Yoooouuuu'rrrrrrrre here !

Pouvait-on réellement parler de peur quand on n’était pas en train de semer des flics essayant de vous coffrer pour fraude ? Iggy médita la question une demi-seconde avant de se dire que non. Non, elle n’avait pas vraiment la trouille de l’échouer son rafiot de riches, mais disons qu’elle préférait tout de même éviter. Raison pour laquelle elle rapprocha son pouce de son index en guise de réponse, lui montrant ainsi que, si cette crainte n’occupait pas non plus toutes ses pensées, elle ferait tout de même un minimum attention. Et puis qu’est-ce que ça signifiait au juste ? Qu’elle n’était pas fun juste parce qu’il n’était pas question qu’elle se prenne une cuite ? Pas de bol alors puisque ce n’était pas vraiment son truc, à Iggy. Bref, autant se concentrer sur la vue. Une vue qui devrait techniquement plaire à tout le monde. C’était du moins ainsi qu’elle voyait les choses mais au fond, elle aussi se doutait bien qu’il devait exister quelque part en ce monde des gens extrêmement louches pour qui c’était moche. Personnes dont elle ne faisait donc pas partie. Et qu’elle jugeait sévèrement pour cette faute de goût. D’autant que ce n’était pas parce qu’elle n’aimait pas la montagne qu’elle trouvait ça moche pour autant. Non, elle trouvait ça très joli. En photo. Ou encore depuis la fenêtre d’un chalet d’où elle n’aurait pas besoin de sortir.
« Pourtant, c’est à couper de souffle. »
Encore plus lorsqu’on se retrouvait au beau milieu de l’océan avec rien d’autre à perte de vue. A l’instar de l’espace, l’océan avait ce pouvoir sur elle de lui rappeler à quel point elle pouvait être insignifiante. De fil en aiguille, ils en vinrent à parler des petites îles alentours, que Jimmy n’avait bien sûr jamais pris la peine d’explorer. Elle le détailla en souriant et en vitesse avant de conclure :
« Du tout. »
Aucune surprise, non. Un peu plus lorsqu’il lui fit savoir que s’il n’y avait pas de piscine sur le pont, au moins y avait-il une salle de bains. Une salle de bains… Alors qu’on peut se baigner dans l’océan ? Ah, ces citadins…
« A choisir, je crois que je préfère quand même me geler les miches. »
Quant à savoir si elle-même avait l’âme d’une pilleuse de tombes, pas tant que ça, non. On ne pouvait clairement pas dire qu’Iggy était une grande aventurière, mais si l’occasion de rencontrer un peuple primitif dont elle deviendrait tout d’un coup la déesse suprême se présentait, elle la saisirait au vol.
« Pas tellement. Mais si on s’approche assez pour ça, j’irai quand même y faire un tour. »

N’importe qui habitant au bord de n’importe quel océan pouvait s’estimer chanceux. Pourtant, ce n’était pas du tout pour cette raison qu’elle avait fait ce choix. Elle avait adoré vivre sur la route, sans jamais pouvoir décrire un endroit précis comme chez elle. Et souvent, l’envie de revenir à la vie nomade qu’elle avait toujours connue refaisait surface. D’ailleurs, si Charli ne lui était pas tombée dessus il y a de ça quelques années, c’est ce qu’elle aurait fait à la minute où le divorce aurait été prononcé. Mais bon, la vie vous réserve parfois des surprises de taille. Et quitte à rester, autant profiter à la fois de l’océan et de sa piscine. Iggy ne voudrait pas d’un jacuzzi, en revanche, convaincue que ça serait néfaste pour sa peau. Elle haussa les épaules.
« Comme tu l’as toi-même dit l’autre fois, y a pire. »
D’autant qu’il n’était pas en train de parler d’une piscine – puisqu’il n’y en avait même pas sur ce yacht - mais bien d’une salle de bains et si c’était pour aller se baigner dans une salle de bains, alors elle aurait très bien pu rester chez elle.

