cinéma, gâteaux & cannabis ft. lily

Lily expliqua en toute simplicité sa situation. Amoureuse d’un homme marié, un amour platonique à sens unique. Murphy l’écoutait, elle buvait ses paroles, parce que même si ce n’était pas le schéma normal d’une histoire d’amour, surtout à leur âge, c’en était quand même. Murphy n’avait jamais connu l’amour, hormis celui de sa famille. Elle n’avait jamais embrassé personne, elle n’avait jamais flirté, elle n’avait jamais eu de petit copain. Alors elle ignorait ce que c’était, ce besoin d’être avec un autre, ce besoin de sécurité, de tendresse, d’affection. Elle ignorait tout ça, elle ignorait la sensation des papillons dans le ventre, du stress des premiers rendez-vous, des premières fois tout ça… et souvent, elle complexait. Parce que c’était étrange qu’à son âge, elle n’ait rien vécu de tout ça. Et en même temps, elle avait peur des réponses à toutes ses questions qu’elle se posait : était-elle normale ? Est-ce qu’elle était lesbienne ? Est-ce qu’elle était si moche qu’elle ne plairait jamais à personne ? C’était peut-être des questions connes, mais elle était obligée de les poser à force d’attendre que quelque chose se passe, mais que rien n’arrive. « Ça te convient, cette histoire d’amour à sens unique ? » demanda-t-elle alors, doucement. Nerveusement, Murphy joua avec les poils du tapis, les balayant d’un côté et puis de l’autre. « Je veux dire… ça ne te fait pas souffrir ? » parce que ça ne devait pas être évident de voir la personne que l’on aime avec une autre… enfin, elle supposait, puisqu’elle n’y connaissait rien. Quand Lily lui retourna la question, Murphy ne put s’empêcher de soupirer longuement avant de lui répondre un peu gênée « hum… à vrai dire, je n’ai jamais rien vécu, ni connu, ni tout ça… ». Un rire nerveux se fit entendre avant que la jeune femme ne prenne de nouveau la parole pour s’exprimer plus clairement. « J’me pose pas mal de questions du coup, parce que j’ai l’impression que ce n’est pas normal de… de ne jamais avoir embrassé personne à mon âge…. Tu vois ce que je veux dire ? J’ai l’impression de… » elle s’arrêta pour marquer une pause, baissant les yeux et murmurant « tu vas te foutre de moi » en souriant. Elle reprit alors sa première phrase « j’ai l’impression de… de ne pas être normale, où d’être moche, ou peut-être inintéressante ? » elle haussa les épaules, sans avoir réellement la réponse à sa question. A dix-huit ans, être encore vierge et ce, même d’un premier baiser, c’était lourd à porter et la jeune femme en avait le cœur gros. Sa conversation avec son père n’avait rien arrangé à ce niveau là. Il l’imaginait avec un garçon bien élevé, fonder une famille, avoir des enfants et elle… elle ne savait même pas si cela serait possible un jour, mais surtout si c’était ce qu’elle voulait également.

HRP : Désolé pour le temps de réponse ma Lily ! Je suis en vacances depuis plusieurs semaines, mais je pensais avoir répondu surtout ! Du coup je m'inquiétais de ne pas avoir de réponse, hahaha ! N'importe quoi. J'espère que tu ne m'en voudras pas trop? Et que ma réponse t'ira? Gros bisous

