette éventualité. Mais tu te disais que personne ne pouvait être ignoble au point de détruire les rêves d'un autre par une simple annonce, si ? Quoi qu'après tout, tu n'avais pas toujours été gentil avec elle non plus. « Non, j'crois pas... même si je l'étais vraiment, je n'ai pas envie d'assumer. Je ne suis même pas sûr d'avoir voulu une relation avec elle... enfin, si relation il y a eu. Là encore, je suis perdu, je ne me rappelle vraiment de rien. » Mais dans quelle situation tu t'étais foutu après tout ! Mais oui, Nina avait raison, tu lui dirais probablement juste merde et puis basta. Tu levais les yeux vers elle pendant qu'un sourire pointait le bout de son nez. « Oui, je crois que le café ne sera vraiment pas suffisant. »

La méfiance de Nina te faisait grandement sourire. D'ailleurs, ça te rassurait. Tu pouvais finalement envisager qu'il pouvait y avoir tromperie dessous toute cette histoire. Et tu espérais que c'était le cas. Qu'on t'avait dupé plutôt que de s'être servi de toi. Tu préférais clairement être pris pour un con un moment plutôt que d'être arnaqué pour le restant de tes jours. Oui, c'était une perspective qui t'angoissait moins que d'être père d'un gosse dont tu n'avais aucune envie et de devoir rester en contact avec sa mère que tu n'appréciais pas. Mais tu craignais d'être vite rattrapé par la réalité. « Faut que je me reprenne, tu as raison. Avec tous ses sales coups, je suis peut-être dans un autre. Et puis, légalement, même si c'était le mien... elle a pas le droit, pas vrai ? » Tu n'étais clairement sûr de rien, mais c'était, une fois encore, plus rassurant de se dire ça. Même si les lois, les droits et tout ça, c'était pas vraiment de ton ressort vu que tu t'y connaissais vraiment très peu. Ou alors en droit du sport, et ça te concernait à peine, à vrai dire.
La vérité n'était pas très belle à dire, mais oui, il avait de quoi avoir honte. « oui... même soirée avec le boulot... j'avais besoin d'oublier. J'ai appris ce jour là qu'elle avait son cancer et... pas très longtemps après... » Peu de temps après, elle avait passé l'arme à gauche. Et en tant que neveu dans la même ville, tu as été au courant après ton cousin qui venait tout juste d'arriver. Tu t'en voulais parce que tu n'avais pas été assez présent, tout ça pour pouvoir t'offrir l'indépendance que tu voulais, et pouvoir la laisser souffler alors qu'elle t'avait tout de même donné la chance d'avoir une enfance normale malgré la mère assez spéciale, même si ce n'était pas de sa faute, que tu avais. « Chez la personne qui faisait la soirée... Mais chez moi, j'en doute. » Quant à toi tu n'aurais jamais mis les pieds chez elle de ton plein gré. « Va pour la tequila ! Tiens mes clés. T'en prends aussi ? » Tu lui avais balancé les clés avec sûreté, mais clairement, tu n'étais pas aussi assuré à l'idée qu'elle en prenne aussi. Elle n'avait vraiment pas l'air bien et tu savais très bien que bouteille et médicaments, si jamais elle en prenait, ça n'était pas le mélange idéal, à vrai dire.

Tu hausses les épaules. « Oui... » Ta voix était dépitée. C'était la honte qui venait d'avouer. Parce que tu n'avais aucunement l'envie d'avoir un enfant avec une femme que tu n'aimais pas. Pour l'enfant en question, c'était mieux comme ça. Et s'il existait vraiment, tu risquais réellement de lui en vouloir à lui d'être là alors que tu n'en voulais pas. Elle n'avait pas le droit de le garder sans ton accord, c'était ainsi que tu voyais les choses, que tu les espérais. C'est généralement quelque chose dont on discute, pas qu'on impose à l'autre en le piégeant. Voilà comment tu voyais les choses. « j'espère... parce que si elle est vraiment enceinte, je suis dans une merde, tu n'imagines même pas... » Déjà que tu ne vivais pas bien avec ton job et que tu étais obligé de vivre en coloc avec tes meilleurs amis pour survivre, ça n'aidait clairement pas. Et tu imaginais mal imposer à Ava, Reid et Jay un gosse dont tu ne voulais pas sous prétexte que c'était ta semaine.
« Oui, sûrement. Si on s'était pas réveillés... bref, disons que le doute ne serait même pas permis. Mais je n'ai aucun maudit souvenir... » Tu fronçais les sourcils. Depuis quand Nina refusait un peu de tequila ?! « Tu passes la main ? Qu'est-ce qu'il t'arrive, tu es malade ? » Les médicaments, c'était vrai qu'avec c'était peu recommandé, mais ça ne vous avait jamais arrêtés ni l'un ni l'autre. « Ca me convient ! Plus jamais hors de contrôle, jamais ! » Une fois, ça t'avait bien servi de leçon.

Tu lui adresses un sourire. Nina a toujours été une personne très compréhensive et un soutien continue pour toi. Faut dire que si tu avais dû lui dire au revoir le jour où elle est partie du bar, si ça avait été un au revoir définitif, tu l'aurais mal vécu. Alors tu te contentes d'apprécier sa présence, sans réaliser à quel point c'est égoïste et à quel point elle-même pourrait avoir besoin de soutien. « Ca c'est parce que tu es une bonne personne » Une bonne personne qui essaye tant bien que mal d'en savoir plus là où toi tu échoues, mais qui ne rate pas de te donner une solution.
Tu soupires. Ca te plait pas de n'avoir aucun contrôle sur cette fameuse soirée, sur ses conséquences et sur cette soit-disant grossesse que tu espérais ne pas en être une. « Tu as raison, il faut que je sache, d'un moyen ou d'un autre, pour savoir quoi faire. » mais tu en reviens toujours au même point : elle ne peut pas te forcer à être le père d'un enfant que tu ne voulais clairement pas. Ni à assumer, ni à l'aider ou quoi. Si elle était vraiment enceinte et que c'était vraiment le tien, elle aurait pu te consulter avant de prendre une décision sans toi.
Tu réalises à peine que Nina a sûrement d'autres chats à fouetter. C'est surtout pour ça que tu es venu la voir. Parce qu'elle répondait pas, vu que quelque chose n'allait pas. Et même si tu la savais très amoureuse de Finn, tu restais sceptique sur le fait qu'une simple rupture l'ait éloignée de son téléphone et des messages que tu lui as envoyés. « En tout cas, tu peux me parler, la prochaine fois - même si j'espère qu'il n'y aura pas de prpochaine fois où tu seras malade ! - si quelque chose ne va pas, d'accord ? » Tu lui donnes un sourire avant de lever ton verre vers elle une fois qu'elle t'a servi. « Ca ne me ferait pas de mal, il faut le dire ! » Heureusement qu'elle est là, Nina.
Tu regardes ta montre une fois ton verre baissé. Tu n'as pas grand chose d'urgent à faire, mais tu n'as pas envie de l'embêter trop longtemps, surtout si elle doit se reposer, quant à toi, tu as quelques petites choses à faire. Mineures, certes, mais à faire quand même. « Je ne vais pas t'embêter trop longtemps quand même. Ce ne serait pas correct si tu dois te reposer. »