Bref, quant à savoir si elle avait l’intention d’abandonner Jimmy si l’occasion d’aller faire un tour sur l’une ou l’autre de ses îles lui était donnée, la réponse était oui. Bien qu’elle n’ait donc rien d’une aventurière, ça pourrait quand même être intéressant. Elle pouffa.
« Parce que tu crois sincèrement que c’est la jungle là-dessus ? Les agences touristiques du coin doivent toutes proposer des circuits sur là-bas. Ça doit ressembler à Disneyland version très exotique, je suis sûre. »
Non, ce n’était en aucun cas une manière d’essayer de persuader Jimmy étant donné qu’elle se doutait bien que ça devait être peine perdue. D’ailleurs, il préféra revenir à ce pourquoi elle était là en lui proposant de prendre les commandes. Et pour le coup, il avait parfaitement raison, voilà qui parvint à détourner son attention des petites îles.
« C’est parti ! »
Là-dessus, il ajouta que s’ils se faisaient arrêter par les garde-côtes, ça serait à elle de gérer. Une fois de plus, Iggy ne fut pas très impressionnée ; ça faisait bien longtemps que les autorités ne lui faisaient plus peur, qu’elle parvenait à passer entre les mailles du filet à chaque fois et se riait d’eux, donc…
« Tiens donc, je croyais que tu n’avais rien de cet ordre à cacher ! »
Bref, retour dans la cabine de pilotage.

Était-ce son genre de tout garder en mémoire pour le ressortir à un moment ou à un autre ? Carrément. Et plus souvent dans le but d’attaquer ou de blesser la personne en face, d’ailleurs. Mais le fait est qu’elle n’avait que très rarement des relations à long terme – quelle qu’elles soient -, aussi manquait-elle sans doute d’un peu de pratique. Et comme une fois de plus, elle en vint à la conclusion que Jimmy en savait déjà bien assez sur elle ainsi, elle se contenta de lui balancer un sourire un brin arrogant. Puis ils en vinrent à discuter de ce qui pouvait bien se trouver sur les îles avoisinantes, celles qu’ils pouvaient apercevoir au loin à condition de plisser très fort les yeux. Et comme souvent, pour ne pas dire toujours, ils n’étaient pas d’accord.
« Non, je pense pas. Mais qu’est-ce que j’en sais après tout ? Le meilleur moyen de le savoir serait encore d’aller voir. »
Mais elle n’insista pas plus, elle avait parfaitement compris qu’il n’en ferait rien. Autant se focaliser sur ce qu’il était en train de lui proposer, à savoir prendre la barre puisque c’est ce dont il fut question une fois qu’elle eut fait mine de pousser un soupir de soulagement en apprenant qu’il n’avait rien de compromettant à bord. Ah, voilà qui la tentait bien ! C’est donc ainsi qu’ils revinrent à la cabine de pilotage.

Iggy suivit les quelques instructions que Jimmy lui donna et trouva grisante cette sensation d’être au contrôle d’un engin aussi imposant. Bien qu’il ne transporte personne et que ça le serait sûrement d’autant plus dans le cas contraire. Bref, elle fronça les sourcils suite à ce qu’il était en train de lui dire puis s’exclama :
« Comment ça ? Tu veux dire que je peux pas faire de drift de bateau ? Alors là, je suis déçue. »
Ils pourraient, pourtant. Mais en prenant le risque que ça se termine comme pour le Poséidon. Dommage, donc. Maintenant qu’elle était aux commandes, Iggy essayait deux ou trois choses, appuyait de-ci de-là pour voir ce que ça faisait, changeait de cap, virait de bord, souquait les artimuses. Bref. Jusqu’à ce que Jimmy lui propose d’aller voir s’il n’avait pas une casquette de capitaine qui traînait par-là.
« Oh ouais, voilà qui m’aiderait beaucoup à me glisser dans la peau du personnage. Mais je ne suis pas sûre que tu sois prêt pour ça en revanche, donc, à tes risques et périls. »