La première question qui vient à l’esprit de la petite blonde, lorsque Lily lui en dit davantage sur sa relation amoureuse à sens unique, fut celle-ci « mais ça fait longtemps ? » parce qu’en effet, si cela s’était produit il y a une semaine, ou bien un an, ce n’était pas pareil. Ne sachant pas ce qu’est l’amour, Murphy n’aurait pas su dire si elle aurait été capable, comme Lily de vivre une histoire semblable. Aurait-elle pu tomber amoureuse d’une personne déjà en couple ? Aurait-elle pu la partager comme Lily le faisait ? Aurait-elle pu vivre avec cette prétendue culpabilité -qu’elle imaginait- et cet espoir qui s’amoindrit au fil du temps ? Elle n’en savait rien du tout. Peut-être que oui, peut-être que non. Comment aurait-elle pu le savoir ?
Quand Murphy évoqua sa situation, Lily ne l’interrompit pas. Au contraire, elle l’écoutait sans rien dire, sans jugement, sans rire non plus. Quand elle eut fini, la jolie blonde sourit doucement à la Gallagher et ne tarda pas à lui répondre. Elle avait l’air de trouver ça chouette, que Murphy se préserve, mais était-ce sincère, ou juste réconfortant ? Après tout, la plupart des gens aiment ce que les autres ont. Une fille aux cheveux raides les désirera bouclés, et inversement. Alors une fille vierge ne pense qu’à ça, tandis qu’une fille en couple, regretterait peut-être d’avoir sauté le cap ? La petite blonde baissa le regard au cendrier posé sur la table basse. Jouant avec un mégot dépassant, dans la cendre, elle garda le silence quelques instants avant de dire « c’est gentil » tout simplement.
Finalement, Lily commença à lui dire de très jolies choses. Comme quoi elle était courageuse, forte et incroyable. Bien évidemment ces quelques compliments firent du bien à Murphy. Cela faisait longtemps qu’on ne lui avait pas dit des choses gentilles comme ça. Les seules paroles agréables qu’elle pouvait entendre, étaient des attentions de son père, et il n’était pas non plus trop dans le détail. Et puis c’était son père, alors forcément, elle remettait tout ça en cause. Là, c’était des paroles de Lily, une amie, quelqu’un d’extérieur à tout ça… toute sa vie. Alors oui, ça avait un impact différent. Ca résonnait différemment dans la tête de la petite blondinette. La tête de Lily vint se poser sur l’épaule de son amie alors que sa main vint d’abord effleurer celle de la Gallagher avant de la saisir. A ce contact, une sensation étrange s’empara du corps de la petite blonde. Ses poils se hérissèrent sur ses bras, tandis que son échine la fit frissonner. Elle se raidit sur place, coincée entre une sensation particulière et un sentiment de gêne, aussi. Le rouge empourpra ses joues et une sensation étrange commença à lui bourdonner dans le ventre. Comme si un millier de petites bêtes étaient en train de danser à tout rompre. Murphy sentit aussi que les battements de son cœur se faisaient plus intenses. Que se passait-il donc ? Etait-ce normal ? Après quelques secondes, la gamine se décala un petit peu, trop gênée pour rester. Le visage bas, elle saisit la télécommande pour changer la musique de la chaîne hifi, faisant mine de rien et changeant de sujet, de façon un peu maladroite « hum… tu veux peut-être qu’on regarde un film ? » Son regard évitait clairement celle de son amie. Pourquoi ? Elle se posait cette question, après tout, pourquoi avait-elle peur de se confronter au regard de Lily, soudainement, comme ça, tout d’un coup ? Que se passait-il bon sang ?

HRP : Je crois que Murphy va tomber amoureuse hihi

Lily était d'accord pour regarder le film. Murphy se sentait toujours un petit peu mal à l'aise, ne sachant pas trop d'où ça venait. En fait, elle avait comprit que le contact physique avec la jolie blonde lui avait fait ressentir ce sentiment de gêne, mais elle ne comprenait pas véritablement pourquoi. En même temps, Murphy n'était pas une adepte des contacts physiques avec qui que ce soit, même avec son père, la petite blonde était parfois mal à l'aise. Et puis bon, les amis ne courraient pas les rues non plus, alors la tendresse... ça n'était plus vraiment quelque chose qui habitait son quotidien. Quand Lily demanda à se resservir à boire, la petite blonde se redressa subitement. « Oh oui vas-y ! Ne me demande pas, je suis vraiment pas douée comme hôte » plaisanta t-elle. Son regard venait de se déposer sur la blondinette, la gêne venait de passer, comme ça, aussi vite qu'elle était venue. Murphy se hissa sur les fesses jusqu'au meuble de la télé afin de pouvoir lancer le film. A l'arrivée de son amie, elle s'était mise d'accord pour un film de science-fiction de Kubrick, à savoir, 2001, L'Odyssée de l'Espace donc. Murphy saisit le coffret et inséra le cd dans le lecteur. « Bon, je te préviens, il a l'air vieux parce qu'on est 50 ans plus tard, mais les effets spéciaux, les choix de Kubrick et puis tout est... hyper impressionnant pour l'époque. C'est clairement un film en avance sur son temps tu verras ! » et c'était le cas. Les effets spéciaux étaient bien avant ceux de Star Wars et ils ne faiblissaient pas face à ceux de maintenant. Ils tenaient encore la route, clairement. Le seul hic, c'était qu'il était assez long et que si Lily n'accrochait pas, elle allait clairement se faire chier. « Tu me dis si le film ne te plaît pas hein ? » demanda t-elle en lançant le film. Une fois lancé, elle alla s'installer sur le canapé près de son amie, toute excitée de voir ce film -qui est clairement l'un de ses favoris- avec une personne curieuse et avide de savoir ce qu'il en était. C'était agréable de pouvoir partager de sa passion, de quelque chose que l'on adore, n'est-ce pas ? Avant de s'installer complètement, la petite blonde prit un nouveau muffin aux fruits dans lequel elle croqua à pleines dents. « Ils sont vraiment bons tes gâteaux » sourit-elle à son amie. Le film se lança, avec la célèbre musique reprit maintes et maintes fois, notamment pour des publicités à la télévision. Murphy fut complètement captivée par le film, elle en adorait chaque détail. Les choix de cadrage, les plans larges, épurés, colorés et en même temps, si forts dans leur simplicité. Et puis cette créativité de Kubrick, visionnaire, qui voit déjà l'intelligence artificielle en 1968 et qui correspond à peu de choses près à l'intelligence artificielle de nos jours. Le mobilier, les effets spéciaux, les mouvements de la caméra... tout était si limpide, si parfait et en même temps si compliqué a réaliser. Murphy était fan, totalement même. Les heures défilèrent et à la fin du film, curieuse de connaître l'avis de son amie, elle se tourna vers la jolie blonde, impatiente de savoir « alors ? Tu as aimé ? Dis-moi franchement hein ! » parce que si Lily n'était pas honnête, ça ne servait à rien, Murphy continuerait à lui faire voir des films qu'elle n'aimerait probablement jamais... ça n'avait pas de sens, n'est-ce pas ?