Quarante kilos d’équipement ? Bivouaquer ? Il y avait méprise. D’ailleurs, Iggy était certaine qu’il devait y avoir au moins un hôtel. Pas un énorme complexe hôtelier pour gens pétés de thunes, mais au moins une poignée de cabanes ou même de cases sur pilotis. Un truc que les insulaires feraient passer pour un petit village typique. En facturant allez savoir combien la nuit. Mais de manière détournée, afin que les touristes ne s’en rendent pas compte et que l’immersion soit totale. Mais c’était le problème des hommes comme Jimmy, il n’admettrait jamais qu’elle puisse avoir raison quand lui non. Sans doute pas parce qu’elle était une femme, il devait sûrement être ainsi avec tout le monde. Un truc de riches, possiblement. Ou juste de personnes très bornées et sûres d’elles. Raison pour laquelle elle ne répondit par rien de plus qu’un roulement d’yeux. Avant de s’offusquer très exagérément du fait qu’elle ne puisse pas drifter avec cet engin. Ce que, très premier degré pour le coup, il ne comprit pas ; lui expliquant les raisons pour lesquelles elle ne pouvait pas. Dites donc, s’il l’a trouvée chiante parce qu’elle avait dit non à l’alcool, il n’était pas beaucoup plus fun, là, tout de suite.
« Ouais, je me doute bien, c’est sarcastique. »
A moins qu’il la prenne vraiment pour une idiote ? Ah, il faudrait veiller à faire attention car on penchait un peu plus du côté de la misogynie, quand même. Bon, mine de rien, cette petite sortie commençait à devenir un brin chiante au goût d’Iggy. Surtout que naviguer n’avait rien d’aussi palpitant que ce qu’elle aurait cru ; c’était tout droit avec personne à l’horizon. Aucune sensation d’accomplir un quelconque exploit – ce dont elle aurait pu se douter en voyant qu’il n’y avait besoin de personne d’autre qu’eux deux, et encore, ils auraient amplement pu se passer de l’un ou de l’autre. Ce qui explique qu’elle accepte volontiers de porter la casquette de capitaine. Et de se détendre un peu par la même occasion. Captain Rayne, même ! Parce que ça rime.
« Commence par me faire un Vesper, tu veux ? Si toutefois c’est dans tes cordes. »
Un cocktail assez méconnu portant le nom de la plus célèbre James Bond girl, voilà qui mettait pas mal dans l’ambiance aussi. Elle lui jeta un coup d’œil juste histoire de voir si lui connaissait et lui adressa un sourire avant d’étendre le bras dans une direction.
« On va jeter l’ancre par là-bas, j’ai bien envie d’aller me baigner maintenant. »
De plus, ça lui permettrait de voir comment on fait ça aussi.

Comment ça, elle commençait seulement à lui plaire ? Iggy avait bien remarqué la façon dont il la regardait parfois – en même temps, faudrait être aveugle pour le louper -, et puis, si elle ne lui plaisait pas de base, elle ne serait même pas là, pour commencer. Mais, histoire d’une fois de plus prouver qu’elle n’était pas bête, elle comprenait ce qu’il voulait dire : il appréciait le fait qu’elle se lâche. Ce qui signifiait surtout qu’il aimait les femmes voulant faire la fête. Et ça ne l’étonnait pas le moins du monde bien qu’elle refuse toujours de coller à cette étiquette. Faire la fête c’est bien mais seulement quand on peut se le permettre et qu’on n’a rien de mieux à faire. Car non, Iggy ne voulait pas apprendre à naviguer juste pour épater la galerie ou parce que ça lui rajouterait une corde à son arc mais parce que les gens qu’elle fréquentait, et qu’elle arnaquait surtout, en avaient généralement au moins un en leur possession, que de pouvoir en faire voguer un revenait à peu de choses près à tous pouvoir les faire voguer et que s’il lui fallait mettre les voiles au cours d’une croisière quelconque pour se sauver les miches, elle n’aurait désormais plus besoin d’attendre d’être revenue à terre pour ça. Non, Iggy ne laissait jamais rien au hasard.

Sauf quand il était question de vouloir se baigner, peut-être. Mais bon, puisqu’elle commençait à s’ennuyer, autant se trouver quelque chose d’agréable à faire. Jimmy n’alla pas tout de suite lui préparer son cocktail mais lui montra comment arrêter le yacht et rien n’était plus simple en fait, elle fit ça les doigts dans le nez. Mais attendit quand même que le bateau soit immobilisé tout en l’écoutant lui conseiller de plonger depuis l’avant du bateau parce que moins risqué. Et le pire dans tout ça, c’est qu’il avait l’air sérieux cette fois, il ne faudrait pas faire de folies. Toujours aussi contradictoires, les mecs. Cependant, elle non plus n’avait pas tellement qu’il vienne la sauver, elle n’avait franchement rien d’une demoiselle en détresse, aussi ferait-elle ce qu’il lui conseillait. Acquiesçant, elle prit donc la direction de l’avant du bateau tout en semant ses fringues sur le chemin puisque de toute manière, il faudrait bien qu’elle repasse par-là. Une fois en maillot, elle enjamba la barrière de sécurité et se mit en position pour plonger. Ce qu’elle fit avec grâce, ça paye d’avoir une villa avec piscine. Mais elle regretta un peu parce que mine de rien, ça n’avait rien à voir avec la température de sa piscine. Pourtant, elle n’en montra rien, préférant laisser la surprise à Jimmy à qui elle dit :
« Allez viens, elle est bonne ! »

Rien de tel qu’un petit plongeon pour se rappeler que ce n’est plus l’été dans ce pays. Et si Iggy n’en était pas à claquer des dents comme l’autre nuit, il n’empêche que l’eau n’était quand même pas à une température idéale pour se baigner. Ce dont elle préféra ne pas avertir Jimmy dans un premier temps. D’autant qu’elle était certaine qu’il lui dirait une fois de plus qu’elle n’avait pas froid aux yeux. Ou qu’il y penserait. Sa langue pointa entre ses dents en voyant sa réaction une fois qu’il eut découvert par lui-même qu’on ne pouvait pas vraiment dire que l’eau était bonne, non, puis elle sourit à sa remarque.
« Un jour, on arrivera à se baigner à la bonne saison, je nous fais confiance. »
Enfin, à condition qu’ils continuent de se fréquenter évidemment, parce qu’avec Iggy, on ne pouvait jamais être sûr qu’elle serait toujours dans la même ville le lendemain. Surtout qu’elle commençait doucement à s’asseoir sur son principe de rien ou presque d’illégal ici, sinon, elle serait forcée de partir au bout d’un moment. Et de définitivement dire au revoir à Ash. Ce qu’elle aurait sans doute dû faire depuis quelques années. Mais que voulez-vous ? On ne se refaisait pas.

Nouvelle remarque, nouveau sourire.
« T’as à ce point peur que l’un de nous soit forcé de jouer les sauveteurs en mer ? J’ai un maillot de bain rouge, tu sais ? Il manquerait pas grand-chose pour que ça fasse illusion. »
Bon, elle ne le portait pas, là, mais elle en avait vraiment un. Ne manquerait donc plus que la fameuse bouée de la même couleur. Même si effectivement, si l’un des deux se laissait déporter par le courant, une bouée ne suffirait probablement pas. C’est dans ces moments-là qu’un jet-ski était utile.
« Bien que je sois très bonne nageuse, je pense être plus douée pour l’apnée que pour la course aussi loin de la côte, alors si on doit faire un concours, je pense que mon choix se porterait plutôt là-dessus. Histoire de m’assurer la victoire, tu vois. »
Tricheuse un jour, tricheuse toujours. Et même s’il est vrai qu’à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, l’important pour Iggy comme pour plein de gens, c’était toujours de gagner. Cela dit, elle avait dit ça plus pour la forme car la vérité, c’est qu’elle aimerait quand même lui laisser une chance. Ne serait-ce même qu’une toute petite.

Qu’on soit bien clairs : Iggy ne comptait sur Jimmy pour rien. Pas plus qu’elle ne comptait sur qui que ce soit en dehors d’elle-même, soit dit en passant. Et qu’il oublie de l’inviter ou non était en vérité le cadet de ses soucis. Mais si par un heureux hasard, il le faisait, alors elle irait probablement. Pas pour sa piscine ni sa villa – elle avait tout ça chez elle alors le moins qu’on puisse dire, c’est que ça la laissait de marbre, surtout qu’elle avait un peu tendance à détester les autres riches. C’est bien pour ça que c’était toujours ses proies préférées, d’ailleurs – mais plutôt parce que ça la distrayait. Un moment où elle sortait un peu de chez elle sans pour autant devoir aller bosser en d’autres termes. Même si depuis le temps, aller bosser l’était aussi, distrayant. Pas du tout une corvée. En réponse à sa question, elle haussa tout d’abord les épaules d’un air détaché.
« Disons que sinon, je risque d’oublier. Je suis quelqu’un d’à la fois très demandé et très occupé, mais je suis sûre que tu comprends. »
Et bim, voilà comment couper l’herbe sous le pied des gens. Cela dit, un sourire taquin accompagna sa réplique. Sourire qui se transforma en rire parce que tu m’étonnes qu’il pourrait bien la prendre au mot et que ça ne le dérangerait pas. Ça ne dérangerait sûrement personne, en fait. Sauf les phobiques d’Alerte à Malibu, peut-être, parce qu’il doit bien y en avoir.
« Qui sait, alors ? Peut-être la prochaine fois. Si tant est que les gens occupés que nous sommes parviennent à s’en souvenir. »
Cette fois, ce fut d’un clin d’œil qu’elle accompagna sa réflexion. Bref, tout ça pour dire qu’ainsi se lança donc un concours d’apnée. Qu’Iggy était à peu près sûre de gagner. Mais à peu près seulement parce que si ça se trouve, Jimmy était bon pour retenir son souffle lui aussi. Peut-être qu’il s’entraînait jour et nuit dans la fameuse piscine dont elle avait entendu parler mais qu’elle n’avait encore jamais vue - qu’elle ne verrait peut-être jamais – et qu’il la surprendrait. Acquiesçant, elle attendit le décompte pour s’immerger entièrement. Et une chose est sûre, c’est qu’elle n’avait pas vu venir ce qui se produisit ensuite. Une fois n’est pas coutume, ce ne fut pas elle qui tricha mais Jimmy. En venant lui pincer les flancs pour lui faire boire la tasse. Ce qui fonctionna, bien entendu et en quelques battements de jambes, Iggy fut contrainte de remonter à la surface pour tenter de recracher l’eau qu’elle venait d’ingurgiter. Mais elle ne s’indigna pas tout de suite, non. Au lieu de quoi préféra-t-elle se laisser flotter un moment sur le ventre, espérant ainsi attirer son attention.