Lily s'étira longuement pendant le défilement du générique. Murphy fit de même à son contact, avant de lui demander son avis concernant l'oeuvre de Kubrick. Lily avait aimé. A ces quelques mots, un sourire gigantesque se dessina sur les lèvres de Murphy. Les commentaires de son amie éveillèrent en elle un sentiment de bienveillance. Lily avait aimé et son avis était perspicace. Murphy hocha la tête, elle était ravie que ce film, de son réalisateur préféré, lui ait autant plu. « Je suis contente que tu ai aimé, je pensais que tu allais trouver ça ringard ou même un peu trop long... » parce que c'était souvent ce que les gens pouvaient dire au sujet de ce film. Ils s'arrêtaient un peu à la couverture, sans en apprécier le choix de chacun des mots, des verbes et des tournures de phrases qui pourtant, était contrôlé dans les moindres détails. Murphy passa une main dans ses cheveux, elle se rendit compte que le soleil s'était désormais couché. La nuit faisait son apparition lentement autour de la villa Gallagher et pourtant, elle n'avait pas vraiment sommeil, et elle n'avait pas spécialement envie que Lily ne s'en aille. Mais peut-être que celle-ci avait autre chose de prévu ? La petite blondinette saisit la télécommande pour éteindre le film, le lecteur ainsi que la télévision. Elle prit la carafe de limonade et en servit pour chacune d'entre elles avant d'apporter son verre à sa bouche. Elle était tiède, mais encore bonne. Murphy proposa alors à la jolie blonde « tu veux que je te montre un truc cool que je fais souvent ici ? » avec un petit sourire malicieux. A la réponse de son amie, la petite blonde invita Lily à la suivre à l'étage. Grimpant les escaliers, Murphy dévoila sa chambre à son amie. Très rares étaient les personnes qui étaient venues jusqu'ici. Son père, bien évidemment, son meilleur ami Kenny et puis... peut-être quelques amis par ci, par là. Mais ça se comptait sur les doigts de la main, c'était une évidence. Aux murs, il y avait principalement des affiches de films, chinés dans les cinémas de la région. Des films récents aux belles affiches très esthétiques, et puis des vieilles affiches qu'elle avait trouvé sur internet. Kubrick, bien évidemment. Il y avait aussi quelques unes des photographies en noir et blanc du réalisateur, de véritables œuvres aux yeux de la petite blonde. Son lit, grand, se tenait au centre, tandis que de multiples petites lumières éclairaient partiellement la pièce. A son bureau, c'était un mélange entre son ordinateur ouvert, ses cahiers de notes, des fringues et autres petits désordres de jeune fille. « C'est un truc que je fais souvent et j'y ai encore jamais emmené personne » lança t-elle presque mystérieuse. « Tu me fais confiance ? » demanda t-elle en se tournant vers son amie avant d'avancer vers la fenêtre de sa chambre. Elle l'ouvrit autant qu'elle le pouvait et puis la traversa, se retrouvant sur le toit de la maison familiale. Si son père la voyait faire ça... il piquerait une crise, avant de faire une crise cardiaque. Il trouverait ça bien trop dangereux et le lui interdirait sur le champ, c'était évident. La gamine se courba une fois sur le toit, aidant son amie à l'y rejoindre prudemment. Une fois les deux jeunes filles blondes sur le point culminent, elles avancèrent à pas de loup vers un endroit précis. Là, Murphy s'y assis tout d'abord. La vue devant elle était magnifique. Déjà, il y avait la vue sur toute la rue, bercée par une lumière partagée entre celle de la nuit qui ennivrait la ville, mais aussi par le soleil qui n'était pas encore totalement couché. Un chien jappait à quelques maisons d'ici. Des enfants à vélo se dépêchaient de rentrer sûrement pour arriver avant le couvre-feu de leurs parents. Une odeur de viande grillée venait chatouiller les narines de Murphy, la faisant soupirer de bien être. Derrière la rue, une rangée d'arbres avant que, bien plus loin normalement, ne se trouve le littoral. Pourtant, de leur point de vue, l'océan semblait tout de suite chatouiller les racines des grands arbres. La mer était colorée des derniers embruns du soleil, l'odeur iodée ne tarda pas à venir à elles. L'océan était là, disponible, calme, apaisant et ce moment ne pouvait être que magique. Murphy se tourna vers Lily pour voir sa réaction et ne pu s'empêcher de sourire. Ce moment là, il allait rester gravé en elle. Parce qu'à ce moment précis, Murphy su que Lily ne serait jamais juste une amie comme ça. Non. Elle allait devenir bien plus que ça.