Bizarrement, Jimmy n’eut pas tout à fait l’air de la croire lorsqu’elle dit qu’elle était quelqu’un de très occupé et de très demandé et elle se demanda bien pourquoi. L’espace d’une seconde, elle se demanda ce qui faisait qu’on pouvait avoir du mal à y croire. Le fait qu’elle n’ait pas de « travail », sans doute. Ce qui ne signifiait pas pour autant qu’elle n’avait pas d’activités. Les choses avaient quelque peu changé depuis qu’elle avait renoué avec certains contacts. Alors non, elle n’avait pas non plus tout à fait repris du service mais ce n’était pas vraiment son genre d’attendre bien sagement que les choses bougent d’elles-mêmes. Bref, en dépit de ce soupçon de sarcasme dans sa voix, Iggy opina. Oui, il avait de la chance qu’elle ait pu se libérer pour lui. Mais elle ne garda pas son sérieux plus longtemps et pouffa. Elle avait bonne mémoire, elle, oui. Valait mieux, dans son milieu. Ne serait-ce qu’histoire de ne pas viser deux fois la même cible par inadvertance. Ou même juste pour continuer de ne rester qu’une ombre aux yeux de tout le monde. Mais qu’en était-il de Jimmy ? Parvenait-il à se souvenir des prénoms de tous les mannequins passant dans son jacuzzi ou était-il du genre à leur donner des petits noms gerbant pour ne pas commettre d’impairs ? La question pouvait se poser. Cela dit, il se souvenait au moins du sien, ce qui était sans doute un peu flatteur, quelque part. Tout ça pour dire que c’est donc ainsi qu’ils se lancèrent dans un concours d’apnée. Bonne nageuse, excellente menteuse, Iggy était à peu près sûre de le remporter haut la main. Mais c’était sans compter sur une facette encore insoupçonnée de Jimmy qui décida de tricher. Bravo. Il ne valait pas beaucoup mieux qu’elle, en fin de compte. Mais croire qu’elle se laisserait faire serait mal la connaître. Raison pour laquelle elle se laissa ensuite flotter sur le ventre, jouant les mortes avec beaucoup de talent. Pas un talent suffisant pour qu’il tombe dans le panneau, cependant. Mais ce n’était pas vraiment le but. Avec une certaine délicatesse – fallait bien l’admettre -, il la retourna et lui débita une réplique bien sentie. Tout d’abord, Iggy ne cilla pas. Puis elle profita de cet instant de faiblesse pour retourner la situation à son avantage, se redressant et posant une main sur chacune des épaules de Jimmy. Elle exerça ensuite une pression visant à le couler.
« Alors comme ça, on triche ? »
C’est qu’il retournait ses propres armes contre elle, mine de rien. Elle le laissa se débattre une seconde ou deux et clama que, sur ce temps, elle n’entendait rien du tout, s’il avait eu envie de protester puis elle le relâcha et rit aux éclats. Mais prit tout de même un peu ses distances au cas où il aurait eu envie de se venger.