Lily venait de confirmer ce qui traversait l'esprit de la petite blonde. Cette soirée avait été parfaite, sans accro, sans erreurs, sans drames. Les deux jeunes filles avaient encore passé du temps à se découvrir, à partager leur univers avec l'autre et tout cela dans la bonne humeur. Une complicité naturelle s'était installée entre les deux petites blondes, ce qui était rassurant sur l'avenir de leur amitié. Et dire que leur rencontre avait eu lieu dans un contexte tellement extraordinaire. C'était presque comme si tout avait été écrit à l'avance, comme si tout était contrôlé de plus haut qu'elles. Murphy se sentait à l'aise avec Lily et c'était pourquoi elle s'était confié à elle. Elle ressentait cette force, et cette fragilité chez son amie, et semblait par effet de miroir, se retrouver en elle autant que leurs différences l'attirait. Lily avait ce pouvoir attractif envers Murphy. Un pouvoir qui ne faisait qu'accroître cette fascination que la petite Gallagher pouvait éprouver à son égard. Lily était belle, séduisante, douce, pleine de bienveillance, de tendresse et forcément, on avait envie d'être son amie, d'avoir ses faveurs. Elle était comme l'un de ses petits muffins, à la fois gourmand, mystérieux et délicieux. Les deux jeunes filles restèrent sur ce toit pendant plus d'une heure. Elles restèrent là, à observer le soleil se perdre dans l'océan, à observer les couleurs de la journée se fondre dans l'obscurité bleutée de la nuit. La fraîcheur de cette dernière fut ce qui les forçat à rentrer à l'intérieur de la villa. N'ayant pas très envie de se séparer l'une de l'autre, Murphy proposa naturellement à Lily de rester dormir ici, ce que son amie accepta sans ménagement. La petite Gallagher laissa un mot à son père pour le prévenir de leur invitée surprise et en profita pour jeter très loin au fond du jardin, par dessus la cloture, le cendrier avec les preuves de leur illégalité. Murphy rangea leurs verres et laissa les muffins dans la cuisine, au cas où son père désirerait en prendre à son retour du travail, s'il rentrait. Concernant le troisième joint, le tout dernier, la petite blondinette le rangea dans ses affaires, sur son bureau, lorsqu'elle retourna dans sa chambre où l'attendait Lily. Murphy lui prêta un tee-shirt de son papa pour la nuit, un truc de son université, extra large. Murphy ne faisait que de lui piquer ses affaires de toutes façons. Caïn n'était pas fan de cette pratique, mais il n'y pouvait rien, elle avait tous les droits avec lui. Les tee-shirts larges enfilés, les deux gamines se retrouvèrent sur le lit de la jeune étudiante. La musique résonnant tranquillement, elles discutaient ensemble, tout en rigolant. Lily montrait à Murphy comment instagram fonctionnait, ainsi que facebook. Murphy n'ayant ni l'un ni l'autre, elle trouva ça assez fascinant. En fait, il y avait un côté d'elle qui trouvait ça drôle et ludique et puis un autre côté qui s'inquiétait assez de tout ce qui pouvait rester sur des plateformes internet. Sa vie n'avait rien d'extraordinaire, du moins c'était ce qu'elle pensait. Pas besoin de la partager, il ne s'y passait pas grand chose d'intéressant. Finalement, les deux amies passèrent une bonne partie de la nuit à discuter, avant de finalement s'endormir ensemble dans le lit de Murphy, comme deux enfants ayant mangés beaucoup trop de sucre.

FIN